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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 3 février 2005




¿ 0900
V         Le président (L'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.))
V         Me Vincenzo Rondinelli (représentant, Criminal Lawyers Association)

¿ 0905

¿ 0910

¿ 0915
V         Le président
V         Mme Joan Bercovitch (directrice principale, Affaires juridiques et gouvernementales, Association du Barreau canadien)
V         M. Joshua Weinstein (président, Division du Manitoba, Association du Barreau canadien)

¿ 0920

¿ 0925
V         Le président
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC)

¿ 0930
V         Le président
V         M. Joshua Weinstein

¿ 0935
V         Le président
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Myron Thompson
V         Le président
V         M. Myron Thompson
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ)
V         M. Joshua Weinstein

¿ 0940
V         M. Richard Marceau
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Richard Marceau
V         M. Joshua Weinstein

¿ 0945
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli

¿ 0950
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.)

¿ 0955
V         M. Joshua Weinstein
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Joshua Weinstein

À 1000
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Mark Warawa (Langley, PCC)
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Mark Warawa

À 1005
V         Le président
V         M. Mark Warawa
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Mark Warawa
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Mark Warawa
V         Le président
V         Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ)

À 1010
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Joshua Weinstein
V         Mme Diane Bourgeois
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         M. Joe Comartin

À 1015
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Joe Comartin
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)

À 1020
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Joshua Weinstein

À 1025
V         Le président
V         M. Myron Thompson
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC)
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Garry Breitkreuz

À 1030
V         Le président
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ)
V         M. Joshua Weinstein

À 1035
V         M. Serge Ménard
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Serge Ménard
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joe Comartin
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. Joshua Weinstein

À 1040
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. John Maloney (Welland, Lib.)
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. John Maloney
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. John Maloney
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         M. John Maloney
V         M. Joshua Weinstein
V         M. John Maloney
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Mark Warawa

À 1045
V         Me Vincenzo Rondinelli
V         Le président
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         M. Joshua Weinstein
V         M. Richard Marceau

À 1050
V         M. Joshua Weinstein
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin

À 1055
V         M. Joshua Weinstein
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Joshua Weinstein
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 février 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0900)  

[Français]

+

    Le président (L'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.)):

    Nous allons maintenant commencer la réunion.

[Traduction]

    Nous débutons à la séance du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile. Nous poursuivons l'étude du projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et la Loi sur la défense nationale.

    Nous recevons ce matin un témoin de la Criminal Lawyers Association, M. Rondinelli, et deux témoins de la l'Association du Barreau canadien, soit la directrice principale des affaires juridiques et gouvernementales, Mme Bercovith, et M. Weinstein, le président de la division du Manitoba.

    Je demanderais à M. Rondinelli de commencer son témoignage, qui devra durer environ dix minutes, puis nous laisserons la parole aux représentants du Barreau canadien. Ensuite les membres pourront poser des questions.

    Monsieur Rondinelli, vous avez environ dix minutes.

+-

    Me Vincenzo Rondinelli (représentant, Criminal Lawyers Association): Bonjour. Je suis le représentant de la Criminel Lawyers Association. J'aimerais remercier le comité de m'avoir invité à vous faire part de notre point de vue au sujet du projet de loi C-13, même si nous aimerions aussi pouvoir, lors de la révision prochaine des mesures législatives de la banque de données génétiques dans son ensemble, nous aimerions déposer des mémoires plus détaillés au sujet de l'ensemble des mesures législatives.

    Je vais me limiter aujourd'hui à mon mémoire sur le projet de loi C-13, mais les membres du comité pourront poser des questions sur l'ensemble des mesures législative.

    Avant de présenter mon mémoire, je tiens à préciser que je ne suis pas ici pour critiquer la banque de données génétiques. L'Association des avocats criminalistes n'adoptera jamais cette position. Nous nous réjouissons du succès remporté par la banque de données génétiques, comme tous les autres Canadiens. Comme nous le constatons, la banque de données a eu beaucoup de succès jusqu'à présent. Toutefois, en raison de sa nature délicate et des répercussions grave sur la protection de la vie privée, nous demeurons convaincus qu'il est nécessaire d'assurer un suivi équilibré à mesure que nous allons de l'avant.

    Je vais parler de deux sujets qui touchent le projet de loi C-13. L'un a une portée plus générale et est davantage un avertissement sur l'inclusion des infractions nouvellement désignées qu'il est proposé d'ajouter à la liste. Le deuxième sujet porte sur une question de procédure pour le traitement des ordonnances entachées de vices. Voilà les deux mémoires que j'ai présentés, mais je ne vais pas limiter mes commentaires à ces documents.

    En ce qui concerne la proposition d'ajouter de nouvelles infractions aux listes, je crois qu'il s'agit d'une « dérive législative ». C'est du moins le terme que j'ai utilisé lors de mes interventions—et j'ai pris la parole récemment lors d'un symposium sur l'ADN. C'est une dérive législative en ce sens que l'on comment à ajouter de plus en plus d'infractions à une loi établie au départ pour certaines infractions et certains contrevenants. Nous nous retrouvons en bout de ligne avec une nouvelle législation qui est devenue un monstre et qui ne respecte pas l'objet pour lequel elle a été adoptée.

    Si nous examinons ce qui s'est passé et la progression des lois régissant le prélèvement de substances corporelles à des fins d'analyse génétique au Canada, nous voyons des signes de cette dérive législative, et je vais vous expliquer pourquoi. Ce phénomène ne se produit pas seulement au Canada; nous observons la même chose aux États-Unis et au Royaume-Uni. Limitons-nous au Canada. En 1995, lorsque le régime de mandat relatif aux analyses génétiques a été adopté pour la première fois, il n'y avait pas vraiment deux listes d'infractions primaires et secondaires, mais plutôt une seule liste d'envergure. Dans l'ensemble, la liste portait sur des infractions graves et surtout des infractions où il était possible de retrouver sur la scène du crime des substances corporelles pouvant être utilisées à des fins d'analyse génétique. On parle ici de crimes violents—et surtout d'agressions sexuelles—car dans ces cas, il est évident qu'il est possible qu'il y ait des substances corporelles sur les lieux du crime.

    Reportons-nous cinq années plus tard, en l'an 2000, lorsque les mesures législatives régissant la banque de données génétiques ont été adoptées. La liste a été divisée en deux, pour différencier les infractions primaires et les infractions secondaires. Il semble que c'est pour tenir compte de la gravité et de la probabilité de retrouver des substances corporelles aux fins d'analyse génétique que le Parlement a séparé la liste en deux, pour que différents tests soient effectués lorsqu'il y a ordonnance de prélèvement pour la banque de données génétiques.

    Cependant, d'autres infractions qui ont été ajoutées à ces listes. Les infractions lors de la conduite automobile en sont un bon exemple. Dans la liste des infractions secondaires, on a ajouté l'utilisation dangereuse de véhicules causant des lésions corporelles ou la mort et la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles ou la mort. D'autres infractions ont été ajoutées, et il en résulte la dérive dont je vous ai parlée.

    Nous nous retrouvons aujourd'hui avec le projet de loi C-13 et l'on propose d'ajouter toute une gamme d'infractions à la liste. Bien sûr, avec la révision qui s'en vient, je suis certain qu'on essayera d'ajouter davantage d'infractions, d'ajouter une catégorie, etc.

    On pourrait ajouter des infractions comme le fait de vivre des produits de la prostitution. J'utilise simplement cela à titre d'exemple, mais on pourrait ajouter d'autres types d'infractions à la liste.

¿  +-(0905)  

    Si nous prenons cette infraction à titre d'exemple, lorsque la mesure sur les infractions graves et la probabilité de retrouver une substance corporelle sur les lieux du crime a été adoptée pour la première fois en 1995, on pourrait dire que vivre des produits de la prostitution—et l'on parle de personnes qui ont moins de 18 ans—est une infraction pour laquelle il est probable de retrouver une substance corporelle sur les lieux. Je crois que c'est très sournois. Je ne sais pas si cette infraction peut se retrouver dans la liste des infractions primaires.

    Mais sans tenir compte des infractions, nous constatons actuellement, maintenant que la liste a été élargie pour inclure divers contrevenants—ceux qui ne sont pas tenus criminellement responsables en raison de troubles mentaux. La dérive législative est encore plus marquée dans ce cas, car elle ne porte pas uniquement sur les infractions, mais sur les contrevenants eux-mêmes, et l'on essayera à coup sûr d'ajouter d'autres infractions.

    Je vous dis tout ceci pour vous mettre en garde. Je ne veux pas parler des données de la police, ni de la société de surveillance, mais il faut garder en mémoire qu'il faut essayer d'équilibrer les droits de la personne et la protection de la société.

    Cette dérive législative ne s'observe pas uniquement au Canada. Au Royaume-Uni, bien sûr, ils sont très en avance en ce qui concerne les données de la banque de données et la manière dont ces données sont recueillies, etc. Aux États-Unis, ce phénomène se produit d'une manière assez marquée : au début, il s'agissait vraiment d'infractions graves, d'agressions sexuelles, et maintenant, on vise tous les délits.

    On a même fait des pressions pour intervenir au moment de l'arrestation, car il s'agit d'obtenir des prélèvements... Dans les enjeux électoraux de la dernière élection présidentielle, en Californie, on a adopté la proposition 69, qui propose de recueillir des échantillons d'ADN lors des arrestations, mais cette partie de la proposition n'entrera en vigueur qu'en 2009. Il s'agit néanmoins d'une dérive législative.

    Pour en revenir à nos oignons, si je puis m'exprimer ainsi, la partie du projet de loi C-13 qui est à mon avis très utile dans les pratiques quotidiennes, les questions de procédure, dont certaines ont été ajoutées au projet de loi et ont suivi leur cours, mais il est bon d'avoir ces aspects dans la loi, par exemple, pour la Couronne qui s'occupe des infractions secondaires. Nous avons vu cela dans les tribunaux, mais il n'y a pas eu de loi à ce sujet.

    J'aimerais parler de la situation des ordonnances entachées de vices. Il y avait clairement une lacune dans la loi, car selon les derniers chiffres que j'ai consultés de la banque de données génétiques, 522 échantillons ont été soumis à la banque de données mais n'auraient pas dû l'être. Alors, essentiellement, des ordonnances ont été rendues sans motif valable, notamment parce qu'il s'agissait d'infractions qui ne faisaient pas partie de la liste. Il y a eu dans cela des infractions liées à la drogue. Je sais que certains de mes collègues se sont plaints que des juges ont rendu des ordonnances en de prélèvement pour la banque de données génétique pour des infractions liées à la drogue ne faisant même pas partie du Code criminel. C'est le genre de choses que l'on freine en aval, avant l'étape de la banque de données génétiques.

    Je crois que cinq prélèvements ont été faits avec le consentement de l'accusé ou du contrevenant, mais il s'agissait d'infractions ne faisant pas partie de la liste qu'ils ont arrêté au début. Alors, la disposition du projet de loi qui porte sur cela permet de savoir comment manipuler ces échantillons lorsqu'ils sont recueillis—mais ils ne devraient même pas être recueillis. Actuellement, le commissaire, d'après ce que je comprends, retient ces 522 échantillons quelque part dans la banque de données. Ici encore, puisqu'il n'y a pas de législation à ce sujet, je ne suis pas très sûr de la procédure suivie pour les conserver, mais ils sont encore là.

    Les dispositions du nouveau projet de loi permettent donc essentiellement au commissaire de donner avis au procureur en général de la province d'où provient l'ordonnance pour l'examiner davantage, pour déterminer la question, à savoir s'il s'agit simplement d'une erreur administrative ou si c'est une erreur fondamentale, par exemple le prélèvement n'aurait pas dû être autorisé dès le départ. Ensuite, si le commissaire obtient un avis d'un autre procureur général à l'effet que l'ordonnance doit être annulée, toute une procédure est mise en place et le commissaire détruit l'échantillon et tout renseignement s'y rapportant.

    Nous remarquons qu'il s'agit simplement d'une clause procédurale, et qu'elle devrait avoir un effet rétroactif. Cependant, je dirais qu'il aurait été plus avantageux de le préciser dans le Code criminel pour éviter tout litige quant à son entrée en vigueur rétroactive, et surtout pour traiter ces échantillons qui sont là actuellement. Si vous regardez la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques dans sa forme actuelle, vous verrez qu'il y a un article—l'article 10—qui stipule que le commissaire peut en tout temps détruire tout ou partie des substances corporelles conservées s'il considère qu'elles ne sont plus nécessaires pour des analyses génétiques à des fins médico-légales.

¿  +-(0910)  

    Selon nous, le commissaire aurait dû, en vertu de cet article, avoir détruit ces 522 échantillons, mais cela n'a pas été fait et ils sont encore entreposés. Alors, s'il était mentionné de manière explicite que cet article s'appliquait de manière rétroactive, les 522 échantillons auraient été traités rapidement et en conséquence.

    Un deuxième aspect du régime de mandat portant sur les vices dans le projet de loi C-13, et qui je crois pourrait permettre d'améliorer la disposition si elle est corrigée, est l'absence d'une disposition d'avis dans le projet de loi C-13. Par « avis », je veux dire qu'il conviendrait de donner un avis donné aux contrevenants qui ont fournit des substances corporelles à des fins d'analyse génétique lorsque l'on a décidé qu'un échantillon devait être détruit parce qu'il concernait une infraction non désignée ou pour toute autre raison. On devrait faire des efforts raisonnables pour donner un avis ou pour informer le contrevenant qu'un échantillon a été détruit.

    Maintenant, je sais que parfois les contrevenants sont difficiles à retracer. C'est pourquoi j'ai dit qu'on devrait faire des efforts « raisonnables », car certains individus ne sont que de passage et il est très difficile de tenir à jour des adresses de domicile fixe pour ces personnes. Il est clair que dans ces cas, il serait difficile de les retracer. C'est pourquoi il faudrait faire des efforts raisonnables pour informer ces personnes de ce qui est arrivé à leur échantillon d'ADN. Cette façon de faire est simplement conforme aux idéaux de la société canadienne en ce qui a trait aux renseignements personnels.

    Il y a eu récemment l'adoption de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, la LPRPDE, qui a réellement mis l'emphase sur l'importance d'informer les Canadiens de la manière dont les renseignements personnels à leur sujet sont recueillis, utilisés, enlevés, détruits, etc. En conformité avec ces principes, il faudrait donner un avis aux contrevenants lorsque leurs échantillons d'ADN ne sont plus nécessaires pour la banque de données génétiques et qu'ils ont été détruits.

