Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec ma collègue la députée de Victoria.
Je suis fière de dire que j'appuie à 100 % la motion proposant d'autoriser de nouveau la tenue de séances hybrides au Parlement. Je suis fière que le NPD réclame cette mesure. Je suis fière de prendre la parole à la Chambre pour la première fois en cette nouvelle législature. C'est un honneur de défendre les intérêts des gens du Nord du Manitoba. La région d'où je viens et les gens que je représente me poussent à affirmer on ne peut plus clairement à la Chambre qu'il faut passer en mode hybride.
Je suis bien franchement abasourdie qu'en 2021, en pleine quatrième vague d'une pandémie mondiale, après une année et demie passée à créer un Parlement hybride qui fonctionne, nous ayons à tenir un tel débat. En toute honnêteté, le fait que nous débattions de cette question témoigne d'un manque de leadership. Nous aurions dû retourner directement aux séances hybrides.
Je tiens d'abord à affirmer clairement qu'il est irresponsable de réclamer la tenue de séances en personne au Parlement. Nous sommes dans la quatrième vague d'une pandémie mondiale. La COVID‑19 se propage encore beaucoup à l'échelle du pays. Elle rend les gens malades, y compris ceux ayant reçu deux doses de vaccin. En effet, au Manitoba, deux députés doublement vaccinés sont actuellement atteints de la COVID‑19. Nous savons aussi que la COVID‑19 continue de tuer des personnes. Sur cette note, je souhaite offrir mes condoléances à la famille de la sénatrice Josée Forest-Niesing.
Que savons‑nous à l'heure actuelle? Nous savons que le nombre de cas de COVID‑19 est de nouveau à la hausse au Canada. Nous savons qu'on encourage les gens à obtenir leur injection de rappel pour assurer l'efficacité du vaccin. Nous savons qu'il y a des risques accrus de transmission dans des espaces clos et bondés, surtout durant l'hiver quand les gens se déplacent à l'intérieur. Nous savons que nous devons porter des masques plus efficaces quand nous sommes à l'intérieur, mais cela ne semble pas s'appliquer à certains habitants de la planète parlementaire.
J'étais ici lundi quand nous avons élu notre Président et la vice‑présidente adjointe. Il n'y avait pas de distanciation sociale. Il y avait trop de monde et, dans l'antichambre, plus d'un député conservateur ne portait pas de masque. Nous savons également que certains députés conservateurs ont choisi de ne pas divulguer s'ils sont vaccinés.
On nous a dit, plus tôt au cours de la pandémie, que nous étions des vecteurs de propagation de la COVID‑19. Aujourd’hui, nous sommes 338 personnes venant de diverses régions du pays, dont des points chauds, toutes réunies en un même endroit. Nous sommes de nouveau des vecteurs.
Nous devons nous inquiéter non seulement pour nos collègues, mais aussi pour nos proches et les gens que nous représentons, et nous ne pouvons pas faire comme si nous étions les seuls à travailler ici.
Nous pouvons nous acquitter de notre travail grâce aux centaines de personnes qui travaillent sur la Colline du Parlement, du personnel de nos partis au personnel des services de traiteur, en passant par les pages, les interprètes, les techniciens, les agents de sécurité et le personnel d’entretien. Leur santé et leur sécurité ne devraient pas être compromises parce que nous, députés, refusons de reconnaître la réalité d’une pandémie mondiale. Nous pouvons faire œuvre utile avec un Parlement hybride mettant à profit la technologie virtuelle et nous permettant de travailler à partir de nos communautés plutôt que de tous être ici.
Précisons aussi qu’un Parlement hybride est sensé sur le plan logistique. Il est devenu plus difficile de nous rendre à Ottawa et d’en revenir. De nombreux vols ont été supprimés depuis le début de la pandémie. Le transporteur régional Calm Air, qui dessert Thompson, la plus grande ville de ma circonscription, a supprimé près de la moitié de ses vols à destination et en provenance de Winnipeg. Air Canada n’offre aucun vol aller-retour direct entre Winnipeg et Ottawa. Ces vols n’ont pas été rétablis, et ils ne le seront pas de sitôt, ce qui allonge notre déplacement à destination et en provenance d’Ottawa, déplacement qui prend souvent des allures de cauchemar logistique.
Je dis à mes collègues qui ont la chance de pouvoir prendre facilement un vol pour Ottawa ou de pouvoir s’y rendre en voiture d’envisager les choses au-delà de leur situation personnelle. Nous devons trouver des solutions permettant à tous de faire ce travail en toute sécurité.
