Monsieur le Président, encore une fois ce matin, j'aimerais reconnaître que je prends la parole depuis le territoire traditionnel de la Première Nation Qayqayt et des Salish du littoral.
Hier, j'ai mentionné le fait que nous avions deux pays alors que nous traversons cette crise de la pandémie: nous avons un pays dans lequel les milliardaires ont accru leur richesse de plus de 78 milliards de dollars et où le système bancaire a reçu plus de 750 milliards de dollars en appui aux liquidités, et nous avons un autre pays où les gens en arrachent.
Voilà la question fondamentale à laquelle nous devons réfléchir au moment de mettre en vigueur ce budget par l'adoption du projet de loi C-30.
Hier, j'ai parlé des répercussions de la pandémie. J'ai parlé aussi des entreprises, souvent locales, familiales et de petite taille, que la pandémie a malmenées et qui ont survécu de peine et de misère ou qui ont carrément dû fermer leurs portes. J'ai parlé des travailleurs de première ligne, notamment dans le réseau de la santé, et des premiers intervenants, qui ont fait preuve d'une ténacité et d'un courage exemplaires et qui ont sauvé toutes les vies qu'ils ont pu tout au long de cette crise. Malgré tout, la pandémie a coûté jusqu'ici la vie à 24 000 Canadiens.
Hier, j'ai aussi parlé de ce qui est arrivé à la vaste majorité des Canadiens depuis le début de la pandémie, et c'est là-dessus que j'aimerais revenir aujourd'hui. Avec le projet de loi C-30, le gouvernement fait de l'autocongratulation, il n'y a pas d'autre moyen de le dire. Alors que le pays est encore en pleine troisième vague, il estime que nous devons mettre graduellement fin aux mécanismes de soutien qui sont actuellement offerts aux Canadiens.
Nous sommes loin de la remarquable rapidité avec laquelle il est intervenu l'an dernier, puisqu'à peine quatre jours après le début officiel de la pandémie, il fournissait 750 milliards de dollars au secteur bancaire pour qu'il ne manque pas de liquidités. Il appert donc que la priorité numéro un du gouvernement consistait à maintenir les profits des grandes banques. Voilà qui devrait entacher son bilan au moins jusqu'à la fin de son mandat.
Toutefois, le NPD a été en mesure, en situation de gouvernement minoritaire — et c'est tout à l'honneur de la démocratie canadienne —, de réorienter les priorités du gouvernement, qui sont passées des banques et des milliardaires à la création de programmes visant à améliorer les choses pour les gens. Je parle entre autres de la Prestation canadienne d'urgence et de la mesure de soutien pour les étudiants, de celle pour les aînés et de celle pour les personnes handicapées, auxquelles je reviendrai, car elles sont lacunaires et ne répondent tout simplement pas aux besoins, comme beaucoup de programmes que nous avons obligé le gouvernement à mettre en œuvre. Nous avons également forcé le gouvernement à veiller à ce qu'il y ait des congés de maladie et à mettre en place une subvention salariale pour assurer la survie des emplois et des entreprises. Nous nous sommes aussi battus pour que de l'aide au loyer soit offerte aux petites entreprises.
Toutes ces mesures ont vu le jour à la suite des pressions exercées par le NPD. En situation de gouvernement minoritaire, nous y sommes arrivés, grâce à la force de la démocratie canadienne. En réalité, il y a deux pays: celui des banques et des milliardaires, et celui des autres, où, comme on le sait, la majorité des Canadiens sont à 200 $ de l'insolvabilité mois après mois. Des Canadiens ont toujours de la difficulté à joindre les deux bouts, à mettre de la nourriture sur la table et à maintenir un toit au-dessus de leur tête. Le nombre croissant de sans-abris un peu partout au pays témoigne de l'impact de la pandémie et de l'inefficacité de la réponse du gouvernement.
Que fait le projet de loi C-30? Comme je l'ai mentionné plus tôt, il représente une victoire quant aux mesures d'aide que le NPD a forcé le gouvernement à mettre en place. En ce qui concerne la Prestation canadienne d'urgence, il y aura une importante diminution en juillet, et ce, en quelques semaines seulement. Alors que la troisième vague déferle sur nos rives, le gouvernement choisit de sabrer les mesures d'aide d'urgence. La subvention salariale et l'aide au loyer seront éliminées graduellement durant l'été, à quelques semaines d'intervalle, au pire moment de la pandémie.
Hier soir, nous avons discuté de la crise en Alberta, qui est la région la plus durement touchée par la pandémie en Amérique du Nord. C'est à ce moment que le gouvernement affirme que son travail est terminé, que sa mission est accomplie, et qu'il va commencer à éliminer les mesures d'aide.
