Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole ce soir à propos d'une question très importante, à savoir le manque ou l'absence de main-d'oeuvre qualifiée dans certaines régions du pays, qui en auraient besoin pour assurer le succès de leurs entreprises et permettre au Canada de se doter des infrastructures importantes dont il a besoin.
Je sais que j'ai déjà posé la question à mon collègue, au cours de la période de questions et d'observations ayant suivi son discours, mais je tiens à souligner la frustration éprouvée par mes collègues conservateurs et néo-démocrates lorsque le comité dont nous faisons partie a débattu de la motion M-190, qui portait sur la pénurie de main-d'oeuvre dans la région du Grand Toronto et de Hamilton. Nous avons demandé au parrain de cette motion, le député libéral de Mississauga-Est—Cooksville, s'il était prêt à considérer un amendement de la motion pour que le comité des ressources humaines et du développement des compétences ne limite pas à la région du Grand Toronto et de Hamilton son étude des pénuries et des déséquilibres dans la main-d'oeuvre, surtout dans les métiers spécialisés, mais qu'il étudie ce problème dans l'ensemble du pays. Je m'étonne de voir les libéraux continuer de parler de l'importance de cette question et le faire encore une fois ce soir, alors qu'à l'époque, le parrain de la motion et les autres membres libéraux du comité ont répondu que le Parti libéral n'appuierait pas l'amendement proposé, ce qui fait que celui-ci a été refusé.
Si cet amendement avait été adopté sur le coup, nous aurions fort probablement pu terminer cette étude d'ici la fin de la session. Malheureusement, étant donné que mon collègue de Niagara-Centre a présenté cette motion si tard au cours de la présente législature, il est très peu probable que l'étude se poursuive. Je suis déçu et je trouve vraiment regrettable qu'une mesure aussi importante que celle-ci ne soit pas abordée au Parlement parce que les collègues du député ont refusé d'approfondir une étude antérieure du comité.
Il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans les métiers spécialisés en demande, surtout à mesure que la population vieillit. Je pense que nous convenons tous — et c'est ce qui ressort de nos réunions avec les intervenants de tout le pays — que le vieillissement de la population exercera des pressions très réelles sur la main-d'oeuvre canadienne. D'après ce que nous avons entendu, plus de 400 000 emplois au Canada ne sont pas comblés. C'est pourquoi j'étais vraiment fier que le chef de l’Opposition, le député de Regina—Qu'Appelle, mette de l'avant une politique ou une plateforme qui nous permettra d'entreprendre une initiative pangouvernementale pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre, notamment en nommant un ministre du Commerce intérieur, ce qui constitue un élément central de cette initiative.
L'objectif premier est d'éliminer les barrières commerciales interprovinciales, qui continuent de freiner l'essor de l'économie canadienne. Au vu des statistiques, ces barrières ont fait reculer le PIB canadien de 130 milliards de dollars et empêchent les travailleurs spécialisés de passer d'une province à l'autre lorsque leurs titres de compétence ne sont pas reconnus dans telle ou telle province. L'élaboration d'une stratégie pancanadienne nous aurait certainement permis d'aborder plusieurs enjeux liés à la mobilité de la main-d'oeuvre.
L'idée d'avoir un ministre qui s'occupe exclusivement du commerce intérieur s'appuie sur les efforts des gouvernements conservateurs précédents, qui ont instauré la Subvention incitative aux apprentis et la Subvention à l'achèvement de la formation d'apprenti, en 2009. Nous avons accordé plus de 530 000 subventions aux apprentis, totalisant près de 700 millions de dollars, afin d'aider de nombreux Canadiens à terminer leur formation.
Je suis très fier d'avoir fait partie du gouvernement qui a lancé en 2014 le prêt canadien aux apprentis. Je me souviens très bien qu'à ce moment, alors que nous débattions de cet enjeu à la Chambre, nous avions appris que plus de 50 % des Canadiens qui entreprennent un programme d'apprentissage ne le terminent pas. Prenant acte de ces énormes lacunes, notre gouvernement s'est attaqué au problème en instaurant le prêt canadien aux apprentis, dont l'objectif était de fournir aux Canadiens les moyens de terminer leur programme.
Comme mon collègue l'a mentionné aussi dans son intervention, nous ne devrions pas avoir plus de soudeurs ou de tuyauteurs en Alberta en ce moment. Il y a trop de ces travailleurs très qualifiés. Plus tôt cette année, je me trouvais dans un établissement de formation du syndicat des chaudronniers et des tuyauteurs, à Edmonton, et j'ai appris que 70 % de ses membres n'avaient pas de travail. J'ai voulu savoir pourquoi, et il est ressorti clairement des discussions que le projet de loi C-69 et l'interdiction des pétroliers y sont fortement liés. L'annulation du projet de pipeline Northern Gateway, le torpillage du projet d'expansion du pipeline Trans Mountain et la mort par étouffement réglementaire du projet Énergie Est constituent trois des principales raisons pour lesquelles nous faisons face à une crise de l'emploi en Alberta.
