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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 31 octobre 2001

• 1933

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.)): Bonsoir et bienvenue à cette séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

[Traduction]

Bienvenue à cette séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

[Français]

Ce soir, nous continuons l'étude du projet de loi C-15B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

[Traduction]

Parmi les témoins de ce soir, nous accueillons

[Français]

l'Association canadienne des médecins vétérinaires, représentée par le Dr Michael Barr et et la Dre Alice Crook. Soyez les bienvenus.

Nous avons aussi

[Traduction]

Liz White et Anna Louise Richardson, de la Animal Alliance of Canada.

[Français]

Nous avons l'Association des universités et collèges du Canada, représentée par M. Robert Giroux, son président,

[Traduction]

et M. Andrew Tasker, doyen associé, Études supérieures et professeur en recherche.

[Français]

Chiens de chasse Québec est représenté par M. Richard Couture, qui en est le président, et Gaston Lemay, le directeur à la recherche et aux renseignements.

Nous allons procéder de la façon suivante. Je vais demander à chacun des intervenants de faire un exposé de cinq minutes, et ensuite nous allons passer à une période de questions de la part des députés membres de notre comité permanent.

On pourrait commencer immédiatement avec l'Association canadienne des médecins vétérinaires. J'invite le Dr Michael Barr a prendre la parole.

M. Michael Barr (président, Association canadienne des médecins vétérinaires): Bonsoir, monsieur le président et membres du comité.

• 1935

[Traduction]

Bonsoir, monsieur le président. Je suis vétérinaire à Antigonish, en Nouvelle-Écosse, et j'ai le plaisir de m'adresser à vous ce soir au nom de l'Association canadienne des médecins vétérinaires, qui regroupe plus de 8 000 vétérinaires de tout le pays.

L'une des premières priorités de l'ACMV est de continuer à faire la promotion du bien-être des animaux. En s'appuyant sur des données scientifiques, l'ACMV a beaucoup contribué à l'adoption de politiques pour les propriétaires d'animaux, les éleveurs et les industries. Au cours des années, elle a pris, au sujet du bien-être des animaux, diverses positions qui sont souvent devenues des positions de référence à l'échelle nationale.

[Français]

L'association a un comité sur le bien-être des animaux qui est très dynamique. Il se compose de vétérinaires et d'individus représentant d'importants organismes nationaux, notamment la Fédération des sociétés canadiennes d'assistance aux animaux, le Conseil canadien de protection des animaux et l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

[Traduction]

L'ACMV appuie le projet de loi C-15B.

Je suis accompagné ce soir de la Dre Alice Crook, présidente du Comité du bien-être des animaux de l'Association et coordonnatrice du Sir James Dunn Animal Welfare Centre, du Collège vétérinaire de l'Atlantique, de l'Université de l'Île-du-Prince- Édouard.

Je vais maintenant demander à Mme Crook d'exposer notre position.

Mme Alice Crook (présidente, Animal Welfare Committee, Association canadienne des médecins vétérinaires): Bonsoir, monsieur le président.

Nous nous adressons à vous aujourd'hui pour exprimer l'appui de l'Association aux propositions de modification du Code criminel concernant la protection des animaux, notamment à la partie V.1 du projet de loi C-15B, intitulée «Cruauté envers les animaux».

Comme beaucoup d'autres groupes, l'ACMV a contribué à la rédaction du projet de loi C-15 par le truchement du «Document de consultation sur les crimes envers les animaux», distribué par le ministère de la Justice en septembre 1998. Nous pensons que les modifications proposées répondent de manière satisfaisante aux préoccupations soulevées dans le cadre du document de consultation au sujet des dispositions actuelles du Code criminel.

Les vétérinaires occupent une place particulière dans la mesure où ce sont souvent les premiers professionnels amenés à examiner les animaux ayant fait l'objet de cruauté. L'une de nos responsabilités consiste à protéger ces patients contre tout autre risque d'abus. Une loi plus efficace nous aiderait à atteindre cet objectif. Elle permettrait aussi à d'autres parties de lutter contre la cruauté envers les animaux, notamment les organismes d'exécution des lois et les sociétés de protection des animaux.

Nous comprenons que les modifications répondent à deux objectifs fondamentaux: moderniser et regrouper les dispositions actuelles du Code criminel concernant la cruauté envers les animaux; et alourdir les peines maximums et prévoir de nouvelles peines pour rehausser l'efficacité de la loi.

Nous approuvons les principales modifications proposées dans le projet de loi C-15B pour atteindre ces objectifs. La position de notre Association repose sur notre interprétation des modifications et sur l'espoir qu'elles ne compromettront et ne criminaliseront pas des pratiques acceptées en matière de traitement ou d'utilisation des animaux, notamment pour des activités comme la chasse, le piégeage, la pêche ou l'exercice de la médecine vétérinaire, ou pour toute activité réglementée ou autorisée en vertu des lois fédérales ou provinciales ou des codes de pratique pertinents. Nous convenons que la notion d'excuse légitime est inhérente au Code criminel et reste un mécanisme de protection pour l'utilisation légitime des animaux conformément à ces normes largement acceptées.

En ce qui concerne l'utilisation des animaux pour la recherche, l'enseignement ou les essais, l'ACMV recommande qu'on modifie le projet de loi pour y ajouter des dispositions qui permettront au gouverneur en conseil de promulguer des règlements. Afin de faciliter l'interprétation du projet de loi, ces règlements devraient entériner les lignes directrices établies par le Conseil canadien de protection des animaux.

L'ACMV appuie les principales modifications proposées au projet de loi C-15B.

Premièrement, nous comprenons qu'un élément crucial du projet de loi consiste à transférer dans un nouvel article du Code criminel les dispositions de protection des animaux qui se trouvent actuellement dans la partie des infractions contre les biens. Ce transfert correspond à la tendance actuelle de notre société à entériner le rôle important que jouent les animaux dans notre vie, à titre de compagnons, d'assistants et, bien souvent, de membres aimés de la famille. En tant que vétérinaires, nous sommes constamment témoins du lien puissant qui existe entre l'homme et l'animal. Et nous savons bien que cette relation est souvent beaucoup plus forte que la valeur monétaire pouvant être attribuée à l'animal.

L'ACMV estime que tous les animaux devraient être protégés contre les risques de cruauté, quel que soit leur statut du point de vue de la propriété. La raison pour laquelle cette protection est nécessaire est que tous les animaux et tous les oiseaux sont sensibles à la douleur et à la peur et ont une aversion de la douleur.

L'ACMV estime que traiter les infractions contre les animaux comme des infractions contre les biens a débouché sur des sanctions inadéquates et sur un manque de dissuasion à l'égard des auteurs d'actes cruels.

Selon les statistiques de la Fédération canadienne des sociétés de protection des animaux, moins d'un tiers de 1 p. 100 de toutes les plaintes pour cruauté contre des animaux aboutissent à des poursuites. De ce nombre, moins de la moitié aboutissent à des poursuites couronnées de succès et, parmi celles-ci, on ne trouve quasiment jamais d'imposition d'une peine maximum.

• 1940

Deuxièmement, l'ACMV appuie l'alourdissement notable des peines prévues en cas de cruauté envers les animaux. La création d'infractions hybrides donne aux pouvoirs publics la souplesse et la latitude nécessaire pour sanctionner adéquatement les circonstances les plus graves. L'évolution vers un alourdissement des peines peut être constatée dans toute l'Amérique du Nord. Aux États-Unis, 27 États ont fait de la cruauté envers les animaux une infraction passible de sanctions pénales.

Troisièmement, l'ACMV appuie la modification destinée à accroître la période de temps durant laquelle un délinquant se verrait interdire de posséder un animal.

Quatrièmement, l'ACMV appuie la modification visant à donner aux juges le pouvoir d'ordonner à quiconque est condamné pour cruauté envers les animaux de payer des indemnités pour couvrir les factures de vétérinaire et autres assumées par la personne ou l'organisme qui s'est occupé de l'animal maltraité.

Finalement, l'ACMV appuie l'intégration dans le Code criminel d'une définition du mot «animal». Nous pensons que la définition pourrait être mieux formulée, par exemple en disant «un vertébré, autre qu'un être humain, ou un invertébré sensible à la douleur». Cela dit, nous approuvons le principe consistant à reconnaître en droit que les animaux sont des êtres qui ressentent des choses.

Nous pensons que ces modifications permettront d'infliger des peines plus lourdes et plus adéquates dans les cas de cruauté envers des animaux, ce qui devrait avoir un effet dissuasif plus marqué.

Je voudrais parler également de la cruauté envers les animaux dans le cadre plus général de la violence au sein de notre société.

Les organismes de protection des animaux, les organismes d'exécution des lois, les organismes d'intervention dans les affaires de violence familiale et les organismes de protection des enfants sont de plus en plus convaincus qu'il existe un lien incontestable entre la violence envers les animaux et la violence envers les personnes. De nombreux chercheurs ont examiné ce phénomène et ont confirmé que la violence envers les animaux est à la fois un élément et un symptôme de la violence envers les enfants, le conjoint ou les personnes âgées, et aussi un indicateur de potentiel de violence accrue et de dangerosité.

Les vétérinaires sont souvent les premiers professionnels à examiner les animaux maltraités. À la fois pour protéger ces animaux et parce que cette forme de violence pourrait être le signal d'autres formes de violence, à l'intérieur ou à l'extérieur de la famille, il est crucial que les vétérinaires puissent agir efficacement lorsqu'ils soupçonnent que les animaux sont maltraités. Les modifications proposées au Code criminel les aideront à cet égard, et nous espérons qu'elles contribueront à interrompre les cycles de violence humaine dont la cruauté envers les animaux n'est qu'un élément.

Dans le document qui est joint à mes notes et que nous avons remis au greffier, l'ACMV encourage les vétérinaires à dénoncer aux autorités pertinentes les cas de violence soupçonnée envers des animaux. Les associations provinciales de médecins vétérinaires ont modifié leurs règlements, au cours des 10 dernières années, pour que ce type de dénonciation ne soit plus considéré comme un bris de confidentialité.

Bien que les lois provinciales sur la médecine vétérinaire autorisent les vétérinaires à dénoncer la cruauté, elles ne les protègent pas contre le risque d'accusations de la part de personnes estimant avoir été diffamées. Certains États, comme l'Idaho, la Virginie occidentale, l'Arizona et le Massachusetts, ont réglé ce problème en offrant aux vétérinaires une immunité contre le risque de poursuites pénales ou civiles pour diffamation. Par contre, ce genre d'immunité n'est pas encore offert aux vétérinaires du Canada.

L'ACMV recommande respectueusement à la ministre de la Justice d'envisager d'offrir une telle immunité aux vétérinaires, sous forme d'addition au pouvoir de droit pénal prévu dans ce projet de loi ou, sinon, d'exprimer son appui aux provinces pour les inviter à introduire de telles dispositions dans leurs propres lois de réglementation de la profession vétérinaire. Cela offrirait aux deux paliers de gouvernement une nouvelle occasion de collaborer sur des questions très importantes pour réprimer efficacement la cruauté envers les animaux.

Nous recommandons par ailleurs une modification à la définition de «négligence» du paragraphe 182.3.(2). L'ACMV recommande respectueusement que l'on ajoute l'expression «dans des circonstances similaires» après le mot «adopterait», de façon à préciser le critère de négligence pour tenir compte des différences qui existent au Canada dans la prestation des services vétérinaires. Ce paragraphe deviendrait donc:

    «par négligence» s'entend d'un comportement qui s'écarte de façon marquée du comportement normal qu'une personne prudente adopterait dans des circonstances similaires.

Notre dernière recommandation concerne l'intégration d'une autre division dans le projet de loi, de façon à séparer la partie V.1 concernant la cruauté envers les animaux de la partie du projet de loi concernant les armes à feu. L'ACMV estime qu'il est crucial que les dispositions relatives à la cruauté envers les animaux puissent être adoptées sans retard.

En conclusion, l'Association canadienne des médecins vétérinaires félicite le gouvernement fédéral d'avoir élaboré un projet de loi offrant une nouvelle protection importante aux animaux sans compromettre les pratiques reconnues et acceptées de traitement et d'utilisation des animaux.

Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Docteure Crook et docteur Barr, merci beaucoup de cet exposé.

• 1945

Je donne maintenant la parole à Liz White et Anna Louise Richardson, de la Animal Alliance of Canada.

Mme Liz White (directrice, Animal Alliance of Canada): Je m'appelle Liz White et je travaille pour un organisme national de protection des droits des animaux dans le but de protéger les animaux par la promotion, l'éducation et la politique. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici ce soir.

Nous avons effectué des études assez approfondies sur la cruauté envers les animaux, dans tout le pays, et nous avons examiné attentivement le projet de loi C-15B. Au nom de nos 20 000 partisans, nous recommandons vivement aux membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de renvoyer directement devant la Chambre les dispositions du projet de loi C-15B sur la cruauté envers les animaux, pour la troisième lecture, sans recommander d'amendements. Nous formulons cette recommandation après mûre réflexion.

Lorsque la Chambre était saisie du projet de loi C-17, nous avions adressé un certain nombre de préoccupations au Comité de la justice, dans le cadre du processus de consultation. Bon nombre des recommandations que nous avions formulées à l'époque ont été rejetées par la ministre mais celle-ci a intégré au projet de loi C-15B un certain nombre de modifications destinées à répondre aux préoccupations de l'industrie. Je pense que ce projet de loi va très loin dans cette voie.

Notre inquiétude ce soir, c'est que—même s'il y a des choses que nous aimerions modifier dans le projet de loi—si ces discussions ont lieu, d'autres changements seront adoptés. Or, nous craignons que cela n'affaiblisse encore plus le projet de loi. Nous estimons que celui-ci est déjà un document considérablement affaibli par rapport au C-17 et nous ne voudrions pas qu'il le fût encore plus.

