Madame la Présidente, je veux d'abord revenir au point que je faisais valoir, car ce que le député dit est vraiment ahurissant.
Sur le plan personnel, à titre de leaders parlementaires, nous apprenons tous à nous connaître un peu. Nous participons à des réunions supplémentaires tout au long de la semaine, notamment à celles du Bureau de régie interne, pour discuter des travaux de la Chambre et d'autres aspects de cette assemblée. J'ai toujours estimé que mon homologue du côté ministériel était une bonne personne avec qui travailler, et je tiens à le dire d'emblée. Je suis conscient que tout le monde ici a des opinions politiques différentes et que nous sommes tous des êtres humains, y compris le député. Toutefois, il parle de désinformation, de division et d'une lutte pour le cœur et l'âme des Canadiens, alors qu'il représente un gouvernement qui s'est fait prendre à dire des faussetés flagrantes à maintes reprises.
J'aimerais préciser au député que ma référence au passage « Va, et ne pêche plus » des Saintes Écritures ne signifie absolument pas que je prétends satisfaire à cette norme. Je peux l'assurer que je n'ai aucune prétention à cet égard. Cependant, j'aimerais lui confier un petit secret. Dans quelques heures, ce sera la période des questions et nous entendrons des renseignements erronés et des faussetés du côté du gouvernement. Nous entendrons le premier ministre nier qu'il a une part de responsabilité dans l'inflation.
Chaque jour, quand il prend la parole, le premier ministre nie qu'il a directement causé la pire inflation que les Canadiens aient connue dans les 40 dernières années. Il jette le blâme sur des facteurs externes, comme si l'inflation était une simple tempête qui survient inopinément, se plaisant à nous avertir d'ajouter une couche de protection et de garder quelques billets de 20 dollars bien au chaud dans nos poches afin de ne pas être pris au dépourvu, si nous ne sommes pas vigilants, par les bourrasques de la hausse des prix. C'est tout simplement insensé. Nous savons qu'il a financé ses dépenses effrénées, dont une bonne partie n'avait rien à voir avec la COVID‑19, en forçant la Banque du Canada à imprimer de l'argent et en augmentant les déficits. Voilà pourquoi nous nous retrouvons en pleine crise inflationniste, mais ce n'est pas le message qui est véhiculé. Le gouvernement nous sert des renseignements erronés et des faussetés en essayant de rejeter la responsabilité de l'inflation sur le dos des autres.
Il y a une expression que bon nombre de personnes connaissent probablement très bien, qui dit à peu près ceci: « Une mauvaise planification de votre part ne constitue pas une urgence pour moi. » Le leader du gouvernement à la Chambre a cité quelques exemples de projets de loi qui sont retardés par la seule faute de son gouvernement. Il a parlé du projet de loi C-9, qui est resté au Feuilleton pendant six mois avant que le gouvernement veuille en faire l'étude. Quand enfin le gouvernement a voulu l'étudier, les libéraux ont été surpris que des députés veuillent intervenir pour signaler des lacunes dans le projet de loi. Les libéraux n'aiment pas cela.
Le député a aussi dit que le projet de loi S-5 nécessitait six jours de débat, comme si cela constituait un long débat. Le projet de loi S‑5 est une mesure législative très complexe qui modifierait plusieurs lois. Il compte de nombreux nouveaux règlements d'application, car il se rapporte à l'industrie chimique et à toutes sortes d'éléments interreliés. Les députés ont besoin du débat à la Chambre pour faire ressortir les lacunes du projet de loi afin de sensibiliser les Canadiens. Nombre d'intervenants et de groupes qui représentent les industries seront touchés par le projet de loi.
Lorsque nous venons ici, nous prenons le temps de faire les choses comme il faut. Nous donnons aux gens qui seront touchés par le projet de loi le temps de donner leur avis, de renseigner les membres de leur organisation, leurs collègues ou les députés de cette Chambre. Lorsque nous commençons à débattre d'un projet de loi, il arrive que nous soyons soudainement sollicités par nombre de personnes qui veulent nous rencontrer et nous renseigner sur ce qui arriverait si le projet de loi était adopté ou rejeté, et cela prend du temps.
