Monsieur le Président, c'est un plaisir de parler du projet de loi S-3 dont le Parlement est saisi aujourd'hui. La question est évidemment importante non seulement pour moi, en tant que députée de Terre-Neuve-et-Labrador, mais aussi pour de nombreuses personnes partout dans la province.
Pour commencer, je dirai que, malheureusement, de nombreux événements tragiques ont façonné l'histoire, la culture et la force de la population de Terre-Neuve-et-Labrador. La plupart d'entre eux se sont produits dans l'industrie extracôtière ou sont liés d'une manière ou d'une autre à l'océan, puisque la province est une province canadienne bordée par l'océan.
L'un des événements tragiques est certainement la catastrophe de l'Ocean Ranger. Celle-ci a elle-même été un catalyseur des améliorations à la sécurité dans l'industrie pétrolière et gazière dans la zone extracôtière. Le 15 février 1982, le forage et l'exploration au large des Grands Bancs de Terre-Neuve-et-Labrador ont engendré une tragédie sans précédent. À seulement 267 kilomètres de St. John's, 84 membres de l'équipage ont tragiquement perdu la vie. Il n'y a eu aucun survivant.
Le 13 mars 1985, nous avons eu l'écrasement de l'hélicoptère Universal dans la baie Placentia, à Terre-Neuve-et-Labrador, où six personnes ont perdu la vie. C'est un autre événement tragique, triste et malheureux de l'histoire de la province.
Cela nous amène au 12 mars 2009, il y a seulement 12 ans, lorsque l'hélicoptère Cougar qui assurait le vol 491 s'est écrasé, tuant 17 personnes qui se rendaient sur les champs pétrolifères au large de nos côtes à partir de St. John's, à Terre-Neuve. Il s'agit d'un autre événement tragique historique, qui a façonné la province que nous sommes fiers d'habiter.
Ceux d'entre nous qui habitent à Terre-Neuve-et-Labrador et qui occupent un emploi dans l'industrie pétrolière extracôtière, le secteur de la pêche hauturière ou les nombreux autres secteurs industriels savent que nous travaillons dans un climat rigoureux. Nous travaillons souvent dans des conditions difficiles. Nous savons aussi que, au cours de notre histoire, il y a eu des pertes tragiques. Nous aimerions croire que, dans certains cas, nous pouvons en faire davantage pour prévenir les pertes tragiques à l'avenir.
En 2009, quand l'accident de l'hélicoptère Cougar s'est produit, j'étais cheffe de l'opposition pour le Parti libéral de Terre-Neuve-et-Labrador. Je me souviens très bien de cette journée et des jours qui ont suivi. Un organisme de réglementation a été chargé d'examiner la sûreté de l'industrie extracôtière. J'ai vu de nombreuses familles s'effondrer à la suite de cette tragédie et pleurer la mort de leurs proches. Toute la province pleurait leurs pertes. Les jours qui ont suivi ont été difficiles, et il fallait trouver ce que nous devions faire pour accroître la sécurité et la protection des travailleurs de cette industrie.
La route a été longue et ardue. J'étais cheffe de l'opposition à l'époque. J'ai passé une bonne partie de ma carrière politique dans l'opposition, et j'ai aussi fait partie du gouvernement. Il est toujours facile de pointer un doigt accusateur et de demander pourquoi ceci n'a pas été fait ou cela n'a pas pu être évité. En réalité, toutefois, nous sommes malheureusement venus dans ce monde pour tirer des leçons des tragédies et pour faire mieux. C'est ce que nous tentons de faire actuellement au Canada. Nous tentons de faire mieux. Nous tentons de voir à ce que la sécurité, le bien-être et la protection des travailleurs de l'industrie pétrolière et gazière extracôtière — que ce soit à Terre-Neuve-et-Labrador ou ailleurs au pays — soient pris en compte et que les règles de sécurité soient respectées.
Un peu plus tôt, un député avec lequel je siège au comité des ressources naturelles a parlé du travail du juge en chef Wells, tout comme le député de St. John's-Est, qui était à l'Assemblée législative de Terre-Neuve-et-Labrador en même temps que moi. On pourra vérifier dans le hansard, mais je crois qu'il ne s'est pas passé une seule journée sans que lui ou moi ne parlions des enjeux de santé et de sécurité dans l'industrie extracôtière.