Nous approuvons la définition du mot «animal». Je ne pense pas qu'elle soit parfaite mais elle est bonne. Elle a été formulée par l'organisme pertinent du gouvernement fédéral, le Conseil canadien de protection des animaux, vers lequel le gouvernement se tourne chaque fois qu'il a besoin d'avis sur ces questions. Je pense qu'on peut donc accepter cette définition.

Nous sommes absolument et fermement convaincus que le transfert des infractions dans un nouvel article—pour que les animaux soient envisagés différemment—est un élément absolument crucial de ce projet de loi et qu'il ne faut absolument pas y toucher. Dans les dispositions actuelles du projet de loi, les animaux ne sont pas différents des grille-pain ou des téléviseurs. Actuellement, quand un acte criminel est commis envers un animal, on considère c'est le propriétaire qui est la victime, pas l'animal lui-même. Avec la modification proposée, on pourra tenir compte vraiment du fait que l'infraction est commise contre l'animal. Cela entérine dans une certaine mesure l'idée que l'animal a un certain intérêt dans l'affaire, même s'il reste la propriété d'une personne.

Nous croyons qu'il y a assez de protections dans le Code criminel contre le risque de poursuites frivoles. Des expressions telles que «volontairement» et «sans nécessité» constituent des obstacles qu'il est très, très difficile de franchir si l'on doit s'adresser à un tribunal. On ne les trouve dans aucune autre partie du Code. Si quelqu'un commet un acte criminel contre une autre personne, la Couronne n'est absolument pas tenue de prouver que l'acte a été commis volontairement ou sans nécessité. Ces critères n'existent que dans les articles relatifs aux animaux et offrent toutes sortes de protections devant les tribunaux.

Nous croyons que l'expression «sans excuse légitime» ne devrait pas être ajoutée aux dispositions, que cette notion existe déjà de manière implicite dans le Code et que ces mots supplémentaires ne feront que donner aux juges le signal qu'une «excuse légitime» doit avoir encore plus de poids dans ce contexte que dans n'importe quel autre.

Ce projet de loi ne criminalise en rien les activités légales. Je pense que les industries qui utilisent les animaux, ceci dit sans vouloir offenser leurs représentants qui nous ont précédés devant ce comité, font tout simplement erreur à ce sujet. Tant que les gens agissent dans le respect de la loi et de codes de pratique conformes à la loi, cela ne peut pas être criminalisé.

Je vais être parfaitement claire car on va sans doute me poser la question: je n'aime pas du tout qu'on enlève le bec à un poulet ou les cornes à un animal, et je n'aime pas non plus qu'un animal soit marqué au fer. Il s'agit cependant là de questions de politique fondamentale. Ce ne sont pas des questions relevant du Code criminel. Ces activités sont jugées légales au Canada et personne ne peut intenter de poursuites à leur égard en invoquant le Code criminel. Certes, il s'agit d'activités dont nous devrions absolument discuter, mais ce n'est pas l'objet de la réunion de ce soir.

• 1950

La réunion de ce soir est consacrée à la question de savoir si l'on va modifier ce projet de loi pour décider que certaines activités sont inacceptables, qu'il faut les prendre au sérieux et que le gouvernement veut signaler aux tribunaux qu'ils doivent les prendre au sérieux.

Je vais faire une dernière remarque avant de donner la parole à Anna Louise Richardson. J'ai de très sérieuses réserves au sujet de la proposition visant à intégrer au Code criminel les normes du Conseil canadien de protection des animaux. Voici ma raison: cela aboutirait à fixer des normes qu'il serait très difficile d'améliorer puisqu'elles seraient dans le Code criminel. Cela aurait tendance à nous tirer vers le bas. Or, les provinces ayant adopté des lois dans ce domaine, comme l'Alberta, avec la Universities Act, et l'Ontario, avec sa Loi sur les animaux destinés à la recherche, pourraient fort bien vouloir adopter des normes plus élevées que celles du CCPA. Autrement dit, si l'on intègre les normes du CCPA dans le Code criminel, on risque d'empêcher tout progrès en ce qui concerne la recherche avec des animaux parce que ces normes ont tendance à être plus statiques lorsqu'elles sont associées à un texte de loi.

Merci.

Mme Anna Louise Richardson (associée, Animal Alliance of Canada): Bonsoir. Je m'appelle Anna Louise Richardson.

Je m'adresse à vous ce soir en ayant acquis beaucoup d'expérience sur le traitement des animaux. J'ai passé deux ans au Toronto Wildlife Rehabilitation Centre où j'ai eu à m'occuper d'animaux et j'ai reçu les appels téléphoniques de gens qui se plaignaient de la manière dont certains animaux étaient traités, notamment les animaux sauvages qui sont moins protégés que les chiens ou les chats. Le Toronto Wildlife Rehabilitation Centre reçoit 230 appels par jour. Pratiquement tous les animaux qui s'y trouvent y sont à cause d'un certain type d'intervention humaine. Je parle ici de mauvais traitements infligés aux animaux.

J'ai dû mettre à mort des écureuils qui avaient été poignardés, en plein centre de Toronto. J'ai vu des cygnes tués d'une balle dans la tête. À l'heure actuelle, il y a à Toronto quelqu'un qui pose des pièges à mâchoires; nous avons traité un raton laveur à trois pattes; deux jours plus tard, une mouffette à trois pattes, parce que ces animaux avaient coupé eux-mêmes leur quatrième patte avec leurs dents pour s'échapper de ces pièges. Nous voyons beaucoup de blessures causées par des fusils à plomb, surtout chez les écureuils. Apparemment, les adultes de Toronto apprennent à leurs enfants à tirer au fusil en s'entraînant sur des écureuils avec des fusils à plomb. Avec de telles blessures, ces animaux peuvent très facilement être paralysés. Il m'est arrivé de rester debout jusqu'à 4 heures du matin à retirer des vers de blessures causées par balles à des ratons laveurs et à d'autres animaux.

Comme je sais que les gens s'intéressent plus à des animaux moins rares que des écureuils ou des ratons laveurs, je tiens à vous signaler qu'il y a à Toronto un aigle royal qui a été atteint deux fois par des balles au cours des deux derniers mois. On l'a transporté directement à l'Université de Guelph où les vétérinaires ont fait beaucoup d'efforts pour le sauver mais sans succès. De même, toujours au cours des deux derniers mois, quelqu'un a abattu un cygne d'une balle dans la tête.

Nous savons que les Canadiens sont horrifiés par ce type de comportement. Cela ne correspond pas du tout au type de société que nous voulons.

Quand j'avais cinq ans, environ, Hugh Faulkner était venu dans notre salle à manger pour entamer sa longue marche vers Ottawa car nous habitions dans sa circonscription. Mes premiers souvenirs sont donc d'électeurs qui nous parlaient, sur le pas de leur porte, pour nous dire comment notre société devrait changer pour s'améliorer.

Il m'est extrêmement difficile de lire aujourd'hui et d'entendre les déclarations de représentants de l'industrie des animaux qui mentent sur ce que veulent et ce que sont les militants de protection des animaux. Écoutez, je suis une femme de paix. Je veux que cette violence cesse. C'est également ce que souhaitent les gens avec qui je travaille, qui ressemblent plus aux partisans de Gandhi qu'à qui que ce soit d'autre.

J'avais des photos de Trudeau sur tous mes murs. Quand j'étais jeune, ce n'était pas des vedettes de cinéma ou de la chanson qui étaient mes idoles, c'était Trudeau. Je crois beaucoup à notre régime politique et je vous demande de lui faire honneur. S'il vous plaît, adoptez ce projet de loi. Nous vous appuyons, le gouvernement libéral, pour que vous adoptiez rapidement ce projet de loi.

Merci beaucoup.

Mme Liz White: Je voudrais ajouter une chose: nous avons préparé un mémoire qui est à votre disposition. Je m'excuse car, comme nous avons été prévenues assez tard de cette comparution, nous n'avons pas eu le temps de le faire traduire. Finalement, nous avons apporté avec nous une photographie du type de piège à mâchoires que l'on a trouvé à Toronto. J'ai pensé que vous voudriez savoir de quoi il s'agit et je vous invite donc à faire circuler la photo parmi vous.

• 1955

Quelqu'un a construit ce piège et vous pouvez voir qu'il y a des pointes. Comme vous le diront les autres vétérinaires autour de cette table, ce piège ne tue pas un animal, à moins que celui-ci n'ait beaucoup de chance. Voilà le genre de problèmes auxquels nous devons faire face et, pour toute personne qui veut poser des pièges de ce genre, il y en a des milliers qui veulent l'interdire.

J'ai également apporté des statistiques des États-Unis et d'Angleterre sur le lien entre la cruauté envers les animaux et la violence humaine, ainsi qu'entre la cruauté envers les animaux et la violence conjugale, la cruauté envers les animaux et la violence envers les enfants. Le lien est direct et il faut y mettre fin. Tous les signes sont là. Beaucoup de criminels que nous finissons par envoyer en prison, ce qui nous coûte très cher, nous avaient donné dès l'enfance tous les signes qu'ils étaient parfaitement capables de commettre également ces crimes horribles contre des êtres humains. Je tiens ces informations à votre disposition. Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Je tiens à remercier les représentantes de l'Animal Alliance of Canada.

[Français]

Nous allons maintenant passer à l'Association des universités et collèges du Canada, à M. Robert Giroux, son président,

[Traduction]

et M. Andrew Tasker.

[Français]

Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux (président, Association des universités et collèges du Canada): Monsieur le président, merci à vous et aux membres du Comité permanent de la justice de nous donner l'occasion de commenter devant vous la partie du projet de loi C-15 B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

Je suis président de l'Association des universités et collèges du Canada. J'ai le plaisir de vous présenter mon collègue le Dr Andrew Tasker, vice-doyen des études supérieures et de la recherche au Atlantic Veterinary College de la University of Prince Edward Island. M. Tasker est également un des représentants de l'AUCC auprès du Conseil canadien de protection des animaux, le CCPA.

L'Association des universités et collèges du Canada est l'association nationale des universités et collèges universitaires publics et privés sans but lucratif du Canada. Nous représentons 93 membres ici et à l'étranger. Nous offrons un forum de discussion et un cadre d'action à l'échelle fédérale pour faciliter la formulation de la politique officielle sur l'enseignement supérieur. Nous encourageons aussi la coopération entre les universités et les partenaires avec lesquels nous avons des intérêts communs. L'AUCC est financée par les cotisations de ses membres, les recettes des publications et la gestion des contrats.

[Traduction]

Pour commencer, l'AUCC souhaite rendre hommage au travail effectué par le Conseil canadien de protection des animaux pour analyser l'effet que pourraient avoir les dispositions du projet de loi C-15B sur l'exécution de recherches éthiques avec des animaux.

Nous appuyons le témoignage du CCPA devant le comité, ainsi que les témoignages communs des Instituts canadiens de recherches sur la santé et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Les Canadiens attachent beaucoup d'importance à la recherche universitaire. En leur nom, le Parlement a fourni plus de 1 milliard de dollars, rien que cette année, aux IRSC et au CRSNG, et le gouvernement a réitéré son engagement en matière de recherche et d'innovation dans le discours du Trône de 2201.

Les Canadiens savent que la production et l'exploitation de nouvelles connaissances débouchent sur l'amélioration des soins de santé, sur l'innovation et sur des possibilités d'emploi dans l'économie globale du savoir. L'AUCC appuie sans réserve l'objectif de protection des animaux contre la négligence et la cruauté. Toutefois, nous craignons que le projet de loi C-15B n'entrave par inadvertance ce que les Canadiens considèrent comme un usage acceptable des animaux pour mener des recherches au profit des être humains et des autres animaux.

Notre association craint que le projet de loi n'expose ses institutions membres à des poursuites frivoles et injustifiées, ce qui pourrait entraîner des coûts élevés et nuire considérablement à la réputation d'institutions et de particuliers qui exécutent des recherches importantes auprès des animaux de manière foncièrement éthique et en respectant des lignes directrices rigoureuses.

L'AUCC pense que certaines parties du projet de loi C-15B ne sont pas assez claires pour protéger cette recherche. Des expressions comme «douleur, souffrance ou blessure sans nécessité», «sauvagement ou cruellement» et «omet de lui fournir les aliments, l'eau, l'air, l'abri et les soins convenables et suffisants» sont des expressions subjectives qui dépendent considérablement du contexte. Qu'est-ce qui est «sans nécessité»? Qu'est-ce qui est «brutal»? Qu'est-ce qui est «convenable»? Qu'est-ce qui est «suffisant»? Pour quelqu'un qui s'oppose fondamentalement à l'utilisation des animaux dans la recherche, tout cela peut avoir un sens très différent que pour quelqu'un qui appuie la recherche ou y participe.

Ces expressions ne sont pas définies dans le projet de loi. Leur interprétation et leur utilisation risquent de poser de graves problèmes et de causer des incohérences d'une province à l'autre.

• 2000

L'AUCC craint qu'une telle imprécision du projet de loi, si l'on n'y remédie pas, puisse être utilisée par une minorité de Canadiens qui s'opposent à toute utilisation d'animaux dans la recherche afin d'intenter des poursuites privées contre des institutions et des chercheurs qui mènent des recherches responsables, légitimes et éthiques.

De plus, le simple risque de poursuites frivoles ou injustifiées pourrait avoir un effet glacial sur une partie importante de la recherche universitaire financée par le gouvernement fédéral.

L'AUCC pense que la solution réside dans l'expression claire, dans la loi, que la norme de soins qu'une personne raisonnable devrait appliquer pourrait être satisfaite en respectant un programme d'évaluation rigoureux pour superviser l'utilisation éthique des animaux dans la recherche et l'enseignement. Ce programme se compose de lignes directrices, de politiques et de normes d'évaluation élaborées par le Conseil canadien de protection des animaux.