Le gouvernement n'avise pas tous les Canadiens de ce qu'il compte faire. On n'envoie pas de courriels tous les jours aux Canadiens pour leur indiquer ce qui est publié dans la Gazette du Canada afin qu'ils sachent quelles sont les mesures législatives que le gouvernement compte faire adopter dans quatre ou cinq mois et qu'ils puissent donner leur avis à ce sujet. Le gouvernement laisse peu de temps à la Chambre entre l'annonce de ce qu'il compte faire et la présentation du projet de loi en première lecture, et il arrive souvent qu'on passe à l'étape de la deuxième lecture dès le lendemain. Dans bien des cas, ce n'est qu'à ce moment que les Canadiens sont informés de la situation, et il leur faut du temps pour informer leurs députés de la façon dont ils seraient touchés par ce projet de loi.
Il est ridicule de prétendre que six jours de séance à la Chambre avant qu'un projet de loi ne soit renvoyé à un comité est une période inhabituellement longue, surtout quand on pense que le débat n'a duré qu'une heure pendant deux de ces journées. Le gouvernement a prévu le débat à l'étape de la deuxième lecture les jours où les séances sont les plus courtes. En fait, si je ne me trompe pas, c'est pour cette raison que la porte-parole néo-démocrate concernant le projet de loi S‑5 a dû attendre jusqu'au troisième jour avant de pouvoir conclure ses remarques. Si le gouvernement dit qu'il ne veut pas écouter les députés néo-démocrates présenter des discours, j'éprouve une certaine sympathie à leur égard, mais je ne crois pas qu'il est approprié d'imposer ce genre de motion, qui fera en sorte que les députés néo-démocrates n'auront pas assez de temps pour s'exprimer.
À mon avis, il faut pouvoir entendre tous les points de vue et toutes les voix avant que la Chambre ne prenne une décision. Par conséquent, l'argumentaire du député est totalement bidon. Il ne s'appuie sur rien de solide; c'est du vent.
À quoi cela revient-il? Le leader du gouvernement à la Chambre a parlé en long et en large du fait que la Chambre doit agir. Je crois que bien des Canadiens seraient d'accord. Ils nous regardent à la Chambre. Nous connaissons les problèmes qui les affectent au quotidien et nous savons qu'ils attendent des gestes concrets. Ils veulent que leurs représentants élus s'attaquent à ces problèmes. Par contre, ils ne veulent pas que le gouvernement ait les mains totalement libres.
Toutes les démocraties cherchent à mettre en place des mécanismes pour la prise de décisions, mais également pour permettre à ceux qui s'opposent à ces décisions d'avoir au moins un impact et la possibilité de limiter le pouvoir absolu que peut avoir l'exécutif. Au Canada, il existe des freins et contrepoids. Dans certains pays, il y en a plus. Il y a aussi des pays qui ont fait de l'incapacité à changer les choses une des caractéristiques mêmes de leur système. Beaucoup de gens regarderont les États‑Unis et diront que le processus est très compliqué et qu'il demande beaucoup de temps et que, pour accomplir des changements ambitieux, un parti doit avoir le contrôle des trois branches du gouvernement soit des deux Chambres, la Chambre des représentants et le Sénat, et de la présidence. Certains pourraient dire que c'est un défaut et c'est probablement parfois vrai. C'est que le système américain a peut-être été conçu de façon à ce qu'il soit difficile de changer les choses.
Le système canadien a été conçu de façon à ce qu'il soit plus facile pour le gouvernement de mettre en œuvre son programme, mais il comporte tout de même des freins et contrepoids. Le Parlement comprend une deuxième Chambre, le Sénat, dont les membres jouissent de bon nombre des mêmes droits et privilèges dont jouissent les députés. Cette assemblée utilise le même processus législatif. Une fois qu'un projet de loi quitte la Chambre et est renvoyé au Sénat, il doit passer par les trois étapes de lecture et être étudié par un comité. À diverses occasions dans l'histoire du Canada, le Sénat a ralenti l'adoption de projets de loi du gouvernement afin de pouvoir exercer son rôle de contrepoids.