    Je sais qu'il y aura d'autres questions et je ne veux pas aborder d'autres sujets prématurément. Je vais mettre fin à ma présentation maintenant et j'aborderai les autres sujets durant la période de questions, si c'est nécessaire.

¿  +-(0915)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Rondinelli.

    Avant de laisser la parole à l'Association du Barreau canadien, je voudrais m'adresser aux membres. M. Gary Rosenfeldt de l'organisme Victims of Violence Centre for Missing Children devait, selon l'ordre du jour, comparaître aujourd'hui, mais il n'a pu venir. Le greffier le contactera pour vérifier s'il peut revenir.

    Nous allons maintenant laisser la parole à l'Association du Barreau canadien, et je crois que c'est Mme Bercovitch qui va commencer.

+-

    Mme Joan Bercovitch (directrice principale, Affaires juridiques et gouvernementales, Association du Barreau canadien): Merci, et je vous remercie également au nom de l'Association du Barreau canadien pour nous avoir permis de présenter notre mémoire sur le projet de loi C-13.

    Le Barreau canadien est une association qui comprend plus de 38 000 juristes des quatre coins du pays.

[Français]

    L'amélioration du droit et de l'administration de la justice comptent parmi les buts et objectifs de l'association. Les propos que nous avançons aujourd'hui concordent avec ces deux objectifs.

[Traduction]

    C'est Joshua Weinstein, un membre de l'exécutif national de la section nationale de droit pénal, qui présentera notre mémoire. Notre section de droit pénal comprend des avocats de la défense et des procureurs, alors l'opinion véhiculée dans notre mémoire et les commentaires que Josh fera aujourd'hui sont conformes à l'opinion générale des membres du Barreau, des avocats de la défense, et des avocats de la Couronne. Josh pratique le droit criminel à Winnipeg. Il présentera notre mémoire puis je répondrai à vos questions.

+-

    M. Joshua Weinstein (président, Division du Manitoba, Association du Barreau canadien): Merci.

    Je vous remercie, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres honorables du comité.

    Je voudrais tout d'abord remercier les autres membres de la section de droit pénal qui nous ont aidés à rédiger ce mémoire, ainsi que Mme Bercovitch, et aussi Mme Gaylene Schellenberg qui nous a aidés lors de la rédaction.

    Comme Mme Bercovitch l'a dit, ce mémoire est en fait le rassemblement de plusieurs idées provenant des avocats de la Couronne et des avocats de la défense. Nous croyons qu'il représente un point de vue équilibré; il y a eu beaucoup de va et vient. Le mémoire que nous vous présentons aujourd'hui portera essentiellement sur l'équilibre, la manière de traiter certaines questions. Dans tous les contextes, il faut toujours tenir compte des besoin de la police, essayer de résoudre les crimes et de protéger la société, et de la nécessité de respecter la vie privée des personnes.

    Je voudrais tout d'abord préciser que nous avons déjà présenté des mémoires—et nous vous en remercions. C'était en 1996 et en 2002. Nos mémoires continuent de refléter notre position antérieure.

    Voici les principes généraux qui ont été véhiculés dans nos mémoires antérieurs et dans le mémoire actuel. Tout d'abord, il faut reconnaître que l'inscription d'une personne dans une banque de données génétiques et le prélèvement d'échantillon constituent une ingérence dans l'intégrité physique et dans la vie privée de cette personne. Il y a deux problèmes ici : le prélèvement de l'échantillon et sa conservation. Selon nous, la conservation de l'échantillon est l'ingérence la plus grave.

    Deuxièmement, il faut reconnaître que le droit au respect de la vie privée ne devrait être abrogé qu'aux conditions les plus strictes et conformes à des objectifs qui peuvent justifier cela. Nous voulons savoir ce qui justifie un tel acte et la raison—disons qu'il s'agit d'une liste d'infractions primaires—et si l'objectif est atteint avec l'allongement de cette liste, et quelles seront les répercussions en matière de liberté individuelle.

    Nous vous demandons de faire preuve de prudence et de suivre continuellement les principes de la Charte lorsque vous examinez la possibilité d'allonger la liste. Il y a bien sûr des questions de la Charte qui sont en jeu, et ultimement, il faudra déterminer si la loi respecte la Charte. Nous parlerons tout à l'heure de la nécessité d'avoir des preuves convaincantes pour justifier certaines choses—pour justifier les modifications, comme l'allongement de la liste, c'est-à-dire des éléments qui justifient cet ajout. Nous sommes également préoccupés au sujet de la rétroactivité dans le cas de certains régimes d'infractions commises avant la mise en vigueur de la législation en juin 2000.

    Nous sommes d'avis que la banque de données génétiques doit servir non seulement d'outil pour la cueillette de preuves inculpatoires, mais aussi pour la cueillette de preuves disculpatoires, de manière à éliminer des suspects et à protéger les personnes qui sont innocentes.

    Au sujet des modifications à la liste, nous croyons que le moment le plus propice serait après avoir effectué la révision approfondie de la banque de données génétiques. Ce processus sera effectué cette année, d'après ce que nous en savons; s'il y a des problèmes, vous vous en apercevrez d'abord lors de l'examen d'ensemble. Nous vous demandons alors d'examiner les modifications par la suite pour voir si elles sont nécessaires.

    Je vais parler tout d'abord de l'allongement de la liste des infractions primaires, des articles 2 à 6. Mon ami de l'Association des avocats criminalistes parle de dérive législative. J'utiliserais un autre terme pour décrire ce qui s'est produit : un vol de gène. C'est essentiellement ce que l'on a fait lorsque l'on allonge sans arrêt cette liste.

    Ces infractions sont des infractions pour lesquelles un large éventail de sentences peut être imposé. Nous avons toujours été d'avis que les dispositions portant sur les analyses génétiques faisaient partie des éléments de punition. Si vous pouviez au moins reconnaître qu'il y a toute une gamme de sentences possibles, alors cela explique la raison pour laquelle ces infractions ne devraient pas faire partie des infractions primaires.

¿  +-(0920)  

    Je vous donne un exemple. Quelque chose qui attire beaucoup l'attention, ce sont les dispositions relatives à la pornographie juvénile et à la possession de pornographie juvénile. En ce qui concerne cette infraction, on peut se demander, premièrement, pourquoi il n'y a pas de peine minimale. Cela peut changer, mais il n'y a pas de peine minimale et cette dernière varie depuis l'absolution jusqu'à l'emprisonnement réel.

    Dans un certain nombre de cas vous avez une personne qui possède une importante collection, qui a catalogué la pornographie infantile et qui a des antécédents d'attentat aux moeurs. Comparez cela à une personne de 18 ans qui possède une dizaine d'images qu'elle a téléchargées la veille. Il est évident que les tribunaux vont voir ces deux personnes d'un oeil différent, mais en bout de ligne, en vertu du régime proposé, il est absolument obligatoire qu'un échantillon soit prélevé chez ces deux personnes. Il n'y a pas de distinction.

    Ce que nous vous demandons, c'est que si vous devez inclure ces personnes dans une liste quelconque, que ce soit uniquement dans la liste des infractions secondaires, qui prévoit une analyse par un arbitre indépendant qui déterminera, en fonction de la nature de l'infraction et de la nature du contrevenant, si une telle ordonnance devrait être imposée.

    Pour ce qui est des citations, nous avons dit que « le risque de violence future est si minime que l'atteinte à la vie privée l'emporte considérablement sur tout risque futur pour la société ». Cette citation se trouve à la page 3 de la version anglaise et à la page 4 de la version française. C'est sur elle que nous nous sommes fondés pour dire que les infractions qui figurent dans les clauses 2 à 6 du projet de loi ne devraient pas être ajoutées à la liste des infractions primaires.

    Encore une fois, en ce qui concerne cette question, si on devait prétendre que nous avons un problème grave et que cela concerne des infractions à l'endroit d'enfants ou de personnes vulnérables, il y a tout de même des infractions pour lesquelles la Couronne peut chercher à obtenir une ordonnance si vous placez les infractions dans la liste des infractions secondaires, mais il reviendra ultimement à un juge d'en décider. Il y a une protection additionnelle liée au fait que toutes les circonstances seront soupesées et que tout sera soupesé à la lumière du fait que ces infractions sont d'un type, encore une fois, qui comporte un spectre très large d'issues possibles.

    Évidemment, c'est la raison pour laquelle nous disons qu'il faut donner la préférence au régime des infractions secondaires. Pour les infractions violentes graves, l'homicide, nous sommes toujours d'accord pour qu'elles soient incluses dans le régime des infractions primaires, mais pour les infractions proposées, nous nous y opposons respectueusement.

    La question suivante porte sur la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Nous trouvons troublantes certaines modifications proposées. Nous avons ici un régime qui existe déjà dans le Code criminel qui traite de la question de la non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux et qui prévoit qu'en fin de compte, la personne ne sera pas reconnue coupable. Cela fait partie du Code criminel et c'est encore le cas aujourd'hui. À la limite, une personne peut faire l'objet d'une absolution. Ayant commis une infraction, cette personne est réputée ne pas avoir commis cette infraction et n'est pas reconnue coupable.

    Pourtant, les modifications proposées incluraient ces personnes dans le régime qui traite de la jeunesse et des personnes absoutes en vertu du Code criminel. En faisant cela, ce que nous disons est conforme à notre dernière position. Si vous voulez les traiter comme si elles n'avaient pas été reconnues coupables, alors vous ne devriez pas les inclure dans un régime qui s'applique aux personnes qui ont été reconnues coupables. L'inclusion de ces groupes de personnes dans ce régime est troublante.

    Encore une fois, nous reconnaissons qu'il y a des objectifs qui sont poursuivis en termes de solution des crimes. Encore une fois, si cela concerne des infractions violentes graves, des homicides ou des infractions graves d'ordre sexuel, à défaut de ne pas les inclure du tout dans les régimes portant sur les empreintes génétiques, l'argument subsidiaire est de les inclure dans le régime des infractions secondaires.

    En vertu de ce régime, pour les jeunes délinquants et les personnes absoutes, non seulement la question est-elle à la discrétion du juge, mais en vertu de ces dispositions, il y a le critère additionnel, la protection additionnelle, qui est liée à cette analyse. Elle tient compte des répercussions que cela aura sur la personne, de la nature de l'infraction et de sa gravité. En bout de ligne, les répercussions sur le contrevenant sont l'élément le plus important dans le cas de quelqu'un qui a reçu un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux.

¿  +-(0925)  

    Imaginez simplement ceci. Cette question est également liée à la question d'avoir à obtenir un nouveau prélèvement, ou à la question de la rétroactivité, dans le fait d'avoir à exiger un prélèvement d'une personne qui a reçu un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou qui a commis dans le passé une infraction alors qu'elle ne souffrait pas de maladie mentale et qui en souffre maintenant. Combien de fois avons-nous entendu parler de certains contrevenants qui ont reçu un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux et dont l'affection mentale pourrait être le délire paranoïde? De quoi? Des gouvernements qui font intrusion dans leur vie privée. Imaginez l'effet sur ces personnes qui ont subi un traitement et qui sont maintenant absoutes en vertu des dispositions de la loi et qui ne sont pas reconnues coupables et à qui on dit maintenant qu'elles doivent se laisser piquer ou accepter qu'on leur fasse un prélèvement par écouvillonnage. Non seulement cela, mais si le prélèvement n'a pu être obtenu—il y a maintenant une disposition qui prévoit un nouveau prélèvement d'échantillon—, imaginez la personne qui est maintenant traitée, qui a reçu les bénéfices du traitement et à qui l'ont dit maintenant que le gouvernement doit lui faire un prélèvement à l'aide d'une piqûre ou faire un prélèvement d'une substance corporelle quelconque.

    C'est pour cette raison que nous avons toujours maintenu que les personnes ayant reçu un verdict « de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux » devraient faire l'objet d'un autre traitement en vertu du Code criminel, et c'est de cette manière qu'il faut les traiter.

    Côté citation, à la page 5 de la version anglaise et à la page 6 de la version française, nous avons :

La charge de la preuve devrait toujours reposer sur la poursuite dans le cadre de ces circonstances limitées

    —et c'est si cela est proposé en vertu du régime des infractions désignées, dans l'alternative—

et les infractions devraient toujours faire partie de la liste des infractions secondaires, permettant ainsi au tribunal de rendre une ordonnance sur le fondement de son pouvoir discrétionnaire. Lorsque l'on demande au tribunal de rendre une telle ordonnance, le juge doit tenir compte des critères qui figurent actuellement à l'alinéa 487.051(1)b) et au paragraphe 487.051(3) du Code criminel. Il doit aussi examiner attentivement le degré de risque futur que pose le transgresseur et les répercussions sur la protection du public dans les circonstances de l'espèce.

    Je veux parler de la rétroactivité en général. Je serai très bref sur cette question. Nous avons toujours soutenu, en ce qui concerne la rétroactivité, que cette dernière ne devrait être applicable que dans les cas les plus graves d'infraction avec violence—infraction d'ordre sexuel et homicide—. Nous sommes fortement d'avis qu'il ne devrait plus y avoir d'ingérence dans la vie de ces personnes. Toutes les questions auraient dû avoir été traitées au moment où la sentence a été prononcée. Vous ne devriez pas revenir en arrière et importuner les personnes qui ont déjà été châtiée ou qui ont reçu leur peine avant la date où les modifications ont été adoptées, simplement parce que les dispositions ont changé.

    Je ne sais pas si mon temps est épuisé. C'est le cas.

    Je vais attendre vos questions. Merci.

[Français]

+-

    Le président: Je remercie les témoins pour leurs présentations. Nous passons maintenant aux questions.

    Monsieur Thompson, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Merci, monsieur le président, et merci, mesdames et messieurs, d'être présents ici aujourd'hui.

    Il y a quelque chose qui m'irrite particulièrement dans notre système de justice et dans certains des problèmes que nous avons dans notre pays dans certains domaines, une question qui, je crois, est vraiment prise à la légère et dont la gravité est incroyablement sous-estimée, et vous y avez fait allusion dans votre exposé, à savoir la pornographie juvénile. Des infractions de ce genre surviennent presque chaque jour quelque part au pays. Il y a même eu plus d'une ou deux tentatives pour essayer de faire cesser ce genre d'activités. C'est devenu une activité organisée; on sait maintenant que des bandes organisées et d'autres personnes sont activement mêlées à la distribution, ou quoi que ce soit d'autre, de ce matériel ordurier aux personnes de notre société qui s'y intéressent.