Monsieur le président, votre comité a déjà reçu des détails complets sur le programme d'évaluation du CCPA. Les principes d'éthique du CCPA en matière de recherche avec des animaux concernent l'utilisation des animaux dans la recherche, l'enseignement et les essais uniquement si cela promet de contribuer à la compréhension de principes biologiques fondamentaux ou à l'expansion de connaissances dont on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'elles soient bénéfiques aux êtres humains ou aux animaux. Les chercheurs sont censés utiliser les méthodes les plus humaines possible, sur le plus petit nombre possible d'animaux appropriés, pour trouver des informations valides.

Aujourd'hui, le programme d'évaluation du CCPA est le fruit de 33 années d'investissement d'expertise, de temps, d'énergie et d'argent par les universités, les conseils fédéraux de subventionnement, la Fédération canadienne des sociétés de protection des animaux, les organismes de recherche du gouvernement fédéral et le secteur privé. Toutes ces parties prenantes sont représentées au sein du Conseil et participent pleinement à ses délibérations et à l'élaboration de ses politiques et procédures.

Les normes du CCPA sont respectées par toutes les universités canadiennes, par tous les membres de l'AUCC qui mènent des recherches auprès d'animaux. De fait, le respect de ces normes est une exigence absolue du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et des Instituts de recherches sur la santé du Canada, qui appuient la grande majorité des projets de recherche financés par le gouvernement fédéral et entrepris dans nos universités.

Les universités elles-mêmes ont étendu l'application de cette exigence à toutes leurs recherches auprès des animaux, quelle que soit la source de financement. La norme du CCPA jouit d'une telle réputation au Canada et à l'échelle internationale que les services de recherche fédéraux et les sociétés et laboratoires du secteur privé qui mènent des recherches auprès des animaux ont décidé qu'il est dans leur meilleur intérêt de participer volontairement au programme d'évaluation. Et d'autres pays se sont inspirés du programme du CCPA.

Soyons clairs: nous ne demandons pas d'exemption à l'égard de ce projet de loi. Je répète, monsieur le président, que l'AUCC appuie sans réserve les mesures visant à protéger tous les animaux contre la négligence et la cruauté intentionnelle. Par contre, nous pensons qu'il existe dans le domaine de la recherche auprès des animaux des normes rigoureuses qui ont déjà fait leurs preuves.

Nous recommandons que le projet de loi soit modifié pour prévoir l'adoption de textes réglementaires faisant référence au programme d'évaluation du CCPA et destinés à guider ceux qui auront pour fonction d'appliquer la loi—pour déterminer si les normes requises ont été respectées, si des accusations devraient être portées ou si des poursuites devraient être intentées.

[Français]

Je vous remercie donc encore une fois, monsieur le président, de nous avoir donné l'occasion de vous communiquer les vues de l'AUCC au nom de ses établissements membres. Monsieur Tasker et moi serons prêts à répondre à vos questions et à celles des membres du comité.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, monsieur Giroux, de votre présentation au nom de l'Association des universités et collèges du Canada.

Les prochains intervenants sont, de Chiens de chasse Québec, messieurs Richard Couture et Gaston Lemay.

Monsieur Couture.

M. Richard Couture (président, Chiens de chasse Québec): Je remercie le comité de nous avoir invités à exposer notre point de vue sur le projet de loi C-15B et sur l'utilisation des chiens à la chasse.

Chiens de chasse Québec est un organisme sans but lucratif qui veut faire la promotion du chien de chasse et aussi faire l'éducation de l'éthique des chasseurs de façon à utiliser ces chiens dans un cadre assez normal, si on peut dire.

• 2005

Il nous apparaît évident, à la lecture de ce projet de loi, que ceux qui en ont fait la conception ne pratiquent pas la chasse au sens large, et plus précisément la chasse avec utilisation du chien de chasse, bien que de nombreux articles dans la presse cynégétique en fassent la promotion depuis des décennies.

À juste titre, nous croyons et appuyons la nécessité d'améliorer la législation actuelle en matière de cruauté envers les animaux, car nous défendons les mêmes valeurs dans nos activités, que ce soit à l'entraînement ou dans les concours en Europe et en Amérique.

D'ailleurs, un chien soumis à la cruauté ne peut être entraîné à la chasse et exercer ses qualités naturelles. Les exigences de l'entraînement nécessitent et obligent les propriétaires à prodiguer les meilleurs soins à leurs bêtes et, pour plusieurs races dont le tempérament est sensible, à assurer un environnement stable et sans contraintes excessives.

Au-delà de ces considérations, l'exercice du droit de chasse est indéniable, et l'utilisation du chien de chasse fait partie intégrante des us et coutumes de la chasse au Québec et ailleurs dans le monde. Nous ne pouvons passer sous silence l'absence formelle de ce fait dans le texte du projet de loi en tant qu'admission à l'exclusion en regard des activités normales de cette pratique.

De plus, les exigences réglementaires auxquelles un chasseur doit se conformer pour exercer son droit de chasse—permis de possession d'arme à feu et autres— contiennent déjà des notions intrinsèques de respect de la faune et sont incluses dans les cours de formation obligatoires. Malgré le respect de ces règles, un chasseur ne pourrait invoquer l'apparence de droit pour sa défense lors d'une accusation portée contre lui en vertu des nouvelles dispositions du Code criminel.

Plusieurs termes utilisés dans ce projet de loi ouvrent à une large interprétation, car il y a absence de définitions. En effet, la chasse est-elle une nécessité, hormis pour les peuples autochtones, qui donne le droit de tuer un animal ou une excuse légitime permettant de se soustraire à celle-ci? Nous devrons laisser aux juges et aux procureurs de la Couronne le soin de déterminer ce qu'est un acte brutal, cruel ou légitimement excusable.

Certains articles interpellent directement les utilisateurs de chiens de chasse, les éleveurs, les dresseurs professionnels, les clubs ou associations de chiens de chasse, les pourvoyeurs et même les vétérinaires qui doivent utiliser des oiseaux d'élevage pour l'entraînement et les concours de chasse pratique. Encore une fois, la méconnaissance des activités nécessaires au maintien et au développement cynégétique des qualités naturelles de nos chiens est démontrée par la présence de ces articles sans exclusions reconnues.

L'article 182.1 proposé dans la définition d'animal admet l'inclusion de tout animal sans distinction pour le gibier sauvage prélevé par l'exercice du droit à la chasse. Donc, tout chasseur, avec ou sans chien, est exposé à des poursuites légales.

Je pense que c'est un point important. Il faudrait peut-être arriver à donner une définition plus exacte que la courte définition qui existe dans le projet de loi.

L'alinéa 182.2(1)a) proposé utilise les termes «sans nécessité» lorsqu'une blessure, de la souffrance ou de la douleur est causée à un animal. Bien que la chasse soit pratiquée dans l'ensemble du Canada, n'en demeure-t-elle pas moins une nécessité, même pour les peuples autochtones? Le fait de retrouver sur le marché alimentaire l'essentiel de la nourriture rend-t-il nécessaire le fait de chasser ou de tuer des animaux? Voilà le résultat de l'absence d'interprétation qui conduira à des débats houleux et onéreux pour la société.

L'alinéa 182.2(1)b) proposé fait allusion à une mort cruelle, qu'elle soit immédiate ou non. Pour un chasseur avec chien ayant blessé au tir un gibier et dont le chien rapporte l'animal blessé à son maître qui met alors fin à la vie de l'animal, cela peut permettre une mise en accusation en vertu dudit article. Pourtant, cette situation est fréquente, et l'utilisation du chien permet de retrouver le gibier blessé dans un contexte de conservation de la faune, car le petit gibier blessé est difficilement retrouvable sans chien de chasse.

L'alinéa 182.2(1)c) proposé est sans contredit celui qui confronte l'indéniable apparence du droit de pratiquer la chasse comme excuse légitime à l'acte de tuer un animal. En effet, la partie V de la présente loi ne permet pas la défense basée sur l'apparence de droit puisque ce type de défense n'existe pas dans les types de crimes visés dans le chapitre sur les infractions d'ordre sexuel et contraires aux bonnes moeurs dans lequel, maintenant, l'ancien article a passé. Cela change totalement la vision des choses. Cela fait qu'un chasseur pourrait être accusé sans droit de défense.

Les alinéas 182.2(1)g) et 182.2(1)h) proposés visent directement les utilisateurs de chiens de chasse: chasseurs; éleveurs; dresseurs; clubs; associations qui, dans l'entraînement, épreuves ou concours, utilisent des animaux d'élevage pour améliorer les qualités de leurs chiens sans intention d'agir avec cruauté envers les animaux, mais plutôt afin d'assurer une pratique de la chasse dans un esprit de conservation de la faune.

Je vais laisser mon collègue poursuivre.

M. Gaston Lemay (directeur à la recherche et aux renseignements, Chiens de chasse Québec): L'argumentation.

Au Québec, près de 15 p. 100 des 403 000 chasseurs sont accompagnés d'un chien de chasse, notamment pour la chasse au petit gibier ou pour les oiseaux migrateurs sous juridiction fédérale. Cela représente des retombées économiques importantes pour les différentes régions du Québec et pour les différents paliers de gouvernement.

Mais plus important encore, la tradition de la chasse avec chien est axée essentiellement sur un esprit de conservation de la faune, et les chasseurs utilisant ce moyen en sont les plus grands porte-parole. Qui plus est, nombreux sont ceux qui participent à des études d'inventaire des populations du gibier sauvage ou migrateur, où l'utilisation du chien s'avère essentielle. Cette utilisation est reconnue et privilégiée par les différents responsables des services gouvernementaux, ce qui témoigne d'un sens des responsabilités envers la faune.

• 2010

Le but ultime de ce projet modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux) qui est présenté dans ce projet de loi omnibus ne peut être contesté dans ses fondements de par les revendications des organismes défenseurs des droits des animaux. Mais un tel projet ne peut brimer les droits historiques et les traditions des citoyens exerçant des activités telles que la chasse, avec ou sans chien, sans toutefois se soustraire aux obligations de bonnes moeurs et de respect de la vie animale.

L'impact du projet de loi, tel que présenté dans sa forme actuelle, est dévastateur pour la pratique de la chasse et l'utilisation des chiens de chasse. Ce projet ne fera qu'animer des débats de confrontation entre les citoyens, et l'interprétation de son application entraînera de lourdes dépenses. Nous ne pouvons nous permettre de laisser apparaître et perdurer de telles situations à notre époque. La reconnaissance de l'existence des droits et pratiques relatifs à la chasse qui ont cours dans notre société doivent, à prime abord, être pris en compte dans le texte du projet de loi, le législateur démontrant ainsi sa volonté de reconnaître et de protéger ceux-ci.

Les lois et règlements fédéraux et provinciaux en matière de chasse prévoient des mesures d'interdiction et d'infraction à l'égard des pratiques de chasse qui, dans un esprit de conservation et de respect de la faune, protègent les animaux des actes abusifs ou cruels à leur endroit. Le prélèvement faunique a fait et fera toujours partie de l'activité humaine d'une société, même avec des moyens de contrôle de plus en plus exigeants.

Le ministre de la Justice et le Parlement canadien tout entier ne peuvent pas ignorer et encore moins négliger l'importance et la pérennité des droits fondamentaux des chasseurs, pêcheurs et trappeurs. Ceux-ci ne font certes pas preuve de plus de cruauté, sinon moins, envers l'espèce animale que n'en montre souvent l'être humain envers lui-même.

Voici nos recommandations. Compte tenu de l'énoncé actuel du projet de loi C-15B, il nous apparaît évident que des modifications et amendements très importants doivent y être apportés dans l'intérêt des chasseurs et des utilisateurs de chiens de chasse du Québec.

Premièrement, en préambule ou en domaine d'exclusion, on doit reconnaître officiellement que la chasse fait partie du patrimoine canadien et que la pratique normale et reconnue de cette activité ne peut être soumise au présent projet de loi.

Deuxièmement, au chapitre des infractions, à la partie V.I, aux articles 182.2 et suivants proposés, on doit exclure toutes les activités reliées à la pratique effective de la chasse, incluant la chasse avec chien, les activités d'entraînement et de dressage des chiens de chasse organisées par les différents organismes associés au domaine du chien de chasse, et toute autre activité réalisée dans le cadre normal du développement des différentes races de chiens de chasse.

Voilà l'esprit que les utilisateurs de chiens de chasse du Québec, dûment représentés par l'organisme Chiens de chasse du Québec, considèrent comme étant essentiel dans les modifications majeures à apporter au présent projet de loi sur la cruauté envers les animaux inclus dans le projet de loi omnibus C-15B afin de préserver et respecter nos droits légitimes et patrimoniaux, tout en conciliant les droits de tous les autres animaux visés par ledit projet.

En clair, nous demandons que tout ce qui a déjà été sanctionné ou réglementé dans la législation antérieure le demeure par la suite et que cette indication apparaisse dans le projet de loi C-15B, afin que toute interprétation malencontreuse ne fasse pas l'objet d'une éventuelle jurisprudence. Merci beaucoup.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, monsieur Couture et monsieur Lemay, pour votre présentation au nom de Chiens de chasse du Québec.

J'aimerais faire un petit commentaire. La chasse ouvre officiellement à minuit ce soir au Québec, et nous allons tenter d'ajourner avant ce début officiel.

• 2015

Nous allons maintenant procéder à une période de questions et réponses. Les règles suivantes s'appliquent. Chaque parti politique a sept minutes, et cela comprend la question et la réponse. Ensuite, au deuxième tour, nous aurons trois minutes. Nous allons commencer immédiatement.

[Traduction]

Je demande à M. Vic Toews de poser la première question.

M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

M. Couture et M. Lemay, je ne sais pas si le thème de notre discussion vous paraît purement théorique ou non. En effet, si ce projet de loi est adopté, nous ne discuterons plus de la question de savoir si l'utilisation de chiens pour aller chasser est effectivement une pratique cruelle.