Il faut ajouter à cela les répercussions des politiques gouvernementales, comme l'Agence du revenu du Canada qui pourchasse des Canadiens ayant été victimes de fraude. Au cours des dernières années, nous avons été témoins de nombreuses situations, comme celle à Desjardins, où des fraudeurs ont dérobé des renseignements personnels, puis s'en sont servi pour demander la PCU au nom des victimes. L'Agence du revenu du Canada réclame le remboursement de paiements que les victimes n'ont jamais reçus.
Comme les députés s'en souviendront, en juin dernier, le gouvernement voulait aller encore plus loin. En effet, il souhaitait emprisonner des Canadiens, même si leurs renseignements personnels avaient été obtenus frauduleusement. La fraude constitue un enjeu de taille. Le gouvernement aurait dû prendre des mesures pour la prévenir, mais il est incroyable qu'il demande maintenant aux victimes de rembourser des sommes qu'elles n'ont jamais reçues. Voilà comment le gouvernement traite les gens ordinaires.
Qu'a-t-il fait en cette période sans précédent? C'est la première crise de l'histoire canadienne où on n'a pas demandé aux ultra-riches de payer leur juste part. Durant la Seconde Guerre mondiale, le Canada a instauré un impôt sur les profits excessifs et un impôt sur la fortune pour que tout le monde soit solidaire et paie sa juste part. À l'issue de la Seconde Guerre mondiale, après avoir triomphé du nazisme et du fascisme, nous avions les moyens d'effectuer des investissements sans précédent dans le logement, l'éducation, les soins de santé et le transport, ce qui a mené à la période la plus prospère de l'histoire canadienne.
Que s'est-il passé cette fois-ci? Qu'est-ce que le gouvernement actuel a accompli depuis le début de la pandémie? Il a essentiellement accordé un traitement de faveur aux ultra-riches. Il ne demande pas aux milliardaires canadiens, qui ont accru leur richesse de plus de 78 milliards de dollars, de verser une contribution ou de payer des impôts. Il n'y a pas d'impôt sur la fortune, même si le directeur parlementaire du budget estime que cela rapporterait 10 milliards de dollars par année. Il n'y a pas non plus de taxe sur les profits générés pendant la pandémie, même si le directeur parlementaire du budget estime que cela rapporterait 8 milliards de dollars, ce qui serait suffisant pour éradiquer l'itinérance au Canada et veiller à ce que tous les Canadiens aient un toit sur la tête. Pourtant, le gouvernement ne veut rien faire en ce sens.
Le gouvernement a mis en place une taxe de luxe symbolique inférieure au montant de 1 cent par dollars qui, selon le directeur parlementaire du budget, pourrait être perçue si on mettait en place un impôt sur la fortune. Étonnamment, c'est le genre de petit geste symbolique dont les libéraux aiment bien faire l'étalage. Ils imposent une taxe sur les yachts pour pouvoir dire qu'ils font quelque chose pour lutter contre les énormes inégalités, mais la mesure que j'ai mentionnée ne se trouve même pas dans le projet de loi C-30. C'est un tour de passe-passe. Le gouvernement jette de la poudre aux yeux en imposant une minuscule taxe de luxe symbolique inférieure au montant de 1 cent qu'on pourrait percevoir sur chaque dollar si on mettait en place un impôt sur la fortune, mais ce n'est pas du tout dans les intentions du gouvernement.
Il a promis de le faire, mais comme on l'a vu avec bien d'autres de ses engagements, cette promesse du gouvernement libéral ne vaut pas grand-chose. Nous n'avons qu'à penser à une autre promesse brisée, celle de mettre en place un régime universel d'assurance-médicaments. Les Canadiens attendent qu'on remplisse cette promesse faite à maintes reprises depuis plus de 25 ans. En ce qui concerne les services de garde, on nous dit cette fois-ci que les libéraux comptent vraiment remplir leur engagement, mais cela fait près de 30 ans qu'on manque à cette promesse. Pour ce qui est des avis de faire bouillir l'eau, les promesses sont brisées depuis plus d'une décennie. Le gouvernement affirme qu'il veut vraiment s'attaquer aux inégalités. C'est plutôt fort de la part d'un gouvernement qui n'a rien proposé en ce sens, que ce soit dans le budget ou dans son projet de loi d'exécution.