    En tant que porte-parole dans le domaine de la justice, j'ai passé beaucoup de temps à visiter les pénitenciers. J'ai passé beaucoup de temps à visiter des détenus qui sont en prison principalement à cause de délits sexuels à l'endroit des enfants. Je voulais parler particulièrement de cette question. Je n'ai presque pas rencontré de cas où les détenus m'ont dit que la pornographie juvénile n'avait pas joué un rôle dans le cheminement qui les a amenés à faire ce qu'ils ont fait—qu'ils s'adonnaient activement à cette dernière.

    Lorsque je vois la vulnérabilité des jeunes enfants et leur exploitation par des adultes par le biais de la pornographie juvénile, et que je vois un mémoire qui laisse entendre qu'il ne s'agit pas d'une infraction grave parce que les circonstances sont différentes... Nous avons une preuve assez solide dans ce pays que quiconque possède de la pornographie juvénile, ou qui en est dépendant ou qui l'utilise pour son intérêt personnel... Tôt ou tard un enfant finit par en payer le prix.

    Depuis 10 ans maintenant, différents groupes, et moi-même, ont fait des pressions pour que l'on règle cette question. Et elle n'est pas toujours réglée aujourd'hui. Je trouve très troublant que des personnes dans votre situation donnent un exposé qui laisse entendre que nous devons faire très attention à ces contrevenants qui sont arrêtés ou qui sont accusés de possession ou de quoi que ce soit d'autre lié à la pornographie juvénile, aussi bénin que cela puisse être. C'est quelque chose de grave dans notre pays qui met nos enfants à risque.

    Je suis désolé, mais je pense que la sécurité de nos enfants est de loin plus importante que le droit de toute personne qui passe son temps à se délecter de pornographie juvénile, qu'il s'agisse de violence, ou qu'il n'y ait pas d'intention, ou qu'il n'en sorte jamais rien. Nous ne pouvons prendre ce genre de pari avec la vie de nos enfants.

    Je trouve cela vraiment difficile à comprendre. Pourriez-vous, s'il vous plaît, m'expliquer ce qui fait que des mémoires de ce type mettent si peu d'accent sur les dangers qui existent aujourd'hui dans notre pays à cause de la pornographie juvénile; pourquoi cette question ne saute-t-elle pas aux yeux comme une question qu'il faut régler? Je ne vois pas cela dans vos mémoires et j'aimerais savoir pourquoi. S'il vous plaît, veuillez m'expliquer cela et m'aider à comprendre pourquoi j'ai tort.

¿  +-(0930)  

+-

    Le président: Monsieur Weinstein.

+-

    M. Joshua Weinstein: Je comprends votre point.

    Je veux dire d'emblée en ce qui concerne cette question, et vous traitez spécifiquement de la pornographie juvénile, que nous disons qu'elle ne peut pas faire l'objet de quelque régime que ce soit en termes de prélèvement d'ADN. Nous devons faire la distinction en ce qui concerne le prélèvement d'ADN en soit. Si nous disons qu'il fait partie de la peine infligée, il n'y a vraiment qu'une seule question : est-il ordonné ou non?

    Il se peut très bien qu'il y ait ces cas dont vous parlez. Il y a la distribution et il peut y avoir la production et cela peut être si grave et comporter de tels facteurs aggravants que la cour peut punir l'accusé très sévèrement. Mais alors, la question qui se pose est de savoir si une ordonnance de prélèvement d'ADN s'applique. Si l'infraction est placée dans ce régime des infractions secondaires, il se pourrait très bien qu'il soit tout de même ordonné. Dans le genre de circonstances dont vous parlez où il existe des facteurs aggravants, vous n'avez qu'à regarder les dispositions régissant les infractions secondaires et à déterminer s'il est dans le meilleur intérêt de l'administration de la justice de le faire. Dans les circonstances que vous avez décrites, où il y a tant de facteurs aggravants, cela pourrait être le cas.

    Mais il peut y avoir des cas qui sont de nature moins grave. Par cela, nous voulons dire que c'est uniquement la nature de certaines des infractions qui sont entendus par le tribunal. Le tribunal doit distinguer entre les personnes qui possèdent cinq ou dix photos et qui les ont eues pendant une journée et la personne qui a accumulé une collection et qui a peut-être décidé de passer à l'étape suivante—par exemple, elle a démarré une entreprise de distribution ou a commencé à produire de la pornographie juvénile elle-même. Je ne peux dire ce qui arriverait. Tout ce que nous disons, c'est qu'il faut que cela soit décidé par un arbitre indépendant. S'il y a des avantages à ordonner un prélèvement d'ADN dans cette circonstance particulière, ce sera fait.

¿  +-(0935)  

+-

    Le président: Monsieur Rondinelli, voulez-vous répondre à la question de M. Thompson?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je n'ai pas soulevé la question de la pornographie juvénile dans mon exposé. L'exemple que j'ai utilisé, c'est le fait de vivre des produits de la prostitution, mais je comprends votre point.

    Si les infractions liées à la conduite automobile sont ajoutées à la liste des infractions désignées dans la législation actuelle, je pense qu'il serait difficile de défendre l'idée que la pornographie juvénile ne soit pas ajoutée elle aussi à la liste. Si l'on regarde le critère à deux volets de la gravité de l'infraction, de toute évidence, elle est sérieuse. En ce qui a trait à la possibilité que certains échantillons soient trouvés sur les lieux du crime, je peux voir qu'il peut y avoir certains avantages à cela, également, parce qu'il pourrait y avoir certains échantillons de substance corporelle liés à la pornographie juvénile. Il m'est plus facile de voir cette question faire partie du régime que la conduite dangereuse d'un véhicule causant des lésions corporelles ou la mort. C'est le principal envahissement législatif dont je parle. Ce n'est pas que le régime ne doit pas inclure les infractions graves et, probablement, les infractions qui ont été omises initialement soit parce qu'elles n'existaient pas à ce moment-là ou parce que la société a maintenant plus d'expérience pour faire face à certaines questions. Il faudrait les ajouter à la liste. Alors, encore une fois, si l'on regarde ce qui figure maintenant sur la liste et si l'on compare cela à la pornographie juvénile, je pense qu'il s'agit d'une tâche difficile que d'essayer de défendre l'idée qu'elle ne devrait pas faire partie de la liste.

+-

    M. Myron Thompson: Merci de votre réponse. Je suis d'accord avec vous.

    Combien de temps me reste-t-il?

+-

    Le président: Moins 53 secondes.

+-

    M. Myron Thompson: Je veux simplement signaler que je trouve vraiment triste que de toutes les infractions—et je suis d'accord avec vous en ce qui concerne la conduite automobile et certaines autres choses—dont il est question le plus dans les médias et d'après les exposés faits par différentes personnes, la pornographie juvénile ose se glisser dans une partie de nos activités criminelles qui peut ne pas être si violente ou poser un risque si grave. Nous devons changer cette attitude. Je pense que toute personne responsable, que ce soit les avocats, les juges ou les tribunaux, doit commencer à insister sur le fait que la protection de nos enfants est de la plus haute importance et que nous devons mettre fin à cette absurdité.

+-

    Le président: Merci, monsieur Thompson.

    Monsieur Marceau, cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aussi aux témoins d'être venus ce matin nous présenter leurs points de vue.

    Maître Weinstein, j'ai été surpris de vous entendre dire, si j'ai bien compris, que selon vous,

[Traduction]

    « le prélèvement d'ADN fait partie du châtiment ».

[Français]

    C'était quelque chose comme cela. Je voudrais comprendre le raisonnement derrière cela.

    En quoi le prélèvement d'un échantillon d'ADN dans la salive ou une goutte de sang ferait-il partie de la punition? On a visité la banque hier. Au secondaire, quand on testait notre groupe sanguin, on se faisait une piqûre sur le bout du doigt. Ce n'était pas une punition. Je ne comprends pas en quoi cela ferait partie de la punition.

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Peut-être que la meilleure façon de le dire, c'est que cela fait tout de même partie du processus de détermination de la peine. Cela fait partie de la même chose. Je pense que nous avons eu des tribunaux dans le passé qui ont dit que les ordonnances de dédommagement, qui sont entrées en vigueur en termes d'obtenir une ordonnance de dédommagement distincte au civil... que le paiement de dédommagement est considéré comme faisant partie du châtiment. Alors, il y a un certain nombre de choses qui peuvent sembler des questions administratives qui sont traitées dans la détermination de la peine, mais elles font toutes parties de la détermination de la peine—ordonnance interdisant d'être en possession d'armes, à savoir si elles devraient être ordonnées ou non; des ordonnances de prélèvement d'ADN, à savoir si elles devraient être ordonnées ou non. Pour ce qui est du prélèvement de gènes, cette observation a été faite davantage en réponse à une observation faite par mon collègue sur l'envahissement législatif.

    Mais cela a été notre position et je pense qu'elle est conforme aux positions prises par les tribunaux, pas nécessairement en ce qui a trait aux ordonnances de prélèvement d'ADN, mais uniquement en fonction du fait que les choses qui surviennent au moment de la détermination de la peine en font partie.

    Pour être un peu technique, si on traite de la question de la rétroactivité, s'il se trouve que nous prélevons un échantillon chez quelqu'un qui a été trouvé coupable d'une certaine infraction avant juin 2000, l'alinéa 11i) de la Charte dit que si des dispositions ont été adoptées qui prévoient maintenant une peine plus sévère pour la personne entre le moment où l'infraction a été perpétrée et le moment de la sentence—si vous examinez quelque chose de semblable, la réponse normale, c'est que vous ne pouvez changer les règles du jeu au beau milieu de la partie. Exiger alors que ces personnes reviennent après que la sentence a été prononcée, c'est à ce moment-là que je dis, du fait que l'ordonnance de prélèvement d'ADN fait partie de la peine, c'est de cette façon que nous prenons cela...

¿  +-(0940)  

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Il y a une différence fondamentale entre faire partie du sentencing, comme vous dites, et faire partie de la punition.

    Je reviens à la question, que j'avais peut-être mal formulée. Lorsqu'une peine est prononcée à l'endroit d'un accusé qui a été reconnu coupable, donc un criminel, d'une part, l'État envoie le message à la société que le crime est puni, que cela a une certaine valeur et qu'il y aura des conséquences si on commet le même acte. D'autre part, ce message est envoyé à l'individu en tant que tel, cela fait partie de la base philosophique du système criminel.

    En quoi l'obligation pour une personne de donner une goutte de son sang aurait-elle un effet quelconque sur l'attitude de cet individu ou sur la société en général? En quoi est-ce une punition?

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Encore une fois, juste pour clarification, je dis que cela fait davantage partie du processus de détermination de la peine. Si quelqu'un devait débattre l'idée, disons, qu'il a été puni plus sévèrement parce qu'un échantillon d'ADN a été prélevé, notre exposé présente un argument beaucoup plus fondamental que cela. Il est fondé sur le respect de l'intégrité physique et des droits de la personne.

    Si l'argument offert, c'est que la personne n'a aucun droit en ce qui a trait à l'intrusion dans sa vie personnelle ou au respect de son intégrité physique, alors c'est une question, mais l'exposé en général est fondé davantage sur l'analyse de cette infraction quelconque. Qu'est-il arrivé dans cette infraction quelconque? Examinons le contrevenant et voyons si l'ordonnance doit être émise ou non.

    Tout ce que je dirais, en général, c'est que lorsque nous regardons certaines des infractions, il faut se demander quel est le problème que nous essayons de résoudre. Est-ce que c'est le fait que les policiers sont incapables de résoudre les cas de pornographie juvénile parce qu'ils n'ont pas d'ADN—qu'un certain nombre de cas demeurent non résolus et que l'ADN résoudrait tous les problèmes? Si c'est le cas, alors peut-être que c'est là l'argument qui prime, mais il est évident que nous n'avons pas vu que...

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Si j'ai le temps, on reparlera de la liste. En effet, il y a certains illogismes dans la façon dont la liste a été faite, notamment au niveau des infractions primaires et secondaires.

    Je veux revenir à ce que vous avez appelé invasion of privacy. Hier, lorsque nous avons visité la banque, il a été intéressant de voir son fonctionnement. J'aimerais que vous m'expliquiez en quoi le fait d'aller chercher de la salive dans la bouche, d'aller chercher des cheveux ou encore une goutte de sang est pire sur le plan de la vie privée et respecte moins la vie privée que de faire dix empreintes de doigts. Quelle est la différence entre faire une piqûre une, deux, trois ou quatre fois, ou tremper ses doigts dans l'encre 10 fois?

    Est-ce le geste lui-même qui constitue une invasion dans la vie privée, selon vous, ou le fait que la banque garde une partie du matériel génétique pendant une période assez importante?

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Merci de cette question.

    Cela me ramène à l'un des premiers points qui a été mentionné au début de l'exposé. La question de la vie privée concerne les deux. Elle concerne le prélèvement de l'échantillon et sa conservation, mais l'intrusion la plus importante en ce qui a trait au droit à la vie privée, c'est la conservation de l'échantillon.

    Je suis d'accord : il peut y avoir certaines circonstances. Si j'ouvre une porte, je peux laisser de l'ADN sur place, mais c'est la conservation de l'échantillon qui, à nos yeux, est l'atteinte la plus sérieuse à la vie privée de cette personne.

¿  +-(0945)  

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Marceau.

[Traduction]

    Monsieur Comartin, vous avez sept minutes.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président, et merci à vous tous d'être venus.

    Monsieur Rondinelli, sur la question de la rétroactivité, vous dites que votre source d'information est le site Web de la banque. Est-il clair que ces gens conservent encore ces 522 échantillons?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: L'information que j'ai reçue est fondée sur des ouï-dire. Je ne l'ai ni vue ni lue. J'ai eu cette information à la première réunion du comité à laquelle assistaient le ministre de la Justice et deux membres du ministère de la Justice. Ils ont mentionné que le commissaire les conservait, qu'ils étaient encore retenus. À ma connaissance, ils existent encore, mais je n'ai pas pu trouver dans leur documentation où ils se trouvent. Je répète que ce n'était qu'au cours de discussions informelles avec d'autres personnes.

+-

    M. Joe Comartin: En ce qui concerne l'article 10 du projet de loi, êtes-vous satisfait des procédures? C'est seulement parce que vous voulez qu'elles soient rétroactives à ces 522 échantillons.