À mon sens, ce projet de loi vise à détruire non seulement l'industrie de la production alimentaire d'origine animale mais aussi le secteur de la chasse. Nous avons déjà eu le projet de loi C-68, le registre sur les armes à feu, qui représentait un effort d'un milliard de dollars du gouvernement fédéral pour enregistrer les fusils des chasseurs de canards. Ce projet de loi, conjugué au projet C-68, va clairement détruire le gagne-pain de beaucoup de gens dans ma circonsription. Il représente en fait un nouveau clou dans le cercueil du gagne-pain des gens de ma circonscription—et ce n'est pas quelque chose que j'invente.

Mme Liz White, la directrice de la Animal Alliance, a déclaré publiquement qu'elle s'inquiète de voir que certaines personnes pensent que ce projet de loi est l'aboutissement alors que, pour elle, ce n'est qu'un début. Ce qu'il y a dans le projet de loi importe peu si personne ne s'en sert, si personne n'intente de poursuites, si personne ne le met à l'épreuve. Le défi qui est lancé aux sociétés de protection des animaux et aux autres groupes de première ligne est de pousser ce projet de loi à sa limite, de mettre ses paramètres à l'épreuve et d'avoir le courage et la conviction nécessaires pour porter des accusations. Voilà de quoi il s'agit, et que personne ne s'y trompe.

Soyons donc clairs: les groupes des droits des animaux ont des objectifs parfaitement clairs. Ils veulent faire cesser vos activités, ils veulent mettre mes électeurs à la ruine, ils veulent faire cesser la recherche médicale. Et c'est exactement ce que leur offre ce projet de loi qui est un pas dans cette voie.

Nous avons entendu aujourd'hui les vétérinaires et les membres de la Animal Alliance affirmer que ces lignes de défense qu'on laisse dans les dispositions relatives aux biens et qu'on ne transfère pas dans la nouvelle partie sont implicites dans la loi. Que voilà un concept intéressant! J'ai été procureur et je n'ai jamais entendu parler de ces lignes de défense implicites du Code criminel. Je sais qu'il existe certaines lignes de défense constitutionnelles mais ce n'est pas de cela que nous parlons.

Nous avons donc ici une tentative évidente de destruction de ce que vous croyez important. Si ces lignes de défense sont implicites et si ce projet de loi ne change rien, pourquoi ont-ils tellement peur de les énoncer explicitement dans la loi afin de protéger des organisations et des groupes comme le vôtre, comme les chercheurs en médecine, ou comme les éleveurs de ma circonscription dont l'entreprise sera détruite par des groupes radicaux de protection des droits des animaux dont l'objectif ultime est de détruire leur gagne-pain? Pourquoi cela? Parce qu'ils ont des objectifs secrets dont Liz White et d'autres nous ont parlé.

Je ne sais pas si vous avez quelque chose à dire à ce sujet mais je serais très heureux de connaître vos réactions.

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Monsieur Lemay.

M. Gaston Lemay: Effectivement, c'est pour cela que je suis parti de Rimouski ce matin pour venir ici aujourd'hui. Ce n'est pas par plaisir, à part celui de vous rencontrer et de rencontrer le comité.

Je suis biologiste de profession, et mon confrère l'est aussi, et nous avons travaillé toute notre vie, pendant 42, 43 et 44 ans, pour la protection de notre faune sauvage, peu importe les catégories. Un biologiste croit en la faune. Je vais vous dire quelque chose qui peut sembler un peu ridicule.

• 2020

J'ai souvent fait la comparaison suivante devant les associations de chasse et de pêche. Devant une maison neuve qu'on vient de construire, on décide de faire pousser du gazon parce que madame est fatiguée de voir les enfants entrer de la vase dans la maison. On fait venir de la terre, on sème du gazon et on s'organise pour avoir une belle pelouse. Le gazon pousse, mais on a dépensé tellement d'argent et on a tellement travaillé qu'on ne le coupe pas. Le propriétaire n'aura jamais, au grand jamais, un bon champ de foin, et il n'aura jamais une belle pelouse.

Notre rôle à nous est d'exploiter la faune, comme un agronome peut dire qu'il faut couper au mois de juillet à telle hauteur et ainsi de suite. C'est ça, notre rôle. Il ne s'agit plus seulement de satisfaire nos besoins en nourriture, parce que ce n'est plus le cas aujourd'hui, mais on travaille à satisfaire les besoins de la faune elle-même.

Nous arrivons aujourd'hui après nous être battus pendant des années pour ne pas perdre de gibier. On dit qu'on va utiliser les chiens. Tous les chasseurs devraient avoir un chien de chasse. Je ne vous parle pas des cervidés, mais on se sert des chiens pour retrouver les animaux qu'on ne retrouverait pas si on n'avait pas de chien. Si vous envoyez un pigeon en dehors d'une cage, vous stressez le pigeon qui est dans le fond de la cage. Je vous parle là d'une interprétation.

Si le gouvernement fédéral est là pour protéger l'ensemble des citoyens, il doit protéger nos droits, notre patrimoine et nos us et coutumes. C'est pour ça que nous nous sommes dérangés en pleine retraite pour venir vous dire qu'il faut continuer à utiliser les chiens, selon les règles établies par la société et les protecteurs de la faune.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, monsieur Lemay.

Un court commentaire, madame White.

[Traduction]

Mme Liz White: J'aimerais remercier M....

M. Vic Toews: Veuillez m'excuser, monsieur le président, ce sont mes sept minutes.

Si cela ne vous dérange pas, je choisis moi-même à qui je pose mes questions.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Il vous reste 15 secondes.

M. Vic Toews: Merci.

Monsieur Couture, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Français]

M. Richard Couture: Oui, j'ai un commentaire à faire. En fait, on ne demande pas grand-chose. On demande deux trucs: de stipuler dans la loi qu'il y a des animaux d'élevage et qu'il y a du gibier. La loi telle qu'elle est rédigée actuellement ne fait pas la différence. C'est ce qui fait que nous pouvons être accusés de cruauté envers les animaux si on chasse. C'est sûr que la mort n'est pas toujours instantanée, mais ça fait partie du patrimoine et ça fait aussi partie du contrôle des populations animales. Nous voudrions qu'on dise dans la loi que les dispositions sur les activités reliées à la chasse, à la trappe et aux recherches vétérinaires demeurent les mêmes que dans l'ancienne loi.

Quand une loi n'est pas assez claire, il y a toujours des esprits tordus. Il y en a partout, et c'est ceux-là qu'il faut craindre. S'ils veulent interdire la chasse, qu'ils s'organisent pour que le gouvernement fasse adopter une loi en ce sens, et on en discutera. Ils ne doivent pas passer par des chemins détournés. Ça, c'est hypocrite.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, monsieur Couture.

Nous allons maintenant passer au deuxième intervenant. Monsieur Lanctôt.

M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, monsieur le président. Je remercie chacun des témoins ici présents aujourd'hui.

Ça fait déjà plusieurs témoins qu'on entend et on essaie de circonscrire ce débat. Pour ma part, je crois que ça semble se faire de plus en plus. Mes questions s'adressent au groupe Animal Alliance of Canada.

Selon ce que j'en comprends, le but premier de ce projet de loi était de protéger les animaux contre la cruauté. En étudiant ce projet de loi, on se rend compte que le but ultime, et je pense que tout le monde s'entend là-dessus, est de protéger les animaux contre la cruauté. Je pense que là n'est pas la question.

Dans un projet de loi comme celui qu'on a devant nous, tel que rédigé, selon plusieurs témoignages, que ce soit d'agriculteurs, de chasseurs ou de trappeurs, il semble y avoir l'indication suivante: ils perdent des droits parce qu'ils ont moins de défenses possibles. Quand on prend la partie XI du Code criminel et qu'on crée une nouvelle partie V.I, des défenses se perdent, et des gens, semble-t-il, peuvent perdre des droits parce qu'ils perdent une défense avec l'article 429.(2), je crois, ou quelque chose comme ça.

• 2025

Le problème est le suivant. Il y a des groupes qui tirent la couverture du côté blanc et il y en a d'autres qui la tirent du côté noir. Je me demande s'il n'y a pas un terrain d'entente possible. Selon moi, il y en a un: on doit protéger les animaux contre la cruauté.

Comment peut-on atteindre ce but? Est-ce en faisant des changements à la loi? Est-ce qu'on manque de ressources ou même d'actes d'accusation à porter, comme disait M. Toews? Quel est le but ultime que vous visez? Pourquoi ne pas permettre que les défenses que vous dites implicites—moi, je ne vois pas qu'elles pourraient être implicites—soient mentionnées? À ce moment-là, je pense que chacun des groupes pourrait avoir un gain.

[Traduction]

Mme Liz White: En ce qui concerne les éléments explicites, il s'agit probablement de la question de «l'excuse légitime». En discutant de cette question avec des avocats du ministère de la Justice et des avocats de la défense comme Clayton Ruby ou Frank Addario, qui vont devant les tribunaux pour traiter précisément de ces questions, j'ai appris que certains mots sont mis dans la loi pour des raisons particulières et que certains autres ne le sont pas pour d'autres raisons particulières.

Dans le Code criminel, «l'excuse légitime» est déjà implicite. Si vous dites qu'il faut ajouter cette expression dans cet article, vous envoyez un message particulier au juge. Vous lui dites: «Écoutez, nous voulons non seulement que vous fassiez attention au principe de l'excuse légitime qui s'applique à l'ensemble du Code, mais nous voulons aussi que vous prêtiez une attention particulière à l'argument de l'excuse légitime dans cet article particulier concernant la cruauté envers les animaux».

Voilà le problème. Cela veut dire non seulement qu'il faudra prouver que l'acte était délibéré—ce qui est très difficile à faire devant un tribunal et qui constitue une bonne ligne de défense contre des poursuites frivoles—et non seulement qu'il faudra prouver que ce qui a été fait était nécessaire ou ne l'était pas—vous avez ces deux arguments—mais vous devrez aussi franchir une norme distincte qui est plus élevée que dans le reste du Code, du point de vue de l'excuse légitime. J'affirme que cela rendrait à toutes fins pratiques le Code inutile pour quiconque souhaite intenter des poursuites de manière légitime. Les cas dans lesquels nous voulons intenter des poursuites sont ceux où un acte criminel a été commis.

Je sais que mes collègues de gauche qui font partie des collèges et des universités diront que cela va mettre fin à la recherche. C'est factuellement faux. Tout d'abord, le public ne peut même pas savoir ce qui se passe dans les laboratoires de recherche. En Ontario, la loi interdit à la Société de prévention de la cruauté envers les animaux d'aller dans les établissements de recherche, et c'est la même chose dans beaucoup d'autres provinces. Dites-moi donc, avec un comité de protection des animaux dont la majorité des membres sont des chercheurs et où il n'y a qu'un seul représentant de la communauté externe, qui va intenter des poursuites si le public ne peut même pas savoir ce qui se passer et si les SCPA ne peuvent aller vérifier?

Deuxièmement, au sujet de toutes ces activités, on ne peut pas criminaliser quelque chose qui est légal. La chasse, avec des chiens dans certaines circonstances, est une activité légale. Aucun procureur le moindrement sensé n'irait devant un tribunal avec une telle cause.

Nous nous sommes occupés du problème des chiens au Québec, ce qui est un excellent exemple. Il y a différents types de chiens. Ceux qui vont récupérer le gibier d'eau sont excellents parce qu'on ne veut pas abandonner du gibier d'eau blessé. Il y a donc des cas où nous appuyons le recours aux chiens. Nous n'aimons pas la chasse mais, si quelqu'un veut chasser le gibier d'eau, nous préférons que ce soit avec des chiens. Ce ne sont pas des chiens qui attaquent les animaux mais qui les retrouvent pour qu'on puisse les traiter sans cruauté.

Nous avons demandé au gouvernement d'interdire l'utilisation des chiens dans la chasse à l'ours. Le gouvernement a dit d'accord. Nous n'avons pas eu recours au Code criminel pour cela, nous avons utilisé le processus législatif.

• 2030

[Français]

M. Robert Lanctôt: Ce discours-là, je l'entends et je le réentends. Ce n'est pas ce que j'ai besoin de savoir. J'ai besoin de savoir quel est le but ultime de la loi. Même s'ils gardent leurs droits, ils vont être obligés de se protéger avec des défenses, existantes ou pas. Il y a plusieurs autres avocats, de même que plusieurs autres témoins, qui nous ont dit le contraire.

Je vous demande si le but ultime de ce projet de loi est d'enlever des droits et des défenses à des agriculteurs, à des chasseurs ou à des trappeurs, ou de protéger les animaux contre la cruauté. Quel est le but ultime, selon vous?

[Traduction]

Mme Liz White: À mon avis, le véritable objectif de ce projet de loi n'est pas du tout de s'attaquer à des activités qui sont parfaitement légales. Il s'agit de s'attaquer aux gens qui traînent un chien derrière leur camion, aux gens qui mettent un chat dans leur four à micro-ondes, aux gens qui attrapent une mouffette dans un piège et l'inondent d'eau bouillante, au fermier qui abandonne sa porcherie et laisse ses cochons mourir de faim. Il s'agit là d'exemples de cruauté absolue que l'on veut réprimer au moyen de ce projet de loi.

[Français]

M. Robert Lanctôt: Accepteriez-vous qu'on modifie ce projet de loi afin d'y inscrire clairement les trois défenses possibles? Accepteriez-vous un tel amendement au projet de loi?

[Traduction]

Mme Liz White: Si vous parlez de «délibérément», «sans nécessité» et «excuse légitime», ces expressions ont toujours été là. Elles sont dans la loi depuis 100 ans. Ce projet de loi n'est pas différent. Ces trois expressions font partie de cette loi...

[Français]

M. Robert Lanctôt: Oui ou non?

[Traduction]

Mme Liz White: ...depuis le début.

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, monsieur Lanctôt.

[Traduction]

Monsieur Bill Blaikie.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président.

