Madame la Présidente, je remercie le chef du Bloc québécois de partager son temps de parole avec moi. Avant d'aller plus loin, j'aimerais aussi offrir mes condoléances aux gens de la Nouvelle-Écosse.
En tant que porte-parole du Bloc québécois en matière d'aînés, je tiens à dire que c'est un privilège d'être ici, à la Chambre, aujourd'hui. Nous nous réunissons dans des circonstances exceptionnelles et dramatiques. La pandémie de la COVID-19 submerge le Québec et sévit sinistrement dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, les CHSLD. On a appris que 99 % des gens décédés au Québec avaient plus de 60 ans et que la moitié d'entre eux provenaient des CHSLD.
La maladie est particulièrement dévastatrice chez les personnes qui ont déjà une santé fragile, mais cette réalité vient révéler un problème qui devrait nous affliger depuis longtemps, celui de la précarité des conditions de vie de nos aînés. Plusieurs aînés ont dû mourir seuls, sans même que leurs proches en soient avisés.
Les enfants et les petits-enfants, pour qui les liens sont encore importants, vont voir leur papa, leur maman, leur papi ou leur mamie au travers des fenêtres de leur chambre de résidence. Ils doivent se contenter de crier des « je t'aime » ou des « prenez soin de vous » du bas des balcons, pour ceux qui ont cette chance.
Il y a des histoires d'horreur, et même si c'est difficile, il ne faut pas généraliser et blâmer le personnel exténué et dépassé par la situation. Je salue et remercie du fond du cœur tout le personnel de la santé et le personnel de soutien qui viennent en aide à nos aînés malgré la souffrance et la peur, que les gens qu'ils accompagnent ressentent également. S'il y a vraiment eu des cas de négligence, je souhaite que des sanctions exemplaires soient infligées.
Ces gens sont ceux et celles qui ont façonné la société prospère qui nous permettra de traverser la crise. Pourtant, plusieurs d'entre eux ne s'en sortiront probablement pas. Ce serait indigne de notre part de les laisser tomber, en tant que parlementaires et législateurs, mais aussi en tant que citoyens et êtres humains.
L'amélioration des conditions de vie de nos aînés aurait dû être une priorité bien avant cette crise. Personnellement, c'est un combat que je mène depuis longtemps. Avant d'être élue, j'étais chargée de projet pour la sensibilisation à la maltraitance et à l'intimidation envers les aînés. Je travaillais avec des gens qui offraient du soutien à domicile et des organismes communautaires dévoués à nos aînés. Malgré tout cela, des histoires d'horreur, j'en ai entendu.
À cet égard, comme le répète notre chef depuis plusieurs jours déjà, le Bloc québécois a toujours fait du droit des aînés son cheval de bataille. Lorsque j'étais adjointe, il y a longtemps de cela, soit de 2007 à 2011, le Bloc québécois avait déjà la réputation d'être le défenseur des aînés. Récemment, nous avons fait plusieurs propositions qui auraient probablement changé considérablement les choses si elles avaient été appliquées à temps. Nous en avons parlé pendant les élections, d'ailleurs.
Dès le début, lorsque je suis arrivée à la Chambre, j'ai eu l'occasion de poser une question à la ministre des Aînés au sujet de la bonification de la pension de vieillesse à 65 ans plutôt qu'à 75 ans, pour éviter de créer deux classes d'aînés. Elle m'a même dit que c'était une bonne question. Prévoir et prévenir, plutôt que de réagir une fois que le mal est fait, c'est une attitude essentielle qu'un gouvernement devrait avoir. Voilà pourquoi il ne faut pas diviser les aînés en deux catégories.
Notre gouvernement devrait en appeler à cette force du Bloc québécois, mais la situation est maintenant trop urgente pour parler de ce qu'on aurait dû faire. Il faut agir immédiatement. Afin que la santé de nos aînés ne soit jamais compromise pour des raisons financières, nous suggérons une augmentation de la pension de vieillesse de 110 $ par mois et une bonification du Supplément de revenu garanti, le fameux SRG. Comme le chef du Bloc québécois l'a si bien démontré, c'est minime par rapport à tous les investissements. Cela représente 1 milliard de dollars. Cependant, il est encore difficile de comprendre pourquoi le gouvernement voudrait limiter cette augmentation aux aînés de 75 ans et plus. J'en ai parlé et je le répète: les aînés ont besoin de cette aide, et ce, à partir de 65 ans.
