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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 18 octobre 2005




Á 1105
V         La greffière du comité
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC)
V         La greffière
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC)
V         La greffière
V         M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ)
V         La greffière
V         Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.))
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président

Á 1110
V         M. Daryl Kramp (Prince Edward—Hastings)

Á 1115

Á 1120
V         Le président
V         M. Tony Cannavino (président, Association canadienne de la police professionnelle)

Á 1125

Á 1130
V         Le président
V         Chef Rick Deering (Royal Newfoundland Constabulary)

Á 1135
V         Le président
V         Chef-adjoint A. Warr (Opérations spéciales, Service de police de Toronto)

Á 1140

Á 1145
V         Le président
V         M. David Daubney (avocat général, Équipe de la réforme sur la détermination de la peine, ministère de la Justice)

Á 1150

Á 1155
V         Le président
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)

 1200
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ)

 1205
V         M. Daryl Kramp
V         M. Richard Marceau
V         M. Daryl Kramp
V         M. Richard Marceau
V         M. Tony Cannavino

 1210
V         M. Richard Marceau
V         M. Tony Cannavino
V         M. Richard Marceau
V         M. David Daubney
V         Le président
V         M. David Daubney
V         Le président

 1215
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         M. Daryl Kramp
V         M. Joe Comartin
V         M. Daryl Kramp

 1220
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         M. Daryl Kramp
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Chef-adjoint A. Warr

 1225
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)

 1230
V         M. Daryl Kramp
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Daryl Kramp
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz

 1235
V         M. Daryl Kramp
V         M. Tony Cannavino
V         Le président
V         Chef Rick Deering

 1240
V         Le président
V         M. Marc Lemay

 1245
V         Le président
V         M. Marc Lemay
V         Le président
V         M. Tony Cannavino
V         M. Marc Lemay
V         M. Tony Cannavino
V         M. Marc Lemay
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         M. Tony Cannavino
V         Le président
V         L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.)
V         Le président
V         L'hon. Judy Sgro

 1250
V         M. David Daubney

 1255
V         Le président
V         M. Myron Thompson
V         Le président
V         M. Daryl Kramp

· 1300
V         Le président
V         M. Tony Cannavino
V         Le président
V         M. Tony Cannavino
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         Le président
V         M. Myron Thompson
V         M. Tony Cannavino
V         M. Myron Thompson
V         M. Tony Cannavino
V         M. Myron Thompson
V         Le président
V         M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.)

· 1305
V         M. Daryl Kramp
V         Le président
V         M. Mark Warawa (Langley, PCC)

· 1310
V         Chef-adjoint A. Warr
V         M. Marc Lemay
V         M. Mark Warawa
V         Chef-adjoint A. Warr
V         M. Mark Warawa
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 053 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 18 octobre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    La greffière du comité: Honorables membres du comité, je constate que nous avons quorum.

[Français]

    Nous pouvons donc procéder à l'élection de la présidence.

[Traduction]

    Je suis prête à recevoir les motions à cet effet.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Je propose M. John Maloney.

[Français]

+-

    La greffière: Y a-t-il d'autres mises en candidature?

[Traduction]

    Une voix: Non, je ne crois pas.

    La greffière: La période de mises en candidature est terminée.

    Plaît-il au comité d'adoption la motion?

    Des voix: Oui.

    La greffière: Je déclare la motion adoptée et M. John Maloney dûment élu à la présidence.

    Des voix: Bravo, bravo!

    La greffière: Nous passons maintenant à l'élection des vice-présidents.

[Français]

    Je suis prête à procéder de l'élection de la vice-présidence pour l'opposition officielle.

[Traduction]

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Je propose Garry Breitkreuz.

[Français]

+-

    La greffière: Y a-t-il d'autres mises en candidature?

[Traduction]

    Une voix: Non.

    La greffière: La période de mises en candidature est maintenant terminée.

    Plaît-il au comité d'adopter la motion?

    Des voix: Oui.

    La greffière: Je déclare la motion adoptée et M. Garry Breitkreuz dûment élu à la vice-présidence.

    Des voix: Bravo, bravo!

[Français]

    La greffière: Je vais maintenant procéder à l'élection du vice-président d'un autre parti de l'opposition.

+-

    M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ): Je propose Richard Marceau.

+-

    La greffière: Y a-t-il d'autres mises en candidature?

[Traduction]

    Une voix: La période de mises en candidature est maintenant terminée.

    Des voix: Oh, oh!

    La greffière: La période de mises en candidature est terminée.

    Plaît-il au comité d'adopter la motion?

    Des voix: Oui.

    La greffière: Je déclare la motion adoptée et M. Richard Marceau dûment élu à la vice-présidence.

    Des voix: Bravo, bravo!

    La greffière: J'invite le président à occuper le fauteuil.

+-

    Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)): Merci beaucoup de ce vote de confiance.

    Nous pouvons maintenant reprendre nos travaux. Avec votre consentement, j'aimerais que nous passions sans plus tarder à l'audition de nos témoins de ce matin.

    Monsieur Comartin?

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Monsieur le président, j'aimerais, tôt ou tard pendant la présente réunion, que nous discutions de l'horaire de nos réunions futures.

+-

    Le président: Certainement, monsieur Comartin, mais peut-être pourrions-nous attendre après l'audition des témoins. Nous pourrions en discuter entre nous et avec la greffière et peut-être changer de plage horaire avec un autre comité.

+-

    M. Joe Comartin: La greffière et moi en avons déjà discuté et il ne reste plus qu'à obtenir l'accord du comité.

+-

    Le président: Très bien.

    J'invite nos témoins à prendre place.

    Nous accueillons aujourd'hui M. Daryl Kramp, député à la Chambre des communes, M. Tony Cannavino, président de l'Association canadienne de la police professionnelle, M. Rick Deering de la Royal Newfoundland Constabulary, M. A.J. Warr du Service de police de Toronto et M. David Daubney du ministère de la Justice.

    Chaque témoin disposera d'au plus dix minutes pour présenter son exposé. Nous commencerons par M. Kramp et, après toutes les déclarations liminaires, il y aura une période de questions avec des interventions de sept minutes, puis de cinq minutes.

    Daryl, vous avez la parole.

Á  +-(1110)  

+-

    M. Daryl Kramp (Prince Edward—Hastings): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup à tous les membres du comité d'avoir accepté de nous entendre, non seulement moi, mais aussi les autres témoins.

    Je suis heureux de comparaître devant vous aujourd'hui pour parler du projet de loi C-215, mais avant de commencer, j'aimerais présenter et remercier les témoins qui sont venus appuyer le projet de loi.

    Le chef de police Rick Deering, de la Royal Newfoundland Constabulary. Il est aussi membre du conseil d'administration et représentant désigné de l'Association canadienne des chefs de police. Merci, Rick.

    M. Tony Cannavino, président de l'Association canadienne de la police professionnelle, et M. Yves Charette, directeur adjoint du Service de police de la Ville de Montréal. Je suis aussi accompagné du chef adjoint du commandement des opérations spécialisées du Service de police de Toronto, Tony Warr.

    Mesdames et messieurs, cet été, les décès causés par une arme à feu ont atteint un niveau inacceptable. À Toronto seulement, le nombre de victimes a dépassé 40. Ce que ces chiffres n'indiquent pas, c'est le nombre total de vies touchées dans chaque cas. La famille, les amis et le voisinage sont marqués à jamais par cette violence sauvage. Combien d'enfants restent privés d'un de leurs parents? Et combien de parents perdent leur enfant?

    Outre les statistiques publicisées des décès causés par une arme à feu, on note aussi une augmentation des autres actes de violence mettant en cause une arme à feu. Une femme de 46 ans, Louise Russo, mère de trois enfants dont une fille handicapée, est restée paralysée après qu'une personne à l'intérieur d'une fourgonnette volée a fait feu à répétition en passant devant le stationnement d'une sandwicherie. Les médecins disent qu'elle ne marchera plus.

    Et très récemment, à Toronto, un chauffeur d'autobus a reçu une balle dans le visage et a perdu l'usage d'un oeil.

    Je rappelle à mes collègues que le confort et la sécurité de cette salle de comité ne représente pas la réalité de nos rues. Pour faire du Canada un pays plus sécuritaire, je vous parlerai aujourd'hui du projet de loi C-215, qui modifierait le Code criminel du Canada en imposant des sentences minimales obligatoires pour les actes criminels commis avec une arme à feu. La sentence additionnelle, qui sera purgée consécutivement à la première, consistera en une peine minimale de cinq ans d'emprisonnement si l'arme à feu n'est pas utilisée, de dix ans s'il y a coup de feu et de 15 ans s'il y a coup de feu et qu'une personne autre qu'un complice subit des blessures corporelles.

    Les infractions visées sont celles prévues aux articles suivants: l'usage d'une arme à feu ou d'une fausse arme à feu lors de la perpétration d'une infraction, meurtre, homicide involontaire coupable, tentative de meurtre, fait de causer intentionnellement des lésions corporelles, agression sexuelle armée, agression sexuelle grave, enlèvement, prise d'otage, extorsion et vol qualifié.

    Mesdames et messieurs du comité, le projet de loi que je présente aujourd'hui ne concerne pas seulement l'incarcération: il vise à envoyer un message très clair pour protéger la société contre les actes criminels graves commis avec une arme à feu.

    Je ne prétends pas que le projet de loi C-215 soit la seule solution pour éliminer les crimes violents commis avec une arme à feu. Il faut aussi se pencher sur les causes fondamentales que sont la pauvreté, le chômage, la problématique du logement et le manque d'éducation. Des progrès dans ces dossiers contribueraient certainement à améliorer le milieu social et sociétal dans lequel la violence a tendance à foisonner. Il est crucial de fournir plus de ressources aux services de l'ordre et aux programmes de protection et de prévention. Reconnaître la corrélation directe entre la drogue, les gangs criminels et les armes à feu permettrait certainement de cibler une partie importante des crimes commis avec une arme à feu. Néanmoins, le projet de loi C-215 demeure, je crois, un élément crucial de la lutte contre les crimes violents. C'est un élément clé, à mon avis, de la solution globale.

    Le projet de loi C-215 a déjà reçu de nombreux appuis dans le milieu. L'Association canadienne des chefs de police et l'Association canadienne de la police professionnelle, forte de ses 54 000 membres, lui ont donné leur aval. Partout au pays, les policiers nous demandent, à nous parlementaires, de leur donner les outils dont ils ont besoin pour protéger la société. Nous ne pouvons tout simplement pas faire la sourde oreille à leur demande.

    La sécurité de nos concitoyens ne doit pas souffrir de partisanerie. L'été dernier, le procureur général de l'Ontario, le libéral Michael Bryant, le procureur général du Manitoba, le néo-démocrate Gord Mackintosh, et le chef de l'opposition conservatrice de l'Ontario, John Tory, ont eux aussi appuyé le principe de la peine obligatoire. M. Mackintosh a déclaré et je cite:

Le Code criminel doit avoir un effet dissuasif beaucoup plus puissant contre ce genre de crimes... Le 1er septembre, le Manitoba a demandé au gouvernement fédéral d'accroître la peine minimale obligatoire pour le trafic d'armes à feu.

Á  +-(1115)  

    À la deuxième lecture, le projet de loi C-215 a reçu l'appui de membres de différents partis tous attentifs aux préoccupations grandissantes de leurs électeurs.

    J'aimerais maintenant prendre quelques instants pour parler des préoccupations exprimées pendant le débat en deuxième lecture par les adversaires du projet de loi. L'actuel ministre de la Justice a affirmé que la peine obligatoire ne fonctionnait tout simplement pas et qu'il était opposé sur le plan philosophique à ce principe même s'il défend son existence dans le Code criminel. À ce propos, la chercheure Elizabeth Sheeby a écrit dans le Osgoode Hall Law Journal, et je cite:

[Traduction] Les ouvrages canadiens en parlent peu. Il n'existe presque pas d'ouvrages qui pourraient préconiser le recours à la peine minimale obligatoire.

    La preuve favorable à la sentence obligatoire inclut l'idée selon laquelle les criminels condamnés ne commettront pas d'autres crimes pendant qu'ils purgent la peine obligatoire. La preuve concrète qui est disponible indique que les peines minimales obligatoires donnent d'assez bons résultats. L'efficacité de la sentence minimale obligatoire est bien documentée dans le cas de l'ivresse au volant. Rappelons-nous ce qu'il advenait il y a un certain nombre d'années à une personne arrêtée pour conduite avec des facultés affaiblies: son permis était peut-être suspendu pour trois mois et une amende de 200 $ lui était imposées. Voilà qui contribue très peu, malheureusement, à faire diminuer l'ivresse au volant. Par conséquent, on a établi un minimum obligatoire d'une année de suspension et de 1 000 $ d'amende. Tout à coup, des résultats se sont manifestés. Le message était très dissuasif: il ne faut pas conduire après avoir bu.

    Certains opposants au projet de loi C-215 font valoir que le pouvoir discrétionnaire des tribunaux souffrirait de l'imposition des sentences obligatoires. Malheureusement, le pouvoir discrétionnaire inégal des tribunaux est justement la raison pour laquelle les criminels n'ont pas peur de la sentence de quatre ans qui figure actuellement dans le Code criminel. On note en effet des manques d'uniformité flagrants d'une peine à l'autre. Le rituel de négociation de plaidoyer n'envoie pas le bon message à l'élément criminel de la société. Si les sentences imposées dans le cas des crimes commis avec une arme à feu continuent d'être décidées arbitrairement et sans uniformité, les criminels continueront leurs méfaits sans crainte des conséquences.

    Dans un autre commentaire, Elizabeth Sheehy affirme que les sentences minimales obligatoires réduiraient la disparité des peines et du même coup l'effet discriminatoire du pouvoir discrétionnaire des tribunaux.

    Certains ont affirmé que les peines obligatoires enfreignaient la Charte des droits et libertés. Mais encore la semaine dernière, la Cour suprême a déclaré constitutionnelles les interdictions obligatoires de possession d'une arme à feu dans l'affaire Philip Neil Wiles c. Sa Majesté la Reine. La cour a décrété que les sentences obligatoires n'enfreignaient pas la Charte des droits et libertés, et ce jugement devrait permettre d'apporter des améliorations très attendues à notre Code criminel.

    Une des positions défendues dans le débat à la Chambre est que le taux de criminalité est en baisse depuis un certain temps, ce qui est trompeur et même faux. Le 28 juillet 2004, Statistique Canada a rendu public son rapport annuel sur les vols qualifiés, et on nous dit ce qui suit:

    Les vols qualifiés ont augmenté de 5 p. 100 , leur premier gain depuis 1996. Cette statistique comprend un accroissement de 10 p. 100 des vols commis avec une arme à feu. Sur les 28 000 vols et plus commis en 2003, 14 p. 100 avaient été commis avec une arme à feu, 38 p. 100 avec une arme autre qu'une arme à feu et près de la moitié avaient été commis sans arme.

    Plus de 2 300 vols perpétrés en 2003 ont été commis avec une arme à feu. Sur les 161 homicides commis avec une arme à feu en 2003, 109 ont été commis avec une arme de poing. Les autres crimes violents sont aussi en hausse. Toujours en 2003, les tentatives de meurtre et agressions graves étaient toutes deux en hausse de 4 p. 100 et les agressions armées ont augmenté de 1 p. 100 .

    Malgré les critiques exprimées contre les sentences minimales obligatoires, les nombreux débats au sujet de leur rôle et de leur utilité se poursuivent, notamment sur la question de savoir si les lois sur les peines obligatoires jouent un important rôle symbolique de protection des intérêts des groupes vulnérables ou condamnent les crimes commis par les tout-puissants, et si les lois sur les sentences discrétionnaires peuvent être assujetties à des principes d'égalité.

