Monsieur le Président, aujourd'hui, je suis heureux de me lever à la Chambre, au nom des citoyens de Mégantic—L’Érable, pour parler de la motion présentée par mon collègue de Louis-Saint-Laurent.
Afin que les gens soient bien au courant de la raison pour laquelle je prends la parole aujourd'hui, je vais lire la motion.
Que la Chambre:
a) prenne note de l’importance d’une presse libre et indépendante pour une démocratie en santé;
b) exprime sa conviction que des acteurs engagés dans la politique partisane ne devraient pas choisir, en pleine année électorale, les gagnants et les perdants dans le secteur des médias;
c) condamne l’inclusion d’Unifor, un groupe qui a défendu et qui continue de défendre des positions politiques partisanes, dans le comité qui supervisera la distribution des 600 millions de dollars consacrés à l’aide aux médias;
d) demande au gouvernement de cesser immédiatement ses manœuvres destinées à lui donner avantage aux prochaines élections et de remplacer son plan d’aide aux médias par une proposition qui ne permet pas au gouvernement de choisir des gagnants et des perdants.
Aujourd'hui, alors qu'il ne reste que quelques jours à la 42e législature, nous discutons d'une des questions les plus importantes pour notre démocratie. D'ailleurs, mes collègues et moi avons été appelés à intervenir sur cette question depuis l'élection des libéraux en 2015.
Rappelons-nous à quel point les libéraux ont dupé les Canadiens et les Canadiennes lors de la campagne électorale. Leurs promesses étaient certes ambitieuses, mais ils n’avaient nullement l’intention de les tenir.
Voici une promesse qui figurait dans le discours du Trône:
Pour veiller à ce que chaque vote compte, le gouvernement mènera des consultations sur la réforme électorale, puis fera en sorte que l’élection de 2015 aura été la dernière à être menée selon le système électoral majoritaire à un tour. [...] il favorisera la tenue de débats ouverts et le recours au vote libre. [...] il n’aura pas recours à des mécanismes tels que [...] les projets de loi omnibus pour éviter les examens minutieux.
Ces éléments sont tirés du discours du Trône, prononcé par le gouverneur général au tout début de ce mandat.
Souvenons-nous aussi des engagements des libéraux concernant le retour à l’équilibre budgétaire en 2019. Ils promettaient de petits déficits et le retour à l’équilibre budgétaire en 2019. Or les déficits sont importants et les libéraux n'évoquent même plus de date en lien avec le retour à l’équilibre budgétaire. Les libéraux ont complètement perdu le contrôle des dépenses publiques. Ce n’est pas pour rien qu'on se rend aujourd'hui compte que leur promesse d’être un gouvernement ouvert et transparent était cousue de fil blanc. Leur intention louable, certes, s’est vite frappée à la réalité libérale.
Quand un libéral touche au pouvoir, tout ce qui compte pour lui, c’est de protéger ses amis, de garder le pouvoir à tout prix, de briser les règles si elles le contrarient, de cacher ses faits et gestes ou son inaction derrière de belles images ou de belles paroles, et de détourner constamment l’attention des Canadiens quant aux sujets qui les préoccupent vraiment.
La ministre de l’Environnement et du Changement climatique a récemment révélé, dans un bar, la véritable politique du gouvernement libéral. Elle a dit que si nous disons son message et que nous le répétons plus fort, les gens vont totalement nous croire.
Voici quelques exemples que les libéraux ont aimé garder derrière les portes closes: l’extravagant voyage en Inde du premier ministre, ses vacances sur l’île privée de l’Aga Khan, les manquements à l’éthique du premier ministre, la villa en France du ministre des Finances, les tentatives d’ingérence politique dans l’affaire SNC-Lavalin et, plus récemment, l’affaire Mark Norman.
Je pourrais aussi parler des tentatives répétées de la leader du gouvernement à la Chambre de changer les règles de fonctionnement qui régissent les députés de la Chambre. Qui cela favorisait-il? Évidemment, cela favorisait le gouvernement libéral. Cela retirait à l'opposition tous les outils dont elle disposait pour tenir tête au gouvernement et jouer pleinement son rôle essentiel, c’est-à-dire tenir le gouvernement responsable de ses actes.
Cela m’amène au premier alinéa de la motion d’aujourd’hui:
Que la Chambre:
a) prenne note de l’importance d’une presse libre et indépendante pour une démocratie en santé;
Tous les exemples que je viens de mentionner n’auraient probablement pas été mis au jour, n’eût été l’importance d’une presse libre et indépendante. La confiance entre le public et les médias vient directement du fait que les gens considèrent les médias comme indépendants de leur gouvernement. Cependant, le premier ministre libéral a mis en place un plan de 600 millions de dollars qu’il distribuera aux médias canadiens juste avant les prochaines élections. Le premier ministre a choisi lui-même les membres du comité qui décidera où ira l’argent. Il ne s’engage pas à respecter leurs recommandations. Le premier ministre refuse que les délibérations du comité soient publiques. Il demande aux membres du comité de signer des accords de confidentialité. L’Association canadienne des journalistes se demande encore si elle participera au processus, et elle exige plus de transparence.
