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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 8 mai 2002




¹ 1535
V         Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.))
V         M. Lawrence McBrearty (directeur national, Métallurgistes unis d'Amérique)

¹ 1540

¹ 1545
V         Le président
V         M. Lawrence McBrearty

¹ 1550
V         Le président
V         M. Toews
V         M. Lawrence McBrearty

¹ 1555
V         M. Vic Toews
V         M. Lawrence McBrearty
V         M. Vic Toews
V         M. Lawrence McBrearty
V         M. Vic Toews
V         M. Andrew King (chef de service, Santé, sécurité et environnement, Métallurgistes unis d'Amérique)

º 1600
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)
V         M. Lawrence McBrearty

º 1605
V         Le président
V         M. Andrew King

º 1610
V         Le président
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)

º 1615
V         M. Andrew King

º 1620
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)
V         M. Lawrence McBrearty

º 1625

º 1630
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. Lawrence McBrearty
V         Le président
V         M. Vic Toews

º 1635
V         M. Andrew King
V         M. Vic Toews
V         M. Andrew King
V         M. Vic Toews
V         M. Andrew King
V         M. Vic Toews
V         M. Andrew King

º 1640
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.)
V         Le président
V         M. Lawrence McBrearty

º 1645
V         M. Ivan Grose
V         M. Lawrence McBrearty
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Andrew King

º 1650
V         Le président
V         Le président
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)

» 1700
V         Le président
V         M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)
V         M. Kevin Sorenson

» 1705
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt

» 1710
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. John Maloney
V         Le président
V         M. Ivan Grose
V         Le président

» 1715
V         M. Cadman
V         Le président
V         M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.)
V         Le président
V         M. Chuck Cadman
V         Le président
V         M. McKay
V         Le président

» 1720
V         M. John McKay
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         M. Chuck Cadman
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Vic Toews

» 1725
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. John McKay
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 086 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 8 mai 2002

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte cette 86e séance du Comité permanent sur la justice et les droits de la personne. Aujourd'hui, conformément à l'ordre de renvoi du 19 février 2002, nous discutons du projet loi C-284, loi modifiant le Code criminel (infractions commises par des personnes morales, administrateurs et dirigeants).

    Nos témoins, aujourd'hui, sont Lawrence McBrearty, directeur national des Métallurgistes unis d'Amérique, et Andrew King, chef du département de la santé, de la sécurité et de l'environnement. Je vous remercie tous les deux. Je sais que vous êtes déjà venus ici auparavant. Généralement nous prévoyons 10 minutes pour la présentation, mais dans les circonstances, je soupçonne que nous aurons une certaine latitude. Vous avez la parole.

+-

    M. Lawrence McBrearty (directeur national, Métallurgistes unis d'Amérique): Comme l'a dit le président, je m'appelle Lawrence McBrearty. Je suis directeur national des Métallurgistes unis au Canada, et nous représentons environ 180 000 métallos de tout le pays, dans quasiment tous les secteurs de l'économie. Notre syndicat a 60 ans cette année et il a toujours été actif dans le domaine de la santé et de la sécurité, pour protéger les vies de nos membres.

    Ceci est ma deuxième comparution devant le comité permanent sur le sujet de la responsabilité criminelle des entreprises. Nous avons préparé un mémoire exhaustif où nous expliquons nos préoccupations et les orientations que nous voudrions voir adopter à la loi. Notre département juridique a déjà présenté un document de discussion sur l'aspect juridique. Je traiterai ici des faits saillants de notre mémoire. Je suis accompagné, comme l'a dit le président, d'Andy King, de notre département national de la santé et de la sécurité et de l'environnement, qui a contribué à la préparation de notre mémoire. Andy a passé huit ans à pratiquer le droit criminel avant de se joindre à l'équipe des Métallurgistes unis d'Amérique, en 1989.

    J'ai été le directeur de district du Syndicat chargé de l'organisation de la mine de charbon de Westray. Le syndicat avait entrepris une campagne de recrutement à la demande des mineurs de l'endroit. Il ne fait aucun doute que la sécurité était un grand sujet de préoccupation. Le jour où la mine a explosé, notre syndicat a immédiatement cessé la campagne de recrutement et s'est lancé au secours des travailleurs, de leurs familles et de la communauté. Nous avons envoyé des représentants supplémentaires pour aider les travailleurs d'autres régions du Canada et d'ailleurs. Nous avons immédiatement exigé une enquête publique sur les circonstances de la tragédie. À la demande des mineurs survivants, nous avons été certifiés comme la section locale 9332, même si nous n'avions pas de membres et même si nous savions qu'il n'y aurait jamais de convention collective à négocier. Nous avons participé à l'enquête publique pour le compte de la section locale, et aux délibérations devant la Cour suprême, pour permettre la poursuite de l'enquête. Notre syndicat a aussi aidé les anciens employés à régler les questions d'indemnité de cessation d'emploi, de rémunération et d'impôt.

    J'ai moi-même vécu personnellement l'expérience, en tant que président d'une section locale où est survenu un décès tragique dans le milieu de travail, en 1971, celui d'un garçon de 17 ans. Il avait été écrasé par le broyeur à barre d'une mine. Les circonstances de sa mort ont entraîné une enquête du coroner—c'était au Québec—qui a fini par recommander qu'il y ait des accusations au criminel, mais cela ne s'est jamais réalisé.

    De 1992 jusqu'à maintenant, 133 métallos membres de notre syndicat, au Canada, sont morts au travail. Nous savons que ce chiffre n'englobe pas les maladies professionnelles, comme le cancer.

    Je suis aussi accompagné, aujourd'hui—certains ne pouvaient pas venir, parce qu'ils devaient rencontrer d'autres députés ailleurs sur la Colline—nos métallos activistes, qui ont pris de leur temps pour être ici aujourd'hui et rencontrer des députés au sujet de la modification du Code criminel. Nous avons aussi, cette semaine, et particulièrement aujourd'hui, deux femmes dont les maris ont été tués au travail, à OC Transpo, Mme Davidson et Mme Lemay, qui je crois doivent faire une présentation demain.

    Notre mémoire traite de plusieurs sujets. Nous insistons beaucoup sur les cinq principes de base qui, selon nous, peuvent et doivent être intégrés dans la loi par ces amendements. Tout d'abord, je dois dire que le Syndicat des métallos appuie la motion et le projet de loi d'initiative parlementaire qu'ont déjà soutenu ce comité et la Chambre des communes. Nous respectons et soutenons l'approche non partisane qui a été adoptée et l'appui que tous les partis ont apporté au contenu et aux objectifs de la recommandation 73 qui a été formulée à la suite de l'enquête sur la mine Westray.

    Le Syndicat des métallurgistes d'Amérique ne demande pas qu'on emploie un libellé particulier dans les modifications. Il y a cependant cinq principes de base que les modifications au Code criminel adoptées par la Chambre doivent inclure pour être fidèles à la recommandation 73 et à la mémoire des 26 hommes qui ont trouvé la mort au travail il y a 10 ans. N'oublions pas que 15 corps ne seront jamais retrouvés. Les cinq principes de base sont les suivants.

¹  +-(1540)  

    Premièrement, les dirigeants et les administrateurs ont le devoir de protéger la vie de leurs employés au travail. Ce devoir doit être consacré dans le Code criminel du Canada.

    Deuxièmement, les dirigeants et administrateurs peuvent être passibles de poursuite au criminel, notamment pour les actes accomplis ou les omissions commises parce qu'ils ont choisi de les ignorer ou du fait de leur négligence criminelle, si des travailleurs trouvent la mort ou subissent des blessures graves ou souffrent de maladies professionnelles parce qu'ils n'ont pas rempli leurs obligations.

    Troisièmement, les entreprises peuvent être tenues responsables au criminel lorsque la conduite de leurs dirigeants revient à ignorer ou à choisir de ne pas voir les problèmes de santé et de sécurité au travail, et qu'elle entraîne la mort de leurs employés ou leur cause des blessures graves ou des maladies professionnelles.

    Quatrièmement, les dirigeants et administrateurs et l'entreprise peuvent être poursuivis et condamnés à des infractions distinctes bien que les circonstances soient les mêmes.

    Enfin, les principes un à quatre peuvent être réalisés sans enfreindre le principe de la Charte canadienne des droits et libertés, la répartition constitutionnelle des pouvoirs, ni le Code criminel. Avec ce dernier principe, nous avons poussé les choses un peu plus loin et, dans le cadre du mémoire, nous avons préparé une version révisée avec l'aide du conseiller juridique principal. Vous pourrez en parler plus tard, ainsi que des preuves que nous avons trouvées qui appuient notre thèse que les amendements au Code criminel favoriseront la prévention.

    Pour résumer, les dirigeants et administrateurs et les entreprises doivent être passibles de poursuites, selon leur responsabilité. De ce côté-là, nous ne demandons rien de plus que de faire assumer leur responsabilité aux sociétés et à leurs administrateurs et dirigeants, comme toute autre personne au Canada assume les siennes. J'ai entendu quelqu'un dire que si nous rendons les administrateurs et dirigeants passibles de poursuite, nous ne pourrons pas convaincre des gens compétents de siéger aux conseils d'administration d'entreprises du Canada. Pour dire ça, il faut vraiment ne pas penser avoir cette responsabilité actuellement, et c'est un sujet de très grande préoccupation pour nous. Ce genre de responsabilité existe déjà dans d'autres pays, et nous n'avons jamais entendu dire qu'il serait bizarre qu'un Canadien refuse de siéger à un conseil d'administration américain ou européen parce qu'il ne veut pas assumer de ces responsabilités.