    On a souvent dit, et entendu du gouvernement, que le fait d'ajouter 5, 10 ou 15 ans à une sentence de une à quatre années irait à l'encontre des principes codifiés de la proportionnalité et de la totalité et, qu'en bout de ligne, la punition pourrait s'avérer cruelle et inusitée. À cela, je réponds en demandant au comité d'écouter très attentivement les policiers de première ligne qui font affaire quotidiennement avec les criminels et les victimes. Écoutez leurs frustrations devant la loi et le système de justice, écoutez-les parler du manque d'appui des législateurs et, surtout, écoutez leurs plaidoyers en faveur d'une loi qui les aiderait à protéger les citoyens. En répondant à vos questions aujourd'hui, je suis certain que nos représentants des forces de l'ordre pourraient montrer au grand jour ces réalités.

Á  +-(1120)  

    Bien que le projet de loi porte uniquement sur la durée des peines, il existe, je crois, des arguments et des décisions favorables à ce que le comité se penche très attentivement sur d'éventuelles modifications concernant la durée des sentences et l'admissibilité à une libération conditionnelle. Permettez-moi de citer l'affaire R. c. Danvers, dont le jugement rendu le 25 août 2005 par la Cour d'appel de l'Ontario dit au paragraphe 77:

[Traduction] Je suis d'avis que les circonstances de ce meurtre mettent en jeu les principes de dissuasion, générale mais surtout individuelle, les principes de dénonciation et la protection de la société. Les décès par arme à feu dans des lieux publics de Toronto sont un fléau et doivent être endigués et dénoncés et doivent cesser. Seule l'imposition de peines exemplaires pourra dissuader les criminels armés. La présence accrue des armes de poing dans les lieux publics montre l'importance de périodes prolongées d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. La société doit être protégée contre les criminels armés d'une arme de poing mortelle. Il ne fait aucun doute que les tribunaux doivent se pencher sur les principes de dénonciation et de dissuasion et de crimes armées dans les termes les plus musclés.

    J'ajouterai qu'il y a à peine une heure, les chefs de police de l'Ontario ont tenu une conférence de presse à Queen's Park, à Toronto, pour annoncer la création d'un groupe d'experts constitué de chefs de police chevronnés chargés de relever toutes les lacunes de notre système de justice pénale. Ils ont été motivés par l'absence totale d'appuis du gouvernement à cet égard. L'adoption d'une loi alourdissant les peines dont sont passibles les crimes commis avec une arme à feu témoignerait de notre volonté de contribuer à la solution.

    En terminant, qu'il soit bien clair que ce projet de loi veut envoyer un message non seulement pour dire aux auteurs de crimes qu'ils seront punis, mais aussi pour dire aux victimes que nous prenons leur protection au sérieux et que nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que leurs droits et leur sécurité soient respectés. Nous, les parlementaires, avons la responsabilité morale, juridique et constitutionnelle d'agir maintenant pour défendre le droit des individus de vivre dans une société sûre et juste.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur Cannavino, à vous la parole.

[Français]

+-

    M. Tony Cannavino (président, Association canadienne de la police professionnelle): Thank you, Mr. Chair.

    Bonjour. L'Association canadienne de la police professionnelle se réjouit d'avoir l'occasion de présenter son mémoire devant le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile au sujet du projet de loi C-215, Loi modifiant le Code criminel (peine consécutive en cas d’usage d’une arme à feu lors de la perpétration d’une infraction).

    L'ACPP fut créée en 2003 lors de la fusion de l'Association canadienne des policiers et policières et de l'Association nationale de la police professionnelle. L'ACPP est le porte-parole national de 54 000 membres du personnel policier en poste d'un bout à l'autre du Canada. Par l'intermédiaire de nos 225 associations membres, les adhérents à l'ACPP comprennent le personnel policier oeuvrant au sein de corps policiers de petites villes et de villages du Canada, ainsi que dans les grands corps policiers municipaux, les services policiers provinciaux, les associations des membres de la GRC et les associations des policiers des premières nations.

    La violence urbaine suscite une vive préoccupation au sein de notre association. Depuis plus d'une décennie, les associations de policiers préconisent la réforme de notre système judiciaire canadien, réclamant plus particulièrement des changements qui fortifieraient les dispositions relatives à la détermination des peines, la détention et la libération conditionnelle de contrevenants violents.

    Lors de notre assemblée générale annuelle de 2004, les délégués de l'ACPP adoptaient à l'unanimité une résolution invitant le gouvernement fédéral à fournir des fonds supplémentaires pour faire en sorte que: la sécurité soit accrue aux frontières afin de prévenir l'importation illégale d'armes à feu au Canada; les vendeurs au détail, les grossistes et les fabricants d'armes à feu et de munitions soient convenablement surveillés; les policiers et policières sur le terrain partout au Canada reçoivent un financement supplémentaire afin de contribuer à juguler la montée de violence perpétrée avec une arme à feu. En outre, cette résolution réclamait qu'un projet de loi fédéral soit déposé dans le but de prévoir des peines d'emprisonnement obligatoires plus sévères et plus adaptées pour les individus impliqués dans un acte criminel mettant en cause une arme à feu.

    Notre but est de travailler de concert avec les représentants élus de tous les partis afin d'instituer d'importantes réformes qui raffermiraient la sécurité de tous les Canadiens et Canadiennes, y compris ceux et celles qui ont fait le serment de protéger nos communautés. Par exemple, le 21 septembre dernier, à titre de président de l'Association de la police professionnelle du Canada, accompagné du président de l'Association des policiers de Toronto, M. Dave Wilson, j'ai assisté, à Toronto, au Forum sur la violence urbaine du gouvernement fédéral et du Grand Toronto. Le 7 octobre, j'ai participé au Groupe de travail du Parti conservateur sur la sécurité dans les rues et des communautés saines. En outre, je rencontre régulièrement, à titre personnel, des députés et des membres de votre comité pour leur faire part de nos préoccupations. Le mois prochain, nous avons l'intention d'assister à la Conférence des ministres fédéral-provinciaux-territoriaux de la Justice qui aura lieu à Whitehorse, afin de faire part de nos préoccupations aux ministres responsables des services policiers, de la justice et de la sécurité dans notre pays.

    Il est regrettable que nous nous trouvions encore en train de plaider en faveur de changements qui imposeraient des conséquences significatives et proportionnées aux crimes commis avec violence. L'heure est venue de cesser de parler du problème de la violence urbaine dans les villes canadiennes et de commencer à instituer des changements significatifs. L'une des préoccupations des policiers et policières partout au pays est de faire cesser la violence des gangs, et la solution commence par faire cesser le phénomène des portes tournantes dans le système judiciaire canadien.

    Les policiers et policières du Canada ont perdu confiance en un système qui remet régulièrement les contrevenants violents en circulation dans nos rues. Nous devons restaurer des conséquences significatives et des moyens de dissuasion convaincants dans notre système judiciaire, et cette restauration commence par des peines plus sévères, une véritable incarcération en prison et des politiques plus rigoureuses d'admissibilité à la libération conditionnelle pour les contrevenants violents. Il nous faut des peines minimales plus sévères pour les contrevenants qui commettent un crime à l'aide d'une arme à feu ou de toute autre arme.

Á  +-(1125)  

[Traduction]

    Nous tenons à féliciter M. Kramp de son initiative en proposant ce projet de loi.

    En tant qu'ancien policier au service de la Police provinciale de l'Ontario, M. Kramp comprend clairement le traumatisme que subissent les victimes visées par une arme à feu et, à plus forte raison, les victimes sur lesquelles un agresseur fait feu en perpétrant un acte criminel. Il comprend également la frustration ressentie par ces victimes et par le personnel policier lorsque ces crimes n'entraînent pas les peines qu'elles méritent dans nos tribunaux.

    Nous soutenons que le projet de loi C-215 constitue un premier pas positif pour combler les lacunes actuelles, plus particulièrement en ce qui a trait aux préoccupations suscitées par la violence exercée avec une arme à feu. Nous sommes convaincus que ce projet de loi représente un moyen de dissuasion efficace contre les crimes violents commis à l'aide d'une arme à feu et nous souscrivons entièrement au principe de créer des peines minimales obligatoires plus sévères pour la perpétration d'infractions graves lorsqu'elles sont amplifiées par l'usage d'une arme à feu. Nous maintenons également que des dispositions semblables à celles que prévoie le projet de loi C-215 devraient s'appliquer aux infractions graves impliquent l'usage de tout autre genre d'arme.

    La violence exercée par les gangs constitue un problème majeur dans plusieurs de nos grandes villes, comme nous avons pu le constater à Toronto au cours des derniers mois. Ne vous y méprenez pas: la violence urbaine n'est pas un problème exclusif à Toronto. Statistique Canada a publié récemment des chiffres révélant que les villes de Regina, Winnipeg, Abbottsford, Edmonton, Saskatoon et Vancouver ont régulièrement eu des taux d'homicides plus élevés que Toronto au cours de la dernière décennie. Regina accuse le taux le plus élevé, soit cinq homicides pour 100 000 habitants. Le taux d'homicides à Winnipeg a presque doublé depuis l'année précédente. Dans 85 p. 100 des homicides commis, la victime a été tuée par quelqu'un qu'elle connaissait. Les deux tiers des victimes d'homicide en 2004 étaient de sexe masculin. Nous avons besoin d'autre chose de la part des autorités provinciales que des voeux pieux et des accusations à l'endroit d'adversaires politiques.

    Les pénalités actuelles et les peines minimales obligatoires pour les infractions impliquant des armes à feu sont souvent les premières dont les procureurs de la Couronne se débarrassent en recherchant un marchandage de plaidoyers qui réduirait les coûts d'un procès et leur charge de travail. Si les procureurs de la Couronne provinciaux ont sérieusement l'intention de sévir contre les crimes perpétrés à l'aide d'une arme à feu, ils doivent faire leur part en écartant la négociation de plaidoyer en faveur de peines minimales obligatoires pour tout acte criminel violent impliquant une arme à feu.

    Certains fonctionnaires du ministère de la Justice et d'autres théoriciens, du haut de leur tour d'ivoire, ont tendance à se prononcer contre les peines minimales, préconisant plutôt un pouvoir discrétionnaire accru pour les juges, des mesures de rechange à l'incarcération et plus d'accent sur la réadaptation. Les contrevenants violents ne sont pas dissuadés par nos politiques actuelles en matière de détermination des peines, de service correctionnel et de libération conditionnelle. Les contrevenants chroniques comprennent le système et le font fonctionner à leur avantage. Le gangs criminalisées se sont emparées de nos prisons et se sont emparées de certains quartiers de nos villes. Il nous faut donc des moyens d'intervention plus musclés qui combineraient la dissuasion générale, la dissuasion spécifique, la dénonciation et la réforme.

    Dans le domaine de la loi régissant la conduite avec facultés affaiblies, ce que nous avons constaté au Canada au cours des trois dernières décennies démontre que des peines minimales ont eu un effet dissuasif, à la fois en termes généraux pour les personnes ivres tentées de prendre le volant et en termes particuliers pour les récidivistes.

Á  +-(1130)  

[Français]

    Comme nous l'avons déjà mentionné, le projet de loi C-215 constitue un premier pas positif. Nous maintenons qu'il est grand temps de réformer notre système de justice pénale.

    Lors de l'assemblée générale annuelle de 2004 de l'Association canadienne de la police professionnelle, la vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Mme Anne McLellan, avait promis d'entamer la révision de notre système actuel. L'Association canadienne de la police professionnelle accueille favorablement cette révision et est impatiente de travailler avec la ministre et le Parlement afin de répondre aux préoccupations susmentionnées.

    L'une des préoccupations des policiers et policières à la grandeur du pays est de faire cesser la violence des gangs. La solution commence en faisant cesser le phénomène des portes tournantes dans le système judiciaire canadien. Nous devons restaurer des conséquences significatives et des moyens de dissuasion convaincants dans notre système judiciaire. Cette restauration commence par des peines plus sévères, une véritable incarcération en prison et des politiques plus rigoureuses d'admissibilité à la libération conditionnelle pour les contrevenants violents. Il nous faut des peines minimales plus sévères pour les contrevenants qui commettent un crime à l'aide d'une arme à feu ou toute autre arme.

    L'Association canadienne de la police professionnelle recommande que le Parlement procède à l'adoption rapide du projet de loi C-215, afin de donner effet aux modifications qu'il renferme.

    Je vous remercie de votre attention et je demeure à votre entière disposition pour répondre à vos questions.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Chef Deering, vous avez la parole.

+-

    Chef Rick Deering (Royal Newfoundland Constabulary): Merci, monsieur le président, d'avoir accepté d'entendre nos vues aujourd'hui sur le projet de loi C-215, Loi modifiant le Code criminel qui imposerait une peine consécutive en cas d'usage d'une arme à feu dans la commission de certaines infractions criminelles.

    Dans quelques semaines, je vais entreprendre ma trente-sixième année de service dans cet honorable métier qu'est celui de policier. Au cours de ces années, j'ai été témoin de nombreux changements dans la société, dont la plupart ont enrichi la perspective de l'agent de police dont je vais vous faire part aujourd'hui.

    Après plus de 30 ans de service au sein de la Police provinciale de l'Ontario, j'ai assumé la direction de la Royal Newfoundland Constabulary, où je me trouve depuis cinq ans. En conséquence, ma perspective est celle d'un citoyen de l'Ontario ainsi que de Terre-Neuve et du Labrador. De même, j'ai sondé bon nombre de mes collègues de l'Association canadienne des chefs de police, et je suis à même de vous faire part de leurs vues sur ce projet de loi.

    Ce projet de loi nous semble tout à fait logique. Même s'il semble y avoir moins de crimes violents dans certaines régions de notre grand pays, on assisterait quand même à la prolifération de l'usage des armes à feu dans la commission de certaines infractions criminelles. Les infractions mentionnées dans le projet de loi C-215 sont celles qui, à mon avis, ont le plus grand effet sur les droits, les libertés et la sécurité des Canadiens d'un océan à l'autre.

    Dans mon secteur de responsabilité, on se sert de plus en plus d'armes à feu dans la commission de vols à main armée comparativement aux autres infractions mentionnées dans le projet de loi. Le chef Blair de Toronto vous dira probablement que l'usage des armes à feu par les gangs violents préoccupe beaucoup son service de police. Mes homologues des villes comme Winnipeg, Vancouver et Halifax sont peut-être plus préoccupés par la présence des armes à feu dans la commission d'autres infractions. Notre dénominateur commun, c'est que nous sommes tous préoccupés et sommes constamment à la recherche de solutions pour remédier à ce problème grave et tenace.

    Même si Terre-Neuve-et-Labrador demeure l'endroit le plus sûr au Canada d'un point de vue statistique, nous sommes en présence d'une tendance alarmante relativement à l'augmentation des crimes violents. En 2004, le nombre de vols à main armée a augmenté de 105 p. 100 par rapport à 2003. Jusqu'à ce jour, en 2005, le nombre de vols à main armée a augmenté de 35 p. 100 par rapport aux statistiques inquiétantes de 2004.

    Jusqu'à récemment, Terre-Neuve-et-Labrador profitait des nombreux avantages qu'il y a à être isolé du reste du monde. La mondialisation a changé cela et a donné à la province de nombreuses perspectives de croissance et de développement. Malheureusement, le crime suit souvent la prospérité. Dans notre cas, l'avènement de la culture de la drogue a augmenté le nombre de vols à main armée. Nous estimons qu'environ 90 p. 100 des crimes contre la propriété sur lesquels nous faisons enquête ont un lien direct avec les drogues illicites. Dans de nombreux cas de vols à main armée sur lesquels nous faisons enquête, on s'est servi d'une arme à feu ou on a menacé de s'en servir. C'est non seulement une menace importante pour l'ensemble de la société, mais aussi pour les victimes de crimes violents et pour les agents de police qui interviennent pour protéger les gens.

    Les armes à feu semblent être un aspect important de cette culture de la drogue. Les armes à feu et les drogues semblent bien aller ensemble. Le profil démographique du revendeur de drogue moderne rajeunit constamment. De notre point de vue, cette combinaison est alarmante.

