Monsieur le Président, il y a des détails qui ne m'ont pas échappé ce soir. Premièrement, les Raptors tiraient de l'arrière par trois points à six minutes de la fin. Le pointage a peut-être changé depuis; je l'ignore. Le page pourrait peut-être nous tenir au courant.
L'autre chose qui ne m'a pas échappé, c'est que la leader du gouvernement à la Chambre vient encore de couper court au débat sur une question que les députés de ce côté-ci de la Chambre considèrent comme un sujet de discussion important.
Nous avons entendu la députée de Kamloops—Thompson—Cariboo en parler plus tôt ce soir. Le député de Dauphin—Swan River—Neepawa en a aussi parlé. J'étais à la Chambre pendant la plus grande partie du débat, et c'est lui qui a le mieux évalué ce projet de loi et ses conséquences pour notre secteur des ressources naturelles. Comme je l'ai dit plus tôt, en écoutant les interventions du député et certaines questions qui lui ont été posées, j'avais l'impression qu'on se battait avec un couteau contre un homme armé d'un revolver, non seulement parce que le député a travaillé comme biologiste dans la vallée du Mackenzie et qu'il connaît les questions en cause, mais aussi parce que ses connaissances sur notre secteur des ressources naturelles sont tout simplement extraordinaires.
Le marteau tombe encore une fois. C'est parce qu'il ne reste que neuf jours avant la fin de la présente session parlementaire, à moins qu'on ajoute des jours de séance pendant l'été à d'autres fins, et parce que le gouvernement a géré le programme législatif de la Chambre avec une incurie totale. Les libéraux ont eu l'occasion de présenter ce projet de loi bien avant ce soir, à 23 h 17, le 10 juin. Maintenant qu'ils sont acculés au pied du mur, pour ce projet de loi et d'autres, ils laissent tomber le marteau ce soir. Ils refusent de continuer à débattre de la question, malgré son importance.
Ce n'est pas seulement le projet de loi dont nous sommes saisis qui pose problème. C'est la destruction progressive et systématique du secteur canadien des ressources naturelles au moyen d'une série de mesures législatives. Je vais les rappeler aux députés: le projet de loi C-69, le projet de loi C-48, le projet de loi C-86 et le projet de loi C-55. Toutes ces mesures législatives visent à étrangler le secteur des ressources naturelles. Non seulement elles mettent à genoux l'Alberta, la Saskatchewan et les producteurs et les transformateurs de pétrole et de gaz de l'Ouest du pays, mais elles les obligent aussi à supplier le gouvernement de prendre les mesures qui s'imposent et de ne pas détruire cet important secteur de l'économie canadienne.
Ce secteur est important pour de nombreuses raisons, qui ne se limitent pas aux paiements de transfert permettant à diverses régions du Canada de prospérer grâce à l'exploitation fructueuse des ressources naturelles. Il est important aussi parce que le tissu social du pays repose largement sur les revenus tirés du secteur canadien des ressources naturelles. Tous les Canadiens dépendent du financement issu de ce secteur pour bénéficier de bons services de santé, d'un filet de sécurité sociale adéquat et pour que l'on puisse prendre soin des plus vulnérables de notre société, y compris les communautés autochtones, qui ont profité dans le passé des réussites du Canada. Ces réussites ne doivent pas être seulement économiques, mais aussi environnementales. Nous devons pouvoir faire sortir notre production du pays d'une manière écologiquement viable. Il est dommage que nous nous trouvions dans la situation actuelle.
Le projet de loi C-88, Loi modifiant la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie et la Loi fédérale sur les hydrocarbures et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, comprend deux parties. La partie 1 modifie la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, qui a été adoptée à l'origine en 1998, lorsque les libéraux de Jean Chrétien étaient au pouvoir. Le gouvernement conservateur ayant précédé le gouvernement actuel a par la suite modifié cette loi au moyen du projet de loi C-15, Loi sur le transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest.
Je rappelle à la Chambre qu'un des principaux éléments du projet de loi C-15 consistait à regrouper les quatre offices des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie en un seul. Après son adoption en 2014, le gouvernement tlicho et le Secrétariat du Sahtu ont intenté des poursuites contre le Canada, soutenant que cette restructuration allait à l'encontre de leur accord de règlement de revendications territoriales.