    Ceux qui disent ce genre de choses n'expriment manifestement pas l'opinion de la majorité des dirigeants, des administrateurs ou même des actionnaires du Canada. Un sondage mené récemment par la Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises, dont nous parlons dans notre mémoire, démontre que 74 p. 100 des actionnaires sondés sont d'accord pour dire que les sociétés devraient assumer une plus grande responsabilité sociale.

    L'autre question était pourquoi avons-nous besoin de modifier les lois criminelles maintenant? Les entreprises se comporte-t-elle tellement plus mal qu'auparavant? Nous sommes d'accord avec le juge Richard, le problème n'est pas seulement le comportement des entreprises. La plupart des gouvernements provinciaux—d'après nous, ceci s'applique à tous les gouvernements provinciaux, et non pas seulement à celui de la Nouvelle-Écosse—ont adhéré à un programme de déréglementation de la santé et de la sécurité. Les dirigeants des entreprise décident de s'y conformer à leur convenance et les mesures d'application sont faibles. Les employeurs apprennent rapidement, dans un contexte concurrentiel, où ils peuvent rogner sur les coûts à court terme. Les employés sont souvent gardés dans l'ignorance, ou entraînés dans le courant des directives qu'ils reçoivent.

¹  +-(1545)  

    Les changements au Code criminel sont nécessaires pour nous offrir à tous une protection de base, où que nous vivions et quel que soit le contexte économique qui nous entoure, afin que les vies des femmes et des hommes qui travaillent ne soient pas volontairement ou témérairement mises en péril.

    J'aimerais aussi vous donner les résultats du sondage que nous avons effectué. C'était au sujet du dixième anniversaire de la tragédie de Westray, et avant nos activités sur la Colline parlementaire, cette semaine. Nous n'en avons d'ailleurs reçu les résultats qu'hier. Nous savons déjà que 75 p. 100 des répondants inciteraient leurs députés à appuyer les amendements au Code criminel en vue d'accroître la responsabilité sociale des entreprises et 73 p. 100 ont dit que ce devrait être une priorité de ce gouvernement. C'est, en gros, le résultat obtenu. Nous savons où est le problème et les diverses façons dont le Code criminel pourrait les régler. Une loi semblable existe ou existera bientôt dans la plupart des pays développés. Nous savons que la plupart des habitants du Canada appuient les amendements et voudraient que le gouvernement en fasse une priorité. Même les administrateurs, les dirigeants et les actionnaires sont d'avis que les entreprises doivent assumer une plus grande responsabilité sociale.

    Notre premier ministre dit qu'il nous faut avoir la population active la plus compétente du monde, et nous sommes d'accord. Comment l'encourager si nous ne pouvons garantir à tous les travailleurs la protection absolument fondamentale de notre loi criminelle? Mon objectif, cependant, n'est pas d'envoyer beaucoup plus de gens en prison. Je veux plutôt avoir l'assurance que la santé, la sécurité et l'environnement figurent à l'ordre du jour de chaque réunion de cadres supérieurs d'entreprise et que tous les participants à la réunion ont ces sujets à coeur. Nous devons veiller à ce qu'il n'y ait plus jamais de tragédie comme celle de Westray.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je laisse la parole à M. Toews, pour sept minutes.

+-

    M. Lawrence McBrearty: J'aimerais seulement ajouter que nous avons annexé au mémoire que nous avons présenté plusieurs documents pour informer les membres du comité que notre syndicat tient chaque année ce que nous appelons une campagne de sensibilisation des jeunes travailleurs. Nous allons dans les écoles de tout le pays pour informer et éduquer les jeunes travailleurs et les enfants de la façon dont ils devraient aborder et traiter les questions de santé et de sécurité, ce qu'ils devraient faire lorsqu'ils deviennent travailleurs, et comment ils peuvent protéger leur vie, leur santé et leur sécurité. Nous faisons cela déjà depuis plusieurs années, et nous voulions annexer ces documents au mémoire pour vous faire comprendre que nos activités ne sont pas axées strictement sur le Code criminel mais que c'est beaucoup plus vaste, avec les programmes que nous avons dans tout le pays.

¹  +-(1550)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Toews, vous avez sept minutes.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je tiens à féliciter les témoins pour leur présentation et pour leurs efforts d'éducation au sujet de la santé et de la sécurité au travail. Ces activités s'intègrent certainement au mandat de la Loi sur la santé et la sécurité, notamment au travail, dans tout le Canada. Il est bon de constater que les syndicats y participent activement. Je crois que c'est une preuve de responsabilité de leur part.

    J'ai déjà dit, à des réunions antérieures avec vos collègues, que l'Alliance canadienne est généralement favorable aux principes de la loi, et qu'en fait elle a souhaité que la question soit présentée au comité aux fins d'examen. Il y a plusieurs sujets à examiner pour nous assurer d'avoir le meilleur projet de loi possible. Dans mon discours à la Chambre, j'ai expliqué ma principale préoccupation, relativement à la nécessité de prouver l'intention criminelle avant de pouvoir accuser une société, ses administrateurs ou dirigeants, son conseil d'administration ou même un seul membre de son conseil. Je suis heureux de vous entendre mettre cela au clair. Ce n'était pas parfaitement clair dans mon esprit, à la suite de la rencontre que j'ai eue vers 13 h 30 avec certains de vos collègues. Je suis heureux de constater que vous n'excusez pas les membres des conseils d'administration tout simplement parce qu'ils sont membres de conseil d'administration. S'ils le sont, ils assument un certain degré de responsabilité. La question qui se pose, c'est quel degré?

    Je suis heureux que vous ayez soumis la question à des avocats au criminel aussi qui, nous osons l'espérer, comprennent bien la Loi constitutionnelle, afin qu'ils examinent cette question très importante. Je crois que nous rendrions aux travailleurs du pays un très mauvais service en adoptant une loi qui n'est pas conforme aux exigences de nos obligations constitutionnelles sous-jacentes. Je pense que c'est très important, et je crois que votre aide sur ce plan me sera utile, ainsi qu'à mes collègues, pour cerner la question.

    Il y a une question qui a été soulevée lors d'une audience antérieure, celle de la responsabilité du syndicat lorsqu'il y a preuve de participation à la prise de décisions qui entraînent des décès ou des blessures au travail. Je ne veux absolument pas dire que les syndicats sont de la même catégorie que les dirigeants, puisque c'est aux dirigeants de diriger le lieu de travail, mais au Manitoba, par exemple, la Loi sur la santé et la sécurité au travail encourage la prise de décisions en commun entre le syndicat et les employeurs. Peut-être est-ce prématuré, je ne sais pas si vous en avez déjà parlé, mais qu'en est-il de la responsabilité des syndicats qui ne respectent pas certaines normes de santé et de sécurité? Je ne fais que spéculer et conjecturer, parce que nous devons envisager toute éventualité. Qu'arrive-t-il si un syndicat collabore avec un employeur pour contourner les normes réglementaires ou autres? Est-ce que ses dirigeants syndicaux, qui participent largement à ce processus de décision—je ne parle pas d'une participation périphérique—seraient aussi responsables que les dirigeants ou les administrateurs de l'entreprise? Je crois que c'est une question qui se pose, et nous avons besoin de votre perspective sur le sujet.

+-

    M. Lawrence McBrearty: Non, ils ne le seraient pas, mais je voudrais expliquer pourquoi. Nous pratiquons, dans l'ensemble du Canada, que ce soit dans notre syndicat ou un autre, ce qu'on appelle parfois la cogestion en milieu de travail. De plus, les lois ou les conventions collectives de différentes provinces prévoient la création de comités mixtes de santé et sécurité et d'environnement, qui formulent des recommandations. Ils ne participent pas à la prise des décisions ou à leur mise en oeuvre. Leurs recommandations sont présentées à la haute direction. Le plus souvent, c'est la haute direction, les administrateurs ou les dirigeants qui déterminent le coût de l'investissement. Les décisions finales ne sont pas prises par le comité mixte de la santé, de la sécurité et de l'environnement, mais il peut formuler des recommandations.

¹  +-(1555)  

+-

    M. Vic Toews: À ce sujet, alors, si un dirigeant formule une recommandation qui n'est pas adoptée par l'entreprise, il ne serait pas tenu responsable en vertu de cette nouvelle mesure du Code criminel, selon vous.

+-

    M. Lawrence McBrearty: Je vais laisser Andy parler des aspects juridiques mais, à mon avis, les modifications proposées et les aspects juridiques de la négligence ou d'autre chose devraient, dans tous les cas, tenir compte des faits.

+-

    M. Vic Toews: Or, si les faits indiquaient que, même si la recommandation n'a pas été suivie, le syndicat a accepté la situation, n'a pas déposé de plainte au responsable de la santé et de la sécurité au travail de la province, a laissé faire sans mot dire, le syndicat ou ses dirigeants ne devraient-ils pas être tenus responsables?