Les aînés s'endettent. En 20 ans, leur endettement a presque doublé: la proportion d'aînés qui ont des dettes importantes au Canada est passée de 27 à 42 %. Plusieurs d'entre eux ont besoin de travailler pour boucler leur fin de mois. Le pourcentage des personnes âgées ayant déclaré avoir travaillé a presque doublé entre 1995 et 2015. La majeure partie de l'augmentation est le résultat du travail pendant une partie de l'année ou du travail à temps partiel.
En 2015, un Canadien sur cinq âgés de 65 ans et plus, soit près de 1,1 million de personnes âgées, a déclaré avoir travaillé pendant l'année. Il s'agit de la plus forte proportion enregistrée depuis le Recensement de 1981. Le revenu d'emploi était la principale source de revenus pour 43,8 % des personnes âgées qui ont travaillé en 2015, ce qui représente une hausse par rapport aux proportions de 40,4 % enregistrées en 2005 et de 38,8 % enregistrées en 1995. Deuils, séparations, maladies, régimes de retraite privés insuffisants, hausse du coût de la vie, de nombreux facteurs expliquent la détresse financière des aînés. Ce sont plus de 200 000 aînés qui vivent dans la pauvreté au Canada et qui, chaque mois, doivent se demander s'ils vont avoir à faire un choix entre le loyer, l'épicerie ou les médicaments. Cela ne devrait pas arriver.
Les propositions du Bloc québécois permettraient aux personnes âgées de conserver un certain pouvoir d'achat et de continuer de faire rouler l'économie, une économie que ces générations ont contribué à bâtir. Il s'agit de mesures stabilisatrices parce qu'il faut voir les aînés non pas comme un poids, mais comme une force grise.
Les inquiétudes ont donc été vives lorsqu'on les a exclus de la Prestation canadienne d'urgence, ou PCU. Cependant, nous saluons l'humilité du gouvernement d'avoir modifié les critères pour leur venir en aide en excluant les prestations de vieillesse de leur revenu et en permettant aux personnes travaillant à temps partiel d'avoir accès à l'aide d'urgence.
Il faut également mentionner qu'il y a un fossé entre les aînés qui habitent en milieu urbain et ceux qui résident en milieu rural. En effet, ces derniers sont plus enclins à travailler. Grâce aux régimes publics de pension, le taux de faible revenu passe de 14 % chez les 55-64 ans et à 6,7 % chez les plus de 65 ans.
La crise actuelle révèle aussi que le fait de considérer Internet comme un service essentiel aurait pu briser l'isolement dont souffrent les aînés, particulièrement ces temps-ci. Pour certains aînés, l'appel vidéo était la seule manière de dire adieu à leurs proches. Il faut aussi augmenter les soins de santé encore une fois, et après on continuera de parler du transfert canadien en matière de santé. Il faut aussi augmenter la période des prestations de l'assurance-emploi pour les proches aidants et offrir un crédit d'impôt pour l'aménagement de résidences intergénérationnelles. Nous aurons d'autres occasions pour apporter de nouvelles idées dans le but de toujours améliorer la situation de nos aînés. La pertinence de ces mesures apparaît évidente aujourd'hui et montre bien que le Bloc voyait juste.
Concernant les fonds de retraite, la situation financière de nos aînés est aggravée par la chute de la valeur des placements de retraite. Ce sont les épargnes d'une vie qui ont fondu en un mois. Espérons que cette situation soit temporaire et que la valeur de ces placements remontera. À cet égard, nous proposons de suspendre l'obligation de retirer une portion des placements dans les régimes de retraite dont les rendements sont présentement négatifs. La bonification du Supplément de revenu garanti les aidera en attendant la reprise.
Une autre proposition sur laquelle nous planchons — et sur laquelle nous planchions avant le début de cette crise — et qui s'avère très pertinente aujourd'hui est la désignation des régimes privés de pension à titre de créanciers privilégiés en cas de faillite. Depuis le début de cette législature, le Bloc a toujours été constructif et collaboratif et souhaite continuer à l'être. Nos aînés ont besoin de solutions à la mesure de leurs problèmes. C'est notre devoir de les apporter et le Bloc québécois est disposé à le faire immédiatement.
En terminant, j'ai reçu des témoignages, notamment celui de la FADOQ qui disait que nous étions un parti qui, enfin, ne voyait pas les aînés comme étant déjà morts, mais plutôt comme des personnes bien vivantes qui peuvent encore contribuer à la société. On dit qu'un aîné, c'est une bibliothèque. Il faut se rappeler aussi qu'ils ne font pas seulement partie du passé, mais qu'ils feront partie du futur après la crise, et nous aurons besoin de leur présence.