Le projet de loi comprend des mesures surprenantes et quelque peu bizarres. Par exemple, la loi d’exécution du budget reconnaît que les aînés sont de plus en plus pauvres, mais que cette pauvreté critique ne concerne que les aînés de 75 ans et plus. En effet, les aînés de 65 à 74 ans n'auront pas droit à la prestation complémentaire de la Sécurité de la vieillesse, contrairement aux aînés de 75 ans et plus. Tous les aînés sont menacés par la pauvreté et que le gouvernement fasse une distinction selon l'âge est inacceptable. En outre, le gouvernement reconnaît que les étudiants vivent des difficultés pendant la pandémie et il entend leur accorder un congé d'intérêts sur leurs prêts étudiants, mais il continuera d'exiger qu'ils paient le capital. Les étudiants doivent continuer de rembourser leurs prêts, même s'ils peinent à joindre les deux bouts pendant la pandémie.
J'ai parlé plus tôt des problèmes vécus par les personnes handicapées, qui ont la vie très dure pendant la pandémie. Le NPD s'est battu, pas une ou deux fois, mais une demi-douzaine de fois avant de finalement obtenir un versement ponctuel de 600 $ pour le tiers des personnes handicapées. De toutes les batailles dont j'ai parlé au début de mon discours, c'est dans celle qui concerne les personnes handicapées que le gouvernement s'est montré le plus réfractaire, alors qu'il a accordé 750 milliards de dollars aux banques de Bay Street sans hésiter une seconde. Il n'a fallu que quatre jours au gouvernement pour décider d'aider les banques à maintenir leurs profits. Or, dans le cas des personnes handicapées, qui peinent à joindre les deux bouts pendant la pandémie, qui comptent pour la moitié des bénéficiaires hebdomadaires des banques alimentaires et qui représentent une bonne partie des itinérants au pays, seulement le tiers a reçu le paiement ponctuel de 600 $. Qu'y a-t-il pour les personnes handicapées dans le projet de loi C-30? Le gouvernement a décidé de mener des consultations sur trois ans pour déterminer si les personnes handicapées ont des besoins à combler. On dit à ces personnes d'attendre trois ans, alors qu'il a fallu quatre jours au gouvernement pour décider de la création d'un programme d'urgence pour le soutien des liquidités des banques chiffré à 750 milliards de dollars. C'est incroyable, c'est inacceptable et c'est irresponsable.
Les députés se demandent peut-être si j'appuie quoi que ce soit dans le projet de loi d'exécution du budget. Le gouvernement, qui est très fatigué et très enclin à privilégier les belles paroles au lieu de vraiment prendre ses responsabilités, a eu une panne d'inspiration. J'imagine que quelqu'un du Cabinet du premier ministre a découvert que les libéraux pourraient s'inspirer de la plateforme électorale de 2015 des néo-démocrates. Tom Mulcair s'était alors engagé auprès de la population à mettre en place un programme universel de garderies et à augmenter le salaire minimum fédéral. Comme les députés s'en souviendront, le premier ministre et les libéraux s'étaient moqués de ces propositions des néo-démocrates. Revirement de situation: c'est la seule source d'inspiration du gouvernement en ce moment. Après six ans d'échecs, les libéraux ont découvert que la plateforme électorale proposée par le NPD en 2015 pourrait bien être intéressante et ils en ont récupéré une partie. En toute bonne foi, nous encourageons aujourd'hui le gouvernement à faire avancer les dossiers du salaire minimum et des services de garde. Nous sommes là pour garantir que ces choses se réalisent. Nous ne voulons pas que ce soit une autre occasion pour les libéraux de ressasser des platitudes et de briser leurs promesses. Nous voulons travailler avec le gouvernement pour que ces changements deviennent réalité au lieu d'être de simples engagements ou promesses qu'il laisse traîner pendant un quart de siècle. C'est ce à quoi les gouvernements libéraux nous ont habitués.
En terminant, je souligne qu'aucune mesure concrète n'a été prise pour s'attaquer à la crise liée à l'abordabilité du logement. Ce sont pourtant les libéraux qui ont mis fin au programme national de logement, mais ils n'ont pas encore proposé de solution sérieuse. Par surcroît, le gouvernement n'a pas tenu son engagement envers les Premières Nations et des dizaines de communautés autochtones qui n'ont pas d'eau potable; la situation est tragique. Or, le gouvernement refuse de s'engager avant cinq ans à mettre un terme à la dangereuse situation qui donne lieu à des avis de faire bouillir l'eau. Quel message ce refus envoie-t-il aux Premières Nations, notamment aux enfants autochtones?
Le projet de loi C-30 comporte des éléments que les libéraux ont tirés de la plateforme électorale néo-démocrate de 2015. Ils devraient s'inspirer davantage de ce que le NPD propose aujourd'hui, s'attaquer aux problèmes dont j'ai fait mention pour le bien des Canadiens et remédier aux inégalités déplorables qui existent au Canada.