+-

    M. Lawrence McBrearty: Selon notre proposition de loi, je dirais non, parce que nous ne sommes pas considérés comme étant des dirigeants ou des membres du conseil d'une entreprise.

+-

    M. Vic Toews: Je comprends, mais ne devraient-ils pas être considérés comme prenant part au processus de gestion? Les syndicats jouent à juste titre un rôle très important au travail. Le pouvoir d'un représentant syndical de formuler des recommandations et de faire intervenir des représentants du gouvernement est un pouvoir nécessaire et important. S'il ne fait pas son travail à ce sujet et ne... Je ne dis pas que votre syndicat ou un autre se retrouverait dans cette situation; je ne fais qu'émettre une hypothèse. Qu'en serait-il si c'était le cas? Seraient-ils tenus responsables, s'ils avaient pu présenter une plainte aux autorités, mais qu'ils ne l'avaient pas fait?

+-

    M. Andrew King (chef de service, Santé, sécurité et environnement, Métallurgistes unis d'Amérique): Vous demandez maintenant s'ils devraient être tenus responsables. Nous sommes tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit au début, à savoir qu'il est question ici de responsabilité criminelle, que les gens ont effectivement des responsabilités en matière de santé et de sécurité au travail, et qu'il y a d'autres façons pertinentes de les exercer. Je pense donc que vous demandez comment les syndicats devraient être tenus responsables en matière de santé et de sécurité, non pas en général, là où il existe un certain nombre de mesures provinciales, mais plus particulièrement sur le plan criminel.

    Je dois m'en tenir à notre expérience jusqu'à ce jour. Or, notre expérience nous montre que le pouvoir que les lois ou les conventions collectives confèrent aux syndicats est un pouvoir consultatif dans 99,9 p. 100 des cas, et que la décision d'agir ou non est prise par la direction. Le syndicat, en tant qu'institution, ne prend pas part aux décisions. Si après qu'un élément d'information a été fourni à quelqu'un qui se trouve à être membre du syndicat—et il est délicat de commencer à parler d'inaction—la direction agit, une responsabilité individuelle doit être liée à cette action. On peut se demander comment il peut y avoir une forme de responsabilité collective dans le cas d'une organisation dont les activités sont avant tout bénévoles dans les sections locales. Il ne peut pas y en avoir, parce que ce n'est pas la nature du syndicat. Le milieu de travail ne fonctionne pas de cette façon, ni sur le plan national ni sur le plan international. Le syndicat formule des recommandations, donne des conseils. Bien sûr, s'il s'agit d'une mesure prévue dans la convention collective, et si vous parlez d'une responsabilité dont il faut s'acquitter conformément à la loi ou à la convention collective, il y a déjà des dispositions dans la Loi sur les relations de travail qui en traitent.

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Monsieur Toews, j'ai été généreux. Vous avez eu neuf minutes et demi.

+-

    M. Vic Toews: Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un sujet très intéressant.

+-

    Le président: Oui. Le sujet m'intéresse aussi, mais je veux m'assurer que tout le monde a la possibilité de parler.

    Monsieur Lanctôt, vous avez sept minutes.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je vais continuer dans la même veine que mon collègue de l'Alliance. Cette modification au Code criminel concerne les administrateurs, les personnes morales et les dirigeants.

    Si on veut vraiment protéger nos travailleurs lorsqu'il n'y a pas de convention collective ou de syndicat, il faut regarder du côté des dirigeants et des entreprises, et je pense qu'il vaut la peine de le faire correctement. Cependant, lorsqu'il y a des syndicats nationaux ou un syndicat local ayant un pouvoir de recommandation, ou un comité mixte... Puisqu'on parle d'infractions criminelles, on parle non seulement de recommandations, mais aussi d'intentions. Il y a probablement des situations où le syndicat, en supposant qu'il ne soit pas contrôlé par l'entreprise, peut faire des recommandations, mais où on ne va pas au-delà de la recommandation.

    Vous êtes une personne morale. Vous êtes là pour protéger les gens, et c'est tant mieux. Vous le faites bien et j'espère que vous allez le faire encore mieux. Pour faire accepter un tel projet de loi, ne serait-il pas plus facile de vous inclure vous-mêmes pour démontrer votre bonne foi et démontrer aux entreprises, aux dirigeants et aux administrateurs qu'ils doivent aussi emboîter le pas? Je pense qu'en agissant de la sorte, vous auriez beaucoup plus de facilité à convaincre la direction et tous les administrateurs.

    Je vais poser immédiatement ma question, parce que si votre réponse est très longue, j'aurai le temps de poser mon autre question. Je n'ai pas lu votre mémoire, mais je rencontre vos gens à 17 h 30. Ce qui me fait un peu peur, c'est que je ne veux pas utiliser le Code criminel. Je ne veux pas faire indirectement quelque chose que je ne peux pas faire directement en passant par le Code criminel. Autrement dit, je ne veux pas, parce qu'on parle de déréglementation dans les provinces, qu'on passe par-dessus les lois et les compétences des provinces.

    La Loi sur la santé et la sécurité du travail est une loi du Québec. Il y a d'autres lois, notamment celle sur l'exploitation minière. Il y en a plusieurs, comme vous le savez.

    Donc, ces deux questions me préoccupent, et je vois dans votre principe no 5 qu'on ne doit pas enfreindre la Constitution et la répartition constitutionnelle des pouvoirs. Cela me sécurise, mais si vous êtes capable de me dire que c'est bien le cas, cela va me sécuriser encore davantage.

    Merci.

+-

    M. Lawrence McBrearty: Tout d'abord, en réponse à votre première question, je dirai qu'il y a l'aspect décisionnel. Lorsqu'on parle des dirigeants de compagnie, on parle de gens qui prennent des décisions et qui ont du pouvoir.

    Pour ma part, j'ai été élu directeur de mon syndicat sur le plan canadien. Je n'ai pas le même pouvoir, en vertu de nos lois canadiennes et du Code criminel, ou en vertu des règlements de notre conseil d'administration. Je n'ai pas le pouvoir d'entrer dans une entreprise et d'ordonner que certaines opérations cessent parce que je les considère dangereuses. Je n'ai pas le pouvoir de décision. Je n'ai pas la même égalité. Je ne siège pas aux conseils d'administration des compagnies.

    J'aimerais ouvrir une parenthèse. Il y a certains syndicats, que ce soit le nôtre ou d'autres, qui siègent aux conseils d'administration des entreprises. Ces représentants syndicaux ou ces syndicats deviendraient responsables au même titre que toute autre personne siégeant au conseil d'administration. Autrement dit, si je négocie, dans une convention collective, que le syndicat peut avoir un siège ou deux sièges au conseil d'administration de la compagnie Noranda, je sais très bien qu'en partant, j'ai le même pouvoir de décision, les mêmes responsabilités et les mêmes pouvoirs que tout autre membre du conseil d'administration et que je dois me conformer aux mêmes critères que ces autres membres, que ces critères soient dans les lois, dans le Code criminel ou ailleurs. Si je ne fais pas mon travail de la façon dont je devrais le faire, je devrai être pénalisé et en subir les conséquences. On est entièrement d'accord sur cela.

    Cependant, si je ne siège pas à un conseil d'administration, je n'ai pas de pouvoir décisionnel et je n'ai aucun moyen de voter ou d'argumenter devant un conseil d'administration quant à la nécessité de changer les modes ou les conditions de travail. Comme représentant syndical, durant la vie d'une convention collective, les seuls pouvoirs que j'ai sont consultatifs; je peux aussi siéger à des comités conjoints ou coadministratifs, si on peut dire. Ce ne sont pas des pouvoirs décisionnels; ce sont plutôt des pouvoirs de recommandation.

    Lorsqu'il y a des comités de cogestion, comme ceux qu'on a au Québec, les représentants syndicaux ne peuvent pas agir au niveau des décisions, mais plutôt au niveau de la façon dont le travail peut être effectué pour répondre à des besoins des consommateurs. Ce ne sont pas des pouvoirs d'investissement; ce ne sont pas des pouvoirs d'évaluer les investissements ou les profits d'une société. À l'ordre du jour des réunions des conseils d'administration, il n'est pas question de la santé, de la sécurité ou du milieu de travail; il est plutôt question des investissements, des profits et de la productivité.

    J'aime bien votre question. Dans certains cas, quand les responsabilités et le pouvoir décisionnel du syndicat, en tant qu'institution, sont égaux à ceux d'un directeur de compagnie ou d'un cadre de compagnie, oui, ses responsabilités doivent être égales. On ne demande pas d'être exemptés de nos responsabilités, loin de là. Mais sur le plancher des vaches, si je puis dire, là où il y a de la coopération entre les superviseurs et nos membres ou nos représentants syndicaux locaux, je ne pense pas que les responsabilités et le pouvoir décisionnel soient semblables.

º  +-(1605)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur King, vouliez-vous intervenir?