Le calendrier et le programme quotidien constituent également un contrepoids au pouvoir du gouvernement. Le premier ministre ne peut pas arriver et commencer à présenter des projets de loi, à les faire approuver sans discussion et à les faire adopter. Le gouvernement doit tenir compte du calendrier et du nombre de jours de séance, et établir des priorités pour ses mesures législatives. S'il présente un projet de loi que l'opposition n'a pas l'intention d'appuyer, parce qu'il est mal rédigé ou qu'il entraînera des conséquences terribles, il doit comprendre que la Chambre prendra plus de temps pour adopter ce genre de projet de loi, ce qui aura une incidence sur l'étude d'autres projets de loi qu'il veut faire adopter.
Donc, en se donnant le pouvoir de prolonger ces séances, le gouvernement élimine réellement un contrepoids très important au pouvoir sans entraves du premier ministre. Cela va affaiblir la capacité de la Chambre des communes à mettre un frein à certaines idées déplorables qui viennent du gouvernement.
Les conservateurs n'ont pas à s'excuser du fait qu'ils s'opposent au programme du gouvernement qui cause l'inflation. Il va sans dire que nous examinerons très scrupuleusement toutes les mesures législatives pour nous assurer qu'elles n'augmentent pas les dépenses gouvernementales, parce que celles-ci font augmenter le coût de la vie. Il y a une corrélation directe entre l'énorme déficit budgétaire que le premier ministre a imposé aux Canadiens au cours des dernières années et les prix records que les Canadiens paient à l'épicerie et à la pompe.
Par conséquent, chaque fois que le gouvernement présente une mesure législative, le tout premier réflexe des conservateurs est de sortir crayon et papier pour l'examiner attentivement. L'exercice vise à savoir si la mesure alourdira les dépenses gouvernementales et la dette que l'État doit payer à même l'argent des contribuables ou si elle entraînera des frais de conformité supplémentaires pour les industries déjà aux prises avec un fardeau réglementaire et fiscal parmi les plus lourds en comparaison avec nos principaux partenaires commerciaux. Un tel exercice prend du temps, car il ne se limite pas à de la recherche, mais comprend aussi des rencontres avec les parties prenantes.
Au sein du cabinet fantôme, j'agis à titre de ministre responsable de l'infrastructure. Je vois aujourd'hui bon nombre de mes collègues chargés d'une grande variété de dossiers au sein du cabinet fantôme. Je suis convaincu de parler au nom de tous si je dis que lorsque nous sommes saisis d'une mesure législative, notre intervention à la Chambre des communes, soit l'analyse que nous en présentons en 10 ou 20 minutes, ne représente qu'une fraction de notre travail. Dès que nous sommes saisis d'un projet de loi, nous commençons immédiatement à rencontrer les gens qui seraient touchés pour entendre directement leur son de cloche.
Le gouvernement a abordé le projet de loi S‑5. Bien que je n'ai jamais travaillé dans l'industrie du plastique, je peux dire que je connais beaucoup de gens dont c'est le cas et qui savent exactement quelles seraient les répercussions de cette mesure législative. Je connais des gens qui travaillent dans divers secteurs de la fabrication, de la distribution et de la vente au détail et qui seraient tous touchés par l'accroissement du fardeau réglementaire découlant du projet de loi S‑5. Nous devons les rencontrer, tenir compte des opinions de certains groupes par rapport à d'autres, et faire preuve du discernement et de la sagesse nécessaires pour analyser tous ces renseignements avant de décider si nous souhaitons voter pour ou contre ce projet de loi.
