Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole au nom du député de Calgary Rocky Ridge. C'est un ami très cher, et la mesure législative qu'il présente à la Chambre est très importante. C'est un honneur pour moi d'intervenir à ce sujet.
J'aimerais également remercier le sénateur Percy Downe d'avoir présenté ce projet de loi au Sénat. C'est dommage que le gouvernement ait l'intention de s'y opposer, mais j'espère que les députés ministériels comprendront toutes les raisons pour lesquelles ce projet de loi est sensé pour le gouvernement et pour les Canadiens.
Il est tout à fait opportun de parler du projet de loi S-243 maintenant, car la majorité des Canadiens viennent tout juste de terminer de soumettre leur déclaration de revenus à l'ARC. Nous venons aussi de découvrir que l'ARC a radié 133 millions de dollars dus par un seul contribuable.
Les employés de l'ARC ont traité de l'importante radiation dans une note interne en septembre 2018, et les médias en ont fait état en avril. Toutefois, nous ne savons pas qui est le contribuable ni s'il s'agit d'une personne ou d'une société. Nous ne savons pas non plus si cette radiation est liée aux subventions gouvernementales, ce que les Canadiens devraient savoir.
Ce projet de loi vise à tenir l'ARC responsable de la perception des impôts. Il exige également que l'ARC fasse état du manque à gagner fiscal, soit la différence entre les impôts dus et les impôts réellement perçus. Enfin, le projet de loi obligerait l'ARC à rendre publics certains renseignements concernant l'évasion fiscale, ici comme à l'étranger. Des statistiques indiquent que le manque à gagner fiscal à l'étranger pour l'année d'imposition 2014 se chiffrait entre 0,8 et 3 milliards de dollars.
L'ARC a rendu publics des renseignements relatifs au manque à gagner fiscal lié à la taxe sur les produits et services. En 2014, le manque à gagner fiscal à l'étranger avoisinait les 4,9 milliards de dollars. L'ARC a également fait état du manque à gagner fiscal national lié à l'impôt sur le revenu des particuliers, qui pour la même année, 2014, totalisait 8,7 milliards de dollars. Au cours de cette seule année, les sommes dues en raison du manque à gagner fiscal, qui pourraient bien avoir atteint 16 milliards de dollars, auraient permis de financer de nombreux programmes ou d'alléger le fardeau financier de bien des Canadiens.
Les conservateurs croient qu'il est possible de rendre la vie plus abordable aux Canadiens et de garder le taux d'imposition aussi faible que possible afin de stimuler l'économie. Lorsque le gouvernement perd des sommes considérables en raison d'un manque à gagner fiscal, il risque d'augmenter les impôts du reste de la population. Ainsi, on pénalise les honnêtes citoyens.
J'appuie le projet de loi du sénateur Downe, qui est parrainé à la Chambre par le député de Calgary Rocky Ridge, parce qu'il est sensé et qu'il obligerait l'Agence du revenu du Canada et les Canadiens qui n'assument pas leur responsabilité de payer leurs impôts à rendre davantage de comptes.
Certains Canadiens s'inquiètent du fait que la publication de rapports sur le manque à gagner fiscal pourrait compromettre leur vie privée. Toutefois, ce projet de loi atteint un juste équilibre entre, d'une part, la protection de la vie privée des citoyens et, d'autre part, la transparence et l'obligation de rendre compte de l'Agence du revenu du Canada. Les renseignements seraient communiqués au directeur parlementaire du budget; par conséquent, le projet de loi ne vise pas à nommer des Canadiens ordinaires ni à les couvrir de honte.
Les États-Unis, le Royaume-Uni, la Suède et l'Australie publient tous des rapports sur leur manque à gagner fiscal. Les gouvernements de ces pays disent tous qu'ils font rapport de ces données parce que cela aide leur ministère du Revenu respectif à comprendre comment et pourquoi surviennent les manquements. Ces renseignements sont utiles aux décideurs, qui peuvent ainsi prendre des décisions plus éclairées au sujet de la politique fiscale, et ils aident le gouvernement à mieux gérer l'attribution des ressources.
Le Canada devrait se munir d'un tel système. En obligeant les gouvernements et les Parlements à mesurer le manque à gagner fiscal, on pourra veiller à ce qu'ils disposent de tous les renseignements nécessaires pour régler le problème.
Bon nombre d'entre nous savent que l'évasion fiscale à l'étranger est un problème au Canada. Près de 1 000 contribuables canadiens, dont des particuliers, des entreprises et des fiducies, ont été nommés dans les Panama Papers il y a trois ans.
Le mois dernier, l'ARC a dit aux médias qu'elle avait identifié 894 contribuables et terminé l'examen de 525 de ces cas, générant ainsi 14,9 millions de dollars en impôt fédéral et en pénalités. Ce chiffre augmentera à mesure que les vérifications se poursuivront.
Même si l'ARC a précisé aux médias le montant de l'impôt établi, elle n'a pas indiqué quelle partie de cette somme a été perçue. Le projet de loi du sénateur Downe, s'il est adopté, obligerait l'ARC à communiquer ce type d'information aux Canadiens. Comme je l'ai mentionné auparavant, ce genre de renseignements seraient extrêmement utiles pour les décideurs. Bon nombre d'autres pays les utilisent déjà, et les Canadiens seraient mieux servis si nos décideurs disposaient eux aussi de cette information.