En février 2015, la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a prononcé une injonction pour empêcher l'entrée en vigueur des dispositions sur la restructuration des offices tant qu'une décision n'aurait pas été rendue dans cette affaire. Les libéraux ont interrompu cette bataille juridique peu de temps après leur arrivée au pouvoir, et l'histoire ne se termine pas là.
Le point qui me préoccupe davantage à propos du projet de loi C-88 porte sur la partie 2, le moratoire de cinq ans des libéraux sur les activités d'exploration gazière et pétrolière.
Le projet de loi C-88, la partie 2 en particulier, soulève des préoccupations, car il impose un moratoire sur les activités d'exploration gazière et pétrolière dans la mer de Beaufort. Il modifierait la Loi fédérale sur les hydrocarbures de manière à permettre au gouverneur en conseil de prendre des décrets, s'il estime que c'est dans l'intérêt national, pour interdire l'exercice de certaines activités pétrolières et gazières et maintenir les conditions des permis existants afin d'empêcher leur expiration pendant le moratoire.
Je le répète, le gouvernement libéral cherche constamment et systématiquement à contrôler presque tous les aspects du secteur des ressources naturelles au moyen de décrets du gouverneur en conseil. Cela confierait en réalité les pouvoirs décisionnels au ministre ainsi qu'à l'organe exécutif du gouvernement par la voie de décrets du Cabinet.
Pensons à cela du point de vue d'un investisseur qui cherche à investir au Canada. L'une des choses que les investisseurs recherchent le plus est la certitude. Ils veulent savoir que, s'ils placent leur argent dans le type d'investissements qui existent au sein de notre secteur des ressources naturelles, cet argent produira un rendement, ce qui n'est pas un mauvais mot, surtout pour ceux qui investissent. Ils ont besoin de savoir si le processus en soi est assorti d'une réelle certitude.
Une fois que j'ai investi tout cet argent pour évaluer le potentiel d'un investissement au Canada, soudainement, mon dossier est soumis au Cabinet ou au ministre, et ce dernier décide encore une fois, comme l'a fait la leader du gouvernement à la Chambre ce soir, de serrer la vis, disant que le gouvernement n'approuvera pas l'investissement pour une raison ou une autre, principalement en fonction de son idéologie. Pourquoi planifierais-je donc d'investir des milliards de dollars dans le secteur des ressources naturelles du Canada?
Il n'y a pas que la question de l'incertitude qu'il a créée. Le gouvernement a clairement indiqué aux investisseurs du secteur des ressources naturelles qu'il avait l'intention, en raison de son idéologie, de fermer l'interrupteur.
Le premier ministre l'a affirmé explicitement lors de ses voyages à l'étranger. Lorsqu'il a pris la parole à Paris pour dire qu'il ferait fermer le secteur des ressources naturelles dès demain s'il le pouvait, croyait-il que ses paroles ne se rendraient pas au Canada? Le message a été bien compris pas seulement au Canada, mais aussi partout en Amérique du Nord par les investisseurs qui croyaient que le Canada était un endroit sûr où investir et faire de bonnes affaires.
Il est particulièrement inquiétant d'entendre un gouvernement affirmer, comme l'a fait il y a à peine 10 minutes la leader parlementaire du gouvernement, qu'il va mettre fin au débat. Il est important que les députés puissent faire valoir leur opinion sur cette question. Il est important que les Canadiens sachent que le plan du gouvernement est de progressivement et méticuleusement faire disparaître le secteur canadien des ressources naturelles et de faire fuir les investisseurs.
Vers où ces investisseurs se tournent-ils? De toute évidence, tout cet argent est redirigé vers les États-Unis. Nous l'avons vu avec le projet Trans Mountain. Le gouvernement a acheté le pipeline. Où est allé l'argent? Il s'est retrouvé à Houston, où il a été injecté dans un milieu plus favorable aux investissements dans les ressources naturelles. Il est vrai que l'économie américaine fonctionne à plein régime étant donné qu'elle est menée par le secteur des ressources naturelles. Le pays construit plus de pipelines que jamais. Il construit plus de ports en eau profonde que jamais. Tous ces projets visent à faire en sorte que ses produits peuvent être acheminés vers les marchés mondiaux, là où la demande est forte. D'ailleurs, la demande se maintiendra, peu importe si le Canada et un gouvernement libéral décident de ne pas participer à l'offre, peu importe si des concurrents du Canada, comme les États-Unis, font tout pour acheminer leurs produits vers les marchés. Toutes ces mesures législatives cumulatives qui ont été présentées — j'inclus celle d'aujourd'hui, qui est étudiée dans les neuf derniers jours de la présente législature — sont conçues pour fermer le secteur canadien des ressources naturelles.
