Monsieur le Président, je compte partager le temps qui m’est imparti avec le député de Timmins-Baie James.
L’ancien chef du NPD, Jack Layton, a laissé une marque indélébile à la Chambre et dans tout le pays. Il disait, pour reprendre l’une de ses célèbres phrases, qui me tient à cœur, que le rôle de l’opposition n’est pas seulement de s’opposer, mais de proposer.
Dès le début, le caucus néo-démocrate, sous la houlette de notre chef, a décidé d’appliquer ce principe, et depuis, nous nous sommes employés, inlassablement, non seulement à demander des comptes au gouvernement, mais aussi à proposer des politiques constructives pour aider les Canadiens durant cette période difficile.
Il est vrai que les Canadiens n’ont pas été confrontés à des défis économiques et sanitaires aussi importants depuis plusieurs décennies. Les besoins des Canadiens sont le souci prioritaire du caucus néo-démocrate, dont l’objectif est de s’assurer qu’ils reçoivent l'aide nécessaire, sur le plan financier et de la santé, pour traverser une pandémie planétaire qui ne survient qu'une fois par siècle.
Je me permets d'énumérer ce que nous avons accompli à cet égard.
Nous avons réussi à faire apporter 15 améliorations aux mesures de soutien économiques offertes aux Canadiens pendant la crise, notamment la PCU de 2 000 $ et sa prolongation, au besoin; l’augmentation de la subvention salariale, qui est passée de 10 à 75 %; et la proposition concernant les congés de maladie payés, pour laquelle nous avons mené l'offensive. Ce sont les néo-démocrates qui ont mis cette question à l’ordre du jour national. Nous avons proposé des normes nationales pour les établissements de soins de longue durée afin de corriger ce que tous les Canadiens considèrent comme une négligence crasse à l'égard des personnes âgées qui ont contribué à bâtir notre pays.
Nous avons été le premier parti à souligner l’efficacité des masques. Nous avons été le premier parti à soulever la question de la transmission communautaire et asymptomatique au comité de la santé. Nous avons été le premier parti à avancer une solution concrète à l’incapacité honteuse du Canada à fabriquer des vaccins sur son territoire, en proposant la création d’une société d’État pour la fabrication des médicaments, sur le fameux modèle des Laboratoires Connaught. Nous avons réclamé des contrôles plus stricts de nos frontières. Aujourd’hui, nous préconisons une stratégie zéro COVID.
Parallèlement, notre rôle consiste à demander des comptes au gouvernement. C’est là une fonction importante d’un parti d’opposition, dans notre système démocratique, et franchement, il y a beaucoup de choses à critiquer. Les gouvernements ont négligé pendant des années de se préparer aux situations d’urgence. Le meilleur exemple en est la décision malavisée, prise en 2018, d’affaiblir le Réseau mondial d’information sur la santé publique, qui était le centre névralgique du Canada, une source de surveillance pour tenir les Canadiens informés très rapidement de toutes les éclosions de maladies à l'étranger. Cette source a été grandement affaiblie par le gouvernement libéral.
Le gouvernement a minimisé le risque de la COVID-19 dès le début, et cela a eu comme grave conséquence de nous faire perdre un temps précieux au début de la pandémie. Il a tardé à fermer les frontières. En fait, l’actuelle ministre de la Santé a dit que cela aurait des effets délétères. C’est ce qu’a dit la ministre de la Santé au printemps 2020.
Comme je l’ai déjà dit, nous n’avons pas de capacité de production de vaccins sur notre territoire. C’est le résultat de décennies de mauvaises décisions en matière de politique pharmaceutique qu'ont prises les gouvernements libéraux et conservateurs qui se sont succédé. Un pays comme le Canada, membre du G7, n’aurait jamais dû laisser les Canadiens à la merci des sociétés multinationales ou des gouvernements étrangers pour obtenir les vaccins et les médicaments dont ils ont besoin.
Le gouvernement actuel a carrément raté la chance de faire produire le vaccin d’AstraZeneca au pays, une occasion qu’AstraZeneca avait offerte à tous les pays intéressés et qu’une quinzaine d’entre eux, dont le Mexique et l’Argentine, ont saisie.
Le gouvernement fédéral a refusé de faire pleinement usage des pouvoirs dont il dispose et refuse encore aujourd’hui de le faire, préférant, pour des raisons politiques, laisser les provinces se démener, voire se retrouver complètement dépassées par la situation.