+-

    M. Andrew King: Je voulais ramener les gens à l'avant-projet de loi, parce qu'ils pourront constater que les termes sont précis et pourquoi la référence est le Code criminel et non un règlement provincial. On cherche non pas à créer de nouvelles infractions en matière de santé et de sécurité, mais à montrer que les dirigeants des entreprises et les personnes morales devraient être soumis aux mêmes règles que n'importe quel particulier, comme je le serais en tant que dirigeant d'une section locale.

    Nous sommes d'avis que les personnes morales sont différentes. Il n'y a pas une disposition au début du Code criminel qui indique que les syndicats sont des personnes pour les fins du Code criminel, mais il y en a une dans le cas des sociétés. Je ne parle pas de la Loi sur les sociétés ou d'autre chose mais, dans le Code criminel, la façon dont on comprend, pour ce qui est de l'intentionnalité, le fonctionnement d'une entreprise et la responsabilité de ses dirigeants n'a absolument aucun rapport avec la réalité. Il n'est donc pas étonnant, comme l'examen de la loi effectué par le ministère de la Justice le montre clairement, qu'il soit question de la théorie de l'âme dirigeante, et qu'il y ait toutes sortes d'autres aspects qui ne fonctionnent pas.

    Nous voulons donc des modifications qui indiquent clairement que, si vous jugez les entreprises ou les dirigeants responsables, vous le faites en fonction de leurs actes, conformément à leurs responsabilités. Il n'est pas question de créer une nouvelle infraction, mais surtout de comprendre que, quand les dirigeants prennent des décisions en matière de production, par exemple, il y a des conséquences sur le plan de la santé et de la sécurité.

    Nous ne parlons pas de façon théorique. Dans notre mémoire, à la page 24, nous avons examiné les recherches effectuées sur la santé et la sécurité au travail. Je suis sûr que vous n'êtes pas surpris d'apprendre qu'il y a toujours eu, en santé et en sécurité, un principe selon lequel la participation active des administrateurs est nécessaire pour que les choses fonctionnent—c'est évident—, mais ce principe a maintenant été démontré. Nous faisons référence aux études sur le sujet. Je n'entrerai pas dans les détails. Harry Shannon enseigne à l'Université McMaster, ici au Canada. Il applique les méthodes les plus rigoureuses et les plus conventionnelles, et nous citons ses conclusions à la page 25:

L'importance de cet engagement ressort dans chaque cas, peu importe le genre d'études dont il est question. L'on peut même considérer qu'il s'agit d'une condition sine qua non à la sécurité.

    Il poursuit là-dessus.

    Évidemment, vous voulez vraiment savoir comment nous pouvons réussir à leur faire respecter cet engagement. C'est l'objectif du projet de loi. Si vous lisez toute cette partie du mémoire, les seuls travaux de recherche que nous avons trouvés qui comprennent des entrevues avec des cadres d'entreprises et des gestionnaires ont été effectués en Australie. Les conclusions de cette étude se trouvent à la page 26:

Les administrateurs peuvent être motivés s'ils croient qu'il est de leur devoir de respecter la loi...et de se préoccuper du bien-être de leurs employés (ou du moins de la nécessité de veiller à ne pas leur porter préjudice).

    Le chercheur estime que l'intervention du gouvernement est la meilleure façon d'attirer l'attention des gestionnaires, et il ajoute à la toute fin de cette partie du mémoire que la possibilité «d'être accusé était de loin le facteur qui les motivait le plus à s'engager à assurer la sécurité en milieu de travail.» C'est dans le cadre de leur travail de gestionnaire, et pas d'autre chose.

º  +-(1610)  

    Nous demandons essentiellement que la loi reste de nature criminelle, étant donné que nous parlons d'une intention criminelle, mais il faut au moins indiquer comment l'entreprise fonctionne. D'un autre côté, il faut clairement préciser aux administrateurs et aux dirigeants quelles sont leurs fonctions en matière de santé et de sécurité. C'est exactement ce que nous faisons dans notre mémoire, parce que nous voulons bien distinguer les deux. Nous ne voulons pas que la loi soit invoquée chaque fois qu'il y a un problème au travail. Nous voulons qu'elle le soit quand le comportement des dirigeants de l'entreprise est scandaleux. Si vous voulez avoir une idée de cela, les deux volumes sur la mine Westray peuvent vous renseigner. C'est vraiment de cela dont il s'agit.

    Si, un jour, on s'interroge sur la responsabilité des syndicats, vous pourrez examiner la chose de plus près mais, en bout de ligne, vous constaterez que l'influence sur le milieu de travail est complètement différente, et nous n'avons pas de preuves à ce sujet. Nous en avons dans le cas des dirigeants.

+-

    Le président: Merci.

    C'est maintenant au tour de M. Blaikie.

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de cet après-midi de nous avoir si bien présenté le dossier.

    Monsieur le président, je pense qu'il serait regrettable d'orienter la discussion sur la responsabilité des syndicats concernant les accidents en milieu de travail. Je suis sûr que les représentants syndicaux seraient heureux d'assumer cette responsabilité si on leur accordait les mêmes pouvoirs que les dirigeants, mais ce n'est clairement pas le cas dans la loi ou dans la façon dont les sociétés sont gérées. Je pense que cette discussion aboutit à un impasse et il serait aussi regrettable de laisser des questions de compétence nuire à ce qui est clairement l'objet de notre démarche et à ce qui l'était avant, quand la question a été examinée par le comité permanent de la justice de la Chambre, c'est-à-dire de modifier le Code criminel.

    Le Code criminel est de compétence fédérale et, par conséquent, il est tout à fait de notre ressort, si vous voulez, de déterminer comment nous voulons le modifier. Je suis tout à fait d'accord avec M. McBrearty pour dire qu'il s'agit non pas tellement de punir les sociétés après la prochaine tragédie à survenir, mais de prévenir celle-ci en inculquant aux dirigeants des entreprises le sens des responsabilités de façon à leur faire observer une discipline, sur le plan moral et le plan légal, afin qu'ils ne prennent pas de décisions comme celles qui ont entraîné des tragédies de ce genre.

    M. King a peut-être suivi nos audiences, mais il est possible qu'il ait eu l'occasion de prendre connaissance de la prise de position du gouvernement sur la responsabilité criminelle des entreprises, le document de travail du ministère de la Justice. Je me demande si vous pouvez nous dire ce qui vous semble être la façon la plus prometteuse d'envisager la question. Dans ce document, il est question de la responsabilité du fait d'autrui et de l'homicide involontaire des entreprises. On cite des exemples de l'homicide involontaire des entreprises dans d'autres pays, du concept de meurtre d'entreprise au Royaume-Uni et du concept de culture d'entreprise en Australie. Je me demande si vous pourriez nous dire exactement à quoi correspond le projet de loi que vous avez en tête à la lumière de ces solutions qui ont été présentées au comité par le ministère de la Justice.

º  +-(1615)  

+-

    M. Andrew King: Dans notre avant-projet de loi révisé, qui commence à la page 15 du document en français, vous verrez que nous avons fait des emprunts aux deux, en essayant de garder le plus possible une approche conforme au Code criminel canadien. Le Code a un long historique; les choses ont été faites d'une certaine manière au fil des ans et nous voulons demeurer logiques.

    Le problème essentiel que présente l'approche américaine, c'est qu'elle se fonde, en fin de compte, sur le principe de la responsabilité du fait d'autrui, qui nous ramène à la situation évoquée aujourd'hui: il se peut qu'il se passe des choses dont personne n'a connaissance au sein d'une société, des choses qui ne sont même pas permises. Dans certains États américains, ce serait assez pour démontrer la culpabilité d'une société. À mon avis, ceci provoquerait un nombre considérable de contestations fondées sur la Charte, sans atteindre pour autant l'objectif visé.

    Si vous examinez attentivement la législation australienne, particulièrement la législation fédérale, vous verrez que les buts recherchés ressemblent beaucoup aux nôtres. On entend constamment parler de culture d'entreprise, au moins chez nous. Nous savons que chaque société développe sa propre culture pour illustrer son mode de fonctionnement. Nous savons aussi qu'on peut lire des ouvrages en gestion, en santé et en sécurité, car nous avons toutes sortes de manuels techniques sur la gestion des systèmes de sécurité. On y apprend quels sont les différents processus en place au sein de l'organisation, quoi faire et ne pas faire. Par conséquent, nous pensons qu'on en sait assez sur les sociétés pour parler d'une approche fondée sur la culture d'entreprise, à condition que celle-ci soit suffisamment claire pour savoir qu'on fait référence au mode de fonctionnement de la société, à l'instar des Australiens, et vous verrez que cela apparaît également dans l'avant-projet de loi révisé que nous avons présenté. Notre approche est différente en ce sens que nous ne lui donnons pas la même portée que les Australiens. Notre avocat-conseil nous a recommandé d'essayer de bien préciser nos attentes et les éléments de faute, pour ne pas perdre le lien qui existe entre le droit criminel et le comportement. Voilà donc l'orientation que nous avons prise concernant le principe général de la responsabilité de la société, en plus d'avoir apporté quelques éclaircissements pour être conformes au Code criminel.