Aujourd'hui, dans un geste sans précédent, les premiers ministres de six provinces ont signé une lettre conjointe. Je pense que cela ne s'est jamais produit dans l'histoire du pays. Des premiers ministres provinciaux se sont déjà réunis pour discuter avec le premier ministre du Canada de certains enjeux d'importance nationale qui les touchaient, mais je ne crois pas que cela ait déjà été fait de la sorte, en groupe. Aujourd'hui, ils ont envoyé une lettre au premier ministre qui a été rendue publique. Je tiens à en faire la lecture pour que les Canadiens sachent à quel point la situation est grave, et ce, non seulement pour l'Alberta et la Saskatchewan. En effet, nous apprenons maintenant que le Manitoba éprouve aussi des problèmes parce que le gouvernement fédéral refuse d'approuver la construction d'une ligne de transport d'électricité, qui est pourtant un projet d'énergie propre. Les inquiétudes sont tellement vives au sein de la fédération que ces six premiers ministres provinciaux ont décidé d'écrire une lettre aujourd'hui.
Cette lettre dit ceci:
Monsieur le Premier Ministre,
Nous vous écrivons au nom des gouvernements de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest. Ensemble, ce territoire et ces cinq provinces représentent 59 % de la population canadienne et 63 % du PIB national. Nous sommes essentiels à l'économie et à la prospérité du Canada, alors nous estimons de la plus haute importance que vous teniez compte des réserves que nous avons au sujet des projets de loi C-69 et C-48.
Où qu'ils habitent, les Canadiens craignent les répercussions économiques qu'auraient ces mesures législatives si elles étaient adoptées dans la forme proposée par la Chambre des communes. Emploi, économie, investissements: les conséquences se feraient sentir d'un océan à l'autre. La compétence des provinces et des territoires doit être respectée. Or, ils sont les seuls à avoir compétence sur l'exploitation de leurs ressources non renouvelables et forestières et sur la production d'électricité. En faisant fi du pouvoir exclusif des provinces sur les projets d'exploitation de leurs ressources, le projet de loi C-69 rompt l'équilibre de la répartition constitutionnelle des pouvoirs. Le gouvernement fédéral doit reconnaître le rôle exclusif des provinces et des territoires dans la gestion et l'exploitation des ressources non renouvelables, faute de quoi il pourrait se retrouver avec une crise constitutionnelle sur les mains.
Dans sa forme d'origine, le projet de loi C-69 rendrait pour ainsi dire impossible le développement d'infrastructures essentielles au pays, privant du coup le Canada d'investissements dont il a pourtant bien besoin. Selon l'Institut C.D. Howe, en 2017 et 2018, la valeur prévue des investissements dans les grands projets canadiens du secteur des ressources naturelles a fondu de 100 millions de dollars...
Cet argent a disparu.
La lettre poursuit:
... un montant équivalant à 4,5 % du produit intérieur brut du Canada. Pour protéger l'avenir économique du Canada, nous ne pouvons pas nous permettre, collectivement, d'ignorer l'incertitude et le risque qu'entraîne le projet de loi C-69 en ce qui concerne les investissements futurs.
Je dirais que c'est aussi de plus en plus vrai pour le projet de loi C-88.
On ajoute:
Les cinq provinces et le territoire que nous représentons présentent un front uni pour exhorter fortement le gouvernement à accepter le projet de loi C-69 tel qu'amendé par le Sénat, afin de réduire au minimum les répercussions sur l'économie canadienne. Nous encourageons le gouvernement du Canada et tous les députés à accepter l'ensemble des amendements proposés au projet de loi.
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a tenu 38 jours d'audiences et entendu 277 témoins représentant les collectivités autochtones, l'industrie, les premiers ministres et des experts indépendants. À partir de ces témoignages complets, le Comité a recommandé d'importants amendements au projet de loi, amendements que le Sénat a globalement acceptés. Nous vous pressons de respecter ce processus, la compétence du Comité et le vote du Sénat.