Les débats de la Chambre des communes permettent de faire contrepoids au gouvernement, en l'empêchant d'imposer son programme législatif, ce qui est particulièrement important dans le contexte actuel. En effet, lors des deux dernières élections, les Canadiens ont refusé de donner au Parti libéral la possibilité de former un gouvernement majoritaire. Nous savons tous que le premier ministre en a été fort déçu. Il espérait que les élections lui permettraient de blanchir sa réputation après qu'on ait découvert l'implication de son gouvernement dans le scandale SNC‑Lavalin et le fait qu'il ait lui-même commis des actes racistes en portant le « blackface » à d'innombrables reprises.
Nous savons que lepremier ministre espérait avoir un gouvernement majoritaire afin de faire le ménage et de redorer son blason, mais les Canadiens ne lui ont pas donné cette chance. Les Canadiens ne veulent pas que ce parti puisse imposer son programme à tout prix. Ils veulent des mécanismes de freins et contrepoids pour s'assurer que le gouvernement fait l'objet d'une surveillance et d'un examen minutieux. En voulant prolonger les heures des séances selon sa convenance personnelle, le gouvernement veut imposer une plus grande partie de son programme. Il essaie en douce d'éviter de rendre des comptes.
De plus, cette attitude est très hypocrite. Je n'utilise pas un langage non parlementaire si je cite le leader du gouvernement à la Chambre des communes, qui s'est lui-même qualifié d'hypocrite. Je dois dire qu'il a quelques raisons de le faire au regard de l'excuse donnée par le gouvernement pour cette mesure. Il dit qu'il n'y a pas assez de temps pour faire adopter le projet de loi, mais cette excuse provient du parti qui a prorogé le Parlement uniquement pour se sortir d'un scandale lié à une enquête sur la corruption.
Pour ceux qui nous regardent et qui ne connaissent pas toutes les belles expressions que nous utilisons à la Chambre, la prorogation est comme un gros bouton redémarrer. Proroger revient ni plus ni moins à annuler toutes les séances qui restent à la Chambre pour une période donnée, et le compteur est remis à zéro. C'est comme passer l'éponge sur le tableau blanc des projets de loi. Le gouvernement dit qu'il doit maintenant prolonger les séances afin d'adopter tous les projets de loi qui ont été complètement annulés et dont on a dû reprendre l'étude à zéro. Ce n'est pas nous qui avons fait cela. L'opposition ne peut pas proroger le Parlement. Une seule personne peut le faire: c'est le premier ministre. C'est précisément ce qu'il a fait. Une seule personne peut déclencher des élections au Canada: c'est le premier ministre.
À la législature précédente, la composition de la Chambre ressemblait énormément à celle de la législature actuelle. Nous avons tenu des élections l'an dernier uniquement parce que le premier ministre a décidé qu'il souhaitait en déclencher, de la même manière qu'il a prorogé le Parlement au cours de l'enquête sur le groupe d'entreprises UNIS. Les députés se souviennent-ils de cela? Au début de la pandémie, alors que les Canadiens devaient toujours composer avec des directives de confinement parmi les plus sévères au monde, qu'on leur interdisait de visiter des êtres chers à l'hôpital, que les enfants ne pouvaient plus aller à l'école et qu'on interdisait aux jeunes et aux athlètes en santé de pratiquer des sports ou de terminer leur année, qu'a fait le premier ministre? Fidèle à ses habitudes, il a saisi l'occasion pour enrichir ses amis.
Alors que la priorité des Canadiens était de rester en santé, de tenter de sauver leur entreprise parce que les restrictions punitives les empêchaient de gagner leur vie et de composer avec les conséquences effrayantes de la pandémie dans leur vie, qu'a fait le premier ministre? Il a pris le temps de sortir le carnet de chèques associé au Trésor public et de récompenser ses amis du groupe d'entreprises UNIS en leur donnant, sans appel d'offres, un demi-milliard de dollars de l'argent des contribuables canadiens.
Lorsqu'il s'est fait prendre, il a appuyé sur le gros bouton redémarrer. Au beau milieu de l'enquête, il a passé l'éponge et...
Une voix: Oh, oh!