    Je ne suis pas un expert de la détermination de la peine, et je ne suis pas ici pour critiquer ces éléments du système de justice pénal à qui incombe cette responsabilité importante. Je constate cependant que la détermination de la peine varie beaucoup d'une région à l'autre pour ces criminels qui sont reconnus coupables des crimes précisés dans le projet de loi C-215. Je constate aussi que les dangers inhérents à la commission des crimes mentionnés dans le projet de loi sont tout aussi réels à Port Moody, en Colombie-Britannique, qu'à Toronto, en Ontario; à Montréal, au Québec; ou à New Glasgow, en Nouvelle-Écosse.

    Le projet de loi C-215 nous permettra de régler ce problème qui existe depuis de nombreuses années et dont l'acuité s'accroît d'une année à l'autre. Si la sécurité est un élément important de l'identité canadienne, et si la dissuasion est un facteur important dans le processus de détermination de la peine, je vous invite à étudier sérieusement le projet de loi C-215 et à lui donner force de loi.

Á  +-(1135)  

    Le milieu policier a toujours été favorable à ces lois qui peuvent avoir pour effet de rendre nos rue plus sûres. Même si nous sommes seulement un peu plus de 50 000 policiers, c'est nous qui sommes témoins quotidiennement de la violence que l'on commet avec des armes à feu. Nous sommes dans le feu de l'action. Nous sommes les premiers à voir les effets que les armes à feu ont sur la société. Nous savons que c'est un vrai danger, et cela nous préoccupe tous. Même si nous avons l'un des systèmes de contrôle des armes à feu les plus aboutis au monde, même si nous avons créé des unités d'enquête spécialisées comme l'Équipe nationale de soutien à l'application de la Loi sur les armes à feu et les unités provinciales de soutien à l'application de la Loi sur les armes à feu en Ontario, nous perdons la bataille.

    J'ai personnellement consulté le chef Edgar MacLeod du service de police régional du Cap Breton, l'ancien président de l'ACCP, et le chef Jack Ewatski du service de police de Winnipeg, actuellement président de l'ACCP; tous les deux sont favorables à ce projet de loi. L'ACCP, à titre d'organisation, y est également favorable. J'ai la conviction que les 50 000 et plus agents de police de notre pays sont favorables à ce projet de loi; et je crois sincèrement que la vaste majorité des Canadiens respectueux de la loi manifesteraient leur soutien à ce projet de loi si on leur demandait leur opinion.

    Lorsqu'il s'agit de détermination de la peine, j'ai vu trop souvent des criminels de carrière jouer le tout pour le tout. Trop souvent, je les ai vus s'en sortir presque indemne. Nous croyons qu'il est temps de changer cela.

    Rien que ce matin, deux reportages à Global News portaient sur ces actes de violence que l'on commet avec des armes à feu. À Winnipeg, un étudiant innocent et respectueux de la loi a été victime d'une balle perdue — et c'est cet incident qui m'amène à croire que Winnipeg est peut-être la ville du Canada où il se commet le plus d'homicides. Et il y a eu cet incident à Toronto où un chauffeur des transports en commun s'est retrouvé handicapé à vie à cause d'une balle perdue, et tout cela illustre la gravité de la situation. Malheureusement, des incidents comme ceux-là sont en train de devenir la norme. Il faut faire quelque chose, et nous croyons que vous avez les outils pour agir.

    Je vous remercie de m'avoir écouté.

+-

    Le président: Merci.

    Le chef adjoint Warr, s'il vous plaît.

+-

    Chef-adjoint A. Warr (Opérations spéciales, Service de police de Toronto): Merci, monsieur le président.

    Avant d'être nommé chef adjoint des Opérations spéciales du Services de police de Toronto, je commandais la Division 42, qui est la division responsable des parties nord et est de Scarborough, ce qui englobe Malvern. Pendant mon séjour là-bas, j'ai été à même de constater les effets terribles que les armes à feu peuvent avoir sur un milieu qui est par ailleurs tranquille. Les citoyens avaient peur de sortir de chez-eux après être rentrés du travail, ou ils ne laissaient pas leurs enfants sortir pour jouer de crainte qu'ils ne deviennent des victimes innocentes de la violence causée par des armes à feu.

    Même si je vois bien que cette violence est un symptôme d'un problème social beaucoup plus profond, nous ne pouvons pas continuer d'ignorer ce symptôme pendant que nous cherchons un remède définitif. Nous avons traité ce symptôme tout en recherchant le vaccin. Je crois que nous devons offrir aux jeunes gens une alternative aux armes à feu, aux gangs et à la drogue. Nous devons faire en sorte qu'ils croient dans l'avenir et qu'ils puissent devenir des citoyens utiles dans notre société. Notre société doit supprimer les modèles négatifs pour en finir avec la glorification du gangstérisme qui domine le monde du spectacle aujourd'hui. Je crois que si nous mettons derrière les barreaux ceux qui aujourd'hui semblent intouchables, il se trouvera moins de jeunes gens pour les imiter.

    Je suis d'accord pour que l'on punisse durement l'usage illégal d'armes à feu, particulièrement les armes de pointe. Avec des peines minimales pour les infractions commises avec une armes à feu, nous pourrons mettre derrière les barreaux pendant longtemps ceux qui sont enclins à ce genre de violence.

    Les mesures que l'on propose dans ce projet de loi constituent un bon début. Cependant, je vous demande respectueusement d'apporter certains amendements à ce projet de loi avant qu'il n'entre en vigueur. Je voudrais que les articles 94, 95 et 96 du Code criminel qui traitent de la possession d'une arme à feu soient modifiés par l'adjonction de peine minimale de cinq années de réclusion pour ceux qui sont condamnés et que l'on retranche de ces infractions la disposition relative à la procédure sommaire. Je recommande aussi respectueusement que les personnes qui sont armées et qui sont mêlées au trafic de substances mentionnées dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances écopent aussi d'une peine minimale, en utilisant la même formule que l'on retrouve dans ce projet de loi.

    Notre recherche démontre qu'il y a des liens entre les armes à feu, les gangs et les drogues. Bon nombre de meurtres de jeunes gens cette année à Toronto se sont produits au cours d'une transaction qui, pour une raison ou pour une autre, a mal tourné. Une arme à feu permet de régler facilement un différend. Les trafiquants de drogue s'arment pour se protéger contre ceux qui veulent leur voler leur marchandise ou les dépouiller de leur profit. La drogue, ou le trafic de la drogue, est à l'origine de la plupart des invasions de domiciles avec vols qui se produisent dans notre ville. La prolifération des armes à feu et le fait qu'il ne semble pas y avoir de conséquences pour la possession et l'usage d'armes illicites font que de nombreux jeunes gens s'en procurent pour hausser leur statut au sein de leur groupe ou pour imiter les gangsters qui leur servent de modèles. Malheureusement, l'accessibilité des armes est une des raisons pour lesquelles tant de différends qui étaient autrefois réglés à coups de poing sont aujourd'hui réglés à coups de feu. Nous sommes témoins des résultats.

    En ce moment, les peines pour les personnes arrêtées pour possession ou usage d'armes à feu ne veulent rien dire. Les juges n'imposent pas les peines qui sont déjà prévues par les lois; par conséquent, le fait d'alourdir les peines maximales n'a aucun effet. Une peine minimale après un procès équitable nous permettrait de mettre derrière les barreaux des criminels dangereux qui ne pourraient plus récidiver. De nombreux exemples récents démontrent comment le système judiciaire, en ce qui concerne les peines relatives aux crimes commis avec des armes à feu, est devenu une porte tournante; aussitôt qu'un délinquant est reconnu coupable d'un crime commis avec une arme à feu, il se retrouve dans nos rues et récidive.

    Il y a aussi de nombreux exemples de délinquants dangereux qui, libérés sous caution et avec conditions, commettent des crimes graves sans réfléchir aux conditions qu'on leur avait imposées à leur libération. J'ai huit exemples frappants dont je pourrai vous faire part lorsque nous passerons aux questions; je n'ai pas le temps de les mentionner tous maintenant. Je parle de certains cas les plus notoires, mais il ne s'agit pas de cas isolés. Ce sont des cas fréquents que l'on voit tous les jours. Ce ne sont pas des cas seulement à Toronto. Nous semblons avoir plus de cas de ce genre étant donné le nombre de crimes commis chez-nous.

    Il y a une autre conséquence très tangible et tragique à cette prolifération des armes et à l'attitude apparemment désinvolte face à leur utilisation. Il s'agit des victimes innocentes qui sont victimes des échanges de coups de feu. Comme l'ont mentionné aujourd'hui M. Kramp et le témoin qui m'a précédé, justement, samedi soir dernier, un chauffeur d'autobus de la Commission des transports de Toronto a été stoppé par un groupe de jeunes. Il semble que deux d'entre eux fuyaient les trois autres. Leur querelle s'est poursuivie à bord de l'autobus, et tout à coup, l'un des attaquants a sorti une arme et a tiré. Une balle a pénétré le visage du chauffeur et est sortie de l'autre côté, lui causant une blessure très grave. Il va perdre l'usage de l'un de ses yeux, au minimum. Dans cette affaire, il était une victime tout à fait innocente, un père de famille qui gagnait honnêtement sa vie et qui, s'il se rétablit, ne pourra jamais reprendre son travail, et la vie qu'il avait avec sa famille jusqu'à samedi soir dernier ne sera plus jamais la même.

Á  +-(1140)  

    Les exemples abondent. M. Kramp a rappelé le cas de Mme Russo, qui, en avril 2004, alors qu'elle était allée acheter de quoi se nourrir et nourrir sa fille handicapée, avait été frappée par des balles destinées à d'autres clients du magasin. Mme Russo passera le reste de ses jours en chaise roulante.

    M. Derek Wah Yan, pour sa part, n'a pas eu la chance de Mme Russo. En novembre 2003, alors qu'il était dans sa chambre à coucher à regarder la télévision avec son enfant, il a été tué par une balle perdue qui avait pénétré dans sa maison.

    En novembre 2004, la jeune Tamara Carter de neuf ans était à bord d'un autobus lorsqu'une bagarre a éclaté. Quelqu'un a tiré un coup de feu et elle a été frappée par une balle dans la tête. Elle n'est pas morte, mais souffre désormais de blessures permanentes graves.

    En août dernier, c'est le petit Shaquan Cadougan de quatre ans qui jouait à proximité de chez lui lorsque des coups de feu ont éclaté qui l'ont frappé plusieurs fois. Il souffre désormais de séquelles permanentes et graves de ces blessures.

    Les blessures d'ordre physique peuvent être dévastatrices, mais soyez assurés que les traumatismes psychologiques qu'ont vécu ces enfants dureront jusqu'à la fin de leurs jours.

    Vous savez sans doute que Toronto a enregistré cette année un nombre sans précédent de meurtres dûs à des armes à feu: en effet, nous comptons jusqu'ici cette année 61 meurtres, alors que pendant longtemps, notre moyenne se situait à 59 pour l'année. Or, 41 de ces 61 meurtres ont été commis avec des armes à feu. Et bon nombre des auteurs de ces meurtres purgeaient déjà des peines en vertu desquelles il leur était interdit d'avoir une arme à feu ou en vertu desquelles ils devaient se conformer à des mises en liberté judiciaire imposées pour des infractions avec arme à feu. Tous ces meurtres ont été commis avec des armes à feu illégales.

    Je pourrais vous donner plusieurs autres exemples, que je réserverai à la période de questions, si nous avons le temps.

    Vous voyez bien que le système actuel ne semble pas fonctionner; ces meurtres n'auraient sans doute pas été commis si les meurtriers avaient été à l'époque en train de purger des peines sérieuses pour avoir commis des crimes à la pointe d'une arme à feu. Cessons de jouer à l'autruche, et rendons-nous compte que nos rues regorgent de scènes de mort et de carnage; reconnaissons que le régime actuel de peines légères, d'interdictions inutiles d'avoir en sa possession une arme à feu et de conditions en mise de liberté judiciaire ne donne rien.

    Ceux qui choisissent de commettre des crimes en portant illégalement des armes à feu doivent en subir les conséquences. Il est grand temps que notre société envoie clairement à ceux qui envisagent de commettre un crime à la pointe du fusil le message musclé que leur crime ne sera pas toléré et que s'ils choisissent tout de même de le commettre, ils seront condamnés à une peine d'emprisonnement minimale de longue durée.

    Pour résumer, sachez que le Service de police de Toronto appuie votre projet de loi et demande respectueusement au comité d'adopter les amendements que nous avons suggérés, à savoir inclure au projet de loi les articles 94, 95 et 96 du code qui prévoient des peines d'emprisonnement minimales; retirer les dispositions de déclaration de culpabilité par procédure sommaire; et, dans le cas d'infractions impliquant le trafic ou la possession pour fin de trafic de substances contrôlées énumérées dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances tout en étant en possession d'une arme à feu, l'ajout de peines minimales semblables à celles que propose le projet de loi.

    Merci.

Á  +-(1145)  

+-

    Le président: Merci, chef adjoint Warr.

    Nous entendrons maintenant M. David Daubney du ministère de la Justice.

+-

    M. David Daubney (avocat général, Équipe de la réforme sur la détermination de la peine, ministère de la Justice): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Le ministère est d'avis que le projet de loi C-215 soulève de graves problèmes constitutionnels et de politique. En effet, l'article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit que chacun a droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités. En vertu de l'article 12, il faut se demander si le traitement ou la peine est exagérément disproportionné et si elle est à ce point excessive qu'elle heurte le sentiment de bienséance de notre société ou que les Canadiens jugent répugnante ou intolérable la punition. Toutes ces expressions se trouvent dans la jurisprudence.

    La grande majorité de la jurisprudence entourant l'article 2 portait sur une évaluation de la constitutionnalité des peines minimales obligatoires, et, ce faisant, la jurisprudence a fixé deux critères aux tribunaux. D'abord, l'instance révisionnelle doit se demander si la peine imposée est exagérément disproportionnée à l'égard du contrevenant jugé devant le tribunal, si elle tient compte des principes de la détermination de la peine et de l'objectif de la loi, ainsi que de la situation du contrevenant.

    En supposant que l'analyse démontre qu'il n'y a pas de contravention à la charte — ce qui n'est certes pas garanti dans le cas du projet de loi — le tribunal doit alors en second lieu se demander si la manière dont la peine est déterminée aura un effet d'inconstitutionnalité par rapport à des scénarios hypothétiques raisonnables — c'est-à-dire des scénarios qui pourraient raisonnablement survenir, qui ne sont ni extrêmes ni farfelus.

    De façon générale, les dispositions obligatoires minimales maintenues sont assorties normalement d'une peine minimale légère ayant peu de chance de donner lieu à un niveau de disproportion exagéré dans un scénario hypothétique raisonnable; ou alors, les mesures de peine minimale obligatoire sont suffisamment modelées de façon à ce que les infractions s'appliquent à une gamme relativement étroite de comportements et, dans l'idéal, sont suffisamment graves pour justifier qu'elles soient assorties d'une peine obligatoire.

    Je crois me souvenir que le projet de loi qui a précédé celui-ci et qui avait été déposé par M. Pankiw lors de la dernière législature aurait imposé des peines minimales progressives de 15, 20 et 25 ans. Avec tout le respect que je dois au parrain du projet de loi, le modèle proposé ne suffit pas pour garantir qu'il n'y aura aucune contestation véritable en vertu de la charte.

    L'imposition de peines obligatoires minimales ne sont pas la norme au Canada et on reconnaît qu'elles s'éloignent des principes établis de détermination de la peine. Les tribunaux ont accepté d'imposer des mesures musclées pour combattre les crimes faits à la pointe du fusil. Dans l'arrêt Morrisey, la Cour suprême du Canada a établi en 2000 que « le législateur a le droit de prendre des mesures appropriées pour répondre au problème urgent de la mortalité liée à l'usage des armes à feu, compte tenu particulièrement du fait qu'il s'agit d'un problème grave depuis plus de vingt ans ». Toutefois, les tribunaux s'attendront à ce que ces mesures musclées respectent la charte et honorent la garantie de l'article 12.