Si les amendements du Sénat ne sont pas retenus, le projet de loi devrait être rejeté, car, dans sa forme actuelle, il présenterait des obstacles insurmontables à la construction de grands projets d'infrastructures dans tout le pays et mettrait en péril les emplois, la croissance et la confiance des investisseurs.
De la même façon, le projet de loi C-48 [et, je le répète, le projet de loi C-88 également] menace la confiance des investisseurs, et le moratoire relatif aux pétroliers est une forme de discrimination contre les produits dérivés du pétrole brut de l'Ouest. Nous avons été très déçus que le Sénat n'ait pas accepté la recommandation faite au Comité sénatorial des transports et des communications de ne pas faire de rapport sur le projet de loi. Nous exhortons le gouvernement à cesser de faire des pressions pour faire adopter ce projet de loi qui aura des effets délétères sur l'unité nationale et l'économie canadienne dans son ensemble.
Les gouvernements sont très inquiets du mépris dont fait preuve jusqu'à maintenant le gouvernement fédéral à l'égard des préoccupations que ces projets de loi suscitent dans les provinces et les territoires. Pour l'instant, le gouvernement fédéral semble indifférent aux difficultés économiques auxquelles sont confrontées les provinces et les territoires. Des mesures immédiates s'imposent pour peaufiner ou éliminer ces projets de loi afin de ne pas aliéner davantage les provinces, les territoires et leurs populations, et de s'employer à unir le pays pour appuyer sa prospérité économique.
Cette lettre est signée par six premiers ministres provinciaux et dirigeants territoriaux: l'honorable Doug Ford, l'honorable Blaine Higgs, l'honorable Brian Pallister, l'honorable Scott Moe, l'honorable Jason Kenney et l'honorable Bob McLeod, premier ministre des Territoires du Nord-Ouest.
Il faut travailler afin d'unir le pays pour favoriser sa prospérité économique. Voilà de quoi il s'agit: veiller à ce que tous les secteurs soient prospères.
Je sais que le gouvernement met l'accent sur les nouvelles technologies, l'innovation et l'énergie verte. Ce sont des choses sur lesquelles nous devrions tous mettre l'accent, mais il faut le faire en parallèle. On ne peut pas simplement fermer complètement une voie pour pouvoir adopter l'autre, une autre voie qui va exiger du temps, du travail et des investissements considérables, des choses qui seront essentielles pour concrétiser l'économie verte, l'idéologie du développement durable du gouvernement.
Contrairement à ce que dit le premier ministre, nous ne pouvons pas interrompre du jour au lendemain l'exploitation des ressources naturelles. Nous devons continuer à appuyer cette industrie, et ce, de façon écologiquement durable. À mon avis, c'est ce que le Canada a toujours fait. Le Canada est un chef de file de l'innovation et des technologies en ce qui concerne l'exploitation des ressources énergétiques dans le monde. Nous avons cette capacité.
Pourquoi adoptons-nous des mesures législatives et donnons-nous le pouvoir à un gouvernement et à un Cabinet dont l'idéologie ne respecte pas ce que la plupart des Canadiens désirent? Je parle de continuer à extraire et à utiliser nos ressources naturelles et d'arrêter d'acheter et de dépendre des ressources énergétiques d'autres pays. On achète des millions de barils de pétrole de notre plus grand concurrent, les États-Unis, et d'autres pays qui ont un régime despotique, comme l'Arabie saoudite et le Venezuela.
Le Canada a la capacité de faire ce qu'il doit pour assurer la prospérité économique pour tout le monde, la prospérité pour les Canadiens de tout le pays, de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique, en passant par le Nord du Canada et les communautés autochtones au milieu. Nous avons cette capacité.
Je l'ai dit tout à l'heure et je vais une fois de plus faire écho aux propos du premier ministre Frank McKenna. Il est temps que nous tenions un vrai débat national pour déterminer si nous voulons être un pays producteur de carbone. Ce n'est que de cette façon que nous déterminerons les risques et les bénéfices de cette décision.
Monsieur le Président, je vous remercie du temps de parole que vous m'avez donné ce soir. Si je puis me permettre, pourriez-vous me dire comment les Raptors s'en sortent? J'ai déjà eu des nouvelles, mais j'en aimerais d'autres.