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Oui. Au symposium du mois de décembre tenu à l'école de droit d'Osgoode Hall, un avocat de la Couronne faisait partie de mon groupe et nous avons parlé de la banque des données génétiques. Ils pensaient que c'était un peu cher à cause du retard et de l'ajout d'un autre palier de bureaucratie.

    Nous pensons, toutefois, qu'il vaut vraiment mieux avoir une loi que d'avoir le mécanisme non réglementé qui existe aujourd'hui. Par exemple—et cela est lié à votre première question—je ne suis pas sûr où se trouvent les 522 échantillons, mais au moins avec une loi en vigueur, je saurai qu'il y a un processus, bien que je recommande quand même d'y ajouter la disposition relative au préavis ainsi la rétroactivité.

+-

    M. Joe Comartin: Ceci est pour tout le monde.

    Nous avons reçu des preuves, même hier à la banque, qu'en fait jusqu'à présent les articles n'ont pas été utilisés dans plus d'environ 50 p. 100 des cas. il n'y a pas de décomposition des 50 p. 100 qui n'ai été demandée—qu'elle ait été demandée ou non, que la Couronne ne l'ait pas demandée ou non ou que le tribunal, le juge, ait refusé ou non de rendre l'ordonnance. J'ignore donc le pourcentage.

    Les informations issues de plusieurs sources indiquent qu'il y avait de vraie lacune au niveau de la formation des juges et des procureurs. Pouvez-vous nous faire part de votre expérience concernant l'utilisation de ces articles du Code?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je suis d'accord avec votre dernière remarque. C'est vraiment une question de formation ou d'enseignement à ce stade. Je suis l'auteur d'un mensuel DNA Netletter et j'ai suivi les affaires d'ordonnances de banque de données dès le commencement, dès la mise en vigueur de la loi. Je suis toujours surpris du fait que dans certaines décisions, que je lis mensuellement, le juge ne tient même pas compte des articles portant sur les infractions secondaires et des mesures à prendre. Il décide de lui-même en disant « Je vais donner une deuxième chance à M. X et je ne vais pas rendre l'ordonnance de prélèvement. » Ce n'est encore pas vraiment ce que le processus de prise de décision devrait être.

    Je ne blâme pas l'avocat de la Couronne, car tout le monde est concerné au tribunal. La défense a l'obligation de défendre au mieux les intérêts du client et de connaître la loi, ceci est également vrai pour l'avocat de la Couronne et bien sûr le juge. Mais à la lecture de ces décisions, ce qui est frappant, c'est vraiment le manque de connaissance au sujet de ce que les articles autorisent et demandent de faire. Nous constatons un ralentissement aux cours d'appel, maintenant qu'elles reçoivent enfin les affaires, où les juges les traitent au pied levé surtout en Ontario et en Alberta où l'on entend des remarques du genre : Il est très rare que pour une infraction primaire... vous êtes obligé de la donner. Dès qu'il y a plus de discussions d'appel, j'ai remarqué que les juges écoutent et mentionnerons ces affaires quand ils s'occupent des ordonnances de données de banque. Je pense qu'il y a des progrès. Je ne crois pas que les juges, la Couronne ou les avocats le font intentionnellement. C'est simplement qu'ils sont au stade de l'apprentissage.

    C'est peut-être un peu abrupt pour les associations de policiers avec toute l'attention que les médias portent sur l'appareil judiciaire ces derniers temps. Mais je pense que cela facilite la discussion. En lisant les titres, en entendant tous les participants, ils réaliseront qu'il leur faudra se pencher plus sérieusement sur cette question. Et au moins, les chiffres que je vois régulièrement ou mensuellement m'amènent à croire qu'on les accorde de plus en plus fréquemment. La situation ne peut que s'améliorer au fur et à mesure qu'il y a plus d'éducation et de formation.

¿  +-(0950)  

+-

    M. Joe Comartin: Merci.

+-

    M. Joshua Weinstein: Je n'ai plus rien à ajouter. Je pense que c'est une description fidèle de la situation dans notre province.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Comartin, vous avez encore deux minutes.

+-

    M. Joe Comartin: Au sujet des verdicts de non-responsabilité criminelle, monsieur Weinstein—je rappelle que nous avons entendu les témoignages de la Société canadienne de Schizophrénie au début de cette semaine—si je comprends la position de l'ABC, vous êtes prêt à exprimer votre accord. J'essaie de comprendre la logique, bien qu'une ordonnance de verdict de non-responsabilité criminelle ait été rendue vous êtes prêt à accepter qu'on les place dans la catégorie secondaire plutôt que primaire.

    Pouvez-vous m'expliquer la logique de ce raisonnement? La Société canadienne de Schizophrénie a dit qu'elle ne comprenait pas la façon dont nous traitons les accusés et ceux jugés comme tels.

+-

    M. Joshua Weinstein: C'était l'autre position. Notre première position, c'est qu'elles ne devraient pas être assujetties.

+-

    M. Joe Comartin: Est-ce toujours votre position?

+-

    M. Joshua Weinstein: Absolument. Elles ne devraient pas être assujetties à un régime quelconque, peut-être pour la même raison que celle de la Société canadienne de Schizophrénie. Il y a une raison pour laquelle elles suivent un itinéraire différent judiciaire. Si elles n'ont pas reçu une condamnation, elles ne devraient pas être traitées comme l'indique le régime des infractions primaires ou secondaires. C'est seulement dans l'alternative. Évidemment, nous laissons à des associations comme la Société canadienne de Schizophrénie le soin de parler des effets qu'elles auront sur un individu.

    La seule raison pour laquelle nous disons que dans l'alternative ce devrait être assujetti au régime des infractions secondaires, c'est parce qu'il y a cet équilibre. le paragraphe 487.051(1) proposé inclut les personnes ayant fait l'objet d'un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Nous proposons de les assujettir au régime des infractions secondaires, car cela servirait au mieux l'administration de la justice. Les critères qui serviraient au mieux l'administration de la justice indiquent :

Pour décider s'il a lieu de rendre une ordonnance visée à l'alinéa (1)b) le tribunal prend en compte le casier judiciaire de la personne, que celle-ci a ou non déjà fait l'objet d'un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux,

    ... nous mettons en question la partie qui suit...

l'effet qu'elle aurait sur la vie privée de l'intéressé et la sécurité de sa personne, la nature de l'infraction et les circonstances de sa perpétration. Il est tenu de motiver sa décision.

    La question de la sécurité de la personne ayant fait l'objet d'un verdict donnant responsabilité criminelle sera de la plus haute importance. Au moins, cette évaluation est prise en compte en vertu de cet article. C'est la raison pour laquelle que si nous devions choisir, nous dirions que même les infractions à caractère très violent, de nature sexuelle, les meurtres, devraient être considérées comme des infractions secondaires.

+-

    M. Joe Comartin: J'ai encore une petite question, monsieur le président.

    Savez-vous si le taux de récidive de personnes ayant fait l'objet de verdict de non-responsabilité criminelle a fait l'objet d'études?

+-

    M. Joshua Weinstein: Non. Rien ne prouve que ce soit lié à ces questions, si elles étaient traitées et que le taux de récidive est faible, je pense alors que cela renforce notre point de vue visant à ne pas les inclure ou bien de les inclure comme à titre d'infractions secondaires.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Macklin, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci, monsieur le président et merci aux témoins d'être venus aujourd'hui pour nous aider dans cette investigation et ce processus.

    Les cinq principes établis au début de l'exposé de l'ABC me posent problème, il me semble qu'ils ne tiennent pas compte des décisions prises par les tribunaux concernant la banque de données et ses objectifs.

    Je me réfère à l'affaire Briggs de la Cour d'appel, qui a pratiquement établi les utilisations pour la banque de données. Il a été dit que « ... l'obtention du profil d'identification génétique d'un délinquant ne servait pas simplement à dépister d'autres crimes commis par le délinquant. Ces dispositions poursuivent des fins beaucoup plus larges, dont les suivantes : dissuader les récidivistes potentiels; favoriser la sécurité de la collectivité; détecter l'oeuvre d'un tueur en série; aider à résoudre de vieux crimes; simplifier les enquêtes; et aider les personnes innocentes en leur permettant d'être écartées comme suspects très tôt dans le processus d'enquête ou en exonérant celles qui ont été injustement condamnées. »

    De plus, je crois que les tribunaux ont toujours maintenu que les personnes déclarées coupables d'un crime ont une attente moins grande en matière de protection de la vie privée et que l'entrave à la vie privée et à la sécurité d'une personne est minime. Compte tenu de cela, j'aimerais savoir ce que vous pensez des principes qui me paraissent très restrictifs et qui semblent se fonder sur, si j'ai bien compris, un effort visant à déterminer si un délinquant commettra ou non un crime grave à l'avenir.

    Pouvez-vous me dire ce que vous pensez du rapport entre ce que les tribunaux ont identifié et les principes que vous avez établis? Comme je l'ai dit, ils me paraissent extrêmement restrictifs.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Joshua Weinstein: Merci et merci d'avoir mentionné cette affaire.

    Je pense que c'est encore compatible avec les principes que nous avons énoncés. Je crois que nous avons surtout parlé du troisième principe qui mentionne que quelles que soient les mesures prises, elles devraient toujours être conformes à la Charte des droits et libertés. Je répondrai à votre question concernant nos propositions à savoir si elles sont restrictives ou non, mais nous ne disons pas que les objectifs ne sont pas louables ou ne sont pas appropriés; nous disons simplement qu'ils doivent être conformes à la Charte.

    En disant qu'ils sont restrictifs et que nous devons comprendre la raison pour laquelle la banque de données génétiques a été créée, nous disons que pour un certain nombre d'infractions—celles qui sont proposées comme infractions primaires—on peut encore obtenir des ordonnances. On peut encore obtenir des ordonnances dans le régime des infractions secondaires. Il n'y a pas de restrictions si vous donnez au juge le pouvoir et le juge a la possibilité de rendre ou non l'ordonnance. Si la demande d'un échantillon d'empreintes génétiques présente un intérêt, elle sera donnée. Si la demande ne présente pas d'intérêt, elle ne le sera pas. Tout ce que nous disons, c'est que le mécanisme obligatoire pour ce qui est des infractions primaires n'offre pas cet équilibre. Il suit ses propres critères et il tient aussi compte de la Charte.

    En parlant des autres buts de la banque des données génétiques, l'objectif est beaucoup plus large, celui de dissuader les récidivistes. Je ne vais pas parler de la dissuasion. On pourrait en discuter mais...

    Vous avez aussi parlé de la sécurité dans la société. Elle compte parmi les principales priorités des juges lorsqu'ils rendent ces ordonnances dans en vertu du régime des infractions secondaires. Ils ne sont pas impuissants; ils disposent de certains pouvoirs. Tout ce que nous disons, c'est de les laisser exercer ces pouvoirs, au lieu de mettre en place un régime obligatoire qui peut inclure le prélèvement et la conservation d'échantillons obtenus de personnes alors que ce n'est peut-être pas justifié étant donné la nature du délinquant et la nature de l'infraction.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Permettez-moi de revenir sur un point que vous venez de soulever puis je reviendrai à ce qu'a dit M. Marceau tout à l'heure... Vous avez parlé de la conformité du régime avec la Charte et pourtant en composant avec ce concept de sanction, un terme que vous utilisez fréquemment en référence à ce processus de banque... Les tribunaux ont bien dit que s'il s'agissait d'une sanction, elle ne pourrait être rétroactive et pourtant ils ont approuvé la rétroactivité et ont annoncé que notre mécanisme de rétroactivité est conforme à la Charte. N'est-ce pas une indication claire qu'il ne s'agit pas d'une sanction?

+-

    M. Joshua Weinstein: Comme nous l'avons déclaré, au sujet de la rétroactivité, je ne connais pas de cas ayant bénéficié d'un mécanisme de rétroactivité, qu'il soit ou non conforme à la Charte.

    Mais d'abord en ce qui a trait à la rétroactivité, il y a la question de la Charte—qui est la priorité—dont je pourrais parler précisément en trouvant d'autres affaires. En outre, en ce qui concerne le vide qui doit être comblé pour ce qui est d'un certain type d'infractions commises dans le passé et quelque chose dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle peut servir à prouver une infraction à la loi ou empêcher qu'un crime ne se commette.

    Je pense que le meilleur exemple serait de dire que si à la naissance, on nous prélevait à tous des échantillons de substances corporelles et qu'il y avait une banque de données génétiques. Nous pourrions résoudre beaucoup de crimes, mais nous ne le faisons pas parce qu'il y a le droit à la vie privée.

    Donc, le problème est vraiment l'absence de preuves concluantes, si la police venait à dire qu'il y a un certain nombre de ces types de crimes non résolus et qu'il faut des empreintes génétiques pour les résoudre—elles empêcheraient ce genre de crime. N'oublions pas que la police a toujours le pouvoir de prélever des échantillons chez des individus qu'elle considère comme suspects. Le Code criminel prévoit des prélèvements pour analyse génétique chez quelqu'un suspecté d'avoir commis une infraction, donc la police a encore ce pouvoir.

    C'est-à-dire que lorsque l'on consulte certaines dispositions—et je sais qu'elle attire l'attention, mais je reparle de la pornographie juvénile—où se trouve la preuve qui dit que la police a essayé de résoudre des centaines ou des milliers de ces affaires de pornographie juvénile et qu'elle ne fait rien parce qu'elle n'a pas de suspect, il n'y a absolument pas d'autres preuves, la police ne peut pas les retrouver au moyen de l'adresse IP, alors elle a besoin de leurs empreintes génétiques? Voilà le problème en ce qui concerne la rétroactivité d'un certain nombre de ces infractions pour lesquelles, à notre avis, il n'y a pas de justification.

À  +-(1000)  

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Monsieur, si vous me permettez d'ajouter quelque chose concernant l'aspect de la sanction, ce n'est pas nouveau. Même avant que le Canada applique ses lois, le débat faisait rage aux États-Unis et ils ont tous conclu qu'il n'y avait vraiment pas de sanction au niveau de la banque de données génétiques. Dans l'affaire Briggs, ils ont en fait parlé de l'alinéa 11i) et le fait qu'il ne s'agissait pas d'une sanction, surtout avec l'empiètement minimal, comme nous l'a dit M. Marceau.