    Monsieur le président, le projet de loi comporte plusieurs autres irrégularités, notamment le fait qu'il va à l'encontre de ce principe fondamental de détermination de la peine tel que décidé par le Parlement en 1995 : la peine doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant. Le projet de loi viole également le principe de totalité codifié par le Parlement à l'alinéa 718.2(c) du code — à savoir « l'obligation d'éviter l'excès de nature ou de durée dans l'infliction des peines consécutives ». Enfin, le projet de loi propose d'ajouter à une peine d'emprisonnement à vie pour meurtre avec préméditation — qui se trouve correspondre justement à la peine minimale que devra purger le contrevenant jusqu'à la fin de ses jours — une autre peine minimale.

    À notre avis, dès que les amendements entreront en vigueur, il est presque assuré qu'ils feront l'objet d'une contestation en vertu de la charte et que cette contestation sera couronnée de succès. À notre avis, il y a des façons beaucoup plus efficaces de lutter contre le grave problème que sont les crimes commis avec une arme à feu. Certaines des mesures possibles ont fait l'objet d'une discussion lors d'un forum organisé récemment à Toronto sur la violence avec les armes à feu. Le mois prochain, notre ministre rencontrera ses homologues des provinces et des territoires à Whitehorse pour discuter avec eux de toute une gamme de mesures possibles qui incluront vraisemblablement des modifications législatives éventuelles.

Á  +-(1150)  

    Le gouvernement s'engage à prendre toutes les mesures raisonnables et pratiques en vue de juguler les crimes commis au Canada avec des armes à feu, mais malgré les belles intentions que comporte l'initiative du parrain de ce projet de loi-ci, nous sommes d'avis que l'adoption de cette mesure législative ne constituerait pas une de ces mesures raisonnables et pratiques.

    S'il me reste quelques minutes, monsieur le président, j'aimerais aborder certains passages des témoignages précédents.

    La recherche effectuée au Canada et aux États-Unis a démontré que des peines plus longues et plus sévères n'ont pas d'effet dissuasif sur les récidivistes. Tout au contraire, les peines plus longues donnent lieu à des taux de récidive plus élevés. Je vous citerai à cet égard un examen effectué en 2002 par le solliciteur général du Canada de 111 études de 442 000 contrevenants aux États-Unis et au Canada et qui constitue sans doute la plus vaste méta-analyse effectuée dans le monde; cette analyse démontre que les peines de plus de deux ans ont donné lieu à une augmentation moyenne de la récidive de 7 p. 100.

    Les criminologues conviennent que la probabilité d'être appréhendé et d'être condamné peut dissuader les délinquants, mais pas la sévérité de la peine qu'ils pourraient devoir purger. Voilà pourquoi les corps policiers, si nombreux ici aujourd'hui, doivent obtenir plus de ressources pour pouvoir dépister et appréhender ceux qui entendent se servir d'armes à feu pour commettre des crimes graves.

    Nous savons qu'aux États-Unis, on impose les peines obligatoires minimales plus que dans toutes les autres démocraties occidentales réunies. Si cette peine obligatoire donnait de bons résultats, les États-Unis seraient aujourd'hui la société la plus sûre du monde. Or, nous savons que c'est loin d'être le cas, et que les chercheurs américains qui se penchent sur la détermination de la peine s'entendent quasiment tous pour dire que les peines obligatoires minimales n'ont pas d'effet discernable sur le crime. Par contre, elles ont des conséquences imprévues, qui sont négatives: l'imposition de longues peines pour des crimes moins graves; un vaste pouvoir discrétionnaire de poursuivre, qui se traduit par une application inégale et injuste de la loi; un fardeau financier énorme qu'entraînent les procès et la détention préventive et, aux États-Unis, une énorme disparité raciale, puisqu'on compte environ deux hommes Afro-Américains sur cinq de 18 à 24 ans dans la population carcérale totale de 2,1 millions dans ce pays.

    C'est ce qui explique pourquoi presque la moitié des États américains se sont refusé à appliquer de façon inflexible cette méthode et ont réduit ou carrément abrogé bon nombre des peines obligatoires; et c'est aussi pourquoi plus tôt cette année les lignes directrices fédérales sur la détermination de la peine devaient être considérées uniquement comme un cadre, et non pas comme une obligation. Lorsque nous avons regardé ce qui se faisait en termes de peines obligatoires dans les autres pays occidentaux, et il y en avait bien peu, nous avons constaté que dans les pays du Commonwealth et dans les pays de l'Europe continentale qui imposaient les peines obligatoires — il y en avait très peu — , celles-ci étaient accompagnées dans tous les cas de clauses dérogatoires établissant que, dans des circonstances exceptionnelles, le tribunal doit être en mesure d'imposer une peine en deça du minimum.

    Monsieur le président, il vaut la peine de signaler à cet égard que, lorsque le groupe de recherche Environic a mené en mars dernier un sondage général de la population auprès de 1 501 Canadiens, on a constaté que même si 59 p. 100 des répondants étaient d'avis que l'imposition obligatoire de peines minimales était souhaitable, 76 p. 100 d'entre eux estimaient qu'on devrait laisser un peu de marge de manoeuvre aux juges pour qu'ils puissent imposer moins que la peine minimale dans des circonstances particulières. Le Canada est la seule démocratie occidentale, à part les États-Unis, qui ne permet pas cette marge de manoeuvre.

Á  +-(1155)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Daubney.

    Monsieur Toews, votre première intervention.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci beaucoup.

    Je remercie les témoins de leur contribution à nos travaux sur cet important sujet et je remercie mon collègue, M. Kramp, d'avoir déposé ce projet de loi. Que ce projet de loi soit modifié ou non, je peux vous assurer que le Parti conservateur l'appuiera. Nous jugeons absolument essentiel que soient imposées des peines minimales obligatoires pour ce genre d'infractions commises avec une arme à feu.

    Je suis de plus en plus découragé par le ministère de la Justice et son attitude dans ce dossier. Les preuves sont loin d'être aussi irréfutables que l'affirme le ministère et quand on compare le régime de peines minimales obligatoires prévu dans cette mesure législative aux lignes directrices en matière de peines qui existent aux États-Unis, on compare des pommes à des oranges. En fait, dans les États et les villes où on impose de lourdes peines obligatoires pour l'utilisation d'une arme à feu, on a constaté une baisse marquée de l'usage d'armes à feu. Cela a été prouvé et je n'ai pas encore vu de preuve contraire.

    Malheureusement, notre ministère de la Justice continue d'excuser les criminels et refuse de prendre position devant les tribunaux et d'affirmer qu'il y a disproportion, en effet, mais disproportion à l'endroit des victimes. Parlez-en au conducteur d'autobus de Toronto qui a reçu une balle dans le visage et qui vivra avec cette peine le reste de sa vie. En quoi est-ce disproportionné? Parlez-en à la caissière d'un dépanneur qui voit entrer un jeune truand qui pointe une arme à feu chargée sur elle. Pouvez-vous imaginer le traumatisme avec lequel elle devra vivre le reste de sa vie active?

    Dire que c'est une mesure disproportionnée... Dire qu'il est disproportionné d'imposer cinq ans d'emprisonnement supplémentaires à celui qui se munit délibérément d'une arme à feu pour commettre un vol ou dix ans d'emprisonnement supplémentaires à celui qui décharge son arme en présence d'un enfant de 4 ans, d'un chauffeur d'autobus ou d'autres victimes innocentes — disproportionné par rapport à quoi? J'en suis abasourdi. Dire que c'est disproportionné d'allonger de 15 ans la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle de celui qui a tué... car je crois que c'est là votre intention dans cette situation particulière, dans les cas de meurtres au premier degré. Il faudrait peut-être peaufiner ces dispositions, mais dire que c'est disproportionné...

    Ce qu'il nous faut de la part du ministère de la Justice, ce sont des fonctionnaires qui soient prêts à aller dire au juge que telle est la situation dans les rues de nos jours, qu'il faut défendre les lois et qu'on a fini de parler de principes comme la proportionnalité ou la totalité, des normes parlementaires, de toute façon, qui peuvent être modifiées par une loi et qui ne sont pas gravées dans le marbre.

    C'est tout simplement renversant. Déjà, la Cour suprême a jugé inconstitutionnelle l'infraction de meurtre imputé. Auparavant, le complice du vol à main armée qui restait dans la voiture pouvait être accusé de meurtre imputé si le cambrioleur tuait quelqu'un pendant la perpétration du crime. C'est ce qu'on appelle le meurtre imputé et il était tout à fait logique de pouvoir porter cette accusation contre celui qui se place lui-même dans une situation sachant qu'elle pourrait tourner à la violence. La Cour suprême a décrété qu'il s'agit en fait d'un homicide involontaire coupable. C'est scandaleux.

    Le ministère de la Justice nous dit que ce projet de loi est disproportionné, qu'il entraînera une peine cruelle et inusitée — moi, je me demande, cruelle et inusitée pour qui? C'est cruel et inusité pour la victime, certainement pas pour le délinquant qui entre dans un dépanneur avec une arme à feu chargée, la pointe sur l'employé et appuie sur la détente. Cela me semble évident.

    Monsieur le président, c'est ce même ministère de la Justice qui, quand nous avons examiné les peines avec sursis, nous envoyait des analyses de politique qui nous ont dit que les peines avec sursis étaient une bonne idée et qui m'a répondu que c'était tout à fait acceptable même dans les cas de meurtre.

  +-(1200)  

    Voici ce qui motive la politique de justice pénale du gouvernement: remettre les criminels en liberté le plus rapidement possible. Les représentants du ministère affirment qu'une peine obligatoire n'a pas d'effet dissuasif. Pourtant, pendant que ces criminels sont en prison, ils ne peuvent tirer sur des innocents et les tuer. Honnêtement, je n'ai aucune sympathie pour celui qui entre dans un dépanneur, tue un jeune homme ou une jeune femme et estropie un enfant de 4 ans.

    On parle de proportionnalité, mais qu'est-ce vraiment? Le ministère de la Justice ne va pas devant les tribunaux pour parler de proportionnalité, pour parler de l'incidence sur les victimes des peines qui sont imposées de nos jours. Ce n'est pas le genre de chose dont a fait mention le représentant du ministère de la Justice présent ici ce matin.

    Ce dont il s'agit, c'est de la proportionnalité de la peine par rapport aux effets sur les criminels. Je n'en crois pas mes oreilles. C'est le ministère de la Justice, mais il ne défend pas la justice, certainement pas la justice pour les victimes.

    Mon préambule peut sembler un peu long, mais, en fait, vous prêchez aux convertis. Je voulais simplement vous dire que nous aimerions vous aider, mais que le ministère de la Justice et le gouvernement nous en empêchent. Ils feront tout en leur pouvoir pour contrer ce projet de loi, et c'est mal.

    Vous savez, monsieur Kramp, vous ne pourrez faire adopter ce projet de loi que par un autre gouvernement, à moins que certains des députés d'en face aient le courage de s'affirmer face au ministre de la Justice et de dire qu'ils en ont assez de toute cette foutaise sur la proportionnalité, qu'ils veulent défendre les victimes, qu'ils ont l'intention d'adopter ce projet de loi en comité et de le faire adopter lors du vote à la Chambre.

+-

    Le président: Merci, monsieur Toews.

    Au tour de M. Marceau.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci, monsieur le président.

    D'abord, monsieur Kramp, merci d'avoir présenté ce projet de loi. Nous avons eu l'occasion d'en parler à maintes reprises. J'ai aussi eu l'occasion d'en parler avec Tony Cannavino lors de ses appels téléphoniques. Vous faites d'ailleurs un travail de lobbying fort efficace, monsieur Cannavino. Je tenais à le mentionner ici. Même si on ne peut pas toujours être d'accord, vous soulevez toujours des points qui, à tout le moins, nous font réfléchir.

    Vous le savez, monsieur Kramp — M. Cannavino le sait également —, la formation politique que je représente n'est pas du tout allergique aux peines minimales. Nous l'avons d'ailleurs démontré en présentant des amendements dans le cadre du projet de loi C-2 sur la protection des personnes vulnérables. En revanche, nous avons une certaine réticence, pour ne pas dire une réticence certaine, à l'égard des peines consécutives. Ce préambule est une introduction à la question que je voudrais poser à M. Kramp.

    À moins que je me trompe, à l'heure actuelle, il y a dans le Code criminel une infraction de vol qualifié. S'il y a utilisation d'une arme à feu, cela devient un vol à main armée qui place l'infraction dans une catégorie complètement différente parce que c'est une infraction plus grande avec des conséquences plus graves.

    Est-ce que je comprends que le projet de loi C-215 que vous présentez ajouterait obligatoirement une peine minimale en plus de la peine pour un vol à main armée? Est-ce que c'est bien le but du projet de loi?

  +-(1205)  

[Traduction]

+-

    M. Daryl Kramp: Oui, c'est cela, et c'est très simple. Sitôt que quelqu'un empoigne une arme à feu, il faut qu'il comprenne bien qu'il a en sa possession une arme mortelle. Ce n'est pas du tout la même chose que de frapper quelqu'un à la tête avec un bâton au risque de le blesser: dès lors qu'on prend une arme à feu, on sait qu'on risque d'infliger des blessures graves ou de causer la mort.

    Nous parlons donc de la vie en tant que telle. Ce n'est pas simplement une agression. Chaque fois qu'une arme à feu est utilisée, il y a agression qui risque de causer la mort. Et ce genre d'acte mérite assurément une punition supplémentaire.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je présume qu'avant de présenter un projet de loi aussi important que le projet de loi C-215, vous avez fait des recherches. Pouvez-vous nous donner une moyenne des peines qui ont été imposées dans les cas que vous voulez régler?

    On sait qu'avant de régler un problème, il faut l'identifier. Il y a certains cas tragiques qui ont été mentionnés devant ce comité, et je sympathise bien évidemment avec les victimes, de même qu'avec leur famille. Avons-nous des chiffres pouvant nous indiquer les moyennes des peines imposées depuis les 5, 10 ou 15 dernières années, dans les cas tels ceux que vous voulez régler avec le projet de loi C-215?

[Traduction]

+-

    M. Daryl Kramp: Je n'en ai pas, non.

    Par contre, nous avons prêté l'oreille à ce que disaient les gens. J'ai écouté les policiers qui, au quotidien, sont là pour faire respecter la loi, et ils m'ont dit d'expérience et avec beaucoup d'insistance qu'à l'heure actuelle, le châtiment ne correspondait pas à la gravité du crime.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je comprends et je sais que M. Cannavino pourra répondre à ma question. Cependant, avant de faire un changement aussi important, je crois que si nous avions des statistiques, cela nous aiderait à bien former notre opinion. On a toujours un peu le biais de notre formation ou du travail que nous faisons. Mon épouse a été longtemps procureure de la Couronne et elle avait affaire à des voleurs et des violeurs, etc. Il y a bien sûr le point de vue policier.

    J'aimerais avoir les statistiques les plus froides que possible. Monsieur Cannavino, est-ce que vous en avez?

+-

    M. Tony Cannavino: Premièrement, votre épouse a dû être découragée pendant bien des années. Vous avez aussi, à votre gauche, un avocat de la défense qui a vécu très agréablement et à l'aise pendant au moins 30 ans de pratique. Il a vu beaucoup de cas et beaucoup de clients.

    Je sais que pour certains dossiers, votre formation politique n'est pas en désaccord sur l'imposition de sentences minimales. Lorsqu'on parle du projet de loi C-215, il est important que cela ne fasse pas l'objet d'un plea bargaining. Il s'agit d'un automatisme. Le talent des avocats de la défense est de tasser immédiatement ces sentences. Or, le projet de loi, sans être une panacée, ne résoudrait pas tout le problème de la violence urbaine, mais je peux vous dire que s'il est adopté, vous lancerez un message très clair dans tout le Canada à savoir que c'est fini.