J'ai assisté à plusieurs séances du comité pour écouter les témoins. Il serait bon—je ne sais pas si c'est possible—de trouver le moyen de rassurer diverses personnes de diverses catégories qui ont le sentiment qu'une conséquence secrète ou imprévue de ce projet de loi sera que certaines personnes feront l'objet de harcèlement illégal, qu'il s'agisse d'éleveurs, de chasseurs, de pêcheurs, de chercheurs ou d'autres. Nous avons ici un excellent projet de loi qui alourdit les peines et que nous attendons depuis trop longtemps déjà. Pour toutes les bonnes raisons que tant de personnes ont avancées, je ne voudrais pas qu'il soit menacé ou délégitimé à cause de cette peur de harcèlement à l'avenir.

Idéalement, ce que nous devrions faire si nous le pouvions—et c'est un gros si—c'est de trouver le moyen d'adopter ce projet de loi sous sa forme actuelle—et j'appuie le projet de loi mais, néanmoins... Je pense que le texte actuel ne met pas ces gens à l'aise. S'il y avait moyen de les rassurer, que ce soit par des amendements ou par une terminologie plus explicite à l'égard de la chasse, de la pêche et des autres activités qui ont leurs propres systèmes de réglementation, ou leurs propres régimes juridiques... Serait-il possible de modifier le projet—et je suppose que ma question s'adresse à Liz White—pour atteindre cet objectif sans mettre tout le projet en danger? Avez-vous réfléchi à cela?

Mme Liz White: C'est une excellente question. Je ne pense pas que l'on puisse apporter aujourd'hui au projet de loi d'autres modifications que celles qui ont été apportées au projet de loi C-17 sans en réduire considérablement l'efficacité. C'est ça qui m'inquiète.

Quand on parle de la chasse, du piégeage, de la pêche, de la recherche et d'autres activités, on risque de déboucher sur des exceptions pour des industries qui... Que ça nous plaise ou non, il y a des gens qui font preuve de cruauté envers les animaux dans ces industries—comme dans beaucoup d'autres cas. Je ne veux pas dire que tout le monde, dans l'industrie, fait preuve de cruauté envers les animaux. Je ne veux pas dire non plus que nous ne reconnaissons pas que certaines pratiques des industries, pratiques que nous estimons cruelles envers les animaux, quel que soit le critère adopté, soient acceptables pour une foule de raisons, par exemple, la recherche médicale. Deux des normes du CCPA concernent le fait d'infliger de la douleur et des souffrances inutiles, pendant des périodes prolongées, sans anesthésie. C'est là une pratique qui est légale et qui ne peut faire l'objet de poursuites en vertu de ce projet de loi.

• 2035

Tout ce que je vous demande, c'est de regarder les chiffres. Voyez ce qui se passe depuis 30 ou 40 ans. Voyez ce qui s'est passé pendant les 10 dernières années. En 1987 et 1998, en vertu de l'article 446 du Code criminel—qui est ce dont nous parlons ici, c'est-à-dire l'article non modifié—257 accusations ont été portées dans tout le Canada. C'est tout. De ce nombre, 121 ont débouché sur un verdict de culpabilité, et c'est tout. À mon avis, les opposants exagèrent considérablement les conséquences possibles de ce projet de loi.

Si l'on commence à envisager des exceptions, on va se retrouver avec un texte de loi qu'on aurait aussi bien pu laisser de côté parce qu'il sera pire que ce que nous avons maintenant. J'ai pris la peine de réfléchir attentivement à cette question car ma crainte est que ces discussions au sein du comité risquent d'aboutir à un texte de loi extrêmement faible. Le texte actuel l'est déjà et celui-ci n'est que marginalement meilleur. Certes, admettre que l'animal est sensible à la souffrance et qu'il est bien différent d'un grille-pain ou d'un téléviseur est une bonne initiative. C'est un pas en avant important mais cela n'aboutit quand même pas à criminaliser les activités dont vous venez de parler. Ce n'est tout simplement pas le cas et je ne vois donc pas quelles autres modifications on pourrait accepter.

M. Bill Blaikie: Je ne pense pas que cela rassure qui que ce soit. L'un des reproches que vous faites à ce projet de loi est qu'il ne criminalise pas toutes ces choses que les gens pensent que vous voulez criminaliser.

Mme Liz White: Il ne s'agit pas de rassurer qui que ce soit, il s'agit de prendre une décision d'ordre politique.

M. Bill Blaikie: J'entends bien.

Mme Liz White: Vous allez devoir décider, d'un point de vue politique, si vous voulez adopter ce projet de loi ou non. Nous avons exprimé notre point de vue et les autres ont exprimé le leur. Les positions sont parfaitement tranchées et c'est vous qui allez devoir décider. Tout ce que je vous dis, c'est que la décision procède maintenant du politique. On a dépassé l'étape du débat rationnel, on en est maintenant à l'étape d'une prise de décision politique.

M. Bill Blaikie: Voulez-vous dire que la politique n'est pas rationnelle?

Mme Liz White: Oui, c'est exactement ce que je veux dire. Et je suis sûre qu'il y a autour de cette table des gens qui sont d'accord avec moi.

Il n'est pas rationnel de penser qu'il y aura toutes sortes de poursuites frivoles alors que toutes les données qui vous ont été communiquées par des gens comme nous montrent précisément que ce ne sera pas le cas. Donnez-moi un seul exemple de poursuites pénales intentées contre un agriculteur ou contre un laboratoire de recherche. Je n'en connais aucun.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, madame White.

Vous souhaitez faire un rappel au Règlement, monsieur Fitzpatrick?

M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Ce n'est pas une question de politique, c'est une question d'adopter des lois efficaces. Voilà le thème de ce débat. La politique, c'est autre chose. Notre but est d'adopter de bonnes lois dans l'intérêt de la population.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Je vous remercie de cette précision, monsieur Fitzpatrick.

Nous allons maintenant entamer un autre tour de sept minutes avec M. Peter MacKay.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC/RD): Merci, monsieur le président.

Je suis troublé par votre affirmation que ce débat ne devrait pas être rationnel. Je pense en effet que c'est précisément un élément du problème. Le débat est tout à fait émotif, et c'est légitime. La violence envers les animaux suscite des émotions très fortes, tout comme la violence envers les personnes ou les dommages causés à la propriété. Il y a toutes sortes de facteurs émotifs qui entrent en jeu mais, au moins dans notre comité, nous devons nous efforcer d'être rationnels et de tenir compte de tous les points de vue: blanc, noir et tous les gris intermédiaires.

Je m'oppose vigoureusement à votre affirmation qu'il ne vaut pas la peine d'essayer d'amender ce projet de loi. J'estime que l'un des problèmes du système auxquels font face les personnes qui souhaitent protéger les animaux est qu'il n'y a pas assez de repères pour déterminer quand un acte est vraiment cruel envers un animal. Certes, les poursuites intentées jusqu'à présent ont été insatisfaisantes et les personnes condamnées se sont vues infliger des sanctions à peine symboliques. Cela n'a aucun caractère dissuasif. L'élément dissuasif est perdu parce qu'aucune sanction n'est exemplaire. Ce projet de loi pourrait être amélioré en précisant les repères et même, qui sait, en imposant des peines minimums obligatoires pour certains types d'actes particulièrement cruels envers les animaux.

• 2040

Je suis inondé depuis plusieurs jours de coupures de presse sur des exemples atroces de cruauté, par exemple sur des cas de gens qui ont traîné des chiens derrières des automobiles ou qui ont mis des chats ou des hamsters dans des fours à micro-ondes. Or, il existe déjà dans le Code criminel des dispositions suffisantes pour intenter des poursuites. Le problème est qu'elles ne le sont pas. Voilà pourquoi on estime nécessaire—et c'est ce que vous demandez, comme beaucoup d'autres—de relever la barre pour bien faire comprendre les problèmes que pose le Code criminel actuel.

L'idée que transférer les animaux de l'article relatif aux biens à un autre article et, de cette manière, d'éliminer les excuses légitimes qui existent actuellement... Elles sont là. Elles sont dans le Code criminel. Elles offrent des lignes de défense légitimes. Si vous préférez, elles offrent une porte de sortie si les faits le justifient, pour certains actes qui sont acceptés, qu'il s'agisse de la chasse avec des chiens ou de certaines pratiques d'élevage du bétail. Mais prétendre que c'est la solution magique... Il y a là une contradiction inhérente.

Dans le mémoire que vous nous avez remis, madame White, vous dites ceci:

    Ce que fait ce texte de loi, c'est qu'il donne au tribunal des paramètres d'évaluation du problème. Il donne aux juges le signal qu'il s'agit là d'un problème qu'il faut prendre au sérieux. Quant à savoir si les tribunaux comprendront ou non ce message, cela dépend en grande mesure des gens qui intentent les poursuites, mais c'est un excellent premier pas.

Donc, le changement d'article ne fera rien d'autre que donner aux juges le signal, pour autant qu'ils le perçoivent, qu'il s'agit là de questions à traiter avec le plus grand sérieux et qu'ils doivent accorder une plus grande attention à ce type de crimes et aux peines correspondantes. En fin de compte, cependant, c'est une diligence accrue de la part des provinces, des procureurs, de la police et des juges qui permettra d'atteindre ce but.

On a des exemples innombrables d'atrocités commises contre des êtres humains qui n'aboutissent pas devant les tribunaux, hélas. Donc, ce projet de loi est peut-être un premier pas.

J'ai la ferme conviction que bon nombre de ces objectifs, voire la totalité, peuvent être atteints sans transférer les animaux en dehors de cet article sur les biens.

Je rejette complètement et d'emblée toute suggestion que la cruauté envers les animaux et les dégâts causés aux grille-pain seront traités de la même manière. À mon avis, cela ne fait que trivialiser le problème. C'est sans doute efficace pour faire de la rhétorique et pour susciter de l'émotion à l'égard d'un problème qui n'en a cependant pas besoin. Cet argument est tout simplement inacceptable. J'ai été procureur de la Couronne et je n'ai jamais vu personne suggérer qu'un animal équivaut à un grille-pain. De toute façon, c'est un argument sans effet car on ne peut criminaliser ce qui est légal. Ce sont les gens qui agissent dans l'appareil de justice pénale qui vont nous permettre d'atteindre ces objectifs.

Pourquoi ne pas essayer de les atteindre en fixant des normes plus rigoureuses, en faisant de l'éducation et en travaillant avec les provinces pour veiller à ce que des poursuites soient vraiment intentées? Les juges vont clairement comprendre le message, tout au moins en ce qui concerne la gamme des peines qu'ils pourront infliger. En quoi transférer ces dispositions de l'article relatif aux biens à un autre article nous permettra d'atteindre cet objectif?

Mme Liz White: C'est à moi que vous posez la question?

M. Peter MacKay: Oui, c'est à vous.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Il reste cinq minutes.

Mme Liz White: Je serai très brève. Dans l'article actuel, le tort est causé à la personne, pas à l'animal...

M. Peter MacKay: Je le sais.

Mme Liz White: ...parce que l'animal appartient à la personne. On ne reconnaît pas que l'animal possède des droits intrinsèques.

M. Peter MacKay: On ne reconnaît donc pas qu'un animal est différent d'une chose.

Mme Liz White: C'est ça.

M. Peter MacKay: Êtes-vous en train de nous dire que les juges ne sont pas capables de faire la différence entre un chat et un grille-pain?

Mme Liz White: Je ne suis pas la seule à le dire. Le juge Lamer avançait cet argument il y a déjà longtemps. La loi, qui reflète son opinion, donne le message que l'infraction est commise contre la personne, pas contre l'animal, étant donné l'article dans lequel on trouve ces dispositions. C'est en partie pour cette raison qu'il y a tellement peu de poursuites. C'est aussi parce que les coupables sont jugés sur déclaration sommaire de culpabilité. Cela dit, même si l'on offre l'option d'une déclaration sommaire de culpabilité ou de poursuites pénales, le fait est que, selon la loi, l'acte a été commis contre la personne et non pas contre l'animal, ce qui veut dire que les sanctions seront encore une fois probablement légères car on n'aura pas tenu compte de ce qui a été causé à l'animal. On aura simplement reconnu qu'un tort a été causé à quelqu'un parce qu'on a causé du tort à son bien. Je suis moi aussi allée souvent dans les tribunaux dans ce genre de situations et je peux vous dire que ce sont des poursuites très difficiles à faire aboutir à cause de l'article dans lequel figurent ces dispositions relatives aux animaux.

• 2045

M. Peter MacKay: Mais ce sont les preuves qui comptent, pas l'emplacement de l'article.

Mme Liz White: Je pense que vous vous trompez, et le juge en chef Lamer n'était pas d'accord avec vous non plus là-dessus. Il a été très clair à ce sujet.

M. Peter MacKay: C'est peut-être une question d'interprétation.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, madame White.

Merci, monsieur MacKay.

Nous allons maintenant continuer ce tour de sept minutes avec Lynn Myers.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je tiens d'abord à remercier tous les témoins qui se sont présentés devant le comité ce soir. Je suis encouragé de constater que tout le monde, c'est évident, souhaite protéger le mieux possible les animaux contre les actes cruels. Comment y arriver, c'est une autre histoire.

Je voudrais revenir sur l'une de vos affirmations, madame White. J'ai vécu sur une ferme familiale toute ma vie et il m'est donc arrivé de débecquer des poulets et d'écorner du bétail. Or, vous avez dit à ce sujet quelque chose qui a tout de suite retenu mon attention. Vous avez dit que ce n'est pas ce soir qu'il faut discuter de ça. Ma question est donc celle-ci: quand, alors?

Suite à ce qu'a dit M. Toews au sujet de l'une de vos affirmations, je pense qu'on doit au moins vous donner la chance de répondre.