    Toutefois, la Cour suprême du Canada a donné une autorisation d'appel d'incident dans un affaire, il s'agit de l'affaire R. c. Rodgers. C'est une affaire qui va être présentée devant un tribunal en Ontario. Elle porte plus la question ex parte des applications avec effet rétroactif, mais le tribunal va aussi aborder l'élément de sanction des applications avec effet rétroactif.

    La Cour d'appel de l'Ontario en a traité brièvement, mais étant donné que Briggs avait conclu que ce n'était pas une sanction, il n'y a pas vraiment eu de suite, on a dit que la décision avait été prise. Mais puisque la Cour suprême avait accordé l'autorisation d'appel d'incident, vous allez recevoir sous peu plus d'aide dans ce domaine. Je ne pense pas qu'une date a été fixée, mais ils examineront cette question. À ce jour, il n'y a pas eu d'affaire qui a déterminé si c'était une sanction ou non.

+-

    Le président: Merci.

    Merci, monsieur Macklin.

    Nous avons maintenant à la série des questions de trois minutes, monsieur Warawa.

+-

    M. Mark Warawa (Langley, PCC): Merci, monsieur le président et j'aimerais aussi remercier les témoins de s'être présentés aujourd'hui.

    Ma première question s'adresse à M. Rondinelli et à M. Weinstein. Avez-vous visité la banque de données de la GRC?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: J'aurais bien voulu, mais non, je ne l'ai pas visitée. J'ai visité le Centre des sciences judiciaires à Toronto et j'ai vu leurs méthodes d'investigation. Mais non, en ce qui me concerne, je n'ai pas vu les opérations. J'ai simplement lu de la documentation.

+-

    M. Joshua Weinstein: Pareil pour moi, j'ai aussi lu de la documentation, je n'ai pas été là-bas.

+-

    M. Mark Warawa: Je pense que vous y apprendrez beaucoup de choses et que cela vous sera utile dans vos présentations et vos recommandations. Vous êtes ici aujourd'hui en tant que témoins, nous ne sommes pas ici pour débattre, mais pour que vous nous fournissiez des renseignements. Si ne disposez pas de toutes les informations sur un sujet, vous n'êtes pas en mesure de nous fournir des renseignements complets. Je vous recommande fortement d'y aller afin de voir la gestion des échantillons d'empreintes génériques.

    Je pense que nous avons tous apprécié la visite et nous avons vu comment les échantillons étaient manipulés, pris connaissance du programme administratif qui assure que le nom de la personne qui a fourni l'échantillon ne s'y trouve pas. Il y a un code à barres et les renseignements...

À  +-(1005)  

+-

    Le président: Si je peux vous interrompre un instant, je ne pense pas qu'il soit juste de suggérer aux témoins de faire quelque chose qui, à mon avis, est hors de leur contrôle. Je ne pense pas les visites soient ouvertes à tout le monde, il faut faire des arrangements à l'avance et avoir un certain privilège.

    À titre d'information, je ne crois pas que nous devrions reprocher aux témoins de ne pas avoir fait quelque chose alors qu'ils ne peuvent rien.

+-

    M. Mark Warawa: Monsieur le président, mon intention n'est pas de faire des reproches.

    Si l'occasion se présente, je vous encourage vivement à le faire. C'est très informatif, voir la façon dont ces échantillons sont gérés.

    Au sujet de la question soulevée par M. Comartin, l'observation faite à propos des 50 p. 100 d'infractions désignées, en fait plus de 50 p. 100 de ces échantillons d'empreintes génériques n'avaient pas été prélevés.

    Vous avez reconnu que l'on au stade de l'apprentissage. Étiez-vous au courant pour ces 50 p. 100?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: J'ai vu les gros titres, surtout dans le Globe and Mail, Je crois que Christie Blatchford avait été la première à rédiger un article sur le sujet à la fin de 2004 ou peut-être même durant l'été. C'était à l'époque de l'enquête sur l'affaire Holly Jones à Toronto. Il s'agit du meurtre d'une jeune fille à Toronto qui a suscité beaucoup d'attention avec les empreintes génétiques, surtout parce qu'il y avait à cette époque à Toronto un coup de filet qui utilisait les empreintes génétiques. Le titre d'un article déclarait que les juges ne demandaient pas de prélèvements d'échantillon quand ils le devaient, surtout au début quand c'est vraiment obligatoire. Comme Briggs disait, c'est vraiment... ou Hendry, une autre affaire pour la Cour d'appel, seulement en de rares occasions qu'il ne devrait pas avoir de prélèvements.

    J'étais au courant de... des 50 p. 100, c'est probablement un chiffre approximatif. Je ne sais pas s'il est possible d'avoir un chiffre exact, mais je sais que c'était relativement élevé. Je ne sais qui calcule les chiffres ni de quelle façon on les calcule. Mais oui, j'étais au courant.

+-

    M. Mark Warawa: J'aurais trouvé utile, quand vous avez parlé des 522 auteurs d'infractions non désignées dont on aurait prélevé les empreintes génétiques, qu'on équilibre cela avec les 50 p. 100 d'occasions où elles auraient dû être prélevées mais ne l'ont pas été.

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je tiens à préciser une chose. Je ne sais pas si elles auraient dû être prises. Nous ne connaissons pas exactement les raisons pour lesquelles elles l'ont été. Il pourrait bien même y avoir des raisons qui feraient qu'elles n'auraient pas dû être prélevées pour commencer. Ce n'est pas automatique, même pour une infraction primaire. Bien qu'il soit très rare que ce soit contre-indiqué, il existe cette mesure de sauvegarde qui fait que si le préjudice est disproportionné comparativement aux intérêts privés de la personne et s'il l'emporte sur l'intérêt public, de tels échantillons ne devraient pas être pris.

    Je ne voudrais pas dire que ces 50 p. 100 d'échantillons devraient être dans la banque de données. Ce n'est pas ce que je pense.

    Une autre difficulté, c'est que dans certains cas qui sont médiatisés, les juges ne donnent pas de raison pour expliquer pourquoi les empreintes sont prises ou pas. Là encore, c'est une autre disposition obligatoire du Code criminel qui semble ne pas être appliquée... Je ne dirais pas régulièrement, mais il y a beaucoup de circonstances où elle ne l'est pas.

    Je le répète, ce n'est pas parce qu'ils disent qu'ils ne le demandent pas que cela signifie nécessairement que l'échantillon n'aurait pas dû être demandé.

+-

    M. Mark Warawa: Est-ce qu'il me reste un moment?

+-

    Le président: Non. Vos deux minutes sont déjà écoulées. Merci, monsieur Warawa.

[Français]

    Madame Bourgeois, vous avez trois minutes.

+-

    Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Merci, monsieur le président.

    Chers témoins, merci d'être là ce matin et de nous faire, chacun à votre façon, une mise en garde quant à la distinction à faire entre le pouvoir et l'abus de pouvoir. C'est du moins ainsi que je l'interprète. En effet, utiliser ou mettre sur pied la banque de données est signe de pouvoir, mais la façon dont on l'utilise, ou dont on en abuse, c'est autre chose.

    Monsieur Rondinelli, vous avez parlé de législation rampante et même d'extension rampante. Il y a une question qui me préoccupe depuis le tout début, soit l'utilisation de cette banque de données par les autres pays. On sait qu'on est très proches des États-Unis, on a même une frontière commune.

    Est-ce que l'utilisation de cette banque de données pourrait créer des problèmes? Je voudrais vous entendre à ce sujet.

    Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais poser mes questions en rafale. Je m'adresse maintenant à M. Weinstein. Vous avez utilisé l'exemple de gens qui souffrent de maladies mentales. On sait que ces gens-là, quand leur médication est contrôlée, courent moins de risques de commettre des gestes agressifs ou de devenir des criminels. C'est bien souvent dans leur famille immédiate que sont les victimes.

    La Société canadienne de schizophrénie est venue nous éclairer, mais j'aimerais que vous alliez plus loin, dans des exemples plus concrets. C'est de cela qu'on a besoin ici. Que représente l'existence de la banque de donnée pour les malades mentaux dans la vie de tous les jours?

À  +-(1010)  

[Traduction]

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je suppose que je répondrai en premier puisque la première question m'était adressée.

    Pour ce qui est de la coopération avec d'autres pays, plus précisément avec les États-Unis, parce que nous avons une frontière en commun avec eux, évidemment, et dans une certaine mesure le Royaume-Uni, je ne suis pas au courant d'enquêtes qui auraient traversé la mer, si je puis dire. Mais je sais qu'il y a eu une certaine coopération avec les États-Unis, pour repérer des suspects ou, d'ailleurs, je pense, même arriver à les inculper.

    Dans la loi telle qu'elle est en vigueur actuellement, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, il y a une disposition qui permet cette communication outre frontières. Le paragraphe 6(3), je pense, traite précisément de cet aspect et de la manière dont les banques de données ou enquêtes d'autres pays peuvent se greffer sur les nôtres, et vice versa.

    Cela ne s'est fait que très rarement, jusqu'à maintenant. Je ne pense pas que ça ait été plus de quatre ou cinq fois. Personnellement, je crois qu'il faudrait que cela se fasse beaucoup plus, sinon on va commencer à avoir des litiges dans le domaine, surtout parce que nos banques de données ne sont pas les mêmes. Vous avez fait la visite de notre banque de données, et vous avez vu comment nous faisons les choses, mais ce n'est pas nécessairement la manière dont les autres pays font aussi.

    Nous entendons presque chaque jour parler d'autres pays qui créent les leurs. Je pense que les Slovaques ont lancé leur banque de données le mois dernier. La Chine a décidé d'employer une banque de données. Bien que nous ne soyons pas très sûrs, exactement, de ce qu'ils vont en faire, nous savons qu'ils veulent en avoir une. Là encore, selon la technologie qu'ils emploient et selon le nombre de sondes qu'ils ont à la banque de données, cela pourrit ouvrir toute une boîte de Pandore de concordances partielles, selon la quantité de sondes utilisées au Royaume-Uni comparativement au Canada ou aux États-Unis, etc. Je pense qu'ils ont dû vous parler des sondes, hier.

    Je crois que les litiges ne vont pas tarder, parce qu'il y a beaucoup d'enjeux nouveaux, particulièrement quand il y a des compétences différentes, et ce genre de choses. Cette capacité est déjà intégrée à l'article. Évidemment, si elle s'est déjà révélée efficace, c'est une bonne capacité, mais il y reste néanmoins bien des enjeux juridiques à cerner dans ce domaine.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Weinstein.

+-

    M. Joshua Weinstein: Je voulais seulement confirmer que vous vouliez des exemples concrets relativement aux concerne les personnes qui souffrent de maladies mentales, mais quel genre d'exemple concret voulez-vous relativement aux empreintes génétiques? Pourriez-vous le préciser?

[Français]

+-

    Mme Diane Bourgeois: Je parlais de problèmes que certaines personnes souffrant de maladies mentales ont eus relativement au prélèvement d'ADN. Y en a-t-il eu?

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Selon mon expérience, je peux parler d'une personne qui a réellement menacé le premier ministre et qui a été inculpée. Ce sont des gens qui, presque quotidiennement, pensent que le gouvernement s'immisce dans leur vie, les guette, écoute leurs conversations, pénètre dans leurs maisons, fouille dans leurs affaires au milieu de la nuit.

    Cette personne va bien, maintenant. Je n'aime pas penser que je pourrais devoir dire à cette personne qui va bien maintenant, au moment où elle est libérée, qu'il reste une petite chose—le gouvernement va prendre un petit échantillon ou prélever un peu de sang. D'après moi, bien que ce ne soit pas forcément déjà arrivé, connaissant le mode de pensée de ces gens-là, leur perception du gouvernement, ce ne serait pas vraiment leur inspirer confiance dans l'administration de la justice à leur égard. Pour eux, c'est probablement plus le prélèvement de l'échantillon que sa consignation, mais ce serait peut-être les deux, pour ces individus-là. Ils essaient d'aller mieux. Ils essaient de se convaincre que le gouvernement n'essaie pas de s'acharner sur eux, mais au moment où ils vont bien, il s'acharne.

+-

    Le président: Merci.

[Français]

    Merci, madame Bourgeois.

[Traduction]

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Rondinelli, au sujet de cette statistique de 50 p. 100 sur laquelle on vous a posé des questions, c'est en fait dans la banque de données.

À  +-(1015)  

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: C'est dans le rapport annuel. D'accord.

+-

    M. Joe Comartin: C'est dans le rapport de fin d'année de 2003-2004.

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: D'accord.

+-

    M. Joe Comartin: Il n'y a pas de ventilation, par contre, pour expliquer comment ils sont parvenus à ces chiffres.

    Monsieur Weinstein, et peut-être monsieur Rondinelli, est-ce que l'une de vos associations a réellement fait un examen approfondi des infractions qui sont ajoutées, tant les infractions primaires que secondaires, et a relevé là où il semblait y avoir des incohérences?

    Je vous pose la question à vous, particulièrement. Vous avez énoncé certains critères. Est-ce que vous avez fait un examen détaillé et recensé les articles qui ne vous semblent pas appropriés?

+-

    M. Joshua Weinstein: Nous ne tenions pas à nous asseoir et à commencer à faire un tri pour déterminer pourquoi celle-ci et pourquoi pas celle-là. Ce qui nous préoccupait beaucoup, c'était cette liste qui n'arrêtait pas de s'allonger, puisque c'est déjà arrivé à quelques reprises—les infractions qui sont ajoutées, puis d'autres et encore d'autres. C'est cette dérive législative dont on a déjà entendu parler.

    Pour ce qui est de certains types d'infractions, nous avons examiné celles qu'on propose d'intégrer à la liste des infractions primaires. C'est le genre d'infractions qui correspond à un large éventail de types de comportements. On ne peut pas dire eh bien, ce meurtre au deuxième degré était... Vous savez, il peut-être différent d'un autre meurtre au deuxième degré, mais nous sommes d'accord que c'est un meurtre au deuxième degré; c'est une infraction grave avec violence.

    Pour ce qui est de l'agression armée, qui a été déplacée, je pense qu'il y a eu une époque... Je me rappelle de dossiers concernant des gens qui avaient lancé contre d'autre un torchon à vaisselle, une petite figurine représentant un écureuil... Ce sont des agressions armées, et le fait de frapper quelqu'un à la tête avec un bâton de baseball, c'est une agression armée. Donc, si on pense à la nature des infractions, nous nous préoccupons surtout de celles qui sont déplacées dans la catégorie des infractions primaires. Il n'y a pas de latitude dans un domaine d'infractions qui peut pourtant être très vaste.