    On ne s'adresse pas à la crème de la société, mais à ceux qui terrorisent nos communautés, phénomène qui prend de plus en plus d'ampleur. On s'adresse aux criminels violents. Cela est spécifié et c'est la pierre angulaire. De plus en plus, les gangs de rue deviennent un cancer dans nos quartiers. Donc, le projet de loi vient lancer un message. Je dirais même que les gens sauront qu'ils ne pourront pas s'en sortir, même en se payant les meilleurs avocats.

    Également, je dirais respectueusement, monsieur Marceau, que je suis très déçu de la présentation de M. Daubney, mais je n'en fais pas un cas de personnalité, évidemment, et vous comprendrez pourquoi.

    Personnellement, j'ai travaillé comme policier pendant plus de 32 ans, dont au-delà de 15 ans à l'intérieur d'unités spécialisées, notamment Carcajou. En fait, lorsque mon patron était débranché, je l'invitais cordialement à venir s'asseoir dans mon véhicule de patrouille et à faire un tour dans la communauté. Bizarrement, après quelques heures, il changeait son approche. Je me demande si un jour il faudra que les policiers dans l'ensemble du Canada invitent chacun des députés à patrouiller les rues pendant quelques heures afin d'aller voir ce qui s'y passe.

  +-(1210)  

+-

    M. Richard Marceau: Cela me ferait plaisir, monsieur Cannavino.

+-

    M. Tony Cannavino: Il nous ferait grand plaisir de vous accorder cette occasion, et vous pourriez constater la détresse de certaines communautés et de certains groupes sociaux.

    En fait, j'ai participé au Forum sur la violence urbaine de la région du Grand Toronto. J'ai entendu des témoignages incroyables de la part de communautés et de groupes sociaux qui sont pris en otage. Je sais qu'en tant que parlementaires, vous faites votre possible pour aider les communautés. Par contre, en tant que porte-parole de 54 000 membres, je ne peux accepter qu'on me dise que des législateurs ont peur d'être défiés à la Cour suprême à cause de la Charte.

+-

    M. Richard Marceau: Vous pourrez régler votre cas avec M. Daubney. À mon avis, aucun député, jusqu'à présent, n'aurait dit cela à ce comité. J'aurais une dernière question, puisque M. Kramp et M. Cannavino n'avaient pas de statistiques.

    Monsieur Daubney, auriez-vous des statistiques concernant la moyenne des peines qui ont été imposées dans les cas que M. Kramp veut régler?

+-

    M. David Daubney: Malheureusement, je n'ai pas les statistiques avec moi.

[Traduction]

    En connaissance de cause, je pourrais me risquer à dire quels sont les genres de peines qui pourraient être affectées par certains de ces crimes plus graves. Pour commencer, il y a le meurtre qui entraîne une peine minimale assortie d'une période minimale pour l'admissibilité à la libération conditionnelle.

    L'homicide est passible d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à la perpétuité sauf en cas d'acquittement, et les circonstances qui l'entourent sont elles aussi tout aussi variées. Mais en règle générale, en cas d'homicide, la sentence est de l'ordre de six ou sept ans, lorsqu'on fait la moyenne. Dans le cas d'une tentative de meurtre, la sentence est en général équivalente à la moitié de celle qui est prononcée pour un meurtre en ce qui concerne l'admissibilité à la libération conditionnelle. Le vol qualifié est un délit qui, s'il est perpétré au moyen d'une arme à feu, est en règle générale assorti de l'une des peines les plus sévères prévues par le Code criminel. S'il est commis dans le cadre d'une invasion de domicile, il est arrivé que ce genre de délit soit sanctionné par une peine pouvant aller jusqu'à 18 ans dans le cas d'un récidiviste notoire.

    Voilà toutes sortes de peines ordonnées par les tribunaux, selon bien sûr les circonstances aggravantes et atténuantes en cause. La longueur de la peine de prison prononcée est surtout conditionnée par l'existence d'un casier judiciaire antérieur. S'il s'agit d'un cambrioleur notoire, il devrait se voir infliger une lourde peine, probablement supérieure à quatre ans de prison.

    Le problème des peines minimums tient à ce que souvent, la peine minimale devient la peine maximale, de sorte qu'elle a exactement l'effet contraire de ce que voudrait le Parlement, en ce sens qu'elle est considérée comme un plafond. Si vous songez à l'impact des changements survenus en 1995-1996 avec l'introduction de la peine minimale de quatre ans, on le voit très bien. Ce qu'on voit également très bien, c'est que de plus en plus, le ministère public opte pour la négociation d'un plaidoyer, les procureurs provinciaux — et M. Toews, qui a été lui-même procureur général le sait fort bien — assument l'essentiel des poursuites pénales au Canada et devraient faire valoir ce qu'il a lui-même préconisé au ministère. Nous nous occupons des infractions qui relèvent du fédéral et de celles qui sont commises dans les trois territoires, et il est évident que le sort des victimes nous interpelle.

+-

    Le président: Veuillez conclure, je vous prie.

+-

    M. David Daubney: Je terminerai en disant que la preuve est très claire. J'en conviens, on a fait énormément de travaux de recherche au Canada au sujet des armes à feu, mais ce qu'on a pu voir dans le cas des délits passibles d'un an, c'est qu'un pourcentage très élevé de ces infractions font l'objet d'un sursis ou d'une annulation des procédures. Cela montre bien que les procureurs provinciaux veulent vraiment jouer leur rôle d'officiers de justice. S'ils pensent qu'une peine minimum serait disproportionnée étant donné les circonstances, ils peuvent fort bien accepter que la défense plaide une infraction de moindre gravité qui n'est pas associée à une peine minimale.

+-

    Le président: Merci, monsieur Daubney.

    Monsieur Comartin, la parole est à vous.

  +-(1215)  

+-

    M. Vic Toews: Un rappel au Règlement, monsieur le président: le témoin parlait un peu plus tôt du caractère constitutionnel de certaines dispositions. C'est de cela que j'avais parlé. Lorsque le ministère fédéral de la Justice intervient — en particulier au niveau de la Cour d'appel ou de la Cour suprême du Canada, dans ce genre de dossiers...

+-

    Le président: Monsieur Toews, merci pour cette intervention.

+-

    M. Vic Toews: C'était un rappel au Règlement.

+-

    Le président: Monsieur Comartin, vous avez la parole.

+-

    M. Joe Comartin: J'essaie de me retenir, monsieur le président, pour ne pas m'en prendre à M. Toews et au Parti conservateur avec une tirade comme celle qu'il vient de nous livrer pour des raisons purement politiques.

    Je me contenterai de dire ceci: tout cela concerne la prévention des crimes. C'est pour cette raison que nous sommes ici, nous législateurs, et c'est pour cette raison que les corps policiers existent.

    Je voudrais féliciter M. Kramp parce que nous nous sommes déjà lui et moi beaucoup entretenus de ce texte de loi et je pense que le point de vue qu'il a adopté est le bon.

    M. Cannavino — et j'aimerais d'ailleurs vous interpeller tous deux à ce sujet — et vous avez soutenu avec beaucoup d'énergie que le précédent que nous créons en établissant des peines minimales dans les cas de conduite avec facultés affaiblies vaut dans ce cas-ci également. Je tiens à vous dire à tous deux qu'à mon sens, vous avez dans une certaine mesure nui à tout le travail qui a été effectué par l'organisation MADD et par les différents corps policiers partout au Canada afin de sensibiliser la population.

    Par conséquent, monsieur Kramp, la prochaine fois que vous prendrez la parole à ce sujet, insistez un peu plus là-dessus. L'élément en question était que nous ne nous sommes pas limités à faire intervenir des peines minimales. Nous avons mis en branle partout au Canada une campagne phénoménale pour communiquer et pour renseigner sur le fait que ce genre de comportement ne serait plus toléré peu importe l'appartenance sociale.

    Le problème pour moi, lorsque je regarde ces statistiques... Et par ailleurs, monsieur Kramp, je conteste vos chiffres étant donné que ceux de 2004 sont plus à jour. D'ailleurs, l'utilisation d'armes à feu a en réalité diminué en 2004 par rapport à 2003. J'ignore ce que les chiffres vont nous révéler pour 2005. Mais je me demande dans mon for intérieur si nous ne sommes pas maintenant rendus au point de pouvoir utiliser efficacement certaines peines minimales pour dissuader.

    Monsieur le directeur adjoint Warr, lorsqu'on songe aux victimes de Toronto, je pense que pour elles, peu importe que les coupables écopent de quatre ans ou de cinq ans. Ce qui importe pour elles, c'est de ne pas se faire tirer dessus, et c'est en fait cela que je voudrais voir. En sommes-nous donc arrivés au point où nous pourrions efficacement — et je vous pose tous deux la question — faire à la fois de la sensibilisation et...?

    L'argument de M. Daubney est bon. La plupart des gens qui utilisent une arme à feu ne prennent pas la peine de réfléchir, contrairement aux criminels membres d'une bande, et ce sont précisément à ceux-là que je voudrais m'en prendre dans ce dossier des armes à feu, étant donné le nombre considérable d'armes à feu qui pénètrent sur notre territoire et qui se retrouvent entre leurs mains.

    Mais essayez plutôt de me convaincre que nous sommes arrivés au point où ce que nous avons réussi à faire pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies, nous pourrions maintenant le faire aussi pour lutter contre les délits commis avec une arme à feu.

+-

    M. Daryl Kramp: Monsieur Comartin, j'aurais deux choses à vous répondre. Je suis d'accord avec votre synthèse, lorsque vous dites que c'est un tout. Le projet de loi C-215 permettra-t-il d'empêcher cette prolifération d'armes à feu? Non. Est-ce la solution ultime? Non.

    Dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies, il a fallu faire beaucoup de choses pour aboutir à un résultat. Mais il y a un élément qui s'est démarqué, et c'est une dissuasion efficace. Et j'espère que le message que j'essaie de vous livrer aujourd'hui est précisément cela, qu'il ne s'agit que d'une des pièces du puzzle. Ce n'est en aucun cas la solution totale au problème, mais c'est assurément une partie intégrante de la solution.

    En ce qui concerne ce qu'a dit M. Daubney, en toute déférence monsieur, vous avez dit que la plupart des délinquants n'avaient aucune idée de ce qu'ils risquaient. C'est précisément cela. Ils ne considèrent même pas une peine comme une punition sérieuse. Mais s'ils savaient qu'ils risquent bien plus qu'une tape sur les doigts, que les conséquences seraient graves, très graves, comme dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies et d'autres cas également, à mon avis, nous parviendrons ainsi à attirer leur attention et l'aspect dissuasif...

+-

    M. Joe Comartin: Mais comment s'y prendre? Parlez-nous un peu de l'aspect vulgarisation.

+-

    M. Daryl Kramp: Non, ce n'est en soi qu'un des éléments. Bien sûr, devrions-nous faire de la publicité? Devrions-nous nous y prendre sous un angle purement promotionnel? Devrait-il s'agir d'une politique de l'État permettant de compléter cela de différente façon? Devrions-nous aller dans les écoles? Devrions-nous aller dans les établissements carcéraux? Devrions-nous y aller tous azimuts? Bien entendu. C'est tout à fait évident.

    Je vous dirais que j'adorerais pouvoir traiter tout cela avec un projet de loi fourre-tout, mais je propose cela en tant que simple député qui propose un des éléments nécessaires, c'est tout ce que j'ai la latitude et la liberté de faire pour pouvoir attaquer une partie du problème. Voilà, mon bon monsieur, quel est mon dessein ici.

  +-(1220)  

+-

    M. Tony Cannavino: Je pense également que vous avez mis dans le mille en donnant l'exemple de la conduite avec facultés affaiblies. La peine obligatoire minimale est un excellent dissuasif, d'autant qu'elle a été accompagnée d'une campagne soutenue.

    Le Canadien sait que s'il se fait arrêter pour conduite avec facultés affaiblies, il risque une peine minimale. S'il récidive, c'est encore plus grave — la peine est beaucoup plus lourde. Voilà le thème qui a été martelé pendant des années par la campagne.

    Par conséquent, le projet de loi C-215 n'est pas la panacée, mais je pense que ce sera un excellent outil. Par ailleurs, le gouvernement et les législateurs vont devoir faire en sorte qu'il y ait une campagne de prévention, une campagne soutenue, afin que tout le monde comprenne bien qu'il n'y a plus de failles, qu'il n'y a plus de plaidoyer de peine possible et qu'il sera désormais impossible de s'en tirer avec quelques mois de prison.

    S'il y a ainsi une peine obligatoire minimale, peu importe que cette peine devienne un maximum. Entendez-moi bien, ce n'est pas ainsi que les choses se passent. Nous allons courir le risque parce qu'en fait, le pourcentage est tellement faible que cela va plus haut que le minimum que préconise le projet de loi, de sorte que pour nous, ce n'est même pas un risque. Nous savons que cela va fonctionner, nous savons que cela va bien fonctionner.

+-

    M. Joe Comartin: Il y a deux choses importantes dont je voudrais parler. Je ne suis pas encore convaincu. Je regarde les chiffres des 20 dernières années, 20 années pendant lesquelles il n'y avait pas vraiment de peine minimale. Ce que je constate, c'est que le nombre de crimes diminue constamment, même les meurtres, les vols à main armée, les crimes perpétrés avec violence. Jusqu'en 2003, la diminution a été constante. Et en fait, ces chiffres ont continué à diminuer en 2004 sauf dans le cas des homicides. Mais même là, le nombre d'homicides commis en 2004 est de loin inférieur à ce qu'il était en 1980. Et c'est toujours le cas, même avec l'augmentation qui est survenue en 2003.

    Mais nous n'avions pas alors de peine minimale, et c'est cela que je veux vous dire à tous. Si nous avons besoin d'une peine minimale alors que quelqu'un me dise pourquoi le nombre de crimes a diminué ainsi.

+-

    M. Daryl Kramp: Je ne suis pas expert en la matière, mais faisons une petite comparaison entre la situation actuelle et ce qui était le cas jadis. La société a évolué, elle a changé. Il y a des années et des années de cela, il n'y avait pas toutes ces armes à feu, il n'y avait pas toutes ces bandes qu'il y a aujourd'hui.

    C'est un élément tout nouveau dans le tableau et si on ne tue pas cela dans l'oeuf, si on n'intervient pas de façon draconienne, c'est quelque chose qui risque de nous échapper très rapidement. Nous avons bien vu ce qui s'est passé au Québec, lorsque le gouvernement provincial a pris les grands moyens contre les bandes de motards. Il a légiféré, il a adopté une politique pour faire appliquer la loi, et il y a eu des résultats.

    C'est donc un autre dilemme, une autre épreuve si vous voulez.

+-

    Le président: Permettez-moi de vous interrompre parce que le temps file.

    Monsieur Comartin, je pense que M. Warr aurait quelque chose à dire mais votre temps d'intervention est terminé.

+-

    M. Joe Comartin: En tout cas, je voudrais lui demander de répondre à la question.

    Monsieur Warr, nous pourrions vous écouter vous. Vous dirigez actuellement un corps policier qui a décidé d'exercer des moyens de pression au travail parce que vous ne parvenez pas à trouver suffisamment d'argent. À Toronto, vous risquez de connaître une réduction considérable de votre budget, et à tout le moins vous n'aurez pas d'augmentation, pour régler tous les problèmes avec lesquels vous devez composer. Et votre province ne s'est pas attaqué aux bandes avec autant de pugnacité que le Québec en raison de l'aspect financier de la chose, à cause des réductions budgétaires qui ont été favorisées par la droite. Mais cela n'est-il pas une meilleure solution que ce que propose le projet de loi?