Il y a environ un an, la Gazette de Montréal rapportait une déclaration assez similaire de Clayton Ruby. La voici:

    [...] prédisait que, sur une période de 10 ans, les changements seront subtils, qu'on essaiera de les faire passer pour de la protection mais qu'on continuera à les traiter comme un appendice moralisateur des droits humains jusqu'à ce que certains finissent par faire enchâsser leur propre protection dans la loi.

    «Nous assisterons à l'épanouissement des droits des animaux d'une manière très concrète, par des changements progressifs.»

—autrement dit, par des petites victoires successives...

Et il disait ensuite:

    «Nous avons besoin de mesures de protection législatives, de changements législatifs, mais nous accepterons ce que nous pourrons obtenir. Le mouvement ne fait que démarrer.»

J'ai trouvé sur votre site Web, au mois de mars si je me souviens bien, un document intitulé «Action Alert», de Animal Alliance of Canada, où vous disiez, et je vous cite «Votre voix est nécessaire pour appuyer ces amendements révolutionnaires maintenant» et, bien sûr, «Envoyez de l'argent». Et je crois que vous demandiez aussi aux gens d'écrire à la ministre. C'est cela qui inquiète les éleveurs de ma région et les chercheurs qui font des recherches sur les animaux car nous avons vu des cas de ce genre.

Vous avez dit tout à l'heure qu'on n'intente pas de poursuites pénales au Canada. Je crois que c'est ce que vous avez dit.

Mme Liz White: J'ai dit que je n'en connais aucune qui ait été intentée.

M. Lynn Myers: Mais il y en a certainement qui sont intentées aux États-Unis. Par exemple, je sais qu'il y a eu cinq enquêtes devant grand jury au sujet de personnes qui ont commis des actes horribles dans divers États. Et c'est la même chose au Royaume-Uni.

Que dois-je dire aux éleveurs et aux chercheurs en médecine qui affirment que cela n'est que le début de la fin? Attendez, vous n'avez pas encore vu le pire? Que répondez-vous à cela?

Mme Liz White: Ma réponse est qu'il est grand temps que nous discutions sérieusement de tous ces problèmes. Je pense que le public veut un débat là-dessus. Je pense qu'il est temps de parler de la manière dont les poulets et les cochons sont élevés, dont les vaches sont écornées, et de toutes ces choses effrayantes dont les gens ne veulent pas vraiment parler autour de la table.

Même avec ces amendements, je ne pense pas que le Code criminel règle ces problèmes-là. En ce qui concerne les combats de chiens, pour prendre un autre problème précis, nous l'avons réglé au moyen d'un autre texte de loi qui reflétait une politique publique. À mon avis, c'est exactement de cette manière qu'il convient de discuter de ces choses-là, par exemple dans le cadre de l'élaboration de codes de pratique pour l'élevage des poulets.

Je peux cependant vous dire que nous sommes nombreux à avoir des opinions très fermes à ce sujet et à vouloir participer au processus, alors que nous en sommes exclus. Les gens qui partagent mon avis ne font pas partie du Conseil canadien de protection des animaux. Nous voulons donc que ce débat se tienne en public. Et il va se tenir car ce ne sont pas des questions dont on ne peut pas discuter. Mais le Code criminel ne réglera aucune de ces choses-là.

Ce qui est révolutionnaire, à mon avis, pour reprendre cet adjectif, c'est que l'aspect le plus important de ce projet de loi est que l'on retire les animaux d'une partie du Code et qu'on les place dans une autre parce qu'on reconnaît finalement qu'ils sont sensibles à la douleur et que la cruauté infligée à un animal pendant un acte criminel est infligée à l'animal lui-même, pas à son propriétaire. Voilà ce que je réponds.

• 2050

Ma famille élevait des vaches. J'ai fait du piégeage. J'ai chassé. J'ai fait toutes ces choses-là et j'en ai tiré des conclusions différentes des vôtres sur ce qui est bien et sur ce qui est mal dans ce contexte. Mais ce n'est pas avec le Code criminel qu'on va régler ces questions-là ce soir.

M. Lynn Myers: Je respecte votre point de vue, madame White, mais je m'inquiète de vous entendre exprimer des craintes au sujet de codes de pratique tout à fait ordinaires, normaux et acceptables en agriculture. C'est ça qui me fait peur.

Laissez-moi vous demander...

Mme Liz White: J'aimerais vous répondre.

J'ai mes opinions, qui vous font peur. Mais ces gens, là-bas, ont les leurs, qui me font peur à moi. D'accord? Au milieu, il y a vous, qui devez porter un jugement. Vous n'êtes pas obligé d'adopter la totalité de mes opinions ni la totalité des leurs. Ces opinions font l'objet d'un arbitrage par le processus gouvernemental et par l'opinion publique. Je suis tout à fait prête à reconnaître que mes opinions ne sont pas celles de tout le monde au Canada. Au sujet du Code criminel, par contre, je pense que nous avons 95 p. 100 de l'opinion publique avec nous.

M. Lynn Myers: Hier, des représentants de PETA, People for the Ethical Treatment of Animals, ont jeté la pagaille dans une école élémentaire de London, en Ontario. Êtes-vous au courant? Ça concernait le lait.

Mme Liz White: Je ne fais pas partie de People for the Ethical Treatment of Animals. Nous ne...

M. Lynn Myers: Toutefois, si vous me permettez de finir ma question, j'allais vous demander si vous êtes en faveur de ce type de mouvement?

Mme Liz White: Non. Nous ne manifestons pas. Nous traitons les problèmes aux niveaux politique, législatif et électoral. C'est comme cela que nous agissons... et par l'éducation. Nous n'organisons pas de manifestations et c'est notre position depuis que nous avons créé notre organisation. Nous n'agissons pas comme ça parce que nous ne pensons pas que ça fait avancer les choses. Ma réponse est donc non.

M. Lynn Myers: Je vais vous poser une question que j'ai posée au Fonds international pour la protection des animaux. Pouvez-vous affirmer catégoriquement que votre objectif n'est pas de vous attaquer aux éleveurs ordinaires qui respectent la loi telle qu'elle existe et qui appliquent ce que nous appelons des «codes de pratique normaux» en matière d'élevage? Votre intention n'est pas de vous attaquer—je ne sais pas si c'est ce que vous diriez mais je voudrais savoir si vous êtes d'accord ou non avec cette affirmation—aux chercheurs légitimes en médecine, ni aux gens qui pratiquent la chasse et le piégeage pour gagner leur vie, ni aux autres activités de même nature.

Mme Liz White: Si vous parlez précisément du Code criminel, vous avez absolument raison. Je n'essaierais pas de régler ces problèmes-là par le truchement du Code criminel. Tout d'abord, ça coûte beaucoup trop cher. Ensuite, même si vous aboutissez devant un tribunal, vous ne pouvez vous attaquer qu'à une personne, en vertu du Code criminel, pas à un groupe de personnes. Agir ainsi ne me permettrait de faire aucun progrès à l'égard de l'industrie, par exemple. Il s'agirait d'attaquer un individu qui a commis un crime contre un animal et c'est tout. Donc, est-ce que j'utiliserais le Code criminel? Absolument pas.

M. Lynn Myers: Et des poursuites civiles?

Mme Liz White: Est-ce que mon objectif est de faire avancer les choses sur des questions qui vous préoccupent, vous aussi? Absolument, mais je ne le ferais pas par le truchement du Code criminel.

M. Lynn Myers: Par des poursuites civiles?

Mme Liz White: Par la politique et le lobbying.

M. Lynn Myers: Et les poursuites civiles?

Mme Liz White: Absolument pas. Nous n'agissons pas comme ça.

M. Lynn Myers: Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, monsieur Myers.

Nous allons maintenant passer de l'Alliance animale du Canada à l'Alliance canadienne, avec notre témoin suivant, M. Hilstrom.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Je crois que je préférerais autant assister à des manifestations dans les rues qu'à cette tentative insidieuse de manoeuvre politique en coulisses.

Je crois qu'il est grand temps que les vétérinaires prennent le devant de la scène. L'association des vétérinaires a-t-elle des préoccupations quelconques avec ce projet de loi, du point de vue de la recherche destinée à trouver de meilleurs traitements pour les animaux, et du point de vue de la nécessité d'utiliser des animaux pour faire des recherches afin d'améliorer les conditions de vie des animaux? N'avez-vous pas les mêmes préoccupations que les représentants des universités à ce sujet?

Mme Alice Crook: Absolument. Nous pensons que la recherche médicale est très importante. Bon nombre des découvertes médicales ont été bénéfiques non seulement aux êtres humains mais aussi aux animaux.

Nous comprenons que le Code criminel permet de réagir à des crimes individuels contre des animaux plutôt qu'à des pratiques industrielles légitimes. Les pratiques industrielles raisonnables et largement acceptées qui évitent de causer des souffrances inutiles ou des blessures seront toujours protégées par la notion d'excuse légitime. Les lois, les textes réglementaires et d'autres excuses légitimes permettent d'abattre plus de 400 millions d'animaux au Canada chaque année, et c'est le fait de vétérinaires, de chercheurs, de sociétés de protection des animaux.

M. Howard Hilstrom: Marquer des animaux au fer est-il un acte cruel et inusité pour un animal?

Mme Alice Crook: C'est couvert dans les codes de pratique sur l'élevage du bétail. Si c'est couvert dans les codes de pratique, c'est légal.

• 2055

M. Howard Hilstrom: Certes mais, si ce n'était pas dans les codes de pratique et que quelqu'un le faisait quand même, pourriez- vous intenter des poursuites en vertu de ce projet de loi? Recommanderiez-vous qu'on le fasse?

Mme Alice Crook: Je ne comprends pas votre question. Si ce n'était pas dans les codes de pratique...?

M. Howard Hilstrom: Si ce n'est pas une pratique énoncée dans le code et que quelqu'un la considère comme un acte de cruauté envers les animaux, vous pensez qu'on pourrait intenter des poursuites au moyen de cette loi?

Mme Alice Crook: C'est purement hypothétique. Vous parlez d'une procédure qui...

M. Howard Hilstrom: Ne prenons donc pas de cas hypothétique.

Mme Alice Crook: Laissez-moi finir, s'il vous plaît.

Vous essayez d'envisager une situation hypothétique qui n'est pas prévue dans un code de pratique. Dans ce cas, le procureur décidera d'intenter ou non des poursuites en se demandant quelles sont les normes de pratique dans ce type d'opération, si c'est un acte fréquent, et s'il est exécuté dans un contexte qui est jugé normalement acceptable. Voilà tous les facteurs dont il tiendra compte pour décider d'intenter des poursuites ou non.

M. Howard Hilstrom: La plupart des vétérinaires que je connais qui s'occupent de gros animaux—et j'en connais beaucoup, surtout dans l'Ouest—ne seraient sans doute pas totalement d'accord avec vous à ce sujet. Pourriez-vous nous dire comment votre Association prend ses décisions, tire ses conclusions et formules ses positions? Consultez-vous tous les vétérinaires? Effectuez-vous des enquêtes? Y a-t-il un vote? Ou est-ce simplement l'exécutif de l'Association qui décide?

Mme Alice Crook: Nous nous penchons depuis plusieurs années déjà sur les modifications qui pourraient être apportées au Code criminel. Nous avons examiné toutes les informations que nous avons reçues du ministère de la Justice et nous avons discuté de ça pendant trois ans au sein de notre exécutif. Nous n'avons pas exactement sondé nos membres mais c'est quelque chose dont on a beaucoup parlé dans la Revue vétérinaire canadienne et je crois donc pouvoir dire que les vétérinaires connaissent très bien nos positions.

M. Howard Hilstrom: Mais ils ne les approuvent pas nécessairement?

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci. C'est maintenant un tour de trois minutes.

Merci, madame Crook. Merci, monsieur Hilstrom.

Nous passons maintenant à M. Stephen Owen.

M. Stephen Owen (Vancouver Quadra, Lib.): Merci, monsieur le président. Je vous remercie tous et toutes d'être venus témoigner et de nous faire bénéficier de votre expérience.

Le débat actuel est chargé d'émotion, ce qui est parfaitement légitime car il porte sur des questions importantes. Nous parlons en effet de la vie et du gagne-pain de nombreuses personnes, ainsi que des sentiments profonds de bien des gens à l'égard des animaux.

Je pense que, pour la plupart d'entre nous, les décisions prises dans les urnes sont très faciles à prendre. Dans toute l'industrie—qu'il s'agisse des groupes de chasse et de pêche ou des sociétés de protection des animaux, ainsi que de tous les groupes et organismes qui s'occupent du bien-être des animaux—la mise à mort brutale et cruelle d'animaux et l'infliction de douleur inutile sont profondément choquantes. Nous n'avons encore entendu personne dire le contraire. En revanche, la grande majorité des gens approuvent ce que nous pouvons facilement définir dans notre propre esprit comme le traitement légal des animaux pour le bien public, ce qui englobe la consommation humaine, le traitement médical, la recherche médicale, etc.

C'est entre les deux qu'il y a une zone grise et que les choses deviennent difficiles. D'après tout ce que j'ai entendu jusqu'à maintenant, la plupart des gens approuvent l'orientation générale de ce projet de loi et pensent qu'il faut intenter plus de poursuites, infliger des peines plus lourdes et reconnaître clairement, dans le droit pénal, que les animaux sont sensibles à la douleur.

Je ne sais pas quelle différence il y a entre une justification légale et une excuse légitime. Je ne me suis jamais posé la question mais je doute qu'il y ait une différence précise entre ces deux notions qui me semblent en fait dire exactement la même chose.

L'apparence de droit, c'est différent. Ça porte généralement sur la propriété privée, les biens immobiliers, mais pas sur les animaux. Je peux donc concevoir une distinction à cet égard, bien que je puisse probablement imaginer une certaine apparence de droit se manifestant au sujet d'un code de réglementation.

• 2100

L'AUCC a fait certaines propositions intéressantes, ce soir, au sujet de textes réglementaires. Les textes réglementaires ne font généralement pas partie du Code criminel et ils peuvent parfois empiéter, ne serait-ce que par renvoi, sur des lois provinciales, mais c'est une idée intéressante.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Quelle est votre question?