    Pour ce qui est de la responsabilité des administrateurs des sociétés, nous avons fait quelque chose d'un peu différent par rapport au Code criminel. Même si c'est conforme à ce qu'il prévoit, c'est censé guider davantage les juges, les procureurs de la Couronne, les policiers et toutes les personnes concernées, y compris celles susceptibles d'être poursuivies, en cas de négligence criminelle, de manquement aux obligations, lesquelles sont clairement décrites—les voici. Si vous vous retrouvez dans une situation semblable, aux yeux du procureur général, par exemple, vous pourriez être accusé.

    Donc, c'est un peu des deux; on se rend compte qu'il y a deux aspects implicites dans les recommandations que formulera ce comité en bout de ligne. L'un, c'est qu'il doit être conforme au Code et l'autre, c'est qu'une fois qu'il sera adopté, les procureurs généraux devront penser à la façon de l'interpréter. J'espère que le résultat sera aussi clair que lorsque nous avons établi qu'il était inacceptable d'ignorer la violence conjugale. Non seulement vous avez envisagé de revoir certaines lois, mais en plus, chaque procureur général de ce pays a dû repenser à certaines questions et lancer un processus qui fonctionne correctement. Aujourd'hui, 20 ans après, nous avons fait de très grands progrès. Voilà donc les deux aspects essentiels.

º  +-(1620)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup, Bill.

    Monsieur Macklin.

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): Merci beaucoup.

    C'est un plaisir que de vous recevoir aujourd'hui et d'accueillir vos représentants sur la Colline. Ils font du bon travail en venant témoigner ici.

    J'aimerais en revenir à Westray, parce que je pense que Westray, d'une certaine manière, n'est pas seulement l'exemple d'un désastre, mais aussi d'une situation qui a conduit droit à la catastrophe. Certains ont dit que si les règles en place avaient été suivies, ce drame ne se serait jamais produit.

    Vous avez dit, au début de votre allocution, que vous ne vouliez pas que les directeurs de sociétés craignent d'aller en prison, si j'ai interprété vos propos correctement, ou qu'il ne fallait pas prendre en considération les postes de direction parce que ceux qui les occupent pourraient craindre de se retrouver en prison. Westray était dans ce que nous pourrions appeler une situation économiquement difficile; pour survivre, la mine devait compter notamment sur les subventions. Les travailleurs étaient désespérés, mais n'avaient d'autre endroit où aller, selon le témoignage qui nous a été livré aujourd'hui, et devaient subvenir aux besoins de leur famille. En fin de compte, ils essayaient de survivre collectivement dans ce milieu. On nous dit qu'il ne faut pas penser à la prison, que la situation économique de Westray était telle que si quelqu'un avait dit qu'il fallait fermer la mine et mettre les gens à pied comme il se doit, les travailleurs auraient quand même été pénalisés puisqu'on les aurait aussi privés de leur travail et qu'on aurait fait s'effondrer le processus économique.

    Compte tenu de la situation, pourriez-vous me dire en quoi votre modèle aurait pu modifier le cours des choses, de sorte que je puisse voir comment, en changeant la loi, nous aurions pu éviter la tragédie de Westray et travailler pour que la mine continue d'être exploitée pour le bien de tous, soit par la société, soit par les travailleurs eux-mêmes?

+-

    M. Lawrence McBrearty: Je comprends la situation de déprime. Westray a connu une tragédie, mais il y en a probablement eu d'autres ailleurs qui sont passées sous silence. Westray nous a peut-être poussés à faire avancer les choses, car il s'agissait d'une enquête extrêmement longue. Ainsi, notre syndicat a essayé de convaincre les députés et les Canadiens qu'il fallait aller de l'avant. Nous avons fait des recherches en matière de responsabilités criminelles dans d'autres pays. Nous avons ensuite mené des enquêtes et commencé à entreprendre beaucoup de recherches, avec l'aide extérieure de professeurs d'université et de Statistique Canada notamment, pour trouver des informations pertinentes et concrètes, puis nous avons tenté de faire circuler toutes ces informations au Canada.

    Nous avons dénombré 882 accidents mortels sur le lieu de travail. Nous disposons des données par province. Ces dernières ont leur propre législation en matière de santé et de sécurité, nous le comprenons bien, mais il y a eu 882 décès en 2000. Ce chiffre s'élevait à 758 en 1993 et à 833 en 1997. Il y a au moins deux semaines, Statistique Canada a établi qu'il y avait eu près de 800 décès en 2001, sans avoir fini de compiler toutes les données de l'année.

    Peu de gens apprécieront ma réponse, mais je viens d'une mine. Je suis celui qui a extirpé ce garçon du broyeur à barres; son corps gisait dans le panier. L'ambulance n'avait pas encore quitté les lieux que le broyeur était de nouveau en marche. J'ai vu des corps sans vie retirés de la mine et la production reprendre à plein régime 15 minutes après. Je comprends les problèmes de profits, d'investissements et de régions sinistrées. Actuellement, dans ma ville natale de Murdochville, on est en train de fermer la mine Noranda dans laquelle j'avais travaillé et où il y a eu une grève de sept mois en 1957, aussi à cause des mauvaises conditions de travail. Mais je me pose les mêmes questions que vous. C'était ma vie, c'est là que j'ai tout appris, dans la mine. Nous ne pouvons pas mettre en péril des vies humaines pour la recherche du profit, pour garder la mine ouverte et parce que c'est une région défavorisée. Si nous faisions cela, même dans les circonstances, je ne crois pas que je pourrais trouver le sommeil la nuit, ni comme syndicaliste ni comme personne, car c'est exactement ce qui revient tous les jours de la semaine sur nos tables de négociation.

º  +-(1625)  

    Je comprends toutes vos questions. Vous êtes députés et vous devez répondre à beaucoup de gens. Nous savons que nous ne sommes pas les seuls à faire pression sur la Colline. Il y a les chambres de commerce, les compagnies d'assurance, les associations des sociétés minières, vous l'avez dit. Nous le comprenons. Je sais que nous avons des points de vue différents et nous l'acceptons aussi. Il y a beaucoup de sociétés prêtes à s'asseoir avec nous et à approuver ce que vous dites, mais reste à savoir comment.

    Westray était une mine située dans une région sinistrée, les gens avaient besoin de travail pour nourrir leur famille. Je suis désolé, mais j'aurais été prêt à fermer la mine ne serait-ce que pour sauver une vie, si cela avait été de mon ressort.

º  +-(1630)  

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je vous demande comment votre loi aurait pu permettre d'éviter la tragédie de Westray si elle avait été en vigueur à ce moment-là? J'aimerais vraiment le savoir.

+-

    M. Lawrence McBrearty: Andy vous parlera de l'aspect légal, parce que je ne suis pas avocat et que je n'ai pas l'intention de le devenir. Nous croyons fermement qu'une mesure législative comme celle-là permettrait de porter les questions de santé et de sécurité en milieu de travail à l'ordre du jour des réunions quotidiennes des conseils d'administration des sociétés. Je siège à ces conseils. Je présente des exposés aux membres des conseils d'administration de différentes sociétés, partout au pays et ailleurs. La sécurité des travailleurs n'est pas à l'ordre du jour. Je le comprends aussi. On s'occupe de productivité, d'investissements et de profits—nous avons des comptes à rendre à nos actionnaires. Nous comprenons très bien toute la structure, mais nous considérons que cela permettrait de promouvoir la prévention.

    Lorsque le juge Richard a rendu sa décision dans l'affaire Westray, les associations de sociétés minières du Québec et d'autres provinces—et même le Canada—ont embauché des consultants pour savoir comment se protéger des responsabilités découlant d'une telle décision. J'ai la réponse. Ils se sont montrés ouverts avec moi et j'ai obtenu une copie. Lorsque les gens essayent de se couvrir, c'est parce qu'ils savent déjà qu'ils ne le sont pas. C'est ce qu'ils m'ont dit. Mais ce qui fait le plus mal, ce sont les questions d'image et d'argent.

    Pour répondre à votre question, je crois que si ce texte est adopté, il sera un excellent outil de prévention. Nous aurons la charge, en tant que syndicat, de rappeler aux dirigeants des sociétés, chaque fois que nous les rencontrerons, qu'ils sont responsables de la prévention conformément aux dispositions du Code criminel.

+-

    Le président: Nous avions dit sept minutes, mais cela fait déjà onze.

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: Merci.

    Je pense que tous les députés sont d'accord pour reconnaître que l'activité économique et les profits doivent passer après la sécurité des personnes et les conditions de travail. Vous, en tant que témoins, essayez de nous aider à trouver un juste équilibre pour que notre préoccupation première, à l'heure d'adopter ce texte de loi, soit la sécurité des personnes. Malheureusement, comme que je suis avocat, je dois approfondir certains aspects techniques et poser des questions. Je crois que pour le justifier, non seulement pour mes collègues et moi-même, mais aussi pour le reste de mon caucus, je dois d'abord poser plusieurs questions.

    J'aime l'approche que vous présentez en page 18, au sujet des obligations des dirigeants et administrateurs des sociétés. Je pense que c'est un bon début. Je dis bon début parce que j'ai quelques difficultés avec le langage technique employé. Étant donné que M. King jouit d'une certaine expertise, je voudrais profiter de ses connaissances techniques car je n'ai pas pour m'aider une horde d'avocats comme les Libéraux d'en face.