Le juge en chef Wells a été nommé pour s'acquitter d'un mandat, et, à mon avis, il a bien fait son travail. Il était entouré d'une équipe qui a travaillé très fort pour faire en sorte que les recommandations et les règles entourant cette industrie soient suffisantes, ou du moins qu'elles constituent un point de départ en vue d'atteindre le niveau voulu. Les règles sont entrées en vigueur jusqu'à un certain point, et, comme l'a fait remarquer le député de St. John's-Est, certaines se font toujours attendre. Récemment, le gouvernement fédéral a procédé aux premières nominations à la commission de santé et sécurité, et on m'assure que la province emboîte le pas pour que cette commission se mette en branle rapidement.
Je veux souligner divers éléments aujourd'hui.
Ce projet de loi a été renvoyé au comité des ressources naturelles, dont je fais partie. Nous avons eu l'occasion de questionner le ministre pour évaluer le projet de loi et l'étudier afin d'en établir le mérite. L'étude s'est déroulée rondement et le projet de loi a été appuyé à l'unanimité par le comité, dont les membres sont issus de tous les partis. Je veux d'ailleurs remercier mes collègues du comité des ressources naturelles d'y avoir souscrit. Ils ont bien saisi l'importance de la question, ainsi que la tâche qui nous incombait. Le comité a donc appuyé cette mesure.
Pour ceux qui ne savent pas au juste quel est l'objet du débat, je signale que le projet de loi S-3 élargit l'application de six règlements transitoires sur la santé et la sécurité au travail de la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada-Terre-Neuve-et-Labrador et de la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers. Les règlements transitoires sont entrés en vigueur en 2014, en vertu de la loi sur la santé et la sécurité au travail, et comportaient une date d'abrogation automatique, ce qui donnait cinq ans pour l'élaboration de règlements permanents. Voilà où nous en sommes. Subséquemment, la Loi no 2 d'exécution du budget de 2018 a reporté d'un an la date d'abrogation.
Je tiens à donner l'assurance aux députés que nous sommes résolus à accorder la priorité absolue à la santé, à la sécurité et aux protections environnementales dans tous les aspects des industries des ressources naturelles — et assurément dans les secteurs dont nous débattons aujourd'hui — et à faire en sorte qu'on leur accorde l'importance et l'intérêt qu'ils méritent. Durant le débat, j'ai entendu divers intervenants demander pourquoi le projet de loi n'a pas avancé plus rapidement et pourquoi il n'a pas été adopté l'an dernier. Cette question est légitime, et je l'accepte, mais il s'agit d'un projet de loi qu'il ne faut pas prendre à la légère.
Comme on le sait, la période d'application des règlements transitoires sur la santé et la sécurité au travail a été prolongée. Nous savons également que ces règlements sont très complexes. Ils doivent être étudiés très attentivement et mis en œuvre dans le cadre d'une démarche permettant d'atteindre et de protéger le mieux possible les travailleurs de l'industrie.
La Chambre des communes étudie de nombreux projets de loi que nous aimerions pouvoir adopter le plus rapidement possible. Nous établissons souvent des échéances qui ne peuvent pas toujours être respectées, mais personne ne devrait jamais douter de notre volonté d'assurer la sécurité, le bien-être et la santé des travailleurs extracôtiers dans tous les secteurs de l'industrie au Canada, y compris, en l'occurrence, ceux de Terre-Neuve-et-Labrador. Nous savons que la réglementation sur la santé et la sécurité au travail est importante pour les employés de tous les lieux de travail et de toutes les industries du pays, y compris les travailleurs extracôtiers, et le gouvernement doit assumer ses responsabilités en veillant à ce que des mesures soient adoptées et appliquées à cet égard.