Malgré ses beaux discours, le gouvernement n’a pas réussi à obtenir des vaccins aussi rapidement ou aussi efficacement qu’il aurait pu le faire. Franchement, ce n’est pas une question d’opinion politique: les chiffres parlent d’eux-mêmes. À la veille du mois de mai 2021, seulement 2,8 % des Canadiens sont entièrement vaccinés, et 27,8 % des Canadiens, soit moins du tiers, ont reçu une première dose de vaccin. Cela nous place au 33e rang mondial pour ce qui est du taux de doses administrées par 100 habitants. Je sais que le gouvernement aime bien répéter que nous sommes au troisième rang des pays de l’OCDE pour l’administration des vaccins, mais ce qu’il ne dit pas, c’est que nous sommes au 33e rang mondial. Nous figurons au 74e rang mondial pour ce qui est du pourcentage de la population qui est entièrement vaccinée.
Il en résulte, évidemment, que les provinces ont été obligées de rationner les doses. Soyons honnêtes: c’est la seule raison pour laquelle nous faisons passer à quatre mois le délai d’administration de la deuxième dose, en dépit des objections des fabricants eux-mêmes, dont les vaccins ont été approuvés cliniquement en fonction d’un délai d’administration de trois semaines.
La réputation du Canada a été entachée sur la scène internationale. Comme on le sait, le programme COVAX a pour principal objectif de permettre aux pays pauvres et en voie de développement d'avoir accès aux vaccins. Or, le gouvernement a commandé 1,8 million de doses du vaccin d'AstraZeneca, doses qu'il n'a pas encore reçues. C'est très déconcertant parce que le premier ministre a dit à maintes reprises à la population que le Canada dispose déjà d'une quantité suffisante des vaccins de Pfizer et de Moderna pour vacciner tous les Canadiens.
Je signale que cette attitude n'est pas passée inaperçue. Voici ce que le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé a déclaré:
Je vais être franc: le monde est au bord d'un échec moral catastrophique — et le prix de cet échec se comptera en vies et en moyens de subsistance sacrifiés dans les pays les plus pauvres du monde. Non seulement cette attitude du « moi d'abord » laisse les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables du monde exposées au risque, mais elle est aussi contre-productive. Au bout du compte, ces agissements ne feront que prolonger la pandémie, les restrictions nécessaires pour la contenir, ainsi que les souffrances humaines et les difficultés économiques.
De son côté, le secrétaire général de l'OCDE a déclaré ceci:
L'économie mondiale perdra quelque 9 200 milliards [de dollars] si les gouvernements ne parviennent pas à faire en sorte que les économies en développement aient accès aux vaccins contre la COVID-19, dont pas moins de la moitié serait à la charge des économies avancées.
Enfin, Oxfam Canada a fait la déclaration suivante:
Le Canada ne devrait pas prendre des vaccins du programme COVAX destinés aux pays pauvres pour atténuer les pressions politiques sur son territoire. Recevoir 1 ou 2 millions de doses ne réglera pas les problèmes de vaccination au Canada, mais cela nuira aux personnes les plus pauvres et les plus marginalisées ailleurs dans le monde.
Nous voyons ce qui se passe en Inde actuellement, un point chaud de la planète, qui nous touche au Canada parce que nous devons imposer des interdictions sur les déplacements. Ce pays n'arrive même pas à vacciner sa propre population, et pourtant, nous voulons leur prendre des vaccins.
J'appuie chaque mot du préambule de la motion, mais je ne peux pas l'appuyer parce qu'elle s'appuie sur une volonté de faire de la petite politique. Elle demande au gouvernement de vacciner tous les adultes canadiens d'ici la longue fin de semaine de mai. Environ 12 millions de Canadiens se sont fait vacciner. Le pays compte environ 30 millions d'adultes canadiens. Par conséquent, nous avons besoin de 18 millions de doses supplémentaires pour atteindre l'objectif fixé dans la motion. Ainsi, il faudrait que 6 millions de Canadiens se fassent vacciner chaque semaine au cours des trois prochaines semaines. La capacité de vaccination du Canada est de 3,1 millions de personnes par semaine.
La motion nous demande de vacciner deux fois plus de personnes que la capacité de vaccination du Canada le permet. De plus, nous recevrons de 2 à 3 millions de doses par semaine, si Dieu le veut. Il faudrait donc que nous obtenions de deux à trois fois plus de doses de vaccins. D'où viendraient ces doses?
Nous aimerions bien pouvoir vacciner tous les Canadiens d'ici dimanche, mais ce n'est pas réaliste. Au lieu de faire de la petite politique et de présenter des motions complètement irréalistes et déraisonnables comme celle-là, le NPD, lui, continuera à lutter pour des propositions pratiques, pragmatiques, concrètes et positives qui peuvent être mises en œuvre, qui assureront la sécurité des Canadiens et qui permettront au Canada d'affronter la prochaine urgence nationale afin que nous ne soyons plus jamais dans une telle position de vulnérabilité, comme celle dans laquelle les gouvernements conservateurs et libéraux successifs nous ont placés.