M. Stephen Owen: Ah, oui, la question.

Je suis d'accord avec M. Peter MacKay. Ce sont en fait essentiellement les procureurs et les juges, ainsi que les agents de police, qui vont donner un sens concret à ces dispositions. Mais du point de vue d'un procureur général—et je regrette que M. Toews, ancien procureur général, ne soit pas ici, mais je lui en parlerai plus tard—j'estime qu'il appartient au procureur, notamment au procureur général, lorsqu'il est confronté à des poursuites privées qui ne répondent pas aux critères d'inculpation de la province, de suspendre la procédure. Nous devrions tous exiger cela des services judiciaires et des procureurs généraux, ce qui nous donnerait l'assurance qu'il n'y aurait pas de poursuites frivoles ou vexatoires.

C'était peut-être plus une affirmation qu'une question, monsieur le président, mais j'en reste là.

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, monsieur Owen.

Le prochain intervenant est M. Robert Lanctôt.

M. Robert Lanctôt: Je vais revenir un peu à ce dont je parlais plus tôt, mais j'aimerais maintenant m'adresser à l'Association canadienne des médecins vétérinaires.

Plusieurs personnes, plusieurs regroupements, dont, sûrement, plusieurs de vos clients ont une crainte énorme. Qu'elle soit fondée ou pas, elle est là, et ça touche énormément de personnes. Si on nous disait implicitement que les défenses sont toujours possibles, ou quelque chose du genre, seriez-vous prêts, parce que déjà vous me dites que cela ne change rien, qu'il y a déjà une défense disponible, à radier celles qui existent présentement dans le Code?

Le chiffre qu'on nous donne représente peut-être 1 p. 100, soit 200 000 cas d'accusations au Canada, ce qui n'est pas beaucoup. C'est vrai que ce n'est pas beaucoup, mais est-ce que c'est relié à la loi actuelle ou est-ce par manque de ressources ou de financement si ces actes d'accusation ne deviennent pas des actes d'accusation? Autrement dit, est-ce par manque de procureurs, de financement, d'argent qu'on ne porte pas ces causes-là devant la loi actuelle?

M. Michael Barr: Je pense que c'est une question à laquelle on ne peut vraiment pas répondre parce qu'on ne sait pas quel est le statut actuel du système judiciaire. Je pratique sur les petits animaux en Nouvelle-Écosse. Si vous me demandez si c'est un manque de ressources, et si c'est ce manque-là qui fait qu'il n'y a pas plus d'actions qui sont entretenues, je ne peux vraiment pas répondre à cette question.

[Traduction]

Mme Alice Crook: C'est vrai. Dans bien des cas, des poursuites ne sont pas intentées parce qu'on craint qu'elles ne servent à rien. Voilà pourquoi on ne possède pas de chiffres précis sur les causes qui n'ont pas été poursuivies.

Pour ce qui est de rendre explicites les lignes de défense, j'estime que le paragraphe 8(3) du Code et la jurisprudence de la Cour suprême du Canada offrent explicitement ces lignes de défense relatives à l'excuse légitime et aux règles de common law. Cela se trouve déjà dans le Code criminel. Nous disons que c'est implicite parce que ce n'est pas énoncé dans chaque article du projet de loi C-15B, mais ça se trouve ailleurs.

[Français]

M. Robert Lanctôt: Est-ce que vous seriez contre un amendement qui aurait pour but de préciser les trois défenses qui existent?

[Traduction]

Mme Alice Crook: Mais, si c'est déjà là, pourquoi l'ajouter? C'est implicite dans toute la notion d'excuse légitime qui existe déjà puisque le Code criminel vise des cas individuels de cruauté.

[Français]

M. Robert Lanctôt: On les a changés...

Le vice-président (M. Denis Paradis): Monsieur Lanctôt.

M. Robert Lanctôt: C'est déjà terminé?

Le vice-président (M. Denis Paradis): C'est déjà terminé.

[Traduction]

Merci, madame Crook,

[Français]

Merci, monsieur Lanctôt.

Le prochain intervenant est M. Tom Wappel.

[Traduction]

M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Vous pourrez revenir.

• 2105

[Traduction]

M. Tom Wappel: J'ai trois ou quatre questions très précises à poser.

Premièrement, je m'intéresse aux définitions et je pense qu'il faut être très précis quand on définit des choses.

Vous avez dit tout à l'heure, madame Crook, que «tous les animaux et tous les oiseaux sont sensibles à la douleur». Ai-je raison de dire que les oiseaux sont des animaux? Et vous avez bien dit que tous les animaux sont sensibles à la douleur? Je suis personnellement d'accord avec cela mais ce n'est pas ce que dit la définition actuelle, n'est-ce pas?

Mme Alice Crook: Non, vous avez raison, et nous appuyons la définition actuelle qui...

M. Tom Wappel: Qui n'est donc pas la même que celle que vous avez proposée dans votre mémoire, indiquant que tous les animaux sont sensibles à la douleur.

Mme Alice Crook: Vous avez raison, j'aurais dû la rendre plus conforme à cette définition-ci.

M. Tom Wappel: C'est pour ça que nous sommes ici, pour être précis.

Vous avez dit aussi que «les animaux ressentent des choses». Que vouliez-vous dire?

Mme Alice Crook: Qu'ils sont sensibles à la douleur et à la souffrance.

M. Tom Wappel: Je vais formuler cette affirmation comme ceci: la position des vétérinaires du Canada est-elle que tous les animaux peuvent ressentir la douleur?

Mme Alice Crook: Les gens utilisent parfois le mot «animal» à la légère—et nous voulons certainement éviter cela puisque nous parlons d'un texte de loi—quand nous savons que c'est un mot qui englobe des invertébrés et toutes sortes de créatures qui sont «plus bas dans l'échelle de l'évolution». Nous voulions faire référence aux vertébrés et c'est ce que j'aurais dû dire.

M. Tom Wappel: En fait, si la définition disait simplement qu'un animal est un vertébré autre qu'un être humain, cela vous suffirait, n'est-ce pas?

Mme Alice Crook: Nous appuyons la définition du projet de loi C-15B, qui a été conçue par le CCPA, organisme que nous appuyons. Nous reconnaissons qu'elle inclut les vertébrés plus tous les autres animaux capables de ressentir la douleur, étant bien entendu que quiconque voudrait intenter des poursuites aurait un fardeau de la preuve extrêmement lourd puisqu'il faudrait démontrer que des êtres autres que des vertébrés sont capables de connaître la douleur.

M. Tom Wappel: Et ça coûterait aussi très cher de se défendre contre une telle poursuite.

Vous avez dit, madame White, que nous n'avons pas besoin de l'excuse légitime et qu'il n'est pas nécessaire d'apporter des modifications au projet de loi actuel. L'alinéa 182.2(1)c) parle de quelqu'un qui «tue un animal sans excuse légitime», et l'alinéa 182.2(1)d) parle de quiconque «sans excuse légitime, empoisonne un animal». Pourquoi avons-nous besoin de ces mots dans ces dispositions s'ils sont implicites dans le Code criminel?

Mme Liz White: Si j'ai bien compris, on les a mis là pour rassurer un peu l'industrie.

M. Tom Wappel: Bien. S'ils sont là, pourquoi ne pas les mettre aussi ailleurs?

Mme Liz White: Pas si vite. Le ministère de la Justice a essayé de rassurer l'industrie et a fait ce qu'il a jugé bon selon la loi, sans modifier d'autres dispositions ni ajouter de mots aux mots «sans nécessité» et «volontairement», ce qui alourdirait considérablement le fardeau de la preuve. Ces mots ne sont pas nécessaires mais nous devons prendre le projet de loi tel qu'il est et nous sommes prêts à vivre avec sous cette forme.

M. Tom Wappel: Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, Tom. Vos deux minutes sont écoulées.

Merci, madame White.

Je retourne maintenant à Peter MacKay.

M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président. J'ai négligé de remercier les témoins, pendant mon premier tour. Je tiens à leur dire que nous leur sommes très reconnaissants d'être venus nous aider à mieux comprendre toute cette problématique.

Je voudrais revenir sur le thème abordé par M. Wappel. Quel mal y a-t-il à essayer de rassurer l'industrie, les chercheurs, les chasseurs?

Ne pensez pas que je veuille vous provoquer, madame White, mais vous n'avez cessé de dire que ce projet de loi est trop rassurant, d'une certaine manière, ou que l'inclusion de mots tels que «excuse légitime» et des articles qui, selon vous, sont implicites dans le Code permettra aux gens qui sont cruels envers les animaux d'échapper aux poursuites.

Si j'en crois les statistiques, le principal problème est que nous ne réussissons pas à traîner suffisamment de gens devant les tribunaux. Ce projet de loi, même s'il est adopté sous sa forme actuelle, ne changera rien à ça. Il me semble que ce sont les règlements provinciaux qu'il faudrait sans doute modifier, et je suis sûr que vous y pensez aussi, afin d'être beaucoup plus agressifs pour intenter des poursuites et pour imposer des peines plus lourdes.

• 2110

Mme Liz White: D'accord. Il y a deux raisons au fait que l'on intente peu de poursuites.

Je suis d'accord que l'on devrait en intenter plus répondant aux normes du Code criminel mais, dans la loi actuelle, les sociétés de protection des animaux et les autres organismes qui ont pris la peine d'intenter des poursuites n'ont pas pu obtenir de condamnations et ils ont fini par renoncer. Ça n'en vaut pas la peine.

En fait, dans l'affaire du chat à Toronto, où quelqu'un a enregistré sur bande vidéo le dépeçage d'un chat vivant sur une période de plusieurs heures ou jours, ce qui a considérablement frustré la police et les responsables des poursuites, c'est que le Code criminel actuel leur pose un vrai problème. En effet, le propriétaire de l'animal n'est pas connu et, comme c'est à lui que le tort a été causé, et non pas à l'animal, d'après le Code criminel, aucune poursuite ne peut être intentée. Il a donc fallu porter une accusation différente, de méfait.

Tout le problème que pose cette situation vient du fait que le Code criminel ne permet pas d'intenter les bonnes poursuites dans des cas d'actes criminels très graves commis envers des animaux, et l'exemple que je viens de citer illustre parfaitement les problèmes que pose la définition actuelle du mot «animal» dans le Code.

M. Peter MacKay: Mais ces poursuites sont fondées sur des preuves.

Mme Liz White: Absolument, mais la police et...

M. Peter MacKay: Il faut que la police et la Couronne puissent faire la preuve d'un acte délibéré.

Mme Liz White: Mais la police ne peut pas intenter de poursuites. Elle est obligée d'intenter des poursuites en vertu d'autres textes que le Code criminel.

M. Peter MacKay: Je pense qu'elle pourrait intenter des poursuites, et qu'elle le fait d'ailleurs dans certains cas.

Mme Liz White: La police connaît le Code criminel. Je reconnais que la police de Toronto connaît le Code criminel et qu'elle l'invoque constamment.

Par contre, il lui faut un propriétaire.

M. Peter MacKay: Manifestement, elle ne l'invoque pas assez souvent.

Mme Liz White: Il lui faut un propriétaire pour pouvoir intenter des poursuites. Qui va-t-elle accuser? Il lui faut un propriétaire. Le type qui a commis le crime ne possède pas l'animal.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, madame White. Merci, monsieur MacKay.

Nous passons maintenant à M. Derek Lee.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.

Je reviens sur cette question d'excuse légitime. En lisant cet article, j'ai la conviction qu'il faut absolument que ces mots soient là—«sans excuse légitime». Si vous lisez l'alinéa 182.2(1)c) sans ces mots, vous obtenez ceci: «Quiconque tue un animal volontairement commet une infraction». Ah bon!

Il faut dans cet article quelque chose qui autorise ce qu'accepte déjà la société. Si nous voulons manger une dinde le soir de l'Action de grâces, il faut bien lui avoir ôté la vie. Si nous voulons manger de la viande, il faut bien abattre du bétail. Si nous avons un chien mourant, nous mettons fin à ses jours. On ne peut donc tout simplement pas adopter le texte que je viens de lire.

Considérant mon argument, pensez-vous toujours que nous n'avons pas besoin des mots «sans excuse légitime» dans cette partie du Code criminel?

Mme Liz White: Absolument car le contexte dans lequel le Code sera interprété vient avec la notion d'excuse légitime. Cette notion ne figure dans aucune autre partie du Code mais elle est pourtant implicite dans tout le Code. Si l'on prend la peine d'indiquer aux juges que, pour cet article particulier, on doit non seulement appliquer la notion d'excuse légitime générale du Code mais aussi son expression particulière dans cet article, on ne fait qu'ajouter une barrière à ceux qui voudront s'adresser aux tribunaux.

Cela deviendra extrêmement difficile et nous assisterons alors précisément à ce qui inquiète M. MacKay. Les poursuites n'aboutiront pas parce que nous aurons été obligés de satisfaire aux critères nécessaire/pas nécessaire, volontaire/pas volontaire, et excuse légitime, deux fois de suite—pas dans d'autres parties du Code mais deux fois ici. Et c'est ce que nous ne voulons pas.

Tout le monde autour de cette table tient à ce que ce texte de loi nous permette de réagir contre des actes que nous trouvons tous absolument choquants: le dépeçage d'un chat vivant, le fait qu'un chien soit traîné derrière une voiture, le fait qu'un animal soit mis dans un four à micro-ondes. Nous voulons que les coupables soient sanctionnés. Or, ce que nous faisons ici, c'est que nous créons un nouvel obstacle à ce type d'actions.

M. Derek Lee: Bien. Ai-je raison de penser que tous les témoins conviennent qu'il y a beaucoup de raisons légitimes pour tuer des animaux?

• 2115

Mme Liz White: Absolument.

M. Derek Lee: Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, monsieur Lee et madame White.

Brian Fitzpatrick.