En 2014, lorsque le gouvernement a modifié la loi de mise en œuvre de l'accord afin de clarifier le cadre législatif en matière de santé et de sécurité au travail pour les travailleurs extracôtiers et d'établir des règlements transitoires, c'était une étape déterminante pour nous. Depuis ce temps, nous avons travaillé avec diligence en collaboration avec les gouvernements et les industries de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse afin de concevoir des règlements permanents qui soient adaptés aux travailleurs extracôtiers, qui travaillent actuellement dans des endroits parmi les plus éloignés et les plus dangereux du pays.
Suis-je offensée par ceux qui croient que nous aurions dû le faire plus rapidement? Non, car ces règlements permanents visent à protéger des vies. On ne peut pas manigancer et se servir de ce dossier à des fins politiques. C'est un dossier très sérieux. Protéger la vie de ceux qui travaillent dans une industrie dangereuse comme l'exploitation du pétrole et du gaz extracôtiers à Terre-Neuve-et-Labrador doit se faire avec prudence et de manière à prendre tous les moyens possibles pour protéger des vies.
Je suis très fière du bilan du gouvernement en ce qui concerne les mesures prises pour l'industrie pétrolière et gazière à Terre-Neuve-et-Labrador.
J'étais là à l'époque où l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers a été créé. C'est un régime de calibre mondial. À Terre-Neuve-et-Labrador, nous en tirons une certaine fierté parce que nous l'avons construit. C'est le nôtre. Il fonctionne pour notre industrie en général et pour les gens qui y travaillent. Pouvons-nous l'améliorer? Bien sûr que oui. Il est toujours possible de faire mieux.
En ce qui concerne l'industrie pétrolière de cette province, ses émissions par baril sont parmi les plus faibles au monde. Elle produit du pétrole léger non sulfuré. C'est un type de pétrole qui fera partie du paysage pendant encore longtemps. Lorsque nous réfléchissons aux futurs besoins qui seront comblés par l'industrie pétrolière, nous pensons au pétrole léger non sulfuré. Nous cherchons des endroits comme Terre-Neuve-et-Labrador pour produire du pétrole à faibles émissions et pour contribuer à un monde soucieux de son empreinte carbonique. C'est extrêmement important pour nous, au sein de cette industrie, dans cette province.
J'aimerais parler de l'Accord atlantique, que nous avons renouvelé. Nous savons tous que l'Accord atlantique est le résultat de négociations parmi les plus positives à avoir eu lieu entre Ottawa et Terre-Neuve-et-Labrador depuis la Confédération. Je serai toujours reconnaissante envers ceux qui y ont contribué, tout comme je suis fière du gouvernement d'avoir renouvelé l'Accord atlantique pour Terre-Neuve-et-Labrador, un accord renouvelé d'une valeur de 2,5 milliards de dollars.
Nous avons investi 400 millions de dollars pour les travailleurs et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l'industrie pétrolière et gazière. Pendant la pandémie, nous n'avons pas laissé tomber les travailleurs de cette industrie. Nous avons tenu bon pour eux. Cela n'a pas été toujours facile et les négociations n'ont pas toujours été faciles, mais grâce au fort soutien et à l'extraordinaire leadership de groupes comme le Canada-Newfoundland & Labrador Offshore Petroleum Board, la Newfoundland and Labrador Oil and Gas Industries Association et bien d'autres, nous avons été en mesure de travailler avec ces industries sur le NL Offshore Oil and Gas Industry Recovery Assistance Fund et de faire d'autres investissements dans l'industrie pétrolière extracôtière pour les Terre-Neuviens et Labradoriens. Nous avons donc investi 400 millions de dollars pour les travailleurs de cette province et pour réduire les émissions dans cette industrie.
Nous avons réussi à faire passer le nombre de jours consacrés aux évaluations environnementales des puits d'exploration de 900 à 90. Cela a marqué un tournant considérable pour l'industrie, lui permettant d'utiliser son temps et d'investir son argent différemment et de protéger les travailleurs de la province.
Ce sont des choses dont nous sommes fiers. Comme tous les députés le savent, depuis mars 2020, nous vivons dans un environnement et dans un climat différents. La situation a changé pour nous tous, que ce soit dans les domaines de la gouvernance, des investissements, de l'exploitation pétrolière ou de la protection de l'environnement. Oui, nous aurions peut-être aimé agir beaucoup plus rapidement en ce qui a trait à ces règlements, mais nous agissons maintenant et nous nous dirigeons dans la bonne direction.