    Une voix: Oui, mais vous en valez dix.

    M. Vic Toews: C'était une remarque impromptue. Je m'en tiendrai à la formulation.

    Au paragraphe 216.1(1) de la page 18, il est dit:

Tous les dirigeants et administrateurs d'une société ont l'obligation légale de prendre des mesures raisonnables pour s'assurer qu'il n'existe aucune condition de travail susceptible de causer la mort et des lésions corporelles dans un établissement où les employés effectuent des travaux pour le compte de la société.

    J'aimerais revenir sur «aucune». J'ai lu cela très rapidement et peut-être que quelque chose m'a échappé ou que je ne rends pas justice à ce qui a été fait, mais si nous revenons à la page 15, nous voyons que le paragraphe 467.3(1) dit:

«direction d'une société» s'entend, dans le cas d'un acte ou d'une omission...

    puis on parle, entre autres, du

contrôle du secteur d'activités de la société concernée par l'acte ou l'omission.

    Par conséquent, on reconnaît spécifiquement dans cette partie que les administrateurs ou les dirigeants ne devraient être responsables que des secteurs dont ils ont la charge, alors que dans la formulation concernant les obligations des dirigeants et administrateurs des sociétés, ces derniers sont tenus responsables, quel que soit le lieu de l'infraction. Cela m'inquiète un peu parce que je pense que cela va exactement à l'encontre de l'effet voulu par les rédacteurs qui consiste tout simplement à essayer de faire porter la responsabilité à l'employeur. Peut-être pouvons-nous obtenir une explication.

º  +-(1635)  

+-

    M. Andrew King: Les premières dispositions que vous citez concernent l'article 216 qui se rapporte uniquement aux dirigeants et aux administrateurs de sociétés, comme c'est dit au début. Les obligations en question sont définies au paragraphe 2, pour que nous sachions que les responsabilités sont conformes aux obligations légales des dirigeants ou administrateurs de sociétés. Donc, il s'agit de savoir s'ils sont responsables individuellement. Cela dépendrait s'ils manquent à l'une ou l'autre de leurs obligations.

    Le paragraphe 467.3 révisé porte sur les infractions commises par des sociétés. Ici, nous faisons référence à la direction de la société, qui est un peu plus élargie, mais nous parlons également du fonctionnement de la société et de sa responsabilité. Par conséquent, pour établir la responsabilité d'une société, c'est là, je crois, qu'il y a le plus d'éléments permettant de réunir les différentes personnes en cause.

    Comme vous l'avez dit plus tôt à M. Blaikie, il y a un peu des législations américaine et canadienne, on rassemble un peu des deux. Je dirais qu'il ne s'agit pas de la responsabilité du fait d'autrui. En fait, nous avons été critiqués pour notre étroitesse et pour nous être limités au cadre de l'autorité.

+-

    M. Vic Toews: Pour en revenir au paragraphe 216.1(1), techniquement, selon cette interprétation, la responsabilité incombe aux administrateurs ou aux dirigeants d'une société, quels que soient les établissements où travaillent les employés. Imaginons que nous avons un administrateur de société à Winnipeg et qu'il y a un problème concernant les conditions de travail à Sarnia; est-ce que compte tenu de ces responsabilités, cette administrateur a quelque chose à voir avec les activités de Sarnia, est-ce que sa responsabilité criminelle pourrait être reconnue?

+-

    M. Andrew King: Non, à moins que cela fasse partie directement de ses obligations légales. Lisez les alinéas 219.1(2)a), b) et c). Ce que nous disons, c'est que si le dirigeant qui se trouve à Winnipeg dirige l'ensemble de la société, y compris la filiale de Sarnia—si l'on se fie à la façon dont la société a été constituée—il a un rôle à jouer dans la hiérarchie et son mot à dire sur la santé et la sécurité des employés de Sarnia et d'ailleurs. Il a donc pour devoir, en tant que dirigeant, de veiller à l'application et au respect des politiques en vigueur. Il n'a pas nécessairement à s'assurer que les politiques de Sarnia sont correctes mais, à son niveau, il doit faire ce qui est approprié.

+-

    M. Vic Toews: Sont-ce là les seules obligations alors? Si vous utilisez le mot «consiste», il me semble que vous faites référence à d'autres obligations.

+-

    M. Andrew King: Comme vous le savez, ce n'est pas inhabituel de faire cela dans le Code criminel. La fraude, par exemple, n'est même pas définie dans le Code criminel.

+-

    M. Vic Toews: C'est vrai, mais je me demandais...

+-

    M. Andrew King: Nous avons beaucoup d'expérience en la matière. Il faudrait recueillir des éléments de preuve. Or, les pratiques de gestion en matière de santé et de sécurité devraient nous permettre de cerner les procédures qui doivent être suivies à ce niveau-là, et de déterminer si elles l'ont été. Donc, il est question ici d'éléments de preuve, car je ne crois pas, si l'on se fie à cette définition, que l'on tente d'élargir la portée du principe de responsabilité. Je préfère d'ailleurs utiliser l'expression responsabilité correspondante, de portée plus restreinte, au lieu de dire qu'ils doivent rendre des comptes en fonction de leurs responsabilités.

º  +-(1640)  

+-

    M. Vic Toews: Oui, je comprends. Je ne veux pas trop insister là-dessus. Je tiens surtout à ce qu'on établisse un lien entre la responsabilité criminelle et l'intention criminelle, sans dépasser la mesure. Point à la ligne.

+-

    Le président: Monsieur Toews, vous êtes un avocat multidisciplinaire.

    Monsieur Grose.

+-

    M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je suis déçu de voir que vous ne voulez pas que les syndicats assument des responsabilités à cet égard. Avant d'avoir la brillante idée de diriger ma propre entreprise, je travaillais pour une très grande société qui attachait beaucoup d'importance à la santé et à la sécurité. C'était pour elle une question de rentabilité. C'était sa façon de voir les choses. Toutefois, je sais que dans certaines entreprises, quand un travailleur estime qu'il accomplit un travail dangereux, il en informe son délégué syndical qui, lui, prend les mesures qui s'imposent. Il devrait, en tout cas, le faire. Or, s'il ne le fait pas et que rien ne se produit, si l'employé se fait dire de retourner à son travail, le délégué est déchargé de toute responsabilité, même si la convention précise qu'il doit signaler la chose. Je pense qu'il est tout aussi responsable que le gestionnaire ou même le directeur d'entreprise.

+-

    Le président: Monsieur McBrearty.

+-

    M. Lawrence McBrearty: La plupart de nos conventions collectives, lorsque nous avons l'accréditation syndicale, ou la plupart des énoncés de principe faits sur les lieux de travail précisent que la santé et la sécurité sont la préoccupation de tous. Voilà qui est un bon principe de gestion. Je suis d'accord avec vous pour dire que, dans certaines entreprises, la sécurité est la priorité numéro un. Là où elle l'est, elle est rentable. Ailleurs, ce n'est pas le cas.

    Nous avons effectivement des responsabilités aux termes de la convention collective et du code de travail en vigueur, qu'il soit fédéral ou provincial. Nos responsabilités sont définies dans les conventions collectives. Je crois savoir—et les avocats assis à la table me corrigeront si je fais erreur, ce qui est habituellement le cas—que, dans le Code criminel, le pouvoir d'un administrateur ou d'un dirigeant de l'entreprise est beaucoup plus grand que celui du délégué syndical, du chef ou président de l'établissement, du supérieur hiérarchique ou du cadre intermédiaire.

    Remarquez que lorsqu'un décès survient actuellement, en règle générale, les premiers appelés sur les lieux sont soit la sûreté provinciale ou la GRC qui doit enquêter pour voir s'il y a eu intention coupable, par exemple.

    Si le syndicat ou le travailleur a le même pouvoir ou les mêmes responsabilités que la direction, je ne suis pas d'accord pour dire qu'il a les mêmes obligations. Toutefois, pour reprendre votre exemple, si le travailleur repère un endroit dangereux sur les lieux, il peut le signaler à son responsable de la santé et de la sécurité, au délégué syndical ou à je ne sais qui encore. Que je sache, il n'existe pas de convention collective ou de loi provinciale qui permet au délégué syndical de suspendre l'exploitation ou de faire fermer l'endroit dangereux. Aux termes de la loi, le travailleur peut uniquement en faire la demande. Si le délégué syndical ne signale pas la demande, il contrevient à la convention collective. Par contre, si le délégué syndical transmet la demande à des échelons toujours plus hauts de la direction, comme ce fut le cas à la mine Westray, et que celle-ci ferme les yeux ou agit avec négligence, il faudrait alors que le Code criminel entre en jeu.

    Je tiens à être bien compris. Je ne peux pas me prononcer au nom de tous les syndicats, mais le mien ne souhaite pas esquiver ses responsabilités ou se cacher. Si nous avons une responsabilité et que nous ne l'assumons pas, je peux vous dire que nos membres savent quoi faire. Toutefois, nous ne nous cachons pas derrière un écran. En fait, nous voulons contribuer à régler le problème. Nous souhaitons essayer de trouver une solution. Je devrais peut-être dire ce que j'allais dire à la fin. À moins qu'une solution ne soit trouvée, vous allez nous voir souvent sur la Colline au cours des vingt prochaines années.