M. Brian Fitzpatrick: Je suis d'accord avec M. Lee. Je suis aussi avocat et je pense que son argument est parfaitement rationnel et logique. Notre but est d'adopter des lois claires et non pas imprécises.

Quand j'étais petit, j'avais un chien que j'aimais beaucoup et quelqu'un l'a empoisonné. Nous avons passé beaucoup de temps à essayer de trouver le coupable. Le problème du droit pénal, madame White, est qu'il faut trouver un coupable pour pouvoir s'adresser aux tribunaux et, dans bien des cas de cette nature, c'est ça le problème, d'après moi.

Quelqu'un parlait l'autre jour d'un sac de chats qui avaient été mutilés et jetés en bordure de route. Nous sommes tous choqués que quelqu'un puisse mutiler des chats mais nous ne pouvons rien faire si nous ne trouvons pas le coupable. Vous pouvez bien adopter toutes les lois que vous voulez, il vous faut ensuite des preuves. Il faut trouver les coupables et cette loi ne règle pas ce problème. Ce monsieur, là-bas, a été sergent de la GRC pendant 25 ou 30 ans et il connaît parfaitement toutes les difficultés que rencontre la police pour dénicher les coupables et les traîner devant les tribunaux. Ceci ne règle pas ce problème.

Je suis sensible à votre admiration à l'égard de Pierre Trudeau, madame Richardson, un homme que vous avez raison de respecter et d'admirer, mais cela n'a vraiment rien à voir avec ce que nous essayons de faire ce soir. Je tenais simplement à faire cette remarque. Cela n'a rien à voir avec notre débat.

Mme Anna Louise Richardson: Puis-je répondre?

M. Brian Fitzpatrick: Je suis profondément troublé de voir qu'un groupe marginal risque de harceler des Canadiens respectueux des lois qui essaient de gagner leur vie, que ce soit par le piégeage, dans l'élevage ou en pratiquant la pêche. Ces gens-là n'ont pas besoin de ce genre de difficulté. Or, je trouve dans ce projet de loi des choses qui m'amènent à croire que c'est ce que nous essayons de faire.

Prenez par exemple l'alinéa 182.3(1)b), qui parle de «quiconque... omet de lui fournir les aliments, l'eau, l'air, l'abri et les soins convenables et suffisants». Je constate qu'on a ajouté les mots «par négligence» dans les deux autres alinéas de ce paragraphe mais qu'on l'a délibérément omis ici. Supposons qu'il y ait au Québec une tempête de glace qui empêche les éleveurs... de chauffer leurs étables, par exemple. Je vois que cet article parle d'une personne qui «omet de fournir des soins convenables et suffisants». L'éleveur pourrait essayer de dire qu'il n'a pas fait preuve de négligence mais il se trouve que cette notion a été délibérément omise de cette disposition. Pourtant, il me semble qu'il aurait été facile de dire «omet par négligence», ce qui réglerait le problème.

Supposons que vous donniez de l'eau sucrée à des souris dans un laboratoire pour faire des recherches. Ou supposons que vous donniez à certaines des céréales transgéniques et pas à d'autres. «Quelqu'un pourrait vous accuser de ne pas avoir donné des aliments convenables.» Comment pourrez-vous vous défendre? Vous ne pourrez pas dire que vous agissiez en tant que chercheur raisonnable parce que cette défense n'est pas prévue.

Il me semble que les rédacteurs du projet de loi essaient aussi de nous piéger. Ils enlèvent «volontairement et excuse légitime» et les défenses normales de mens rea et ils transfèrent tout dans une sorte de concept de délit civil à l'article 182.2. Tout cela invite le harcèlement, à mon avis, et, si j'étais le représentant d'une des industries qui ont comparu devant le comité, ça me ferait très peur.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Y a-t-il une question là-dedans, monsieur Fitzpatrick?

M. Brian Fitzpatrick: Oui. J'aimerais savoir pourquoi on ne pourrait pas modifier légèrement l'article 182.3 qui est proposé en ajoutant «par négligence» à la disposition concernant quiconque «omet de fournir les aliments, l'eau, l'air, etc.». Cela rassurerait sans doute beaucoup nos deux témoins qui sont venus du Québec, par exemple.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, monsieur Fitzpatrick.

Monsieur Giroux.

M. Robert Giroux: Merci beaucoup.

Je vais demander au Dr Tasker, spécialiste en recherche médicale, de faire quelques remarques sur cette intervention.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Docteur Tasker.

M. Andrew R. Tasker (doyen associé, Études supérieures et professeur en recherche, Département d'anatomie et de physiologie, Collège vétérinaire de l'Atlantique, Université de l'Île-du-Prince- Édouard; Association des universités et collèges du Canada): Merci beaucoup.

Je suis tout à fait d'accord avec vous car nous craignons que des poursuites frivoles soient intentées si l'on n'ajoute pas de garde-fous adéquats dans le Code. Voilà pourquoi nous souhaitons que l'on fasse référence à la norme universellement acceptée du Conseil canadien de protection des animaux.

• 2120

Comme l'a dit mon collègue, monsieur Giroux, toutes les universités et tous les membres de l'Association des collèges et universités du Canada ont adopté ces lignes directrices.

Je me sens également obligé de signaler que certains arguments qui ont été avancés tout à l'heure me paraissent un peu fallacieux. Tout d'abord, quelqu'un a dit que les groupes qui s'occupent de bien-être et de protection des animaux ne sont pas représentés au CCPA. Ce n'est pas vrai. La Fédération canadienne des sociétés de protection des animaux est l'un des membres fondateurs du CCPA, et c'est l'un de nos participants les plus précieux.

En outre, quelqu'un a déclaré que les normes et lignes directrices du CCPA sont des normes minimalistes. Cela non plus n'est pas vrai. Si vous examinez attentivement la procédure, vous verrez que toutes les institutions ont un comité de protection des animaux comprenant des représentants des chercheurs qui utilisent des animaux, des représentants des chercheurs qui n'en utilisent pas et des membres du grand public. La raison précise de cet état de choses et la raison pour laquelle toutes les propositions sont examinées par ces comités est que tout le monde tient à ce que les normes d'éthique jugées appropriées à l'intérieur des institutions, et qui vont au-delà de ce qui est indiqué dans les lignes directrices, soient scrupuleusement respectées. Ainsi, chaque juridiction a la possibilité d'évaluer chaque projet de recherche en fonction de son mérite, en fonction des normes qui sont imposées pour protéger les animaux, et qui sont des normes en fait plus rigoureuses que celles des lignes directrices. Cela constitue en fait l'un des principes fondamentaux de l'approche du CCPA.

Notre argument est donc que cette approche, conjuguée à un volet éducatif très solide, qui est une partie essentielle du mandat du CCPA, contribue à assurer les meilleurs soins possibles aux animaux qui sont utilisés, dans le respect des normes d'éthique les plus rigoureuses possible, et dans les limites de l'intérêt de l'institution, à un niveau qui est supérieur à celui que représenterait un minimum.

Je suis heureux d'avoir pu apporter ces corrections. Je suis également parfaitement d'accord avec l'idée d'ajouter «par négligence». J'approuve complètement votre position—ou au moins ce que j'interprète comme un consensus général—voulant qu'on essaie de définir les termes utilisés dans ce projet de loi à l'égard de définitions bien acceptées à l'échelle internationale et, certainement, reconnues au palier national, et formulées par des agences comme le Conseil canadien de protection des animaux, pour atténuer une bonne partie des craintes qui existent dans le monde de la recherche médicale.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, docteur Tasker.

[Français]

Le prochain intervenant est M. Robert Lanctôt, pour trois minutes.

M. Robert Lanctôt: Je vais poser des questions au lieu de parler. C'est difficile de ne pas parler.

L'augmentation de sanctions, je pense, serait déjà un grand pas pour la cruauté envers les animaux, et je vous reparle, encore une fois, de préciser. Si, au paragraphe 182.2(1) proposé, on ajoutait «et sans justification légale, sans excuse légitime et sans apparence de droit», cela sécuriserait à peu près tous les gens qui sont venus témoigner, en précisant qu'il y a une crainte, une crainte sérieuse.

Deuxièmement, lorsqu'on parle de ressentir de la douleur, les vétérinaires nous disent aujourd'hui que ça va être très difficile et très coûteux. La remarque que je vous ai faite plus tôt, à savoir que c'est peut-être l'application de la loi qui fait problème, les ressources et le financement... Si on ajoute encore des coûts supplémentaires pour faire des expertises pour la Couronne et pour la défense, pensez-vous que vous aurez vraiment le résultat que vous souhaitez?

Personnellement, j'ai une grosse hésitation à croire que vous aurez le résultat que vous voulez. Par contre, si on apporte l'amendement que je propose à ce projet de loi, je pense que vous allez être gagnants, que les animaux vont être gagnants, que les agriculteurs vont être protégés, et qu'ils seront sécurisés.

[Traduction]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Madame White.

• 2125

Mme Liz White: J'aimerais pouvoir être d'accord avec vous mais je ne le peux pas. Ce qui va arriver, si l'on apporte cet amendement, c'est que des poursuites ne seront pas intentées ou qu'elles coûteront très cher considérant tous les obstacles que nous serons obligés de franchir ne serait-ce que pour prouver qu'un acte cruel a été commis.

Plus vous créez d'obstacles, et il y en a déjà ici qui n'existent pas dans les autres parties du Code criminel, comme «sans nécessité», «volontairement»... «L'excuse légitime» ajoutée séparément dans cette disposition signale au juge qu'on lui demande de prêter une attention encore plus particulière à la notion d'excuse légitime lorsqu'il s'agit de cruauté envers les animaux, en allant au-delà de ce qui existe dans n'importe quelle autre partie du Code criminel, bien que ce soit implicite dans le reste du Code. Ma conclusion est que des poursuites qui sont déjà difficiles aujourd'hui le seront encore plus demain et que vous aurez donc fait avec ce projet de loi le contraire de ce que vous souhaitez.

Bien que vous souhaitiez rassurer dans une certaine mesure les gens de l'industrie, et je comprends pourquoi vous voulez le faire, la réalité est que les gens de l'industrie ne font pas l'objet de poursuites pénales pour des activités légales, que cela ne s'est pas fait dans le passé et ne se fera pas à l'avenir, étant donné que ce texte de loi ne va pas criminaliser les activités qui sont légales dans tous les sens du mot. Donc, en ajoutant cette série de mots, vous entravez les efforts que nous déployons pour essayer d'assurer une protection véritable aux animaux qui sont traités de manière vraiment cruelle.

[Français]

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, madame White. Merci, monsieur Lanctôt.

La dernière intervention sera celle de Peter MacKay.

[Traduction]

M. Peter MacKay: Je voudrais revenir sur une dernière question à laquelle M. Owen a fait allusion, celle de poursuites privées. Bien que Mme White affirme vigoureusement que les parties concernées, les chercheurs et les groupes légitimes qui utilisent des animaux dans le cadre de pratiques pouvant être remises en question par ceux qui veulent protéger les animaux n'ont strictement rien à craindre, ne pensez-vous pas que des organismes comme les conseils de recherches, votre groupe, monsieur Lemay, ont raison de s'inquiéter et de craindre que, si ces dispositions sont adoptées sous leur forme actuelle et que les animaux sont retirés de l'article concernant les biens, cela ne soit utilisé pour essayer d'intenter des poursuites privées?

La réalité est que les procureurs généraux des provinces ne font pas d'efforts particulièrement vigoureux pour intervenir dans des poursuites privées, comme M. Owen semblait l'indiquer. Ce n'est pas comme cela que fonctionne le système actuellement. Je conviens avec lui que c'est probablement comme cela qu'il devrait fonctionner mais les procureurs sont déjà surchargés de travail aujourd'hui. Si j'en crois mon expérience, la triste réalité est que, quand on se trouve dans un bureau rural qui fait tout son possible... le bureau principal n'interviendra pas dans les activités quotidiennes des procureurs de la Couronne qui essaient d'exercer leur latitude. Est-ce une crainte légitime, monsieur Tasker ou monsieur Lemay?

M. Andrew Tasker: C'est précisément l'essence de notre inquiétude, monsieur MacKay. J'irais même plus loin en disant que, même si je pense qu'on peut légitimement craindre qu'il y ait des poursuites, peut-être privées, il y aura aussi un effet préjudiciable sur les chercheurs qui mènent des recherches scientifiques légales et parfaitement éthiques dans l'intérêt des êtres humains et des animaux. Ils pourront légitimement craindre de faire l'objet de poursuites, ce qui aura un effet glacial sur les activités de recherche et de développement que nous nous efforçons tant d'encourager dans notre pays, depuis un certain temps, et auxquelles le gouvernement fédéral, en particulier, accorde depuis quelque temps un appui extrêmement vigoureux...

M. Peter MacKay: Parfois, la mauvaise publicité est encore plus préjudiciable que le résultat d'une poursuite privée. Qui pourrait vous rendre votre réputation?

M. Andrew Tasker: Absolument. C'est précisément sa réputation que le chercheur pourra craindre de perdre.

Par ailleurs, je pense que l'un de nos objectifs fondamentaux est d'intéresser les jeunes à la recherche scientifique et de favoriser l'innovation au Canada. Or, je crains que ce type de préoccupations publiques, ce type de législation à géométrie variable, n'aboutisse à dissuader des gens qui auraient pu être tentés par ce type de carrières.

• 2130

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci beaucoup, docteur Tasker.

M. Andrew Tasker: Merci.

Le vice-président (M. Denis Paradis): Merci, monsieur MacKay.

[Français]

Je voudrais, en terminant, remercier tous les membres du panel pour l'exercice de ce soir.

[Traduction]

Quelle que soit votre position, nous avons beaucoup apprécié votre contribution. Nous sommes ici pour concevoir de meilleures lois et votre contribution nous est extrêmement précieuse.

[Français]

Merci beaucoup, tout le monde. La séance est levée.

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