La plupart des Canadiens travaillent fort toute l'année et produisent leurs déclarations de revenus sans tarder. Ce sont des gens honnêtes qui ne chercheraient jamais à escroquer le gouvernement. Cependant, il y a des gens bien nantis et des riches entreprises au pays qui tentent constamment de tromper le fisc.
Les recettes fiscales servent à financer les services dont nous profitons, comme les soins de santé, le transport en commun et les routes. L'ARC devrait être en mesure d'indiquer combien d'argent les Panama Papers lui ont permis de recueillir. Ce serait dans l'intérêt de la population canadienne.
Dans le même ordre d'idées, l'ARC devrait être autorisée et apte à nous dire pourquoi elle a radié 133 millions de dollars dus par un seul contribuable. Cet argent aurait pu servir à injecter des sommes considérables dans des services publics, et les Canadiens méritent de savoir pourquoi ce contribuable ou cette entreprise a bénéficié d'un traitement spécial alors que le reste d'entre nous s'appliquent avec diligence à payer leur juste part.
J'entends beaucoup de gens de ma circonscription se plaindre de leurs rapports avec l'ARC, notamment en ce qui concerne la mauvaise qualité des services et le fait qu'on réclame des documents qui ont déjà été fournis à une autre direction. Le Bureau de l'ombudsman des contribuables, qui est indépendant de l'ARC, a enregistré une augmentation des plaintes au cours des dernières années. Voici les principales plaintes reçues par l'ombudsman des contribuables en 2017. Tout d'abord, il y a la difficulté à rejoindre le centre d'appels de l'ARC, ce qui peut-être un véritable casse-tête, surtout durant la saison des impôts. On mentionne aussi les informations incohérentes ou inexactes reçues des agents du centre d'appel et le manque de communication entre les différentes directions de l'ARC. Beaucoup de Canadiens se sont fait demander de produire les mêmes informations ou les mêmes documents plus d'une fois, parce que leur dossier n'avait pas été transmis à tous secteurs concernés.
Selon l'ombudsman des contribuables, il s'agit de problèmes systémiques, auxquels s'ajoutent d'autres problèmes profondément ancrés. L'ARC reconnaît qu'elle doit en faire plus pour mieux servir les Canadiens. Des représentants de l'ARC vont se déplacer un peu partout au Canada au cours du prochain mois pour mener des consultations en personne et demander comment l'ARC peut améliorer ses services. Je ne doute pas qu'ils recueilleront amplement de commentaires. J'espère que l'ARC s'en servira pour créer et mettre en oeuvre un système qui fonctionne mieux, comme le méritent les Canadiens.
Je sais que l'ARC n'est pas la seule à éprouver ce genre de problèmes. Selon un rapport du vérificateur général publié récemment, d'autres organismes gouvernementaux, notamment ceux qui sont responsables de l'immigration, de l'assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada, n'ont pas répondu aux appels de millions de Canadiens en 2017 et 2018. Manifestement, le gouvernement doit améliorer considérablement l'accès aux services dont les Canadiens ont besoin et qu'ils méritent.
J'espère que les consultations menées par l'ARC porteront leurs fruits et que l'accès aux services sera amélioré prochainement. Je sais que les Canadiens prennent l'ARC très au sérieux, sauf ceux qui sont très riches et qui conservent leur argent dans des comptes à l'étranger sans se soucier des conséquences que cela engendre. Pour de nombreux Canadiens, recevoir une lettre de l'ARC est synonyme d'anxiété, et les processus de vérification et d'enquête peuvent leur causer beaucoup de stress.
Lorsque les Canadiens doivent de l'argent à l'ARC, la plupart d'entre eux s'efforcent de rembourser cet argent au moyen de versements ou d'un paiement forfaitaire. La majorité des gens n'essayeraient jamais de se soustraire au fisc. Ils ne devraient donc pas être injustement pénalisés lorsque les sociétés et les mieux nantis de la société canadienne ne respectent pas leurs obligations fiscales.
Si le projet de loi est adopté, l'ARC devra rendre davantage de comptes, ce qui est dans l'intérêt des contribuables. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, grâce aux modifications proposées dans ce projet de loi, on pourra exiger que l’ARC fasse état de toutes les condamnations pour évasion fiscale ainsi que du manque à gagner fiscal. Ces données seront transmises au ministre du Revenu national dans le rapport que l'ARC soumettra chaque année, qui sera déposé au Parlement. Le ministre du Revenu national est aussi tenu de fournir des données au directeur parlementaire du budget pour qu'il calcule le manque à gagner fiscal.
Ces modifications, dont la mise en œuvre serait peu coûteuse, renforceraient la transparence, ce que le gouvernement prétend valoriser. Des rapports accessibles au public sur l'écart entre les impôts dus et les impôts perçus fourniront une mesure pour évaluer l'efficacité des mesures visant à lutter contre l'évasion fiscale. Ce sont des renseignements importants auxquels les Canadiens doivent avoir accès. Beaucoup d'autres pays occidentaux publient ces renseignements. Le Canada est déjà en retard au chapitre des pratiques courantes à cet égard. Les conservateurs appuient toute mesure visant à accroître l'efficacité et la responsabilité de la fonction publique.
Le projet de loi S-243 apporte des modifications sensées à la Loi sur l’Agence du revenu du Canada, et j'appuie ces modifications.
Je remercie le sénateur Downe de son travail sur ce projet de loi, ainsi que le député de Calgary Rocky Ridge d'avoir contribué à l'adoption du projet de loi à la Chambre des communes. Je suis heureux d'avoir pu parler de ce projet de loi aujourd'hui.