Au-delà de la pandémie, le Parlement hybride représente l’avenir, un avenir où plus de femmes peuvent participer. Nous ne sommes plus dans les années 1860, où les hommes députés laissaient leurs enfants à la maison avec leur épouse pour venir à Ottawa vivre leur vie sans responsabilités parentales ou obligations d’aidant naturel. Nous sommes en 2021. Nous pouvons et devons faire notre travail différemment en incarnant les valeurs d’égalité entre les sexes et d’égalité dans la représentation hommes-femmes à la Chambre.
Je ne compte plus les fois où l'on m'a demandé comment il serait possible de faire élire plus de femmes. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai entendu des femmes dire qu'elles ne peuvent pas s'imaginer devenir députées ou faire ce travail en raison de leur désir d'avoir des enfants et des contraintes liées aux déplacements, aux séjours loin de la maison, à l'absence de services de garde d'enfants et leur désir d'être présentes pour leurs enfants. Je suis très au courant de ces défis, car j'ai occupé mes fonctions pendant neuf ans avant de devenir mère et que cela fait quatre ans que je fais mon travail depuis la naissance de mes jumeaux. Dire que c'est difficile de concilier ce travail et la famille est un euphémisme.
Aujourd'hui, je dois être ici, à Ottawa. Mon conjoint, un ancien combattant, termine ses études en éducation et il vient de commencer son stage dans la communauté semi-éloignée de la nation crie Nisichawayasihk, une communauté autochtone située en dehors de notre ville de résidence, Thompson. Je n'ai pas accès à des services de garde d'enfants ici, à Ottawa. J'ai donc dû laisser mes enfants, dont l'un d'eux est malade, aux soins de mes parents, qui vivent à Winnipeg, afin de pouvoir être ici aujourd'hui. Ce n'est pas sorcier. L'une des solutions pour rendre les fonctions parlementaires plus accessibles aux femmes, et par le fait même à tous les parents, est d'instaurer un Parlement hybride.
Alignons-nous sur ce qui se fait dans tous les milieux de travail, y compris dans la fonction publique fédérale, où le télétravail et la formule hybride sont perçus, comme il se doit, comme des mesures légitimes et efficaces. Nous l’avons déjà fait. Nous l’avons pratiqué pendant un an et demi, et cela a marché. Nous pouvons le faire.
Pour finir, soyons clairs. Il est indispensable d’avoir un Parlement hybride dans ce contexte de crise climatique. Le changement climatique est arrivé. Il fait des ravages partout au pays et sur la planète. La COP26 nous a montré clairement que nous devons réduire radicalement les émissions de gaz à effet de serre. Nous devons radicalement diminuer notre empreinte carbone ici au Canada. Nous savons que le bilan du Canada sur ce plan est le pire parmi les pays du G7 et que le temps presse. Nous devons cesser de subventionner l’exploitation du pétrole et du gaz. Nous devons annuler la construction de l’oléoduc Trans Mountain et de nouvelles infrastructures dans le secteur des carburants fossiles. Nous devons réduire progressivement le recours aux combustibles fossiles, passer à l’énergie verte et nous rallier à ceux qui protègent les terres, comme ceux qui sont sur le territoire des Wet'suwet'en. Nous devons investir dans un nouveau pacte vert.
Nous devons trouver des moyens de réduire immédiatement notre empreinte carbone. Un Parlement en format hybride élimine la nécessité de nous déplacer par avion toutes les semaines pour venir à Ottawa et retourner dans notre coin de pays. N'oublions pas que notre travail est axé sur les collectivités. Il se fonde sur les gens que nous représentons. Il est temps de travailler dans un Parlement qui reflète la réalité d'aujourd'hui. Un modèle hybride nous permet de demeurer connectés avec les communautés et les régions que nous représentons. C'est la voie de l'avenir.
Je propose que le Parlement forme un comité pour trouver des façons de moderniser le Parlement, notamment en faisant du format hybride une solution permanente, de sorte que le Parlement tienne compte de la réalité d'aujourd'hui et des immenses défis qui se posent à nous. Mettons de côté la politique réfractaire à la science et motivée par des théories du complot relativement à la COVID‑19. Mettons de côté le modèle familial du XIXe siècle qui continue de nuire aux femmes. Faisons face à la réalité d'aujourd'hui influencée par les changements climatiques et trouvons des moyens d'améliorer nos méthodes de travail.
Entre la vision d'un Parlement du XIXe siècle et celle d'un Parlement du XXIe siècle, le choix est clair. Nous pouvons y arriver. Faisons en sorte que l'histoire se souvienne de nous pour des raisons positives.