º  +-(1645)  

+-

    M. Ivan Grose: Votre comparaison du pouvoir du délégué syndical et de celui du chef d'établissement m'intrigue. On voit que vous n'avez jamais vu un délégué syndical des TCA à l'oeuvre. Croyez-moi, il y a des jours où le chef n'a pas beaucoup d'influence.

+-

    M. Lawrence McBrearty: Si vous voulez vous lancer dans ce genre de débat, nous le faisons nous aussi, mais je ne souhaite pas en parler ici.

+-

    Le président: J'ai supposé que M. Grose nous parlerait de la probabilité de sa présence ici dans 20 ans, mais pour l'instant, nous nous tiendrons loin du sujet.

    Monsieur Lanctôt, à vous l'honneur de faire la dernière intervention.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais continuer dans la même veine parce que j'aimerais que nous bouclions la boucle. Je comprends très bien une bonne partie de ce que vous avez dit, mais si la recommandation qui provient du syndicat et qui est suivie par le conseil d'administration n'est pas bonne, ou si le syndicat néglige de faire une bonne recommandation, le syndicat ne pourrait pas être poursuivi en tant que personne morale, selon ce que vous dites. Le syndicat, qui est près de ses gens, peut ne rien faire ou faire une mauvaise recommandation qui est suivie par le conseil d'administration. Pourquoi ne pas immédiatement inclure toutes ces possibilités? Dans combien de temps pourra-t-on revenir sur un projet de loi comme celui-là? Je me dis qu'on est là pour protéger tous les travailleurs. Si, comme vous l'avez dit, on peut fermer une mine ou une usine avant qu'une personne décède, pourquoi ne pas penser à ces choses-là immédiatement? Ce n'est pas parce qu'on veut absolument que les syndicats soient responsables, loin de là, mais si on dit aux patrons, aux entreprises, aux dirigeants et aux administrateurs qui viendront devant nous qu'on va vous exclure presque complètement, on entendra certainement du blanc et du noir. Par contre, si on arrive à faire des compromis et à accepter une possibilité comme celle-là--il y en a d'autres, mais j'en prends une--, cela démontrerait votre bonne foi sans vous mettre dans une situation difficile. Vous êtes là pour protéger vos travailleurs.

[Traduction]

+-

    M. Andrew King: Plus vous creusez la notion de responsabilité syndicale dans ces cas, plus vous vous enlisez dans le problème dont il a été question déjà, soit celui de l'intention coupable. Il existe une corrélation manifeste, dans la preuve que nous avons citée, entre la participation active de la haute direction et la réduction du temps perdu. Il est aussi évident que si la haute direction ne participe pas activement à la santé et à la sécurité au travail, nul autre ne le fera, pour des raisons évidentes. Rien ne prouve le contraire. Nous avons la preuve que les syndicats peuvent accroître et accroissent effectivement la sécurité dans les milieux de travail, parce qu'ils en offrent les moyens, mais l'opposé n'est pas vrai. Tout ce que Lawrence vous a dit et tout ce dont nous avons parlé au sujet du rôle des représentants syndicaux ne les placent pas au même niveau de responsabilité que celle qui est clairement attribuable à la direction de l'entreprise. C'est là un point sur lequel j'insiste.

    Ensuite, depuis l'adoption de la loi créant des représentants en matière de santé et de sécurité et explicitement libellée de manière à ne pas créer d'obligation, lorsqu'on en vient au niveau de ceux qui font du travail de santé et de sécurité, bon nombre d'entre eux, qu'il s'agisse d'inspecteurs ou de ceux qui travaillent dans le milieu, particulièrement dans le milieu de travail, sont des bénévoles. Ils aident à repérer les problèmes. Si nous commençons à imposer trop d'obligations à ce niveau, quand on sait qu'ils n'ont pas de pouvoir d'action réel, on ne trouvera plus personne qui soit disposé à le faire.

    C'est donc en quelque sorte une combinaison des deux. Particulièrement sous l'angle du Code criminel, il n'y a pas de preuve que les syndicats ont cet effet défavorable et ont besoin d'être soumis aux mêmes exigences que les entreprises et leurs dirigeants. De plus, on pourrait ainsi faire peur à bien des gens qui sont disposés, du côté de la direction comme du côté syndical, à servir d'antenne sur les lieux, parce qu'ils craindraient d'être poursuivis s'il y avait manquement de leur part.

    Le régime de réglementation vise dans l'ensemble les relations au niveau de l'établissement, et par là j'entends les règles de santé et de sécurité au travail. Ces règles sont plus efficaces dans certaines provinces que dans d'autres. Inutile d'aller dans les détails. Nous parlons de porter la réglementation un cran plus haut et, en réponse à la question posée plus tôt par M. Macklin, à savoir quelle différence cela aurait pu faire, le gros problème, c'est qu'après avoir lu la moitié du premier volume, vous découvrez que toutes les décisions économiques initiales qui ont été prises n'étaient pas les bonnes. Quelqu'un a dit—c'était peut-être le juge Richard—que la mine Westray était une bombe à retardement avant même que les travailleurs y entrent. En raison de la méthode d'exploitation qu'ils ont choisie, ils ont ignoré toutes sortes de choses. Il faut en tenir compte. Si vous me demandez si les choses auraient été différentes aujourd'hui si le Code criminel avait prévu une infraction et que les gens en avaient été conscients, je crois que la réponse est oui. Gerald Phillips, Roger Parry et Clifford Frame ne se seraient pas alors promené partout pour dire qu'il n'était pas nécessaire de tenir compte de ceci ou de cela, parce qu'ils auraient été conscients que le Code criminel s'appliquait à eux. Comme le dit la preuve, à la page 23, les gestionnaires ont dit au chercheur que la crainte de responsabilité personnelle était de loin le plus important facteur de motivation.

    Nous croyons seulement qu'il faut s'assurer qu'ils assument les responsabilités qui vont avec leurs fonctions, qu'il n'est pas nécessaire d'essayer de les rendre directement responsables, mais de les situer dans le contexte de l'entreprise, d'un bon système de gestion de la sécurité et ainsi de suite.

º  +-(1650)  

+-

    Le président: Je remercie les témoins. Ce fut un après-midi fort instructif, et les témoins nous ont aidé à comprendre cette question fort complexe. Monsieur McBrearty et monsieur King, vous avez droit à nos remerciements les plus sincères.

    Je vais laisser deux minutes aux témoins pour quitter la salle, après quoi nous allons examiner une motion de M. Sorenson.

º  +-(1653)  


º  +-(1656)  

+-

    Le président: Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne reprend sa 86e séance.

    Je crois que M. Sorenson a une déclaration à nous faire.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président; je tiens à vous remercier d'avoir permis l'étude de cette motion par le comité aujourd'hui.

    Cette motion m'est venue à la suite de la lecture d'un rapport qui date de quelques années. Il y a plus de deux ans, le sous-comité sur la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, qui relevait du comité de la Justice, a tenu des audiences à Ottawa et a voyagé partout au Canada. Je sais que M. Grose faisait partie de ce comité, de même que M. MacKay et M. Myers, qui siègent maintenant au sein du comité de la Justice. Je sais également que le comité a visité de nombreuses installations correctionnelles, a assisté à des audiences de la Commission nationale des libérations conditionnelles et a traité avec les responsables de cette Commission.

    En mai 2000, le sous-comité a déposé un rapport intitulé «En constante évolution: la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition». En octobre 2000, dans sa réponse au rapport, le solliciteur général affirmait:

Le rapport du comité... vient s'ajouter aux renseignements, aux recherches et aux connaissances qui existent déjà au sujet du système correctionnel et du régime de mise en liberté sous condition au Canada.

    Par la suite, il ajoutait:

Dans son examen, le Comité souligne que certains secteurs du système correctionnel et de mise en liberté sous condition peuvent être améliorés.

    Le solliciteur général a reconnu que le rapport constituait une étude complète et détaillée des témoignages offerts par des délinquants, des policiers, des victimes d'actes criminels, des membres du barreau, des représentants d'organismes d'aide aux délinquants, des avocats de la Couronne, des universitaires et de nombreux autres intervenants. Il a indiqué que le gouvernement devrait accepter 46 des 53 recommandations faites par le comité. Je tiens à noter que le gouvernement n'a jamais renoncé à donner suite à ces 46 recommandations. En fait, dans son dernier discours du Trône, le gouvernement rappelait la nécessité de s'assurer que nos collectivités demeurent sûres. Cependant, ce qui me préoccupe, c'est qu'à l'heure actuelle, aucune des recommandations du comité n'a été mise en application et que le solliciteur général n'a pas respecté son engagement à cet égard.

    Ainsi, la motion qui est devant vous aujourd'hui vise simplement à demander au solliciteur général, à la commissaire du Service correctionnel du Canada, Mme Lucie McClung, à l'Enquêteur correctionnel et aux responsables de la Commission nationale des libérations conditionnelles de comparaître devant le présent comité pour dresser un rapport de situation concernant les recommandations qui ont été mises en application, le cas échéant, et pour justifier l'inaction dans le cas des recommandations qui n'ont pas encore été mises en application.