Je me permets de citer le communiqué émis par l’Association canadienne des journalistes, et non par le Parti conservateur.
L'Association canadienne des journalistes dit que son souci primordial est la transparence et que sa capacité à participer dépendra de la mise en place de mesures garantissant un processus public, ouvert et transparent. Elle remarque que, jusqu'à présent, une grande partie du processus semble s'être déroulée à l'abri des regards du public, lors de réunions à huis clos entre gouvernements, propriétaires de journaux et groupes de pression. Elle estime que, pour les journalistes, dont la légitimité dépend de la confiance du public, il est impératif qu'un processus soit ouvert et que le débat soit rigoureux, complet et ouvert au public.
Par ailleurs, elle dit que de combiner cela avec les accords de confidentialité demandés pourrait créer une situation dans laquelle un média critiquant un ministre ou son gouvernement se voit refuser un financement et l'Association ne peut pas en discuter publiquement. Selon elle, pour s'assurer que le comité n'a aucune apparence de partisanerie, que ce soit le cas ou non, son indépendance totale doit être la règle.
On ne peut pas nous accuser, ici, de vouloir attaquer les journalistes quand ce sont les journalistes eux-mêmes qui affirment que leur indépendance est mise en jeu par ce stratagème libéral. Pourquoi le premier ministre veut-il décider derrière des portes closes quels médias il va aider? Est-ce pour cacher qu'il tente de truquer les élections? Est-ce qu'il comprend le tort qu'il peut causer aux journalistes de ce pays s'il ne les respecte pas davantage?
Parlons maintenant de l'alinéa c) de la présente motion, qui demande à la Chambre de condamner l'inclusion d'Unifor, un groupe qui a défendu et continue de défendre des positions politiques partisanes, dans ce comité. Unifor est un grand syndicat, de loin celui qui représente le plus grand nombre de journalistes au Canada. Je le dis pour les gens du Québec qui n'ont peut-être pas l'occasion de connaître Unifor. Unifor a été invité par le premier ministre à siéger au comité qui va décider de l'aide aux médias. Beaucoup de journalistes et le public canadien sont choqués par cette nomination. Le président d'Unifor, Jerry Dias, le bon ami du premier ministre, a été clair: son syndicat sera le pire cauchemar des conservateurs à l'élection de 2019. Il n'a pas hésité une minute à se faire photographier avec ses camarades en se targuant d'être la résistance à l'élection d'un prochain gouvernement conservateur. Qu'attend le premier ministre pour mettre fin à cette mascarade antidémocratique?
Ce n'est pas tout. Pour les gens qui veulent en savoir un peu plus sur M. Dias et ce qu'il pense du Parti conservateur, je vais traduire ce qu'il a déclaré dans des gazouillis qui ont été rapportés par deux médias. Tout d'abord, il a dit qu'il parlait effectivement contre le leader des conservateurs. Ensuite, M. Dias a dit qu'il n'allait pas diminuer sa campagne anticonservateurs et qu'il allait probablement l'intensifier, parce que le chef des conservateurs l'avait irrité au cours des derniers jours. Telle est l'attitude du président d'Unifor. C'est la personne qu'on a nommée à un comité indépendant pour choisir quels médias vont avoir droit et accès aux fonds octroyés par le gouvernement libéral.
Il s'agit donc d'un syndicat dont le président s'est engagé à faire ouvertement campagne contre les conservateurs, et ce, avec l'argent de ses membres. Je pourrais citer beaucoup de journalistes qui sont furieux envers cette décision, qui n'acceptent pas que leur syndicat fasse de telles déclarations et qui, surtout, s'opposent à ce que le gouvernement s'ingère ainsi dans l'octroi des fonds. C'est un processus qui doit être non partisan, ouvert et transparent, c'est-à-dire tout le contraire de ce que le premier ministre a fait à ce jour.
Le gouvernement s'engage dans cette voie dangereuse avec Unifor en permettant au loup de garder les moutons. La nature du loup fait en sorte qu'il voudra toujours manger des moutons, et Jerry Dias a clairement fait connaître son intention de manger du conservateur lors de la prochaine élection. Comment peut-on faire confiance à M. Dias? Il est encore temps de préserver l'indépendance de nos médias. Que le gouvernement retire Unifor de ce comité, pour commencer.
J'ai moi-même été journaliste pendant des années. J'ai travaillé à la radio pour un hebdomadaire local. La ligne est toujours très mince entre l'influence des partenaires commerciaux et l'influence qu'on peut avoir comme journaliste. Heureusement, les journalistes ont toujours préservé leur indépendance, mais ce n'est pas en agissant de la sorte que le gouvernement va protéger leur travail.
Qu'on retire le président d'Unifor et qu'on fasse les choses correctement, d'une manière ouverte et transparente, pour protéger l'indépendance des journalistes et la démocratie au Canada.