    Pour ce qui est des infractions secondaires, il est évident que nous nous inquiétons de voir cette liste constamment s'allonger, mais au moins, dans le régime des infractions secondaires, il y a moyen d'équilibrer. Si c'est devant un arbitre indépendant, il y a un avocat de la défense et un procureur, ils peuvent présenter leurs arguments. Que ce soit justifié ou non, ce sera déterminé à ce moment-là.

    Pour ce qui est de toutes les infractions proposées aux articles 2 à 6, elles peuvent englober tout un éventail d'activités, et c'est ce qui nous inquiétait le plus. Cela s'applique à toutes les infractions, y compris celles de cette liste, des articles 2 à 6.

+-

    M. Joe Comartin: Je suppose que la réponse à ma question est non, votre association n'a pas fait cet examen.

+-

    M. Joshua Weinstein: Quand nous avons préparé les réponses, nous l'avons fait en examinant les articles un à un, pour déterminer la nature des infractions. Nous les avons étudiées et nous avons conclu qu'il y en avait un large éventail. Chaque fois que nous préparons ce genre de présentation, nous devons faire l'examen article par article.

+-

    M. Joe Comartin: Alors doit-on comprendre que vous ne mettriez aucune de ces infractions les articles 2 à 6 dans la catégorie des infractions primaires?

+-

    M. Joshua Weinstein: C'est bien cela, les articles 2 à 6.

+-

    M. Joe Comartin: D'accord.

    Monsieur Rondinelli?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je voudrais seulement me faire l'écho des observations de M. Weinstein, tout à l'heure, au sujet du moment choisi pour cette législation. Lorsqu'il s'agit d'allonger la lite, d'y inclure des infractions... c'est-à-dire que je peux voir pourquoi ces infractions sont dans la liste, ou pourquoi on propose de les y inscrire, mais je pense que c'est probablement plus pertinent, lorsqu'on parle d'un examen plus approfondi de la loi... là encore, pour revenir à un commentaire que j'ai fait à M. Thompson, il est difficile de soutenir que l'une d'elles n'a pas sa place dans la liste quand on a déjà étudié la liste et le genre d'infractions qui s'y trouvent déjà. Alors je pense que c'est un enjeu plus vaste dont il faut traiter, exactement quels facteurs justifient l'intégration de certaines infractions à la liste? Mais nous n'avons pas nécessairement fait un examen article par article des infractions qu'elle contient.

    Ce qui nous paraît le plus inquiétant, c'est que d'autres encore ont été ajoutées, vraiment, et ce ne devrait pas être une solution de genre symbolique. Peut-être après un examen plus poussé—M. Weinstein en a fait ressortir les avantages—une décision pourrait être prise pour déterminer ce qui distingue une infraction primaire d'une infraction secondaire. C'est une question qui va plus loin et qu'il faut régler en faisant un examen plus approfondi, selon moi.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Madame Neville, vous avez trois minutes.

+-

    Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Je vous remercie.

    Trois minutes, c'est bien peu, alors je vais poser mes questions tout de suite et je verrai ce que le président laissera passer.

    Monsieur Rondinelli, peut-être pourriez-vous étoffer votre commentaire—et je m'excuse, je suis arrivée un peu tard, alors peut-être en ai-je manqué une partie—selon lequel le Royaume-Uni a des années lumières d'avance sur nous. J'aimerais beaucoup en entendre un peu plus là-dessus.

    Nous avons beaucoup parlé des 50 p. 100 d'infractions primaires entraînant la consignation dans la banque de données d'empreintes génétiques, et nous avons parlé beaucoup de pouvoir judiciaire discrétionnaire. Plusieurs choses me chicotent, à ce propos.

    Tout d'abord, nous avons aussi parlé du fait que bien des juges n'usent pas de ce pouvoir discrétionnaire, parce qu'ils n'ont pas la formation, les moyens ou quoi que ce soit d'autre pour le faire. À mon avis, c'est inquiétant, quand on parle de la promotion des infractions secondaires vers la liste des infractions primaires, que le pouvoir judiciaire discrétionnaire ne soit pas, en fait, exercé.

    Nous avons aussi entendu hier que bien des échantillons prélevés dans le cadre des infractions secondaires donnaient lieu à des découvertes sur des infractions bien plus graves. J'ai trouvé cette constatation assez intéressante, hier.

    Je suppose que la CPA a parlé de l'importance d'ajouter quelque chose pour dire si l'infraction et le transgresseur justifiaient le prélèvement. Le test pour analyser l'infraction et le transgresseur n'est-il pas le même que pour déterminer que c'est une infraction secondaire et le Parlement, en promouvant l'infraction vers la liste des infractions primaires ne signifie-t-il pas que l'infraction est tellement grave que, à moins de circonstances extraordinaires, les empreintes génétiques devraient être prélevées?

    Avez vous des commentaires?

À  +-(1020)  

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Pour répondre à votre question sur le Royaume-Uni, quand je dis qu'il a des années lumière d'avance sur nous, je veux surtout dire que ce sont vraiment des pionniers dans ce domaine. Si on pense à Sir Alec Jeffries, à la fin des années 80, c'est vraiment lui qui a inventé cette méthode de profilage des empreintes génétiques, qui est devenue la norme du jour pour les enquêtes où ces empreintes sont utilisées, et les Britanniques ont été les premiers à créer leur propre banque de données. Par « des années lumière d'avance », je veux dire qu'ils ont bien au-delà de deux millions d'échantillons d'ADN dans leur banque de données actuellement. Ils prélèvent des échantillons pour à peu près toutes les raisons imaginables, dirait-on, même lors d'une arrestation dans certaines circonstances, et ils gardent ces échantillons indéfiniment.

    Si l'accusation concerne une infraction entraînant la création d'un casier, dans le sens où elle est passible d'emprisonnement, ils peuvent prélever l'échantillon, le consigner, etc. Ils établissent une quantité phénoménale de correspondances chaque semaine. Je ne voudrais même pas essayer de deviner combien c'est, parce que les chiffres changent tous les jours, au fur et à mesure qu'augmente leur banque de données.

    Cela m'amène à quelque chose que je voudrais porter à l'attention du comité. Il y a une organisation sans but lucratif au Royaume-Uni, appelée GeneWatch UK, qui a un site Web, www.genewatch.org. En janvier, GeneWatch a publié les conclusions d'une étude très poussée sur la banque de données génétiques du Royaume-Uni. On peut télécharger le document du site Web, et j'incite vivement les membres du comité à la lire. C'est une étude absolument fascinante. L'examen qu'elle fait est d'une perspective mondiale, elle ne se confine pas au Royaume-Uni.

    Au bout du compte, ce que laisse entendre GeneWatch, c'est que le Royaume-Uni est en train de devenir, mine de rien, un État orwellien, un Big Brother, à cause de nuances diverses de sa banque de données. Cette étude fait un excellent examen des enjeux potentiels qui pourraient faire surface, que ce soit au plan technologique ou à celui de la violation de la vie privée. La lecture de ce rapport est essentielle, peut-être pas tant pour l'examen du projet de loi C-13, mais certainement en tout cas pour le processus de l'examen plus global. C'est un excellent rapport.

    Alors, quand je parle d'« années lumière », je veux seulement dire que ce sont les pionniers dans le domaine et qu'ils ont certainement déjà beaucoup plus d'expérience que le Canada.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Weinstein.

+-

    M. Joshua Weinstein: Merci.

    Je vais aborder l'enjeu sous le plan de la promotion de certaines de ces infractions secondaires vers la liste des infractions primaires, et c'est peut-être le signal que nous allons laisser le transgresseur en dehors du débat, parce que ces infractions sont tellement graves qu'elles doivent être incluses.

    Voyons encore certaines de ces infractions. Prenons l'exemple du vol. A priori, n'importe qui peut invoquer des images d'un horrible événement quelconque. Cela peut être aussi facile qu'un scène où un jeune homme de 19 ans déambule dans la rue, sous l'effet de drogues, et demande à un passant « Avez-vous une cigarette? », « Non », « Donnez-moi une cigarette! »; il gifle le passant et s'empare de ses cigarettes. C'est grave, mais il est évident qu'il y a des vols bien plus graves que celui-là, comme les vols à main armée, passibles d'une peine d'emprisonnement minimale de quatre ans.

    Ce que nous disons, c'est qu'il y a un large éventail de ce type d'infractions, et il devrait pouvoir être possible de prendre en compte le délinquant et le délit, à la discrétion du juge. D'accord, s'il y a un problème avec la formation des juges et leur imposition de ce genre de peine, alors ce qu'il faut, c'est offrir cette formation. Ce qu'il faut, ce n'est pas ajouter ces délits à la liste des infractions primaires, parce que ce sont des infractions dont on peut dire qu'elles sont liées à un vaste spectre de comportements.

    Il pourrait encore y avoir une espèce d'ordonnance. Il pourrait y avoir un facteur de dissuasion, si c'est l'un des objectifs qui est visé. Les juges peuvent dire que l'infraction en question est si grave qu'ils imposent l'ordonnance en vertu du régime des infractions primaires.

    Les avis sont partagés, ici, pour ce qui est de savoir si c'est un châtiment ou non. Pour certains membres du comité, on ne peut pas considérer cela comme un châtiment, ce n'est pas un élément du scénario de châtiment. Maintenant, nous disons que l'infraction est d'une telle gravité que nous devrions la considérer comme une infraction primaire, pour transmettre le message que c'est une infraction grave, et c'est là l'élément de dissuasion.

    Nous devons aussi nous demander où nous voulons en venir, avec tout cela. Je dirais que, en ce qui concerne la dissuasion—j'ai des arguments là-dessus—il faudrait laisser cela à une certaine latitude discrétionnaire. Il y a tout un large éventail de possibilités en fait de comportements et du type de peines qui peuvent être imposées. Pour le vol, ce peut être une condamnation avec sursis. Ainsi, on le reconnaît, et selon nous, c'est ainsi que ce meilleur équilibre peut être réalisé.

À  +-(1025)  

+-

    Le président: Merci, madame Neville.

+-

    M. Myron Thompson: Monsieur le président, puis-je demander à M. Rondinelli de répéter l'adresse de GeneWatch?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: C'est www.genewatch.org. Le rapport fait environ 55 pages, mais il est très intéressant à lire.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Breitkreuz, vous avez trois minutes.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je tiens, moi aussi, à vous remercier d'être venus témoigner devant le comité.

    Bien des préoccupations que vous avez exprimées et une grande partie de la discussion autour de cette table concernaient la Charte. Vous avez commencé vos présentations en déclarant que les enjeux liés à la Charte sont au nombre des plus importants enjeux ici, que la conservation des échantillons pose problème, et je pense que j'ai même entendu parler, je crois, de saisie de gènes.

    L'une des choses que fait la Charte—et c'est l'objet de mon intervention—, c'est qu'elle assure la protection de la personne. Je dirais que cela devrait s'appliquer à la société en général, y compris les victimes potentielles.

    Nous n'avons pas de bonnes statistiques sur le sujet. J'ai beaucoup de données anecdotiques démontrant que des criminels extrêmement violents commettent aussi d'autres genres de crimes. Au Royaume-Uni, ils ont constaté que quelqu'un qui était accusé de conduite avec facultés affaiblies pouvait aussi avoir commis un meurtre, alors ils recueillent beaucoup de ces échantillons au moment de l'arrestation des gens.

    Je pense que cela pourrait aussi répondre à certaines de vos préoccupations sur le fait, eh bien, que nous prenions un échantillon avant leur libération, pour qu'ils aient l'impression que c'est un élément de leur châtiment. Si l'échantillon était prélevé au moment de l'inculpation, l'effet ne serait probablement pas le même.

    J'ai l'impression que nous avons tellement fait pour essayer de protéger les criminels que nous oublions que la Charte existe aussi pour protéger la société en général. Je suis ébahi que cet équilibre n'ait pas encore été établi.

    La banque de données génétiques, d'après ce que nous avons lu, s'est révélée l'un des outils d'enquête les plus précieux que puisse avoir la police. Alors je pars du principe que nous devrions employer cet outil de la façon la plus efficace possible pour protéger la société. Est-ce que notre système juridique ne devrait pas veiller à ce que la société soit protégée dans la mesure du possible?

    Je ne demande pas qu'on aille à l'autre extrême et qu'on prélève des échantillons génétiques à la naissance. Ce serait aller beaucoup trop loin. Si quelqu'un commet un crime grave, on devrait pouvoir prélever un échantillon. Je ne vois pas en quoi ce raisonnement est fautif.

    Pourriez-vous commenter cela?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je ne vois pas de faute dans votre raisonnement non plus.

    Je dirais que l'équilibre se fait, plutôt que le contraire. En fait, la Loi sur les empreintes génétiques du Canada devrait être un modèle en la matière.

    J'ai été impressionné dès le premier jour par la loi, si on regarde son historique et tout cela, les nombreuses audiences comme celles-ci, et même les mesures extraordinaires qui étaient en oeuvre lorsque le projet de loi C-3 était à l'étude, quand on sondait l'opinion de trois éminents juristes pour s'assurer qu'elle soit conforme à la Charte, et tout le reste. De fait, l'examen judiciaire de la loi n'a suscité que des éloges des plus flatteurs.

    Au sujet du scénario de mandat d'échantillonnage génétique, comme on vient de le voir dans l'affaire R. contre S.A.B. à la fin de 2004, le résultat a été neuf à zéro, et des observations dithyrambiques ont été faites sur le scénario. La banque de données, aussi, n'a pas été touchée par les arguments constitutionnels, à part l'aspect ex parte, dont traitent encore les tribunaux, pour l'aspect rétroactif, mais à part cela, les tribunaux ont trouvé que la loi créait un assez bel équilibre. Nous n'essayons que de maintenir cet équilibre. J'ai commencé ma présentation en disant oui, elle a été très bénéfique à la résolution de crimes, et même aussi à l'exonération de suspects.

    Vous avez donné l'exemple extrême du prélèvement d'ADN à la naissance. C'est l'extrême absolu, mais pour maintenir l'équilibre, il y a d'autres extrêmes auxquels nous ne voudrions pas nous rendre.