+-

    Chef-adjoint A. Warr: Pour être plus précis, permettez-moi de vous dire que nous venons tout juste de recevoir du gouvernement provincial l'autorisation, les fonds nécessaires, pour engager jusqu'à 250 policiers supplémentaires, par rapport à notre effectif actuel, afin de pouvoir attaquer ce problème, de sorte qu'à cet égard oui, cela nous aide un peu. Il y a eu des initiatives provinciales pour lutter contre le phénomène des armes à feu et de la violence des bandes, mais le problème est que le système judiciaire n'est pas à la hauteur des résultats que nous avons obtenus par tout notre travail.

    Je voudrais également répondre à la question de M. Marceau concernant les peines. Comme je l'avais dit dans mon exposé, j'ai quelques exemples. Je peux vous en donner un qui est excellent: il s'agit d'un jeune homme de 24 ans qui a été condamné pour vol à main armée. Il a passé 46 jours en détention, en attendant sa condamnation, et c'est à cette peine-là qu'il a été condamné.

    Quelques années plus tard, il a été inculpé pour utilisation d'arme à feu et, cette fois-là, il a été condamné à neuf mois. À deux reprises, il a été blessé par balle, et il a été arrêté deux autres fois, toujours pour utilisation d'une arme à feu, et à chaque fois il a été libéré sous caution, avec pour condition qu'il ne détienne pas d'arme à feu. Manifestement, il n'a rien compris.

    Maintenant, le message est plus fort. Lui aussi est plus fort. Dans la société, on a peur de lui parce qu'on sait qu'il revient toujours. Chaque fois qu'il est arrêté parce qu'il a commis un crime, il revient et peut aller se venger en s'en prenant aux témoins ou à ses ennemis. C'est cela notre problème. Les gens savent que s'ils vont témoigner, quelques mois plus tard le criminel viendra s'en prendre à eux, de sorte qu'ils refusent de témoigner. Ils ont besoin qu'on les protège de cette façon.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Monsieur Cullen, vous avez sept minutes.

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je voudrais remercier tous les témoins et féliciter M. Kramp pour avoir mis cette question sur la table.

    Sur un plan philosophique, je souscris à ce que vous essayez de faire. Mon seul problème serait peut-être qu'à certains égards, cela risque d'aller trop loin. C'est une simple réflexion que je vous soumets. Même si j'ignore sur quoi ils pourraient porter, accepteriez-vous des amendements?

    À Toronto en général et dans ma circonscription en particulier, il y a eu une véritable flambée de violence due aux armes à feu. Tout récemment encore, dans mon comté, il y a eu des fusillades dans des affaires de drogues. Ce que vous nous dites, monsieur Deering, c'est que la drogue et les armes à feu sont indissociables, et je suis donc tout à fait acquis à ce que vous essayez de faire. Mes collègues ont eux aussi exhorter le ministre de la Justice à envisager des peines plus lourdes.

    Même si personnellement, et je suis sûr que cela vaut également pour mes collègues, je suis un ardent défenseur des programmes de prévention pour lutter contre le crime — il y en a beaucoup dans ma circonscription, et dans d'autres aussi, je n'en doute pas — excusez-moi, mais je pense qu'il y aura toujours des gens qui feront la sourde oreille. À mon avis, il doit y avoir des conséquences.

    Mais permettez-moi de revenir à certaines des choses que vous nous avez dites.

    Vous avez dit que notre ministre de la Justice était opposé pour des raisons philosophiques aux peines obligatoires. Pas plus tard qu'hier, il a déclaré à la Chambre que ce n'était pas le cas, mais qu'il n'était pas encore convaincu de l'efficacité de la chose. Je pense que vous avez raison, qu'il n'est pas disposé à avancer dans ce sens.

    En ce qui concerne la détermination des peines, il faudrait des directives. Lorsque je vois les peines qui sont imposées par nos tribunaux, je suis très mal à l'aise. Je ne veux pas critiquer les juges, car je sais que leur travail est très difficile.

    L'autre jour, je lisais quelque chose à propos d'un type qui était sorti d'un bar et qui avait été frappé à la tête au moyen d'un bâton de baseball. L'inculpé avait été condamné pour homicide — pourquoi, je l'ignore, je n'étais pas là, mais peut-être y a-t-il eu une négociation entre le ministère public et la défense — il avait purgé un an et demi. En réalité, comme il avait été en détention pendant une période équivalente, soit un an et demi, il avait été libéré sur-le-champ, à en croire ce reportage. Je trouve cela répugnant. La mère de la victime était tout à fait bouleversée et, je ne vous le cache pas, je ne l'en blâme pas. C'est fort intéressant, car j'ai appris qu'en cas d'homicide perpétré au moyen d'une arme à feu, la peine minimale est de quatre ans, mais qui si l'arme utilisée était un bâton de baseball... Alors je ne sais pas, mais je m'interroge.

    Lorsque nous étions dernièrement à Regina, notre ministre de la Justice est allé sur place et les gens lui ont dit qu'à Regina, on préfère les armes blanches aux armes à feu. Le projet de loi C-215 est axé sur les armes à feu. Très franchement, cela me va, cela me va très bien même, parce qu'à Toronto, il y a énormément d'agressions perpétrées au moyen d'armes à feu.

    Pour revenir à votre projet de loi, je prends l'exemple d'un homicide qui, s'il est commis au moyen d'une arme à feu, est actuellement passible de quatre ans minimum. Avec votre projet de loi, cette peine serait majorée de cinq, dix, voire quinze ans. C'est pas mal fort. À mon avis, il faudrait intervenir auprès des tribunaux pour voir ce qui est conforme à la charte et ce qui ne l'est pas.

    M. Daubney en a dit un mot et, au sujet de votre argument concernant les peines obligatoires minimales, nous avons déjà accepté cette notion et le comité a adopté des mesures en ce sens. Nous avions l'espoir que cela était bien conforme à la constitution et on nous a dit que nous avions d'assez bonnes chances.

    Ce qui me met mal à l'aise, c'est davantage la notion selon laquelle la punition doit être proportionnelle à la gravité du crime. C'est cet élément-là de votre projet de loi qui me tracasse un peu mais je pense que vous êtes sur la bonne voie.

    Je voudrais maintenant revenir aux chiffres. M. Comartin a eu un argument judicieux: si on compare 2003 à 2002, certains de ces chiffres risquent d'induire en erreur si, effectivement, 2002 a été pour un temps l'année pendant laquelle il y a eu le moins de crimes perpétrés avec violence. Je crois comprendre que dans l'ensemble, la tendance était à la baisse. Malgré tout, un meurtre est toujours un meurtre de trop et je pense que nous devons faire quelque chose.

    On se limite ici aux armes à feu et je me demande si vous ne pourriez pas nous dire un mot des meurtres commis au moyen d'une arme blanche ou d'un bâton de baseball. Sinon, nous donnons un peu l'impression qu'il n'y a que les crimes perpétrés au moyen d'une arme à feu.

  +-(1230)  

    En second lieu, monsieur Cannavino peut-être, et vous aussi monsieur Daubney, vous pourriez peut-être développer un peu la notion de châtiment. Cette mesure pourra-t-elle résister à une contestation en vertu de la charte qui ferait valoir que ce genre de châtiment est excessif? Nous admettons — et j'espère que vous l'admettrez aussi — qu'il faut pousser un peu les tribunaux, mais nous devons rester réalistes. Si l'affaire est simplement abandonnée automatiquement, à ce moment-là nous avons un problème.

    Vous pourriez peut-être aborder ces deux questions.

+-

    M. Daryl Kramp: Merci, monsieur Cullen.

    Vous avez posé la question des amendements. Nous avons ici, au Canada, tellement de problèmes, tellement de peines différentes, tellement de sanctions, tellement de crimes. Peu importe qu'il s'agisse d'un couteau, d'une arme à feu ou d'un bâton de baseball, une victime reste une victime, et je l'admets fort bien. Avons-nous donc besoin de lois plus complètes qui nous permettraient de mieux attaquer le problème et de nous donner les résultats que nous recherchons? Certainement.

    Le problème que nous semblons avoir actuellement est de savoir par où commencer. Comment tout faire en même temps? J'adorerais pouvoir le faire, laissez-moi vous le dire. Suis-je donc prêt à accepter des amendements? Bien entendu. M. Warr en a d'ailleurs proposés qui permettraient de faire un lien avec la drogue. Je pense qu'il y a de nombreux amendements qui sont viables et que nous pourrions envisager, que nous envisagerions. Mais je pense également qu'il y a un problème. Nous n'essayons pas de colmater une digue en y enfonçant le doigt. Cette année-ci, la digue s'est rompue. Il n'y a qu'à voir la violence qui règne actuellement dans nos grandes villes. Cette année-ci, les limites ont été dépassées.

    Pour revenir à la question des chiffres, monsieur Comartin, ces chiffres dont j'ai pris connaissance pour une période de vingt à trente ans, il y a des hauts et des bas pendant des cycles d'un, deux ou trois ans, mais dans l'ensemble, pour une période de 20 à 25 ans, il y a eu une augmentation considérable. Peu importe que cette augmentation soit de 2 p. 100, 3 p. 100 ou 4 p. 100 chaque année ou tous les deux ans, multipliez cela par 20 ans et cela vous donne une augmentation de 40 p. 100. Dans l'ensemble, le nombre de crimes perpétrés avec violence au Canada a augmenté radicalement sur le long terme. Les chiffres que j'ai pu voir, et je ne me souviens plus s'il s'agissait de 20 à 40 ans, mais ce sont les chiffres qui m'ont été donnés... et qui concernaient une période relativement longue.

    Y avait-il une autre question?

+-

    L'hon. Roy Cullen: Faudrait-il qu'il y ait une contestation en vertu de la charte pour savoir si la punition est proportionnelle à la gravité du crime?

+-

    M. Daryl Kramp: Pour être franc avec vous, je pense que c'est là la beauté de la chose en ce sens que tout dépend du point de vue sous lequel on se place. Ce que les Canadiens nous disent actuellement, je pense, c'est qu'il faut faire quelque chose. Ce qui existe actuellement ne marche pas, par conséquent la punition n'est pas proportionnelle à la gravité du crime.

    Pour être honnête avec vous, quel est le prix d'une vie? Je pense personnellement qu'une vie vaut beaucoup plus qu'une peine de prison d'un à trois ans lorsque cette vie a été anéantie ou gravement menacée. Pour moi, la punition est proportionnelle à la gravité du crime.

+-

    Le président: M. Breitkreuz est le suivant et nous en sommes maintenant à des interventions de cinq minutes.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais d'abord remercier tous les témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui, et je voudrais aussi féliciter plus particulièrement mon collègue, M. Kramp, qui a proposé ce projet de loi. Si on songe à l'escalade de la violence attribuable aux bandes à Toronto et dans d'autres villes comme nous avons pu le constater cet été, j'estime que cette mesure législative ferait énormément pour dissuader ces criminels d'utiliser des armes à feu. Pour moi, c'est là une évidence: lorsqu'un criminel est en prison, il n'est plus une menace pour la population ou pour les policiers. Pour moi, c'est une évidence. J'aimerais donc vous féliciter, monsieur Kramp, de nous avoir tenus au courant de ces résultats et aussi pour être parvenu à faire comparaître ces témoins aujourd'hui.

    Cela étant, ma question s'inscrit dans le droit fil de ce dont vient de nous parler M. Cullen, et je voudrais donner aux autres témoins la possibilité de dire eux aussi ce qu'ils en pensent. Même si nous sommes en train d'examiner s'il ne faudrait pas imposer des peines obligatoires minimales et des peines consécutives dans le cas de crimes perpétrés avec violence au moyen d'une arme à feu, le Parlement risque d'oublier le fait que, bien plus souvent, d'autres armes sont utilisées pour perpétrer des crimes, et souvent aussi avec pour résultat des blessures plus graves ou toutes aussi mortelles. Le comité sait que je soutiens depuis longtemps que nous devrions investir ce que nous avons dans les services policiers sur le terrain et pour punir les criminels au lieu de créer un registre des armes à feu absolument prohibitif. En 2004, il y a eu 622 meurtres. Il y a deux semaines, Statistique Canada signalait que 27,7 p. 100 de ces meurtres avaient été commis avec une arme à feu, mais aussi que 33 p. 100 des victimes avaient été poignardées.

    L'Association canadienne de la police professionnelle vient de nous signaler que les dispositions du projet de loi C-215 devraient également s'appliquer dans le cas d'autres délits graves perpétrés avec d'autres types d'armes. Je me suis entretenu avec de nombreux policiers qui m'ont dit que l'un des aspects les plus frustrants de leur travail était que les tribunaux ne donnent pas suite au bon travail qu'ils effectuent; il ne faut pas aller très loin pour trouver un policier prêt à vous confier que c'est là sa principale frustration.

    Je tiens à insister sur le fait que je souscris totalement au projet de loi C-215. Il nous faut des outils de dissuasion comme celui-là, et à mon avis ce projet de loi réglerait le problème. Pourriez-vous nous dire s'il faudrait que cette mesure punisse également l'utilisation d'autres types d'armes et pas uniquement d'armes à feu? Je ne voudrais pas retarder l'adoption de ce projet de loi et je ne voudrais pas qu'on se serve de cela comme une excuse pour ne pas y donner suite, mais je vous demande à vous qui n'avez pas encore répondu à la question ce que vous en pensez et je le demande à M. Kramp si le temps le permet.

  +-(1235)  

+-

    M. Daryl Kramp: Bien franchement, à mon avis, il faudrait pouvoir marcher avant de ramper. Est-ce que je préférerais qu'on puisse déjà courir? Certainement. Mais je pense que c'est un premier pas positif.

    En m'évitant toute partisanerie et en étant juste à l'égard de tous, je dois dire que je suis d'accord avec M. Cullen. J'ai vu un net changement dans l'attitude du gouvernement et des députés par rapport à ces quelques mois où nous avions des problèmes. Le gouvernement affirme qu'il déposera des mesures législatives qui traiteront efficacement de certains de ces problèmes. Reste à savoir qui le fera, comment, pourquoi, quand, où, quelles seront ces mesures et quelle en sera la teneur?

    Bien franchement, si cela réglait les problèmes que nous avons actuellement, j'en serais ravi, j'applaudirais et ce serait extraordinaire. Je ne cherche pas à gagner quoi que ce soit personnellement en présentant mon projet de loi. Je ne suis pas convaincu, toutefois, et je n'ai pas vraiment non plus espoir qu'on s'en occupe comme il se doit. J'aimerais donc pouvoir lancer cette initiative qui pourra servir de point de départ. Elle nous servira d'orientation ou de guide et fera pression sur tous les gens du ministère, qui pourront l'examiner et y voir la volonté du Parlement, la volonté du peuple. Espérons qu'on pourra ensuite s'en servir pour faire mieux.

    Merci.

+-

    M. Tony Cannavino: Bien sûr, ce serait facile pour nous s'il y avait un consensus ici au sujet de l'inclusion de toutes les armes. En effet, qu'on soit blessé par une arme à feu ou par un bâton de baseball, c'est le même problème, le même crime. L'Association canadienne de la police professionnelle et ses 54 000 membres policiers sont d'accord avec vous et vous appuie. Il faut les inclure aussi, mais nous voulons nous assurer que ce projet de loi puisse être adopté.

    J'aimerais ajouter une chose. On ne réglera pas le problème en augmentant la peine maximale puisqu'elle n'est déjà pas appliquée. Les juges n'imposent pas la peine maximale. Même s'il s'agissait de deux peines à perpétuité, de 55 ans ou de 150 ans, les juges ne l'appliqueront jamais. Voilà pourquoi, pour nous, ce qui compte, c'est une peine obligatoire minimale.

