Madame la Présidente, comme je le disais tantôt, je remercie ma collègue de Vancouver-Centre d'avoir présenté le projet de loi S‑209, qui désigne le 11 mars comme un jour commémoratif de la pandémie. Il n'a pas été amendé. Par conséquent, la position du Bloc québécois demeure la même: nous sommes en faveur du projet de loi.
Le Bloc québécois est solidaire de tous les citoyens du Québec et du Canada qui ont été touchés directement ou indirectement par la pandémie de la COVID‑19. Le Bloc québécois profite du moment pour offrir ses condoléances et sa sympathie aux familles qui ont été touchées par la crise et remercier les personnes de la santé et tous les travailleurs qui ne pouvaient pas faire du télétravail. Ils sont nombreux et souvent oubliés. Mon discours soulignera leur travail et rappellera les nombreuses personnes décédées en raison de cette pandémie.
Avant toute chose, je vais présenter une perspective environnementale, ce qui, j'en suis certaine, n'étonnera personne. Je vais parler de la fabrication des pandémies. Ce que je vais maintenant dire ne porte pas sur les origines de la COVID‑19, pas du tout, mais plutôt sur le fait qu'un nombre important des maladies émergentes des 40 dernières années sont des zoonoses. Tout le monde a entendu parler du SRAS, de l'Ebola, de la grippe aviaire, de la rage. On en trouve une dizaine sur le site du gouvernement.
Serge Morand, écologiste et biologiste français, l'explique bien lorsqu'il parle de « l'effet de dilution provoqué par l'homme, qui se rapproche de plus en plus des habitats naturels sauvages et, créant ainsi de plus en plus d'interactions, l'homme accélère de plus en plus la circulation de nouveaux virus en perturbant l'écosystème des animaux ». Ce qui est en cause, c'est la déforestation, l'élevage intensif et la mondialisation.
Sur le site de l'Institut de recherche pour le développement, ou IRD, en France, on peut lire que, en pleine pandémie de COVID‑19, Marie‑Monique Robin, journaliste d'investigation, réalisatrice et écrivaine, a co-produit avec cet institut le documentaire intitulé La fabrique des pandémies. Toujours sur le site de l'IRD, on peut lire les moments importants du documentaire.
Pour ce faire, Mme Robin a parcouru huit pays pour comprendre les facteurs d'émergence des maladies infectieuses. Pour les scientifiques questionnés, le diagnostic est sans appel: ce sont les bouleversements environnementaux qui constituent les causes majeures des épidémies et des pandémies. Une vingtaine de chercheurs sont filmés dans leurs recherches, mais aussi dans leurs interactions avec les communautés locales. Sur le terrain en Asie, en Afrique, en Amérique, des scientifiques et des Autochtones cherchent à comprendre comment et à quel point la santé et la biodiversité sont intimement liées. Dans le documentaire, on apprend que les espèces les plus susceptibles de nous transmettre de nouveaux pathogènes sont les mêmes qui prospèrent lorsque la diversité diminue. Plus on perd de la biodiversité, plus on a d'épidémies.
La science a démontré que les épidémies sont de plus en plus fréquentes. On va donc s'attendre à ce qu'il y en ait d'autres. Le documentaire nous met en garde: si nous continuons de détruire notre planète, nous connaîtrons une épidémie de pandémies, car la biodiversité a un rôle protecteur pour les humains. Il nous faut donc revoir notre façon de vivre pour que les dommages à l'environnement soient le plus minimes possible. Le problème, c'est nous, pas les animaux.
Parlons maintenant des conséquences de la pandémie de la COVID‑19. Parlons des plus vulnérables dans cette société. Le chef du Bloc québécois et député de Beloeil—Chambly a clairement indiqué ses pensées en disant ceci: « J'ai une pensée pour les plus vulnérables, que la pandémie a rendus encore plus vulnérables: les gens qui vivent dans l’isolement, dans la pauvreté, dans l’anxiété, qui souffrent encore davantage et qui sont rendus plus fragiles ».