    Alors, je pense que l'équilibre est assez bien maintenu, et si vous regardez encore toutes les décisions du système judiciaire, il n'a eu que du bien à dire de la loi. L'élément le plus important c'est parce qu'il y a cette mesure de vérification judiciaire qui existe maintenant, que ce soit avec le scénario de mandats de prélèvement des empreintes génétiques, que ce soit l'aspect judiciaire qui fait qu'il faut encore avoir des motifs raisonnables et obtenir l'autorisation d'un juge—et on dit bien un juge, pas un juge de paix.

    Du côté de la banque de données, là encore, il y a ce contrôle judiciaire. Ce n'est rien d'automatique, puisqu'on essaie de préserver toutes les mesures de protection de la Charte autant que le Parlement puisse le faire, donc il y a ce contrôle judiciaire. S'il y avait un thème sous-jacent dans tous ces dossiers, vous verriez que c'est le principal élément sur lequel ils se concentre.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Permettez-moi d'être plus précis. Pensez-vous que nous devrions aller dans le sens du Royaume-Uni et ajouter bien plus de types d'infractions, et aussi qu'au moment de l'inculpation, un échantillon doit être prélevé et si le suspect est acquitté ou déclaré non coupable, bien sûr, l'échantillon est détruit?

À  +-(1030)  

+-

    Le président: Pourriez-vous répondre brièvement?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Pour répondre brièvement à la question sur l'arrestation ou l'inculpation, je dirais que c'est vraiment aller trop loin. J'ai laissé un document au greffier du comité, que j'ai présenté au symposium sur l'ADN en décembre, sur le prélèvement au moment de l'arrestation et pourquoi je pense que l'idée n'est pas bonne. Je vous invite à le lire si vous en avez l'occasion.

    Quant à savoir s'il faut ajouter des infractions, ce n'est pas une question à laquelle on peut facilement répondre oui ou non, et cela devrait être un sujet de l'examen. Je pense que dans l'ensemble, non, mais il devrait y avoir un réexamen des infractions qui sont déjà prévues.

+-

    Le président: Merci.

    Merci monsieur Breitkreuz.

[Français]

    Monsieur Ménard, vous disposez de trois minutes.

+-

    M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'ai présidé l'Association des avocats de la défense de Montréal pendant cinq ans. C'est, je crois, la plus vieille association d'avocats de la défense au Canada: elle a été fondée en 1970, et son premier président était, je crois, Antonio Lamer. II me fait donc plaisir de recevoir le représentant d'une association de criminalistes de Toronto. J'ai aussi beaucoup collaboré avec le Barreau canadien; j'ai été bâtonnier du Québec pendant un an.

    En répondant aux questions des autres, vous avez répondu à plusieurs des miennes, mais je voudrais faire appel à votre expertise. Je constate que l'on considère cette liste comme étant constituée de personnes dangereuses à cause de la façon dont elle est constituée. On estime que ces individus sont dangereux parce qu'ils ont commis des crimes et que l'on soupçonne qu'ils pourraient en commettre d'autres. Il est également possible qu'on les considère dangereux parce que même si, pour cause d'aliénation mentale, ils n'ont pas été déclarés coupables, dans le cas où ils ne prendraient pas les bons médicaments ou qu'ils ne les prendraient pas de façon régulière, leur maladie pourrait les amener à poser des gestes dangereux qui constitueraient un crime, si ce n'était de leur maladie mentale.

    Toutefois, si je fais abstraction du caractère infamant ou humiliant du fait de se trouver sur une pareille liste, je constate qu'il y a de nombreuses dispositions dans la loi visant à assurer que cette liste ne circule pas. Hier, au cours des exposés qu'on nous a faits, on a cherché à nous démontrer que la liste n'était pas utilisée. Par exemple, on ne peut pas demander si vous ou moi sommes sur la liste, et cette liste n'est pas envoyée aux États-Unis ou dans d'autres pays. Elle n'est consultée que dans les cas où l'ADN d'une personne se trouve sur le lieu d'un crime.

    Ces garanties sont-elles respectées? Pourriez-vous nous dire quels sont, à part l'humiliation qui en découle, les autres inconvénients auxquels donne lieu le fait de se trouver sur cette liste ?

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Tout d'abord, vous avez dit que certaines personnes qui n'ont pas commis ce genre d'infractions, mais dont on propose d'inscrire le type d'infraction à la liste, seraient des gens dangereux et pourraient commettre d'autres crimes. Pour ce genre de situation, il y a plusieurs choses. Encore une fois, si c'est une infraction secondaire, le prélèvement pourrait encore être ordonné, si c'est dans l'intérêt de l'administration de la justice, alors il y a encore cette possibilité. Si les transgresseurs sont du genre à présenter effectivement des risques dans le futur, il pourrait exister des dispositions permettant de les surveiller dans la collectivité, en vertu d'ordonnances de probation, d'ordonnances de condamnation avec sursis, ou d'emprisonnement.

À  +-(1035)  

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Ce n'est pas ce que je voulais savoir. Je comprends qu'il est humiliant pour une personne d'être sur cette liste, mais y a-t-il d'autres inconvénients? Avez-vous remarqué si les gens en souffraient d'une façon ou d'une autre?

[Traduction]

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Si je peux seulement dire...

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Pouvez-vous nous donner des exemples?

[Traduction]

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Si on poursuit sur le thème de la dérive législative, il y a aussi le thème de la dérive de la fonction. On a déjà vu cela États-Unis, particulièrement en Alabama. Elle n'était pas censée servir à autre chose. Ce n'était censé être qu'un outil de résolution d'un crime. Mais l'Alabama a maintenant ouvert sa banque de données à la recherche médicale. Ils ont dit : « Nous avons toutes ces empreintes digitales. Pourquoi ne pas les utiliser pour autre chose? ». Voilà encore un exemple de contrôle qu'il nous faut assurer. Tant qu'on s'en sert aux fins prévues à l'origine, ça va, on peut continuer le processus. Mais plus il y en a, plus il pourrait y avoir de chances, par exemple, qu'on veuille essayer de voir s'il y a quelque chose dans les empreintes génétiques qui pourrait contribuer à prédire les comportements futurs.

    À part cela, il y a aussi le risque de fausses correspondances. On ne parle pas ici de science fiction. Je sais que nous parlons de chiffres extraordinaires, mais nous avons déjà vu un cas de fausse correspondance, établie par la banque de données du Royaume-Uni. Ils faisaient une enquête sur un vol, et la personne dont ils ont trouvé les gènes correspondantes, qui était en fauteuil roulant, était à 200 milles du lieu du vol, et n'aurait pas pu le commettre. Bien évidemment, l'alibi était irréprochable. Quand ils ont finalement refait le test, ils ont constaté qu'en fait, il y avait eu erreur.

    Aux États-Unis, nous venons de voir, depuis deux mois, une correspondance partielle qui été établie. La personne avec qui le lien a été établi, dans la banque de donnée, était en prison à ce moment-là. Une fois qu'ils ont refait le test, avec les facteurs plus rigoureux, ils ont trouvé que cette personne n'était pas celle qu'ils cherchaient.

    Qu'arrive-t-il entre-temps? Nous savons que c'est utile d'exonérer la personne, mais si elle doit se battre pendant quatre, cinq, six, huit ou dix mois alors qu'elle est sous surveillance, à cause de cette correspondance partielle qui a été établie? Les empreintes génétiques, on en est venu à s'y attendre, sont très nettes, alors s'il y a correspondance, il était évident que la personne va être trouvée coupable. Il y a ce risque, selon le genre d'analyse qui est faite sur la scène du crime, et c'est un problème réel.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Il nous reste vingt minutes. Il y a encore cinq membres sur la liste, alors je vais être très strict avec la limite de trois minutes à partir de maintenant. Les membres du comité doivent rester aussi après pour adopter un budget pour un sous-comité.

    Monsieur Comartin, soyez bref.

+-

    M. Joe Comartin: Dans quelle mesure peut-il être pratique de maintenir les infractions désignées au niveau secondaire plutôt qu'au niveau primaire? Est-ce qu'on risque que plusieurs procureurs du pays, puisque le fardeau de la preuve pèse sur eux plutôt que sur la défense, ne fassent tout simplement pas les demandes? Est-ce que c'est possible?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je ne le pense pas. C'est ainsi qu'on fait. Il est tout simplement entendu que la Couronne le fait. Même lorsqu'elle fait la demande, c'est encore tout à fait en sa faveur. La demande est généralement agréée quand elle est faite. C'est un fardeau très difficile à assumer pour la défense. Alors je ne pense pas que cela ait de répercussions sur la décision des procureurs de faire la demande.

+-

    M. Joe Comartin: Quand on l'a faite, elle est généralement agréée. Mais ce que je voudrais savoir, c'est-ce que nous allons voir qu'à cause de la charge de travail supplémentaire, les procureurs ne feront pas cette demande?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Il n'y a pas vraiment plus de travail à faire. C'est généralement fait au moment de l'inculpation. Le procureur ne fait généralement que se lever et mentionner les données génétiques. Ce n'est pas un avis formel qu'il faut donner au moment de la demande. Donc cela n'ajoute pas grand-chose à la charge de travail.

+-

    M. Joshua Weinstein: Je serais tout à fait d'accord. La charge de travail, ce n'est rien. Disons que l'affaire se rend jusqu'au procès, et soudainement il y a plaidoyer de culpabilité, le jour du procès. Cela ne prend littéralement que deux secondes. Il vont se lever et dire « Nous demandons une ordonnance de prélèvement d'empreintes génétiques. Ceci est une infraction secondaire ». D'après mon expérience, le plus souvent, ces demandes sont agréées. Cela peut-être aussi être en fonction du fait que les avocats de la défense ont besoin d'une formation pour déterminer si ce devrait être demandé ou non. Ils devraient se lever, aussi, pour le compte de leurs clients, pour assurer l'équilibre aussi.

À  +-(1040)  

+-

    M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney (Welland, Lib.): Monsieur Weinstein, vous avez parlé de saisie génétiques. Monsieur Rondinelli, vous avez parlé de Gene Watch et de la situation en Alabama. Est-ce que vous connaissez actuellement des cas où notre système de collecte d'échantillons a été compromis, ou encore où on peut prévoir qu'ils le sera, à part l'utilisation pour laquelle il est prévu dans le Code criminel?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Pour ce qui est de la banque de données génétiques, non. C'est une bonne chose. Toutefois, il y a des banques de données informelles que tiennent les services de police dans tout le pays, et nous ne sommes pas sûrs de la manière dont elles sont employées, si elles établissent des correspondances partielles et s'ils font leurs propres enquêtes ou non, à cause de la correspondance, et décident de mettre le paquet sur un suspect. Mais pour ce qui est de la banque de données génétiques nationale, je n'ai ni entendu parler, ni lu qu'elle puisse avoir été compromise ou avoir établi des fausses correspondances jusqu'à maintenant.

+-

    M. John Maloney: Est-ce que vous avez entendu parler de compromission des données dans d'autres services policiers qui peuvent détenir des données qui se trouvent à être dans la banque de données génétiques...

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Ce serait plus difficile à savoir. Si c'est arrivé, c'est décidément...

+-

    M. John Maloney: Est-ce que vous en connaissez?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Non, absolument pas.

+-

    M. John Maloney: Merci.

    Monsieur Weinstein.

+-

    M. Joshua Weinstein: Moi non plus, je n'en connais pas, mais en général, nous ne nous intéressons pas nécessairement au lieu ou à la façon dont ces données sont conservées. Nous nous en préoccupons, c'est évident, mais nous nous soucions surtout du fait qu'une ordonnance est émise et de la manière dont elle est émise, et qu'un échantillon est conservé, pas nécessairement la manière dont il est conservé. C'est cela vraiment, qui nous préoccupe.

    Nous nous inquiétons aussi de cette pente qui pourrait se révéler glissante. Il y a cette dérive législative, dans la manière dont certaines infractions sont ajoutées à la liste. Ce qui nous inquiète, c'est ce qui pourrait en découler, de cette dérive potentielle de la législation, en ce qui concerne les utilisations des empreintes génétiques. Une fois que cela arrive, il est trop tard pour que je puisse protester, parce que c'est déjà fait, et c'est évidemment pourquoi nous tenons à ce que ce soit au compte rendu aujourd'hui.

+-

    M. John Maloney: Vous avez aussi parlé de dérive législative et des types d'infractions qui peuvent être ajoutées à la liste ou qui le seront. Les statistiques dont a parlé Mme Neville, que nous avons reçues hier, révélaient que 14 p. 100 des correspondances établies avec des délinquants inculpés avaient été établis parce que l'échantillon avait été prélevé sur un transgresseur inculpé pour une infraction secondaire et la correspondance avait été établie avec un dossier d'infraction primaire qui n'avait pas encore été résolue.

    Cela me porte à croire que peut-être que cette dérive législative, si nous essayions de trouver l'équilibre entre la protection du public et les droits de la personne, n'est peut-être pas une si mauvaise chose. J'aimerais entendre vos commentaires là-dessus.

+-

    M. Joshua Weinstein: Je ne sais pas ce que sont les statistiques sur les infractions désignées comme étant primaires—ils ont pris l'échantillon et rien n'a été trouvé au sujet d'une personne qui, disons, a reçu une peine assez légère. Si on n'a pas ces statistiques, ça va, on peut reconnaître que pour les infractions secondaires, il peut y en avoir 14 p. 100 dont la correspondance est établie avec une infraction primaire. C'est la situation inverse qui nous inquiète, pour ce qui est de l'équilibre, la désignation comme infraction primaire—la violation de l'intégrité corporelle, la conservation d'échantillons.

    Mais nous disons tout de même qu'en vertu du régime des infractions secondaires, on pourrait toujours obtenir l'échantillon et résoudre ces crimes qui font cette statistique de 14 p. 100, donc qu'il n'est pas encore impossible d'atteindre les objectifs pour lesquels la banque de données a été créée.

    C'est seulement qu'au bout du compte, il y aura une pondération que fera le juge. Si le procureur peut le convaincre que ce genre de chose est dans l'intérêt de l'administration de la justice parce qu'il y a des statistiques qui démontrent comment ces crimes sont résolus, et c'est pourquoi nous demandons l'ordonnance même pour une infraction secondaire, alors, si c'est un argument convaincant, le juge va émettre l'ordonnance.

+-

    Le président: Merci, monsieur Weinstein.

    Monsieur Rondinelli, avez-vous une brève réponse à donner?

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je pense que c'est tout.

+-

    Le président: Bien. Merci, monsieur Maloney.

    Monsieur Warawa, vous avez trois minutes.