Si les gens vivaient dans une province comme la mienne, où les secteurs industriels ont dû surmonter tant de tragédies et de défis, ils comprendraient combien il est crucial de protéger la santé et la sécurité des travailleurs dans l'industrie extracôtière et l'industrie pétrolière de Terre-Neuve-et-Labrador. Les travailleurs de ces industries savent qu'elles se nourrissent de fierté, mais qu'elles peuvent aussi, malheureusement, subir d'énormes pertes.
J'aimerais souligner quelques autres points.
Je félicite le ministre et député de St. John’s-Sud—Mount Pearl du travail qu'il a accompli pour indiquer la voie à suivre à cette industrie au nom des habitants de Terre-Neuve-et-Labrador et des Canadiens. Je le remercie également de sa contribution, autant en termes d'investissements que de modifications des lois environnementales. Dans le cas de l'industrie extracôtière, je lui sais gré d'avoir pris un règlement pour protéger les travailleurs. Je lui exprime ma reconnaissance pour son travail et son leadership dans ce dossier. Par surcroît, je remercie aussi tous les députés de Terre-Neuve-et-Labrador de leur soutien dans ce dossier. Ils ont fait entendre leur voix pendant des années pour réclamer la sécurité des travailleurs de cette industrie.
Je veux également féliciter le secteur privé, notamment l'entreprise Cougar Helicopters. Je sais qu'après ce qui s'est passé en 2009, l'entreprise a redoublé d'efforts et a investi pour assurer la santé et la sécurité de tous les travailleurs qui montent à bord de ses appareils et qui sont rattachés à l'entreprise et à l'industrie extracôtière. J'ai rencontré les représentants de l'entreprise à plusieurs reprises et je peux dire que la capacité de cette dernière en matière de recherche et de sauvetage se classe parmi les meilleures au pays et possiblement au monde. Non seulement l'entreprise s'est révélée être une défenseure des droits, de la santé, du bien-être et de la sécurité des travailleurs au Canada, mais elle a aussi servi d'exemple partout sur la planète en raison des leçons apprises et des précédents établis quant à la façon d'assurer la bonne marche d'activités sécuritaires. Je veux souligner l'apport soutenu de cette entreprise à la prospérité de la province.
En terminant, je tiens à souligner le travail de Noia et de Charlene Johnson, avec qui j'ai souvent travaillé auprès de l'industrie du pétrole, notamment pour obtenir l'avis des travailleurs et des intervenants de l'industrie dans la province. Nous en avons évidemment tenu compte. Nous respectons les immenses connaissances et la vaste expérience que possèdent leurs organisations et dont le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador peut tirer profit. Ces organisations sont conscientes qu'il s'agit d'une industrie où surviennent des tragédies, d'une industrie souvent impitoyable.
Depuis les premiers temps où l'on s'aventurait sur la glace pour chasser le phoque jusqu'à aujourd'hui, où l'on se rend aux plateformes de forage en mer, travailler dans un environnement difficile et dans des endroits où les éléments se déchaînent plus que n'importe où ailleurs sur terre fait partie de l'histoire des Terre-Neuviens et des Labradoriens.
Cela se voit quand on marche le long du littoral de Terre-Neuve-et-Labrador. Il suffit d'examiner la géologie de ce territoire où nous vivons. Les rochers anciens le long des côtes ont été usés et façonnés par l'océan, qui, à ses heures, peut être féroce. On constate alors à quel point l'environnement dans lequel travaillent les Terre-Neuviens et les Labradoriens peut être difficile et inhospitalier.
Je remercie mes collègues, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, le gouvernement du Canada, le Sénat, de même que tous ceux qui ont participé à cet effort, y compris le Comité permanent des ressources naturelles, et j'espère que ces modifications et ce projet de loi seront adoptés aujourd'hui, de sorte que nous puissions entreprendre l'important travail qui s'impose pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs extracôtiers de l'industrie pétrolière de Terre-Neuve-et-Labrador.
Je répondrai volontiers aux questions de mes collègues.