Je vais parler d'un autre film qui est en lien avec les paroles du chef du Bloc québécois. Ce n'est pas un documentaire cette fois, c'est un film plutôt réaliste sur l'isolement qu'ont pu vivre les aînés. Ce film dramatique intitulé Tu ne sauras jamais a été réalisé par Robin Aubert et Julie Roy. La caméra est efficace. La lenteur du film est prenante pour bien nous faire réaliser ce que les aînés ont vécu: isolement, repas froids, détresse, manque de personnel. Martin Naud, 88 ans, incarne cet aîné isolé dans la chambre de son CHSLD durant la pandémie de la COVID‑19. C'est un vieil homme qui va mettre tout en œuvre pour revoir la femme qu'il aime une dernière fois. Martin Naud n'est pas un comédien, il ne faut pas chercher sa filmographie. C'est un citoyen de Repentigny et membre du Bloc québécois. Il a passé une audition et s'est révélé être le meilleur pour nous toucher droit au cœur et pour convaincre, même s'il n'est pas un professionnel. Je confirme qu'il a très bien réussi.
Des drames, particulièrement chez les aînés, il y en a eu tellement. Que dire des aînés qui sont demeurés dans leur maison ou leur logement: ennui, solitude, anxiété, maladie et peur. Il y a donc ceux et celles qui sont morts, ceux et celles qui ont vécu l’isolement et ceux et celles qui ont survécu en ayant peur.
Je pense aux travailleurs, ceux de la santé, comme je le disais au début de ce discours, les autres qui ne pouvaient pas être protégés par le télétravail, ceux trop souvent oubliés parce qu’invisibles pour nous, parce que nous allons très vite et nous ne faisons pas attention aux gens qui sont autour de nous, ces gens qui sont essentiels. Je vais y revenir dans quelques instants pour parler d’eux en particulier.
Je vais commencer bien sûr par le personnel de première ligne, le personnel de la santé, personnel soignant de tous genres: infirmières, médecins, préposés. Tous ont mis leur vie en danger pour prendre soin des malades de la COVID‑19. Nous leur serons éternellement reconnaissants. Ça n’a pas été facile pour eux non plus. Tout le monde dans la société a ressenti la peur. Imaginons ces personnes au front, directement avec les malades.
Ensuite, il y a les jeunes. Bien sûr, ce groupe d’âge a été moins affecté par des décès. Cependant, les jeunes ont quand même fait un sacrifice collectif que demandaient les restrictions sanitaires. Cela a privé plusieurs d’entre eux d’occasions de rencontres à un moment charnière de leur existence. Nous nous devons donc d’avoir une pensée pour eux et de les remercier d’avoir fait preuve de courage et de résilience dans ce moment.
Il faut également souligner le travail de la communauté scientifique aussi. Bien que toujours imparfaites par définition, les explications de nos scientifiques ont permis d’éclairer nos débats et de répondre à nos questionnements et inquiétudes tout au long de cette pandémie. Nous sommes chanceux d’avoir pu compter sur eux et de pouvoir encore compter sur des scientifiques. Ma collègue de Vancouver-Centre en a parlé, la science, c’est important pour mieux comprendre.
Enfin, revenons à ceux dont je parlais tantôt, les travailleurs invisibles. Ce sont très souvent des femmes et des jeunes. Je pense aux caissières des épiceries, des pharmacies et à ceux qui placent les produits dans les étagères. Je pense aux livreurs, à ceux et à celles qui nettoient, aux ouvriers de chantier, aux conducteurs et aux conductrices du métro et des autobus. Ce sont des gens qui étaient essentiels pendant la pandémie — ils ne pouvaient pas être en télétravail, eux —, mais qui sont toujours essentiels au bon fonctionnement de notre société et trop souvent invisibles et oubliés. La pandémie a été le moment de mettre la lumière sur ces personnes qui, trop souvent, travaillent dans l’ombre.
En conclusion, veut-on vraiment revivre cela? Voulons-nous encore pleurer de nombreux morts, revivre la peur et l’isolement?
Je vais faire le lien avec le début de mon discours: sans biodiversité, pas de vie possible. Nos destins sont intimement liés. Si on préserve la biodiversité, on réduit les risques et les impacts sur le réchauffement climatique et donc les conséquences sur notre santé. Toutefois, nous devons changer maintenant. Sinon, nous sommes sur la même voie de disparition que les espèces animales aujourd’hui menacées.
La biodiversité, c’est notre maison. On peut encore la sauver, mais à condition d’agir au plus vite. Cela exige du courage de la part des politiciens.
Aurons-nous ce courage?