+-

    M. Mark Warawa: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Weinstein, vous avez parlé de violation, que les faits de prélever et de conserver un échantillon constituaient des violations, et que vous vouliez vous concentrer sur la conservation. Pendant la visite, hier, on nous a dit que le prélèvement d'échantillons se fait de manière assez semblable à ce que fait un diabétique, et je n'ai jamais entendu dire que cela pouvait constituer une violation.

    Si on se concentre sur la conservation d'échantillons, on nous aussi dit que le prélèvement de l'échantillon élimine des suspects. L'exemple était que si quelqu'un est accusé d'une infraction criminelle... la personne qui a fait la présentation a dit que si je devais être accusé d'une infraction criminelle dont j'étais innocent, je serais très heureux de donner un échantillon de mon sang pour ne plus être considéré comme un suspect. Le fait de voir dans la conservation de l'échantillon une violation... cela élimine la personne comme suspect, cela permet d'identifier des suspects, d'identifier les récidivistes, et cela permet d'établir un lien avec des scènes de crime, alors je pense que c'est outil très précieux.

    Il incombe au gouvernement d'assurer la protection et la sécurité de tous les Canadiens. C'est notre responsabilité, et cet équilibre des droits de la personne et des droits des Canadiens en général est très important. Je vois la conservation de l'échantillon non pas comme une violation, mais comme quelque chose qui garantit la sécurité et élimine des suspects qui doivent être éliminés.

    Au sujet du suspect qui n'est pas tenu criminellement responsable, cette personne n'a pas été jugée criminellement responsable à cause d'un trouble mental mais, comme on l'a signalé, si cette personne cesse de prendre ses médicaments, elle peut alors présenter un risque pour la collectivité. Que l'échantillon soit prélevé au moment de l'inculpation élimine le scénario dont a parlé M. Weinstein, l'humiliation du prélèvement au moment de l'inculpation, alors je suis d'accord avec mon collègue.

    Avez-vous des commentaires?

À  +-(1045)  

+-

    Me Vincenzo Rondinelli: Je voudrais parler surtout du commentaire sur l'exonération, et l'implication. Je serais d'accord qu'il est évident que ce serait l'un des outils possibles, mais ce ne devrait pas être considéré comme un moyen infaillible de résoudre des crimes au pays ou dans le monde. Au bout du compte, ce n'est qu'un élément de preuve qui situe quelqu'un sur la scène d'un crime.

    Par exemple, oui, je suis innocent de ce qui a pu arriver à cette fête. Il y avait six personnes. Non en apprend de plus en plus sur le transfert des empreintes génétiques, que ce soit par une poignée de main ou par les pellicules capillaires, ou toute autre chose. Oui, quelque chose qui émane de moi a été trouvé sur la victime d'une agression sexuelle, alors si je vais donner un échantillon génétique pour me disculper, je pourrais me retrouver impliqué dans un crime même si je suis parfaitement innocent.

    Alors, cela ne devrait pas être considéré comme une solution à tous les maux de la communauté, parce qu'en fin de compte, il y a vraiment des preuves circonstancielles et il pourrait y avoir d'autres explications. C'est pourquoi le fait de s'appuyer sur ce concept pour justifier le prélèvement d'empreintes génétiques au moment de l'inculpation serait à mon avis quelque peu trompeur.

+-

    Le président: Merci.

    Avez-vous une brève réponse au sujet de la déclaration de non-responsabilité?

+-

    M. Joshua Weinstein: Je peux en parler brièvement à propos du prélèvement d'échantillons. Lorsque quelqu'un est un suspect, il y a un autre régime qui s'applique. La police peut prélever un échantillon si elle a des raisons de croire quelque chose, et on peut certainement en proposer de notre propre gré en vertu de ces dispositions, mais le problème se pose encore, surtout, à l'étape de la condamnation.

    Je répondrai brièvement à la question sur la personne qui n'est pas tenue criminellement responsable et l'abandon du médicament. Je suppose que la plupart des provinces ont des lois sur la santé mentale, visant toute personne qui est un danger et pour soi ou pour d'autres, ou d'autres situations où sa santé se détériorerait au point de constituer un risque. Il y a déjà des mesures législatives qui existent pour le genre de personnes inculpées en vertu d'un mandat, à cause de la détérioration de leur santé. À mon avis, il manque encore de preuves convaincantes pour démontrer qu'en ce qui concerne la commission d'actes criminels par une personne qui n'est pas criminellement responsable alors que personne ne voit rien ni ne sait rien mais que des empreintes génétiques sont laissées, au moins il reste des preuves pour résoudre le crime. Même si c'était le cas, il faudrait encore faire peser cela dans la balance avec le risque pour la santé de cette personne, une question dont a traité, probablement avec beaucoup plus d'éloquence, la Société canadienne de schizophrénie.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Weinstein.

[Français]

    Monsieur Marceau, vous disposez de trois minutes.

+-

    M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président.

    Êtes-vous au courant de la décision rendue par la Chambre des Lords dans le cadre du cas Marper?

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Non.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je vais vous lire le résumé qui se trouve dans The Lawyer.com, puis une partie du compte rendu de la décision. Celle-ci porte précisément sur le prélèvement d'échantillons d'ADN et sur le fait de conserver ces échantillons.

[Traduction]

... la Chambre des lords a entièrement appuyé les systèmes actuels visant à consigner les profils d'identification génétique...

par rapport à l'utilisation de l'identification génétique, Lord Steyn

    —auteur de la décision—

a déclaré qu'en matière de politique, le recours élargi à de telles preuves par les forces de police, lorsque c'est pratiquement possible, était une priorité importante.

La cour a souligné qu'il ne faisait aucun doute que le prélèvement d'empreintes digitales et d'échantillons auprès de personnes soupçonnées d'avoir commis des infractions désignées constituait une réponse raisonnable et proportionnée aux problèmes du crime...

Lord Steyn a fortement réfuté l'allégation selon laquelle l'enregistrement d'information relative à l'identité génétique violait le droit au respect de la vie privée, tel qu'il est stipulé au paragraphe 8(1) de la Convention européenne des droits de l'homme. À son avis, la conservation d'empreintes digitales et d'échantillons ne violait pas le paragraphe 8(1). Quoi qu'il en soit, il en a conclu que même si c'était le cas, la conservation de ces substances (pour prévenir le crime et protéger le droit d'autrui de ne pas faire l'objet de crimes) cadrait parfaitement avec les violations qui pourraient être justifiées en vertu du paragraphe 8(2).

    Cet article est semblable à l'article 1 de la Charte.

À  +-(1050)  

[Français]

    Ici, il y a Lord Brown qui poursuit au sujet de la décision et qui va même un peu plus loin:

[Traduction]

Il m'apparaît difficile de comprendre pourquoi quiconque s'objecterait à la consigne continue de son profil (et à la conservation de l'échantillon) dans la banque de données, une fois qu'il y a été légalement versé. À mon avis, le seul motif logique d'une telle objection, c'est que la personne en question risque d'être davantage repérée au cas où elle commettrait une infraction à l'avenir. Cette objection peut à peine être légitime, ni non plus être avancée comme telle. De telles objections ainsi suggérées, semblent toutefois entièrement chimériques. Tout d'abord, la crainte d'un avenir orwellien où des échantillons seraient analysés de nouveau par un État malveillant à la lumière de percées scientifiques et où les résultats seraient abusivement utilisés contre l'intérêt de la personne... Si bien sûr, il s'agissait d'une objection valide, elle s'appliquerait autant aux échantillons prélevés auprès des personnes reconnues coupables qu'auprès de celles reconnues non coupables et, par conséquent, entraînerait logiquement la destruction des échantillons de tous. Aucun abus de ce genre toutefois ne risque actuellement de se produire et si c'était le cas, et quand, il serait alors temps de s'en occuper. À chaque jour suffit sa peine.

La deuxième objection vise la conservation des profils obtenus auprès de personnes raisonnablement soupçonnées de crime à un moment donné mais, par la suite, acquittées ou ne faisant pas l'objet de poursuites; selon l'objection, elles seraient ainsi stigmatisées et considérées comme appartenant au groupe des personnes reconnues coupables. À mon avis, c'est une objection tout autant irréaliste.

    Il continue dans la même veine.

[Français]

    J'aimerais entendre vos commentaires sur le compte rendu de cette décision, que je vous invite d'ailleurs à lire.

[Traduction]

+-

    M. Joshua Weinstein: Oui et je tiens à vous remercier, c'est quelque chose que je veux lire.

    J'aimerais être très clair sur un point; j'ai l'impression que l'on considère, à tort, que nous sommes contre le prélèvement des échantillons. Ce n'est pas le cas. Nous sommes en faveur du prélèvement des échantillons dans pareil cas et sommes pour cette liste dont se servirait un arbitre indépendant, à sa discrétion. Si nous faisons confiance à nos juges, à l'État et à la défense qui représente les clients, l'arbitre indépendant finira par décider qu'il vaut vraiment la peine de conserver ces profils.

    Nous ne voulons pas dire aujourd'hui qu'il est impossible de prélever un échantillon auprès de personnes accusées ou reconnues coupables de ces genres d'infractions. Cette possibilité existe toujours.

    Pour ce qui est de la conservation de l'échantillon, je ne sais pas ce que l'homme de la rue en Angleterre penserait, mais je suis heureux de dire que je vis ici et que notre société recherche un équilibre—ce que nous préconisons, je le répète—équilibre décidé en fin de course par un juge.

    Je conviens que ce point de vue, ce que vous lisez, vise probablement à s'opposer à tout prélèvement d'échantillon. Nous ne fermons toutefois pas la porte à l'éventualité de prélever un échantillon; nous disons simplement que cela devrait se faire en vertu du régime des infractions secondaires.

+-

    Le président: Merci, monsieur Weinstein.

    Monsieur Macklin.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Merci beaucoup, je vois que nous allons bientôt arriver au terme de notre séance.

+-

    Le président: Tout à fait.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Je vais essayer de sauter les préambules et aller droit aux questions que j'aimerais poser.

    Tout d'abord, dans le contexte de notre examen du projet de loi C-13, je voudrais savoir si l'ABC a quelque préoccupation que ce soit au sujet du respect de la vie privée prévu actuellement dans notre législation sur la banque de données génétiques ainsi qu'à propos du respect de la Charte. Si vous avez des préoccupations, que proposez-vous d'ajouter à cette mesure législative?

    Deuxièmement, j'aimerais savoir ce que vous pensez, car dans vos principes, vous utilisez l'expression « un intérêt public clair et convaincant » en ce qui concerne l'ajout d'infractions supplémentaires. Tout d'abord, j'aimerais savoir ce que vous voulez dire par cette expression. En particulier, l'ABC, comme nous en avons déjà discuté ici, s'oppose à faire des infractions de pornographie juvénile des infractions primaires; cependant, nous savons d'après l'affaire Holly Jones que certaines personnes font marcher leur imagination à l'aide de pornographie juvénile et ensuite commettent des meurtres. Ne s'agit-il pas ici d'un motif convaincant de changement dans ce cas-là?

    Qu'en est-il des autres infractions? Les groupes de victimes, par exemple, nous ont demandé d'englober le harcèlement criminel dans les infractions primaires.

    J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je sais que je pose beaucoup de questions en un court laps de temps, mais j'aimerais en obtenir des réponses, si vous le pouvez.

À  -(1055)  

+-

    M. Joshua Weinstein: Pour ce qui est des préoccupations relatives à la Charte, très brièvement, dans le cas d'une personne qui fait l'objet d'un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux, nous proposons la façon de traiter ces personnes dans notre mémoire. Nous pensons qu'il pourrait y avoir contestation en vertu de l'article 7, le droit à la sécurité de la personne. Des problèmes se posent à cet égard.

    Il pourrait y avoir un problème également au sujet de l'alinéa 11i), à savoir si cela pourrait être considéré comme une peine ou non. Plus j'entends les membres du comité dire que nous devrions l'englober car cela servirait d'élément de dissuasion, plus je pense que cela permet de défendre l'argument selon lequel il s'agit d'une peine.

    Toutefois, pour répondre à votre question relative à la définition d'intérêt public clair et convaincant, ce que l'ABC demande est ceci : nous voulons un équilibre, quoi qu'il en soit. C'est la première priorité. La deuxième, nous voulons savoir quel est le problème à régler, lequel ne peut l'être que si l'infraction en question est englobée dans un régime d'infractions primaires. Est-ce le harcèlement criminel qui... Prenons l'exemple d'infractions commises par téléphone. Comment le prélèvement obligatoire d'un échantillon va-t-il permettre de régler ce problème? Si, par exemple, une personne fait du harcèlement criminel de manière chronique, toujours par téléphone, en quoi le fait de placer ce genre d'infraction dans la catégorie des infractions primaires permettrait-il d'aboutir à une preuve?

    Nous disons que bien sûr ces infractions peuvent être graves, mais il peut y en avoir d'autres qui le sont moins. Si on le reconnaît, la meilleure façon de les régler—pas la plus pratique—consiste à trouver un équilibre décidé par quelqu'un de manière à privilégier autant la protection du public que la reconnaissance du droit au respect de la vie privée.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Que répondez-vous à l'argument Holly Jones?

+-

    M. Joshua Weinstein: La question n'est pas seulement de savoir comment répondre à cet argument, mais aussi comment justifier l'atteinte physique de la personne qui comparaît devant le tribunal, qui n'a qu'une petite collection et aucun casier judiciaire?

    Il y a des affaires comme Holly Jones, mais il y a également des affaires où les tribunaux reconnaissent et où le juge décide que, tout considéré, l'infraction en cause n'est pas la plus grave; la personne qui comparaît devant eux doit alors payer une amende et peut-être être placée sous probation. Il s'agit de le justifier pour cette personne également. Ce que nous disons, c'est qu'en vertu du régime d'infractions secondaires, cela peut se justifier pour les deux.

    Dans l'affaire Holly Jones, une ordonnance sera prononcée, et pour ce qui est de cette personne de 18 ans, il se peut que ce ne soit pas le cas.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.

-

    Le président: Merci, monsieur Macklin.

    Merci beaucoup à nos témoins; notre séance a été très fructueuse.

    Je vais demander aux membres du comité de rester, puisque nous devons approuver les budgets pour le Sous-comité de l'examen des lois sur le racolage. Nous allons suspendre la séance pour deux minutes afin de permettre à nos témoins de sortir.

    [La séance se poursuit à huis clos.]