Madame la Présidente, je remercie ma collègue de Terrebonne de son excellent discours. Je remercie aussi les députés du Parti conservateur de me donner l'occasion de parler à la Chambre des conditions difficiles dans lesquelles se retrouvent plusieurs milliers de personnes et d'examiner des pistes de solution qui, somme toute, ne semblent pas régler grand-chose.
L'inflation est réelle, galopante et généralisée à tous les domaines, de l'essence au logement, en passant par la nourriture et les véhicules automobiles. Elle demande des mesures autrement plus englobantes que le populisme des propositions d'aujourd'hui. Rien ne m'étonne dans les énoncés généraux du début de la motion. Il est vrai que l'inflation peut perturber le budget des familles et que cela entraîne présentement une spirale à la hausse sur les prix des biens et des services.
Le logement social est un sujet qui m'interpelle. J'assistais justement à une rencontre ce matin avec des gens de la Coop d'habitation Boréale, une coopérative d'habitation de Rouyn‑Noranda. Je tiens d'ailleurs à saluer mon ami Jean‑Philippe. C'est son anniversaire aujourd'hui et je lui souhaite une bonne fête.
Le modèle de cette coopérative en région est adapté à notre réalité, avec un total de huit portes. Ce sont des duplex avec des cours arrière. Ce modèle permet d'offrir des logements abordables à des familles. Cependant, pour effectuer les rénovations nécessaires, il est plus que difficile d'obtenir du financement, tant de la part de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, ou SCHL, que de la part des prêteurs.
Pour qu'elle puisse obtenir ces sommes, on demande à la coopérative d'augmenter ses loyers pour rejoindre le prix du marché. Bravo pour l'abordabilité! Les dédales du gouvernement rendent la tâche difficile pour les bénévoles. Les réponses prennent beaucoup trop de temps à arriver. Il n'y a pas si longtemps, les gens de la SCHL étaient en mesure d'accompagner ces bénévoles. Aujourd'hui, ils n'ont plus le temps d'offrir le même soutien.
Le modèle des coopératives est une option viable pour lutter contre la pénurie de logements. C'est une réponse à l'inflation et à l'augmentation des loyers. Toutefois, il ne faut pas voir ce modèle comme de simples « blocs appartements ». Il faut aussi le voir comme la possibilité d'avoir des duplex, des triplex et d'autres types de résidences qui vont mieux convenir à des familles. Avoir une cour arrière et un stationnement, c'est aussi une façon d'améliorer la qualité de vie des jeunes familles qui ont moins de revenus.
Il est nécessaire de s'assurer que les coopératives d'habitation comme celles-ci restent en place pour continuer d'offrir du logement abordable et accessible. Il faut que la SCHL s'assure que le modèle coopératif demeure une option et qu'elle adapte ses programmes pour aider les modèles de petites coopératives à effectuer les réparations nécessaires.
Si les conservateurs souhaitent réellement que le gouvernement vienne en aide à la population pour faire face à la hausse du coût de la vie, nous les invitons à proposer les solutions qui sont avancées par le Bloc québécois, des solutions plus équitables qui auraient pour effet de mieux partager la richesse.
Dans l'immédiat, il faut soulager les premières victimes de l'inflation. On doit le faire en augmentant le pouvoir d'achat des aînés dont les revenus sont essentiellement fixes, en offrant un soutien financier direct aux personnes à faible revenu, en mettant en place un programme de soutien aux personnes qui sont les plus affectées par une hausse soudaine des prix de l'essence, au point de menacer leur gagne-pain. On parle notamment des agriculteurs, des chauffeurs de taxi et des camionneurs.
Il faut rendre l'économie plus résiliente en s'attaquant aux faiblesses structurelles qui causent l'inflation, diminuer notre dépendance aux hydrocarbures dont l'instabilité chronique provoque les chocs de prix, rebâtir les maillons essentiels à la chaîne d'approvisionnement, s'attaquer à la pénurie de main-d'œuvre qui empêche les entreprises de compenser les difficultés d'approvisionnement par une production locale accrue. Il faudra aussi s'occuper de la santé, de l'éducation de nos enfants et de l'environnement.
L'entêtement des conservateurs à ne pas réfléchir, à ne pas amorcer ni guider leurs choix en tenant compte de cette nouvelle révolution industrielle va créer un fossé. Les conservateurs répètent, dans cette motion, d'anciennes motions qui ont toutes été refusées par la Chambre. Quand ils parlent de taxes inflationnistes, ils parlent de l'abolition de la taxe sur le carbone, de la baisse des cotisations à l'assurance-emploi, de la baisse des contributions au Régime de rentes du Québec. Ils parlent d'une baisse des dépenses, mais sans dire lesquelles. Ces propositions viendraient aider de façon très ponctuelle, sans offrir de véritables solutions. Cela ne ferait probablement qu'amplifier les problèmes.
Proposons des solutions pour contrer la pénurie de main-d'œuvre. Une piste de solution importante serait d'augmenter le revenu des gens. Il faudrait notamment encourager le maintien en emploi des travailleurs aînés en cessant de les pénaliser quant au Supplément de revenu garanti. Il faudrait aussi faciliter le recours aux travailleurs étrangers temporaires dans les professions recherchées en transférant la gestion de cela à Québec, qui réalise déjà les études d'impact que le fédéral demande actuellement aux entrepreneurs. D'ailleurs, le Comité permanent de l'industrie et de la technologie vient de terminer une étude sur cette question et rendra public son rapport dans les prochains jours.
