Madame la Présidente, au Bloc québécois, nous avons toujours été en faveur du libre-échange. Le libre marché nous permet de viser une croissance qui ne serait pas possible dans un marché fermé. Le Québec a besoin d'ententes de libre-échange afin de favoriser le développement et l'innovation de l'ensemble de ses secteurs économiques.
À titre d'exemple, après la mise en place du précédent ALENA, en 1994, les exportations canadiennes de fruits et légumes et de fruits frais vers le Mexique et les États-Unis ont augmenté de 396 %. Les exportations étaient principalement concentrées vers les États-Unis. Il est donc essentiel de conserver cet accès.
Le nouvel ACEUM permet aux entreprises de continuer d'avoir accès au marché américain et apporte des retombées positives pour plusieurs producteurs. Nous en sommes conscients. Certains producteurs y gagnent, notamment les producteurs de grains. Là où il y a une meilleure définition du grain, il y a un gain positif.
Il y a quelques minutes, mon collègue du NPD a fait mention de l'élimination du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États. C'est également un gain positif. Plusieurs organisations demandent donc une ratification rapide.
Cependant, il y a des secteurs qui ne bénéficient pas de l'entente. Ils en bénéficient parfois très peu, sinon pas du tout. Ces secteurs s'avèrent le pilier de l'activité économique de nos campagnes, c'est-à-dire la base de l'occupation dynamique de notre vaste territoire. Tout comme la culture, ces secteurs auraient peut-être besoin d'une exception. Je parle bien sûr, on l'aura deviné, des secteurs sous gestion de l'offre.
Au Bloc, nous travaillons de façon constructive. On se souviendra longtemps que nous avons proposé des pistes de solution pour l'aluminium. Cela vient d'ailleurs d'être souligné par notre collègue du Parti conservateur. Il faudra, un jour ou l'autre, faire la même chose pour les secteurs sous gestion de l'offre, mais nous devons d'abord porter notre attention sur le moment où l'entente sera ratifiée.
Dans cette entente, le Canada a accepté de se faire limiter ses exportations vers des tiers pays par les États-Unis. C'est du jamais-vu. On parle bien sûr des sous-produits du lait. Je pense d'ailleurs que les gens à la Chambre commencent à en être conscients. Ainsi, les sous-produits du lait, comme les protéines laitières, le lait en poudre et les produits pour nourrissons sont limités. Dans ce domaine, les exportations représentaient environ 110 000 tonnes en 2019. L'administration Trump a réussi à inclure une clause qui limite ces exportations à 55 000 tonnes la première année et à 35 000 tonnes la deuxième année. C'est incroyable.
Non seulement nous perdons déjà 3,9 % de marché dans le secteur laitier, mais tous les secteurs sous gestion de l'offre y perdent. De plus, on se fait limiter la façon dont nos producteurs peuvent se reprendre en exportant leurs surplus de protéines solides dans les tiers pays.
Il faudra ultimement faire quelque chose à cet égard, mais la première étape est de s'assurer que l'entente est ratifiée après le 1er mai. Si l'entente est ratifiée en avril, la clause explique que l'entente entre en vigueur le premier jour du troisième mois. Elle entrerait donc en vigueur en juillet.
Par contre, si l'entente est ratifiée en mai, elle entrerait en vigueur en août. Cela fait toute une différence, et les gens doivent en être conscients. En effet, l'année de production laitière commence le 1er août. Si on a une entente qui débute le 1er juillet, cela veut donc dire que la première année de l'entente va durer seulement un mois. Ils ne disposeront que d'un mois pour exporter les 55 000 tonnes. Cela n'a pas de bon sens. Il faut donc s'assurer que l'entente sera ratifiée après le 1er mai.
Cela ne retarde pas l'application de l'entente, et je ne parle pas de retarder la ratification de l'ACEUM après la présente session. Là n'est pas la question. Il s'agit de s'assurer que l'entente entre en vigueur après le 1er août pour commencer à compenser les pertes. Ensuite, on verra ce qu'on fait avec cela. Tous savent que nous sommes capables d'être inventifs, au Bloc québécois. Il faudra trouver une solution à cette clause néfaste et inacceptable.
Par ailleurs, nous avons été heureux d'apprendre, dans l'actualité, qu'on avait commencé à dédommager les producteurs laitiers. Tout le monde est content, même les producteurs, malgré que ce qu'ils voulaient, eux, c'est produire et nourrir la population dans la fierté.
Toutefois, certains secteurs ne sont pas encore compensés. Ce sont les secteurs sous gestion de l'offre, incluant notamment la production de poulet, de dindon, d'œufs d'incubation et d'œufs de consommation.