Cela étant, le fait qu'il y ait des travailleurs spécialisés sans travail en Alberta alors qu'on en a désespérément besoin ailleurs au pays met en lumière des problèmes auxquels nous devrions nous attaquer.
Je me demande si mon collègue de Niagara-Centre serait ouvert à l'idée d'amender sa motion. Je ne veux pas lire toute la motion, puisque nous avons peu de temps, mais j'aimerais ajouter le mot « déséquilibres » dans le premier point pour qu'il dise « les déséquilibres régionaux de main d’œuvre dans les métiers spécialisés ».
J'aimerais aussi ajouter un quatrième point à sa motion. J'espère qu'il sera disposé à approuver cet amendement. J'aimerais ajouter:
(iv) la façon dont l'harmonisation interprovinciale des titres de compétence, dont les certificats d'aptitude professionnelle, et de la formation pourrait aider les chômeurs et les travailleurs sous-employés dans les métiers à trouver du travail dans d'autres régions en facilitant la mobilité de la main-d'oeuvre et la transférabilité des qualifications au Canada.
Je pense qu'il y a une chose que tous à la Chambre nous avons entendue d'un grand nombre d'intéressés et c'est qu'il est impossible de faire reconnaître les titres de compétence des gens de métiers entre les provinces. J'aimerais que nous nous penchions sur la question de la mobilité de la main-d'oeuvre. Nous aurions pu nous pencher sur cette question si nous avions pu faire une étude plus tôt et c'est dommage.
Cela cadre assez bien avec ce qu'on voit du gouvernement libéral actuel quand il s'agit de faire ce qu'il dit. En abordant cette question si tard dans la législature, on est à peu près certain qu'on ne pourra pas faire grand-chose.
Dans la même veine, le gouvernement a aussi proposé un programme de formation professionnelle. J'étais vraiment intéressé à en apprendre plus à ce sujet lorsque la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d'œuvre et du Travail est venue au comité. Une des conditions à la mise en place de ce programme, qui s'inscrit en principe dans la stratégie relative aux métiers spécialisés, est la conclusion d'un accord avec toutes les provinces. Ces dernières seraient obligées de modifier les dispositions de leur code du travail relatives aux congés pour que ce programme puisse fonctionner. Lorsque j'ai demandé à la ministre si ces accords avaient été conclus, elle n'a pas été en mesure de me répondre. J'ai posé la question aux fonctionnaires et ils ont indiqué que les négociations n'avaient pas été entamées. Par conséquent, l'élément central du budget de 2019 censé régler la pénurie de travailleurs dans les métiers spécialisés au pays ne se concrétisera probablement pas.
De toute évidence, compte tenu des discussions que les premiers ministres provinciaux ont depuis deux jours, de la relation que le gouvernement libéral actuel et le premier ministre entretiennent avec eux et du fait que ce dernier les accuse d'être une menace pour l'unité canadienne et la Confédération, je suis convaincu que bon nombre de ces premiers ministres provinciaux ne seront pas pressés de signer un accord sur une initiative libérale sur la main-d’œuvre s'ils doivent modifier leur propre code du travail. Les libéraux jettent beaucoup de poudre aux yeux et ils disent qu'ils veulent régler beaucoup de problèmes, mais, quand vient le temps de gouverner, ils sont vraiment très loin de répondre aux attentes.
Cela dit, je tiens à assurer à mon collègue de Niagara-Centre, qui a présenté cette motion, que, même s'il n'appuie pas l'amendement que j'ai proposé, nous appuierons la motion parce que je crois qu'il est important de régler le problème de la pénurie de main-d’œuvre dans les métiers spécialisés.
La semaine dernière, j'ai visité l'institut de technologie du Sud de l'Alberta et ses tout nouveaux campus de construction et de génie pétrolier; les installations sont incroyables. Cela montre que des possibilités s'offrent à nous et que les installations de formation sont là. Nous devons simplement nous assurer que les Canadiens comprennent que ces emplois sont bien rémunérés. Choisir un métier spécialisé n'est pas un mauvais choix de carrière. C'est un excellent choix qui offre des possibilités incroyables et des salaires très élevés. Nous devons simplement nous assurer de corriger certaines fausses perceptions à propos de ces métiers.
Nous pouvons agir concrètement en attirant plus de femmes dans les métiers spécialisés. L'une des études les plus intéressantes que j'ai menées en tant que parlementaire, au comité de la condition féminine, quand nous formions le gouvernement, concernait les façons d'encourager les femmes à poursuivre une carrière dans un métier spécialisé. J'ai lu cette étude en entier. Les intervenants ont livré des témoignages et ils ont formulé des recommandations remarquables. Dans beaucoup des métiers spécialisés, la participation des femmes est inférieure à 5 %. Dans le Nord de l'Alberta, il y a des mécaniciennes de machinerie lourde et des opératrices d'équipement lourd. Par conséquent, je pense qu'il existe de grandes possibilités à ce chapitre.
J'aurais aimé que cette étude ait une suite et que nous trouvions une solution à ce problème.