    Il y a une autre chose au sujet du tableau, si vous permettez. Pensons aux dernières décisions de la Cour suprême. Dans des affaires de conduite avec facultés affaiblies, je pense, la Cour suprême a déclaré qu'il fallait aussi tenir compte de la sécurité des gens. C'est une déclaration de la Cour suprême. Dans ce cas-ci, nous parlons précisément de protection des collectivités, de protection des citoyens canadiens et de protection des policiers sur le terrain qui doivent composer tous les jours avec des criminels violents.

+-

    Le président: Monsieur Deering, avez-vous un commentaire à formuler?

+-

    Chef Rick Deering: Peut-être en réponse à un commentaire formulé par M. Comartin, qui voudrait avoir prise sur ces groupes criminels organisés. Il faut qu'il comprenne bien que ceux qui contrôlent le trafic de stupéfiants au Canada font partie de groupes criminels organisés. Les gangs de rue de Toronto sont des groupes criminels organisés. Les gangs de rue de Vancouver et de Winnipeg aussi. Cette année, je suis le président du comité sur le crime organisé de l'Association canadienne des chefs de police et je peux vous dire que nous avons un grave problème de crime organisé. Chaque jeune personne qui prend une arme à feu pour commettre un vol qualifié pour s'approvisionner en drogue est en fait directement lié au crime organisé. Nous n'avons peut-être pas la même définition de ce qu'est le crime organisé, vous et moi.

    Pour revenir à vos commentaires, monsieur, nous devons traiter avec la lie de la société, mais nous sommes aussi aux premières lignes de la société et nous assistons aux changements sociaux. Je peux vous dire que sur mon territoire, nous saisissons plus d'armes à feu maintenant que jamais auparavant. Je pense que le service de la police de Toronto et celui de Winnipeg constatent la même chose. Quand on parle d'armes blanches et d'armes à feu, c'est vraiment une question d'actualité. C'est l'avenir à nos portes. C'est nous qui le constatons les premiers. Les tribunaux ne s'en rendront peut-être compte que dans cinq, six ou dix ans mais nous, nous le voyons maintenant. Ce que nous disons, c'est qu'il faut réagir avant que nous devenions comme les États-Unis d'Amérique.

  +-(1240)  

+-

    Le président: Merci, chef Deering.

[Français]

    Monsieur Lemay, vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Marc Lemay: Je n'ai que cinq minutes, monsieur le président, pour un débat aussi important? Je vais essayer de m'y tenir.

    Réglons tout de suite une chose. Récemment, la Cour suprême a rendu une décision sur la sécurité du public, lorsqu'elle a eu à interpréter l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés.

    D'ailleurs, monsieur Daubney, j'espère que les notes que vous avez lues seront transmises à notre comité. J'en fais la demande. Les autres membres du comité et moi l'apprécierions. J'aimerais aussi que les notes des autres témoins d'aujourd'hui nous soient transmises, afin de les étudier à fond. J'ai déjà celles de l'Association canadienne de la police professionnelle.

    La Cour suprême a dit que ce qu'il y a de plus important, lorsqu'un juge doit rendre une sentence, c'est qu'il l'individualise. Il doit rendre une sentence en fonction de la personne qui est devant lui.

    M. Cannavino a raison. Au cours des 30 dernières années, j'ai plaidé devant des cours, dont la Cour d'appel, et je me suis rendu une fois en Cour suprême. En droit criminel, il y a toujours la réprobation sociale. N'en déplaise à mes amis du Parti conservateur — à moins qu'on n'amende la Charte canadienne des droits et libertés —, la Cour suprême a dit que la réhabilitation, le retour de l'individu en société, est un point essentiel lorsqu'on impose une sentence. Ma plaidoirie est terminée.

    J'adore ce que j'ai entendu de la part du ministère de la Justice. Qu'est-ce qui a causé la diminution des crimes avec facultés affaiblies? C'est la peur de se faire prendre.

    Au cours de ma carrière, j'ai plaidé plusieurs causes. Toutes les fois, le client disait qu'il ne croyait pas se faire prendre. On laisse toujours une chance. Je n'ai jamais vu de peine d'emprisonnement dans une première sentence pour conduite avec facultés affaiblies, à moins qu'on ne m'annonce ici aujourd'hui qu'il y a eu un amendement au Code criminel au cours des 12 derniers mois. En effet, j'ai plaidé il y a 16 mois. On accorde donc une chance, mais une seule. C'est différent lorsqu'il y a récidive.

    Parlons franchement. J'ai plaidé pour des clients, et si je retourne à la pratique je plaiderai toujours... Il va y avoir de la négociation de peine, surtout si ce projet de loi est adopté. Les premiers éléments que l'on regarde sur un acte d'accusations multiples sont l'accusation et la sentence minimale. Là, attention, il va y avoir tout un débat.

    Oui, vous avez raison: la sentence minimale est devenue la sentence maximale dans beaucoup de dossiers, et ce n'est pas près de changer. Cependant, il faut vous donner les moyens. C'est pour cela que je vous remercie, ainsi que M. Kramp, d'être venu nous parler de ce problème.

    Le problème auquel vous faites face en est un de gangs de rue. En ce qui a trait au crime organisé, le projet de loi C-49 qu'on a adopté hier — ou qu'on va adopter sous peu — et le projet de loi C-53 qui est en vue vont nous permettre d'avancer et de renverser le fardeau de la preuve pour les biens obtenus par la criminalité. Cependant, le phénomène des gangs de rue en est un auquel vous, les chefs de police, vous les représentants, aurez à faire face. Et on commence à y faire face.

    Je racontais à un collègue que les jeunes membres d'un gang de rue décident un matin de tirer sur les gens habillés en rose. Il n'y a aucune planification. Ils se promènent dans la rue et s'ils n'aiment pas quelqu'un, bang! Ça, c'est un phénomène! Et je suis loin, très loin, d'être certain que ce projet de loi va y mettre fin. Si vous me donniez la garantie du contraire...

  +-(1245)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Lemay, votre temps est épuisé. Aviez-vous une question?

[Français]

+-

    M. Marc Lemay: Déjà!

    Alors pouvez-vous me donner une garantie que ce projet de loi va régler le problème du phénomène des gangs de rue?

[Traduction]

+-

    Le président: M. Cannavino.

[Français]

+-

    M. Tony Cannavino: Monsieur le député, il me ferait énormément plaisir de passer plusieurs heures avec vous pour vous l'expliquer encore plus longuement, surtout que vous êtes un criminaliste comptant 30 années de pratique.

    Vous dites que les causes de conduite avec facultés affaiblies ont diminué parce que les gens ont peur de se faire arrêter. Ce n'est pas parce que les policiers ne sont pas polis. Au contraire, ils sont très polis et lorsqu'ils interceptent ces gens, ils font leur travail professionnellement. Cependant, il y a des sentences minimales. Vous dites que la première fois, on leur accorde une chance: leur permis de conduire est suspendu. Je ne pense pas ce soit là une chance.

+-

    M. Marc Lemay: Je suis d'accord.

+-

    M. Tony Cannavino: Un an sans permis de conduire, c'est une sentence assez sévère. On ne parle pas de meurtre, on parle de conduite avec facultés affaiblies qui, dans certains cas, il est vrai, a causé la mort d'individus. Je comprends cela, mais alors on parle d'autres peines; on ne parle plus seulement de suspension du permis de conduire. Cependant, ce n'est pas vrai qu'on donne une chance aux gens. Déjà, on leur impose une peine minimale, soit la suspension de leur permis de conduire. Par la suite, il est question d'emprisonnement.

+-

    M. Marc Lemay: Je parlais des peines d'emprisonnement minimales au départ.

+-

    M. Tony Cannavino: Non. Des sentences minimales sont appliquées, et il n'y a aucune chance pour les personnes coupables de conduite avec facultés affaiblies, d'aucune façon.

    J'aimerais souligner un autre point. Lorsqu'on dit que la sentence minimale est devenue la sentence maximale, permettez-moi de vous dire que je vais répertorier toutes les sentences qui ont été données au Canada et que vous n'arriverez même pas à moins de 5 p. 100 dans ces cas-là, parce que les sentences prévues dans ce projet de loi ne vont pas jusque-là.

    J'ai fait partie d'à peu près toutes les escouades d'élite au Québec, dont Carcajou, à l'époque où on a adopté des lois sur le gangstérisme, des lois qui avaient du mordant. D'ailleurs, il y a une loi concernant le renversement du fardeau de la preuve qui s'en vient. Quand ces lois ont été adoptées, donc quand j'ai participé à l'escouade Carcajou, je peux vous dire que tous les Hell's Angels et tous les autres motards se cachaient. Ce n'était pas grave, car on les a arrêtés et la plupart d'entre eux sont en prison. Ceux qui n'ont pas été en prison se sont dépêchés d'aller en Ontario, au Manitoba, un peu partout, et ils essaient de semer le trouble.

+-

    M. Joe Comartin: Merci beaucoup!

+-

    M. Tony Cannavino: Exactement.

    Quant au phénomène des gangs de rue — et on en a fait la remarque plus tôt —, vous commencez seulement à voir la pointe de l'iceberg. Il y a déjà longtemps que nos policiers l'ont constaté: la criminalité change.

    En terminant, j'aimerais souligner un dernier un point. Quand on interceptait quelqu'un qui faisait de l'importation de drogue et qui avait transité par les États-Unis, on déposait les accusations aux États-Unis. La raison pour laquelle nous faisions cela, c'était parce qu'ici, ils allaient à « l'hôtel » et ils ne restaient pas très longtemps, alors que là-bas, ils en avaient pour 20 ou 25 ans. Je peux vous dire qu'à ce moment-là, ils paniquaient et ils se mettaient à table! Donc, je peux vous parler longuement de ce qui se passe entre les États-Unis et le Canada.

[Traduction]

+-

    Le président: Madame Sgro, vous avez cinq minutes et cela comprend les questions et les réponses.

+-

    L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): J'allais justement soulever cette question. Est-ce cinq minutes à la fois pour la réponse et la question?

+-

    Le président: Oui.

+-

    L'hon. Judy Sgro: Nous n'avons pas toujours bien respecté ces règles. Il ne reste que huit minutes à la séance et quelques-uns d'entre nous, de ce côté-ci, veulent l'occasion de travailler sur un projet de loi que nous sommes nombreux à vouloir appuyer. Il reste qu'il faut reconnaître que les propos de M. Daubney soulèvent des questions...

    Je pourrais être très émotive et partisane. Oui, je pourrais donner mon appui et ajouter encore 100 ans d'incarcération. On peut faire tous les discours politiques qu'on voudra, monsieur Toews. Vous m'avez presque convaincue de ne pas appuyer le projet de loi. Et malgré vous, j'y vois du beau travail et j'y crois suffisamment pour appuyer ce projet de loi.

    Mais sans vouloir être partisane, que pouvons-nous faire pour mieux protéger les Canadiens? Mettons toute partisanerie de côté: nous parlons-là de questions sérieuses. Bien franchement, j'ai eu des discussions avec le ministère de la Justice dans le but de déposer une motion portant interdiction complète des armes de poing dans les centres urbains. C'est irréalisable. Il y a des choses qu'on voudrait faire et qu'on ne peut pas faire parce que quand on est au gouvernement, il faut être encore plus responsable, faire ce qui doit être fait et de manière constitutionnelle, pour tout ce que nous faisons.

    Je pense que pour nous, il faudrait travailler davantage à ceci, afin de trouver moyen de le rendre acceptable, puisqu'il s'agit surtout d'un message. Parce que ce n'est pas constitutionnel, je ne peux pas faire interdire les armes de poing dans les grands centres urbains, mais c'est la même chose pour toutes ces questions connexes. Ce qu'on veut, c'est transmettre un message. Nous ne pouvons pas le faire comme ça, et j'ai bien sûr des collègues qui ne voudraient même pas parler de l'élimination des armes à feu d'où que ce soit, je présume.

    Là où je veux en venir, c'est que ce qui compte, c'est le message. Il faut faire comprendre aux tribunaux qu'ils doivent appliquer les lois que nous avons déjà, et qui ne sont pas appliquées. Il est frustrant de présenter d'autres mesures législatives si on ne peut même pas obtenir des juges canadiens qu'ils se servent des lois actuelles. On me dit qu'ils ont les outils nécessaires. C'est ce que nous dit le chef. Les tribunaux ont les outils, mais ne s'en servent pas. Il faut attirer l'attention sur le message: nous, législateurs et Canadiens, demandons que les lois soient appliquées, que les peines minimales soient imposées, puis qu'on augmente ces dernières de manière à donner une leçon à ces individus.

    C'est une question de message. Je sais qu'une conférence fédérale-provinciale est imminente. Je sais que le ministre est très préoccupé par ce qui se passe, ne pensez pas le contraire. Il vit au Canada. Il a une famille, comme nous tous. Il faut se demander comment on fera passer le message? Comment le renforcer? Nous étudions actuellement un moyen de le faire.

    Louise Russo est dans ma circonscription. J'ai cet enfant de quatre ans dans ma circonscription. Croyez-moi, ces voyous qui agissent ainsi se moquent bien de vous, de moi et de tout le monde. Ils ne prennent pas le temps de réfléchir, ils tirent. Ils n'ont aucun respect pour votre vie ni pour la vie de quelque victime que ce soit. C'est tout simple.

    Nous avons besoin d'outils pour nous concentrer sur l'éducation, les emplois et tout ce que nous savons devoir faire, mais il faut aussi faire comprendre aux procureurs et aux juges ce qui doit être pris en compte au moment de la négociation d'un plaidoyer. Il ne devrait pas y avoir de négociation de plaidoyer pour quiconque s'est servi d'une arme à feu. Cela ne devrait tout simplement pas être permis. Il ne devrait pas y avoir d'exception et on ne devrait jamais minimiser ces questions. Comment y arriver? Comment améliorer ce projet de loi? Comment en faire une mesure qui recueillera l'appui de tous les législateurs?

    Je parle, je parle, au lieu de poser des questions, contrairement à ce que je fais d'habitude mais de toute façon, je n'avais que deux minutes.

    Reste-t-il du temps? Je ne veux pas dépasser les cinq minutes qu'on m'a accordées.

    En une minute et demie, pouvez-vous me dire ce que nous pouvons faire dans le cadre de ce projet de loi pour qu'il soit plus susceptible d'être adopté et appliqué? Je pense que ma question s'adresse à M. Daubney.

  +-(1250)  

+-

    M. David Daubney: Si vous voulez que je sois le premier à répondre, je dois dire qu'il sera difficile de rendre cette mesure moins susceptible d'être contestée en vertu de la charte, sans changer de beaucoup la portée du projet de loi; les chiffres devront être réduits substantiellement. C'est possible. Pensons aux dispositions abrogées par la Cour suprême; le minimum de sept ans pour trafic et de stupéfiants, dans l'affaire Smith, il y a quelques années. Dans l'affaire Morrisey et quelques autres, on a maintenu les quatre années pour ce genre d'infraction. On a donc une bonne idée de votre marge de manoeuvre. Il n'y a qu'une seule autre infraction dans le Code criminel, outre le meurtre, bien sûr, dont la peine est supérieure à quatre ans: c'est une infraction qui n'a jamais été invoquée, je crois: vivre des fruits de la prostitution d'une personne âgée de moins de 18 ans. La peine minimale est de cinq ans.

    Qu'est-ce qui serait maintenu? Nous avons une étroite marge de manoeuvre. Dans le cas d'une personne qui fait déjà l'objet d'une peine de trois ans, pour une autre condamnation, en vertu de l'article 85, ce qui est maintenant possible, on ajouterait cinq années et on dépasserait ainsi ce qui sera probablement perçu comme le seuil de la constitutionnalité. C'est le mieux qu'on puisse envisager, pour l'instant. Il n'y a pas une grande marge de manoeuvre. Je pense donc vraiment que les suppléments de 10 ans et 15 ans dépassent les bornes, bien franchement, et qu'il ne vaut pas la peine que le Parlement les propose, puisque ce sera certainement rejeté par les tribunaux.

  +-(1255)  

+-

    Le président: Merci, madame Sgro.