Il faut mieux défendre ce qui nous a pris toutes ces années à construire: notre expertise dans les mines vertes, notre capacité hydroélectrique, notre expertise dans les transports lourds électriques, notre chaîne d'approvisionnement de la batterie et des véhicules électriques; il faut valoriser notre expertise dans les technologies quantiques et l'intelligence artificielle. Nous sommes capables de faire encore plus avec des centres d'excellence sur les matériaux avancés et la commercialisation accélérée de composantes microélectriques.
Je pourrais parler des capacités du Québec en long et en large, mais mes collègues se joindront sous peu au débat pour valoriser ces aspects.
Voilà des mesures que le gouvernement pourrait prendre pour s’attaquer à la source et aux effets de l’inflation. Il faut bien comprendre notre approche.
C'est la politique monétaire qui veille à assurer l’équilibre entre l’offre et la demande de manière à contenir une hausse des prix dans la fourchette gravitant autour de 2 %. Cette politique monétaire relève de la Banque du Canada, qui prend ses décisions d’une manière indépendante.
Le gouvernement a aussi un rôle à jouer. Son défi est triple: protéger les plus démunis, en particulier les rentiers et les personnes à revenu fixe, contre les effets de l’inflation; tenter de faire en sorte que l’inflation actuelle, qui est essentiellement conjoncturelle, ne devienne pas structurelle et installée dans la durée; travailler à rendre l’économie plus résiliente et moins sensible aux chocs inflationnistes en s’attaquant à ses faiblesses structurelles.
Le Bloc québécois propose une approche équilibrée et responsable: d’une part, cibler les programmes d’aide aux particuliers et aux entreprises pour soutenir celles et ceux qui en ont besoin, sans exacerber la pression sur la hausse sur les prix; d’autre part, bien cerner les déterminants de l’inflation pour être en mesure de s’y attaquer directement.
Pour ce qui est des solutions, il faut aider les personnes les plus touchées, soit les aînés qui vivent avec des revenus fixes et le fruit de leur épargne dont la valeur fond comme neige au soleil. Ils sont les plus touchés par la hausse du coût de la vie. Avant même la poussée inflationniste, le Canada était un des pays industrialisés où les revenus de retraite remplacent le plus faiblement la part des revenus de travail.
Le Bloc québécois propose de cesser immédiatement de diminuer le chèque de Supplément de revenu garanti des aînés les plus démunis qui subissent des réductions cette année parce qu’ils ont bénéficié de la Prestation canadienne d'urgence ou de la Prestation canadienne de la relance économique l’an dernier et de hausser la pension de la Sécurité de la vieillesse pour préserver le pouvoir d’achat des aînés face à l'augmentation du coût de la vie.
Il faut construire davantage de logements sociaux et communautaires. Après avoir progressé de 6,8 % en mars, les frais de logement ont augmenté de 7,4 % d'une année à l'autre en avril. Il s'agit de la hausse la plus marquée depuis juin 1983. Le manque de logements était déjà un problème urgent, mais certains facteurs de la pandémie l’ont exacerbé. Les ménages à faible revenu, qui consacrent une part plus grande de leurs revenus à se loger, en souffrent particulièrement.
La construction de logements sociaux prend du temps et requiert des programmes permanents et prévisibles plutôt que des programmes ponctuels, comme on en retrouve trop actuellement. Dans le cas du Québec, l’action fédérale a été particulièrement problématique. C'est la seule province qui finance en permanence la construction de logements sociaux par le programme AccèsLogis. Le Québec avait besoin d’une entente asymétrique qui lui accorde la maîtrise d’œuvre totale, ce qu’Ottawa a bloqué pendant deux ans.
Le Bloc québécois propose d’intensifier la construction de logements sociaux et communautaires. Ottawa devrait y consacrer 1 % de ses revenus sur une base permanente par le truchement d’un transfert souple et prévisible vers le Québec, qui pourrait ajouter des sommes à ses programmes.
Il faut préserver l’indépendance des banques centrales et s'attaquer à la pénurie de la main-d'œuvre. D'ailleurs, le Bloc québécois propose de créer un crédit d'impôt pour les jeunes diplômés en région et également pour les immigrants, de valoriser les travailleurs d'expérience, de transférer le Programme des travailleurs étrangers temporaires, de mettre en place une politique de la productivité incluant des mesures telles que le soutien à la recherche-développement axé sur la productivité et du soutien à l'investissement dans l'autonomisation et le virage numérique des entreprises.
Il faut rendre les chaînes d'approvisionnement moins fragiles et plus résilientes et ainsi accorder à nos PME de déceler les fragilités dans leurs chaînes d'approvisionnement, les mettre en lien avec des fournisseurs de chez nous et proposer de nouvelles façons de faire de la gestion de leur stock pour les rendre justement moins fragiles.
Il faut renforcer notre régime de la concurrence, par notamment la Loi sur la concurrence, de manière à limiter la concentration de la propriété des entreprises et leur capacité d'abuser de leur position dominante, ce qui va faire monter les prix.
Il faut diminuer notre dépendance au pétrole. On sait qu'il a bondi de 33 % entre décembre 2020 et décembre 2021. Il faut donc accélérer la transition énergétique pour mettre notre économie à l'abri des hausses soudaines du prix des énergies fossiles, avec l'électrification des transports, les rénovations écoénergétiques, le soutien aux entreprises qui veulent abandonner les hydrocarbures au profit des énergies renouvelables et rediriger les flux financiers vers le développement d'une économie verte.
En conclusion, à Ottawa, cependant, on voit que les libéraux minimisent le problème et proposent d'attendre que le problème se règle par lui-même. Les conservateurs, eux, veulent une politique monétaire plus restrictive et remettent en question l'indépendance de la Banque du Canada.
Quant aux néo-démocrates, ils proposent des dépenses tous azimuts qui risquent d'empirer la poussée inflationniste.