Les représentants de ces organismes ont été de bonne foi et très patients. Ils se sont assis avec les représentants gouvernementaux et leur ont présenté leurs chiffres. Ils en sont arrivés à une entente sur le montant des compensations nécessaires en avril dernier. Nous sommes au mois de mars, cela va donc bientôt faire un an. Depuis, il n'y a rien eu, il n'y a eu aucun signal. Il y a bien eu quelques rencontres pendant l'été en juillet et août, peut-être parce que nos collègues du Parti libéral voulaient faire une annonce pour la campagne électorale — c'est sûr que cela aide. Or, cela n'a débouché sur rien.
Qu'est-ce qui bloque ce dossier? Contrairement aux gens du secteur laitier, qui ont demandé une compensation en argent, les gens de ces secteurs demandent une compensation sous forme de programmes d'innovation et de modernisation des infrastructures. Ils demandent aussi d'avoir la possibilité de faire une campagne de promotion et de mise en marché et d'avoir un soutien financier à cette fin. Cela varie d'un secteur à l'autre; j'ai nommé les quatre tantôt.
Je pose une question à la Chambre: est-ce que le gouvernement du Canada est le mieux placé pour savoir exactement quels sont les besoins de chacun de ces secteurs? Ne devrait-on pas plutôt donner le droit aux gens de ces secteurs d'exprimer ce qu'ils veulent, leurs besoins et ce qui, selon eux, va assurer la pérennité et la compétitivité de leurs industries? Je pense que poser la question, c'est y répondre: selon moi, c'est aux gens de ces secteurs de décider.
Les gens de ces secteurs ne comprennent pas. Le Bloc québécois ne comprend pas pourquoi cela ne débouche sur rien. Le budget sera déposé bientôt. Nous aimerions voir des chiffres. Nous demandons à voir des chiffres à ce sujet. Nous voulons que ce soit chiffré. On nous a promis des compensations pour l'ensemble des secteurs sous gestion de l'offre. Le fait de régler la question avec les producteurs laitiers, c'est bien, mais le secteur laitier n'est qu'un des cinq secteurs sous gestion de l'offre. Il en manque donc quatre. Nous voulons des réponses qui respectent les gens de ces secteurs, qui équivaudront aux pertes subies et qui seront bien sûr équivalentes à ce qu'ont reçu les producteurs laitiers.
Pendant ces questions et commentaires, j'aimerais que des gens du Parti libéral me disent où nous en sommes dans ce dossier, parce qu'il y a des gens qui sont un peu angoissés, qui attendent et qui ont des craintes. Hier, je rencontrais justement des représentants de ces industries en compagnie de mon distingué collègue de Joliette. Nous voulons des réponses. Alors, aujourd'hui, je demande des réponses.
Quand on aura obtenu ces compensations, il faudra réfléchir collectivement à l'importance de ces productions sous gestion de l'offre pour l'économie, pour nos campagnes et pour l'occupation dynamique du territoire. Il faut comprendre les répercussions directes qu'ont ces fermes en matière de gestion de l'offre, c'est-à-dire dans un marché protégé qui permet d'avoir un produit de qualité, un revenu stable et une sécurité alimentaire. Il faut aussi en comprendre les répercussions secondaires: des industries fournissent des marchandises à ces gens.
Des représentants de ces secteurs sous gestion de l'offre m'ont dit quelque chose que j'ai aimé et que je vais donc répéter. Ils m'ont dit qu'on les trouve privilégiés, mais qu'en fait, ils paient indirectement le loyer des vendeurs et des acheteurs avec lesquels ils font affaire et qu'ils apportent une stabilité à l'économie, une stabilité qui est aussi alimentaire, une sécurité alimentaire.
On a déjà commencé à laisser aller le système. J'espère que personne à la Chambre ne va oser me dire que le marché canadien est protégé. En effet, après la mise en œuvre de l'Accord, c'est 18 % du marché qui aura été consenti aux producteurs d'autres pays. Si c'est cela, un marché fermé, j'aimerais savoir ce qu'est un marché ouvert. Je pense que les secteurs sous gestion de l'offre ont fourni leur juste part et qu'il est grandement temps de les protéger au moyen d'une loi.
Nous sommes contents des promesses du gouvernement. Ce dernier nous assure qu'il ne cédera pas et qu'il sera très vigilant dans le cadre du Brexit et du Mercosur. Pourtant, on nous a déjà fait des promesses semblables dans le passé. C'est dommage, mais la confiance diminue quand l'autre renie sa parole: les années suivantes, on demande donc plus de garanties. On demande à ceux qui ont fait des promesses verbales, mais qui ne les ont pas tenues, de mettre leurs promesses par écrit sur un papier et de le signer. On pourra par la suite ressortir ce papier. Dans le cas présent, ce papier, c'est le projet de loi que mon collègue et moi avons déposé pour protéger la gestion de l'offre.