    Monsieur Thompson, vous avez cinq minutes pour les questions et les réponses.

+-

    M. Myron Thompson: Merci.

    Merci, monsieur Kramp, pour cet excellent projet de loi. Je remercie aussi tous les témoins dont j'apprécie particulièrement les commentaires. Je tiens aussi vraiment à remercier mon collègue, M. Toews. Je trouve son discours excellent et nous devrions en entendre davantage de semblables.

    Je vois dans vos documents une référence à l'article 745 ainsi qu'aux prisons et aux gangs qui s'y organisent.

    Je voudrais aussi rappeler ce qui s'est passé en 1993-1994, quand un collègue et moi-même sommes allés à Cornwall. Certains d'entre vous se souviennent qu'on a tiré sur la maison du maire et sur l'hôtel de ville lorsque la contrebande d'armes à feu était à un sommet. On tirait aussi sur les hélicoptères de police. Comment se compare la contrebande d'armes à feu d'aujourd'hui à celle de 1994? Est-ce mieux ou pire? Est-ce que plus d'armes à feu entrent au Canada? Est-ce que la situation s'améliore? Je ne vois pas comment ce serait possible, notamment parce que je sais qu'on a réduit de beaucoup les effectifs policiers. On ne peut pas offrir de meilleurs services policiers avec moins d'agents. Certains gouvernements semblent le croire, mais il en va bien autrement.

    D'après tous mes entretiens avec des gardiens de prison et certains des directeurs, il faut croire que dans les pénitenciers il se fait de la formation au gangstérisme. Cela se passe à notre nez et à notre barbe dans les pénitenciers, quand des prisonniers préparent leur sortie de prison, leur entrée dans un gang, apprennent où se trouver une arme, etc.

    Je suis un peu préoccupé d'entendre M. Deering affirmer que nous ne voulons pas devenir comme les États-Unis. D'après les statistiques que j'ai sous les yeux, il semble qu'il y ait une amélioration, en fait, une réduction de la criminalité là-bas, ce qui est nettement mieux que ce que nous constatons ici. Je remets donc en question ses propos.

    Je crois que la charte avait pour but de protéger nos libertés, de protéger nos biens, de protéger nos citoyens. Pourtant, l'on me dit constamment que telles ou telles mesures ne résistera pas à la charte. Est-ce que la charte nous empêche d'avoir un bon système judiciaire, alors qu'elle était censée améliorer la justice?

    L'un ou l'autre des témoins peut répondre à ce que j'ai dit.

    Bonne journée.

+-

    Le président: Vous avez pris deux minutes et demie et il vous en reste donc deux et demie.

+-

    M. Daryl Kramp: Mon seul souci, bien sûr, c'est que... On a posé la question: qui est responsable? M. Daubney a dit que les tribunaux allaient décider de ce que nous ferions. Je suis un nouveau député mais j'ai toujours cru, ou pensé, ou senti que le Parlement dictait les règles, décidait des lois au Canada qui encadrent le fonctionnement du pays. J'ai souvent pensé que parce que j'étais parlementaire, ma principale responsabilité, qui passe avant toute chose, c'est la santé, la sécurité et la protection des citoyens. Tout le reste est secondaire.

    Ce projet de loi nous fait progresser et j'exhorte mes collègues à l'étudier très sérieusement. Je reconnais que ce n'est pas une panacée, on l'a dit, que cela ne réglera pas le problème, mais je pense que c'est une solution raisonnable. C'est une solution réfléchie.

    Dans toute cette initiative, le plus important, pour moi, c'est son efficacité comme moyen de dissuasion. On dira ainsi clairement que nous en sommes à un point tournant dans notre société et que nous n'accepterons plus cette escalade de la violence. Nous ne parlons pas de la violence de tous les jours. Je l'ai déjà dit, c'est une chose que d'avoir une arme, mais quand on a une arme à feu, on ne va pas s'en servir seulement pour se quereller avec son voisin. C'est une arme fatale. Si vous avez cette arme à la main pendant la perpétration d'une infraction, vous savez exactement ce que vous faites. Ça n'est pas un accident, on ne peut pas dire: « J'étais, je pense, à la chasse, le coup est parti tout seul et j'ai peut-être blessé quelqu'un. » Il s'agit d'un acte délibéré qui doit être assorti de conséquences.

    Si nous ne bougeons pas avec ce projet de loi et cette initiative, si on quitte la séance d'aujourd'hui sans rien faire, c'est comme si on disait que cela ne nous intéresse pas tellement, qu'on pourra y revenir, encore et encore. Je vous garantis que les criminels... Vous pensez qu'ils se moquent bien de ce que fait ce comité actuellement? Oh que non, ils nous regardent. Ils savent ce qui se passe. Beaucoup de gens disent que les criminels ne sont pas vraiment au courant. Or ils en savent beaucoup plus que bien des citoyens qui se disent intéressés, et ils suivront de près ce que nous faisons. S'ils pensent pouvoir agir impunément, que la loi n'est plus appliquée ou qu'il n'y aura pas de peine conséquente, alors c'est que nous vivons dans une société où tout est permis.

    Nous avons une responsabilité. Il faut prendre position et le faire maintenant.

·  +-(1300)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Kramp.

+-

    M. Tony Cannavino: Monsieur le président, est-ce que je pourrais...?

+-

    Le président: Vous avez tendance à être plutôt long, monsieur Cannavino, et notre temps...

+-

    M. Tony Cannavino: Je vais prendre 15 secondes.

    Une chose dont on n'a pas parlé c'est le temps passé en prison avant la détermination de la peine qui est doublé ou triplé. Voilà un autre aspect qui devrait peut-être être supprimé. Je tenais tout simplement à ajouter cela.

+-

    Le président: Il y a deux autres personnes qui aimeraient pouvoir poser des questions. On pourrait prolonger la réunion de 10 ou 15 minutes, jusqu'à 13 h 15 maximum. M. Comartin veut faire une brève intervention.

    Que voulez-vous faire?

+-

    L'hon. Roy Cullen: D'accord, mais il faut que ça soit bref.

+-

    Le président: Il y a consensus pour prolonger la réunion de 15 minutes maximum.

+-

    M. Myron Thompson: J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'avais demandé aux témoins si oui ou non ils savaient que les gangs sont formés dans les prisons. Est-ce que les témoins pourraient nous dire rapidement s'ils sont au courant de cela?

+-

    M. Tony Cannavino: Dans certaines parties de certaines prisons on voit l'emblème des Hells Angels. Dans d'autres endroits c'est l'emblème des Bandidos. Les nouveaux détenus sont formés là.

+-

    M. Myron Thompson: Je l'ai vu moi-même. Je sais ce dont vous parlez.

+-

    M. Tony Cannavino: Vous avez tout à fait raison. Les gardiens de prison ne contrôlent pas les prisons.

+-

    M. Myron Thompson: Non, en effet.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Wrzesnewskyj, vous avez cinq minutes pour la question et la réponse, s'il vous plaît.

+-

    M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je suis ravi d'être le plus récent membre du comité, et je suis doublement ravi car quand ce projet de loi a été présenté en Chambre, je l'ai appuyé pour m'assurer qu'il pourrait être étudié en comité et adopté.

    Même si je suis ravi d'être ici — et je répète que je suis doublement ravi que ce projet de loi nous a été renvoyé en premier — j'ai été très déçu d'entendre M. Toews dire que le projet de loi sera adopté seulement si le gouvernement est défait. Il ne sert à rien de jouer des jeux partisans dans le cas d'un projet de loi si important. Cela va à l'encontre de ce qu'on cherche à faire ici.

    Je passe maintenant à certains des commentaires faits par M. Daubney. Il a fait allusion à un sondage Environics du mois de mars selon lequel la majorité des Canadiens veulent que les juges soient indulgents dans la détermination des peines. Nous sommes des politiciens, nous avons de l'expérience avec les sondages — ils montent et ils baissent, non seulement selon l'humeur des gens mais également selon la façon dont la question leur est posée.

    Donc je me pose vraiment des questions parce que vous utilisez ce sondage pour étayer votre point de vue. Vous avez également dit que ce projet de loi va à l'encontre du respect de la personne humaine et est tout à fait exagéré par rapport aux crimes commis. Je peux vous dire, sans faire de sondage, qu'il y a un sentiment d'intense indignation dans les collectivités touchées par la criminalité impliquant les armes à feu. Les gens sont très déçus parce qu'ils trouvent que la peine n'est pas du tout proportionnelle aux crimes.

    Vous avez également dit que beaucoup de criminels n'ont pas la moindre idée des peines qui les attendent, donc le projet de loi n'aura aucune incidence sur la criminalité. C'est ce que vous avez dit. Les criminels ne s'y connaissent pas parfaitement en droit pénal, mais je peux vous assurer qu'ils savent que les peines ne vont pas les dissuader vraiment. Il existe des preuves empiriques — et les témoins en ont parlé — qui démontrent que les peines ne constituent pas un moyen de dissuasion. Ceux qui commettent ces crimes ne savent peut-être pas si la peine sera de 47 jours ou de six mois, mais ils savent que c'est quelque chose sans grande importance.

    Comme j'ai dit au départ, je suis heureux d'avoir l'occasion d'étudier ce projet de loi en premier. J'espère vivement que le projet de loi sera adopté. Je suis d'accord pour dire que certains amendements sont nécessaires. Les représentants de la police de Toronto nous ont dit cela. Il y aurait peut-être même des amendements à faire concernant tout le concept des peines consécutives. Est-ce qu'une personne accusée de deux crimes où une arme à feu n'a pas été utilisée risquerait de faire l'objet de ces dispositions également?

    Il y aurait peut-être un amendement qui vous conviendrait, monsieur Kramp, pour vous assurer que le projet de loi atteindra votre objectif. Notre comité, qui fonctionne de façon non partisane, pourrait peut-être peaufiner votre projet de loi un peu pour aider à le faire adopter.

    Voulez-vous répondre à cette dernière observation, s'il vous plaît, monsieur Kramp?

·  +-(1305)  

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    M. Daryl Kramp: Comme j'ai dit auparavant, est-ce la solution parfaite? Je ne le crois pas. Mais est-ce que cela nous a montré la bonne voie et nous a amenés à faire des progrès? Je crois que oui.

    Si vraiment le comité a la volonté d'essayer de faire adopter ce projet de loi et si nous pouvons faire preuve d'un certain progrès qui pourrait convaincre tous les partis à la Chambre que nous aurons les résultats escomptés, je serai heureux de travailler de concert avec le comité.

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    Le président: Merci.

    Monsieur Warawa, vous êtes le dernier à poser des questions ce matin.

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    M. Mark Warawa (Langley, PCC): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais commencer en faisant quelques commentaires sur l'intervention de M. Toews. Personnellement, je suis plutôt frustré par la position du gouvernement et la présentation de M. Daubney.

    J'ai noté plusieurs des commentaires de M. Daubney, dont le fait que ce qu'on propose ici est « nettement démesuré ». Je ne suis pas d'accord. Il a dit que la détermination de la peine doit être proportionnelle à l'infraction, et je suis d'accord. Je pense qu'en général les Canadiens croient que les peines qu'on voit prononcer ne sont pas proportionnelles à l'infraction, et donc nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-215.

    Il a aussi dit que les peines plus longues créent un taux de récidive élevé. À ce moment-là, nous avons peut-être des problèmes dans la façon dont les services correctionnels du Canada gèrent nos prisons, et c'est quelque chose qu'il faudra étudier sérieusement. Si nous avons des organisations criminelles qui font marcher les prisons et si les gens en sortent encore plus dangereux que quand ils entrent, il s'agit d'un message sérieux qu'il faudra examiner.

    Monsieur Warr, dans un instant je vais vous demander un autre de vos exemples.

    Je fréquente souvent les stands de tir pour pratiquer avec une arme de poing ou une carabine. J'ai quatre garçons, donc c'est amusant, et j'ai aussi quelques amis qui sont des policiers. Dès l'enfance, on apprend à ne jamais jamais pointer une arme à feu vers quelqu'un, et c'est très sérieux: si jamais vous le faites, vous allez être dans le pétrin. Vous serez châtié si jamais on vous prend en train de braquer une arme à feu contre quelqu'un, même si vous n'avez pas fait par exprès. Vous ne le faites jamais, mais jamais.

    Si un policier sort son revolver, ce sera documenté. C'est une grosse affaire de pointer une arme à feu contre quelqu'un. Qu'on soit un agent de la police ou un civil, jamais on ne braque un revolver sur quelqu'un.

    Nous discutons aujourd'hui en examinant le projet de loi C-215 de personnes qui prennent sciemment une arme meurtrière et la braque sur quelqu'un afin de pouvoir prendre le contrôle de cette personne pour l'intimider, et dans certains cas, elles utilisent une force létale. Faut-il vraiment qu'on ait un message disant que ce ne sera plus toléré au Canada? Selon moi, un tel message n'existe pas en ce moment, d'après les exemples que M. Warr nous a donnés. Il n'y a pas de conséquence grave, et l'objectif de M. Kramp, c'est d'avoir des conséquences, d'avoir un message qui fassent partie du processus éducatif.

    Je salue donc vos efforts ici. Je vous appuie. Je suis déçu et je crois que la plupart des Canadiennes et des Canadiens sont déçus de l'orientation du ministre de la Justice et de son ministère quand ils disent que c'est « nettement démesuré ». Je ne suis pas d'accord. Je pense qu'il faut s'engager dans cette voie.

    En conclusion, monsieur Warr, pouvez-vous nous donner quelques exemples? Et ensuite les autres députés.

    Merci.

·  -(1310)  

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    Chef-adjoint A. Warr: Merci beaucoup, monsieur.

    En voici un exemple. Il s'agit d'un homme âgé de 25 ans qui a été condamné pour port d'arme en 1997: il a écopé de 18 mois sous probation et de 58 jours d'emprisonnement avant la tenue de son procès, ainsi que l'interdiction d'être en possession d'armes à feu pendant cinq ans. L'année suivante, il a été trouvé coupable de vol qualifié et de porter une arme dissimulée: on lui a imposé un mois de garde en milieu ouvert. Deux années plus tard, il a été trouvé coupable de voies de fait, d'enlèvement, de séquestration et de consommation de drogue. Il a reçu une condamnation avec sursis.

    Une voix: Est-ce surprenant?

    Chef-adjoint A. Warr: Deux années plus tard, il a été trouvé coupable de possession d'arme à feu et de munitions, de possession d'une arme prohibée, ainsi que plusieurs autres condamnations: il a écopé de 90 jours et 10 mois d'emprisonnement avant la tenue de son procès, et une période sous probation. Un an plus tard, on l'a trouvé en possession d'une arme prohibée ou à autorisation restreinte, avec munitions: on lui a imposé huit mois et trois années sous probation. L'accusation la plus récente dont il a fait l'objet est pour meurtre au second degré, car il aurait tué quelqu'un avec une arme à feu.

    Voilà donc une personne qui a tiré des leçons de ses punitions.

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    M. Marc Lemay: Il avait un bon avocat.

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    M. Mark Warawa: On nous avait demandé de communiquer ces renseignements. Si vous pouviez remettre ces exemples au comité, je l'apprécierais.

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    Chef-adjoint A. Warr: Oui, je vais rendre le dossier complet.

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    M. Mark Warawa: Merci.

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    Le président: J'aimerais remercier nos témoins pour avoir participé à cet échange assez animé de questions et réponses.

    M. Comartin a posé une brève question. Il a demandé à ce qu'on change la date des audiences sur le projet de loi C-53 afin d'accommoder les témoins, soit le Barreau canadien, le Canadian Council of Criminal Defense Lawyers et, peut-être, le Barreau du Québec. Les audiences se tiendraient donc le 1er novembre, au lieu du 27 octobre. Y a-t-il des réserves ou des objections?

    Des voix: Non.

    Le président: Puisqu'il n'y en a pas, c'est réglé.

    Merci.

    La séance est levée.