    Il y deux raisons pour lesquelles je suis préoccupé, deux raisons pour lesquelles je propose cette motion. Évidemment, la première a trait à l'engagement du gouvernement d'assurer la sécurité de nos collectivités, de protéger la société, objectif dont il a été question dans le discours du Trône. Mais, peut-être plus important encore, je suis inquiet du fait que le gouvernement, le solliciteur général et son ministère ont effectivement passé sous silence le travail difficile accompli par ce comité il y a un certain nombre d'années. L'histoire nous enseigne que beaucoup de rapports ont été rédigés, beaucoup de comités ont été créés, beaucoups de recommandations ont été formulées et parfois même acceptées, sans toutefois avoir été mises en application.

    Mais quelles sont certaines de ces recommandations? Il y en a 53 dont 46 que le solliciteur général avait promis de mettre en application. La recommandation 1 était très simple: «modifier l'article 101 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon que la prépondérance de la protection de la société soit établie en tant que principe fondamental (autonome), applicable au Service correctionnel du Canada et à la Commission nationale des libérations conditionnelles.»

»  +-(1700)  

    La recommandation 11 se lit comme suit : «modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à obliger le Service correctionnel du Canada à procéder à un examen de tous les cas admissibles à une libération d'office afin de déterminer si le dossier du détenu doit être envoyé à la Commission nationale des libérations conditionnelles pour un examen en vue du maintien en incarcération». Je veux que ces personnes viennent nous dire si c'est effectivement la situation à l'heure actuelle. Nous avons affaire aujourd'hui à de nombreux cas. M. MacKay nous signalait hier le cas d'une personne qui est sortie en vertu d'une libération d'office et qui a été sauvagement battue à coups de marteau à panne fendue. Je crois que le comité en est venu à un bon compromis ici, nous avons travaillé tous ensemble, nous avons montré que nous pouvions étudier un rapport, mais il s'agit d'une étude beaucoup plus complète de la Loi sur les libérations conditionnelles à la lumière des nombreux crimes différents qui sont commis par des personnes faisant partie de programmes de mise en liberté anticipée.

    J'aimerais également rappeler rapidement la recommandation 13: «modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de façon à ce que la procédure d'examen expéditif ne s'adresse pas à ceux qui ont été incarcérés pour avoir commis une infraction mentionnée à l'annexe II de la loi et ce, peu importe qu'il y ait eu ou non une détermination judiciaire de l'admissibilité à la libération conditionnelle».

    Monsieur le président, ce ne sont pas là des recommandations proposées par notre parti ou par le parti de l'opposition ou par le seul parti gouvernemental, mais des recommandations qui ont été formulées par un comité qui a bien travaillé collectivement, un comité qui a réussi à avoir l'oreille du gouvernement: le solliciteur général a dit que même si nous ne pouvions accepter les 53 recommandations, il y en avait 46 qui devraient être mises en application. Monsieur le président, je suis incapable de trouver où il est dit que ces recommandations ont été acceptées. J'ai parlé à de nombreuses personnes qui ont fait partie du comité, au personnel de recherche, aux gens de la Bibliothèque du Parlement et à d'autres, et on ne trouve aucune trace de cette acceptation dans les dossiers. Il s'agit fondamentalement d'une question de responsabilité et il faut essayer de trouver le travail le plus récent de ce comité.

+-

    Le président: Merci, monsieur Sorenson.

    Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je remercie M. Sorenson de ses observations, mais tout le monde ici doit se demander pourquoi ces préoccupations n'ont pas été soulevées il y a quelques semaines lorsque toutes ces personnes comparaissaient devant nous alors qu'il était question du Budget des dépenses. Ce sont des gens occupés, nous sommes des gens occupés, nous avons un programme qui nous demandera du temps et vous avez eu vos témoins, vous avez eu l'occasion de leur parler. La question que vous soulevez maintenant aurait été une question idéale à poser au moment de la réunion sur l'examen du budget des dépenses. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait?

+-

    M. Kevin Sorenson: À cette réunion, le temps était compté. Les acteurs étaient présents, mais nous discutions du budget des dépenses et il s'agit d'une question beaucoup plus globale.

    Je crois qu'en premier lieu, nous devons déterminer combien de ces recommandations ont été acceptées et ensuite, demander aux responsables concernés, que ce soit au Service correctionnel, à la Commission des libérations conditionnelles ou ailleurs, pourquoi les autres recommandations n'ont pas été mises en application. Je me souviens que lorsque M. Zaccardelli, commissaire de la GRC, Mme Lucie McClung, commissaire du Service correctionnel du Canada, les responsables de la Commission nationale des libérations conditionnelles et le solliciteur général étaient présents, la réunion avait commencé tard et que nous avions très peu de temps pour parler du budget des dépenses. Je sais bien que tous les acteurs étaient présents et je sais aussi que notre comité peut comprendre qu'il serait bien que ces acteurs reviennent pour répondre aux préoccupations soulevées par cette motion. Il s'agit d'une motion qui vise uniquement à déterminer où nous en sommes à propos de cette question. Siégeons-nous ici uniquement pour passer le temps? Est-ce que les comités qui voyagent à grands frais partout au pays trouvent une oreille attentive? Leurs recommandations sont-elles mises en application?

»  +-(1705)  

+-

    Le président: Monsieur Macklin.

+-

    M. Paul Harold Macklin: Merci beaucoup.

    La remarque de M. Maloney est très pertinente. Je ne pense pas qu'il nous faille inviter le ministre chaque fois que nous avons un problème. Nous pouvons sûrement demander aux fonctionnaires de venir nous faire rapport de la situation, mais je pense que c'est un peu exagéré d'inviter toutes les deux semaines le ministre à venir nous rencontrer.

    Concernant ce qui a été fait jusqu'ici, je crois comprendre que le ministre a pris un certain nombre de mesures. Je sais aussi qu'il est prêt à pleinement donner suite à l'intention de ces recommandations. Je n'aurais pas d'objection à demander un rapport de la situation et à inviter les fonctionnaires à venir nous expliquer où nous en sommes mais, étant donné que le ministre est en voie de donner suite aux recommandations, je pense que le moment est mal choisi pour l'inviter, surtout qu'il vient à peine de nous rencontrer au sujet du budget des dépenses. Comme nous le savons tous, le processus budgétaire permet de poser des questions d'ordre général et pas seulement de nature financière, et on aurait alors pu aborder la question.

    Je proposerais donc de modifier la motion en supprimant les mots «le solliciteur général» et en ajoutant que les fonctionnaires présentent un rapport d'étape en juin, avant l'ajournement de la Chambre, pour que nous puissions savoir exactement où nous en sommes.

+-

    Le président: Donc, dois-je considérer...

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je suis prêt à proposer de supprimer les mots «le solliciteur général» de la motion et à ajouter, après le mot «comité», à la ligne 6, «d'ici juin 2002».

+-

    Le président: Il y a une différence entre «d'ici juin 2002» et «d'ici la fin de la présente session».

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je présume que ce serait pendant que la Chambre siège.

+-

    Le président: Ce serait donc d'ici la fin de mai, n'est-ce pas?

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je pense que c'est d'ici juin.

+-

    Le président: Que voulez-vous dire? Je ne suis pas sûr. En juin?

+-

    M. Paul Harold Macklin: Avant l'ajournement de la Chambre pour le congé d'été.

+-

    Le président: D'accord.

    On a donc proposé un amendement pour ne pas convoquer le solliciteur général, et nous avons précisé que nous voulons que cela se fasse avant l'ajournement de la Chambre.

    Nous allons maintenant donner la parole à M. Lanctôt, M. Toews et M. Maloney.

    Monsieur Lanctôt.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: J'ai une suggestion qui pourrait faire l'affaire de l'Alliance canadienne. J'aimerais qu'on fixe une date. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas dire que cela devrait avoir lieu d'ici la fin mai. On peut difficilement parler de la date de l'ajournement parce qu'on entend plein de rumeurs. On ne sait pas à quel moment on finira. Est-ce que ce sera le 7, le 14 ou le 3? Donc, si on parlait de la fin mai, je pense que ce serait un délai raisonnable.

»  +-(1710)  

[Traduction]

+-

    Le président: Cette date ne convient pas tellement, à mon avis, et je vais essayer que cela se fasse le plus tôt possible. Je pense que nous voulons une échéance, ce qui ne me laisse pas beaucoup de choix.

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: Je tiens particulièrement à ce qu'on respecte l'intégrité du système des comités. Comme mon collègue M. Sorenson l'a signalé, ce n'était pas un rapport de l'opposition, mais du comité. Je crois que M. Grose a approuvé le rapport et je suis convaincu qu'il veut savoir, en tant que membre du comité, où en est la question.

    Je peux approuver la modification proposée pour faire supprimer les mots «le solliciteur général» et ajouter, à la fin de la motion, quelque chose qui dirait que ce serait fait «avant l'ajournement de la Chambre en juin 2002». Je tiens cependant à laisser la porte ouverte, comme nous l'avons fait hier, pour qu'il soit possible de convoquer le ministre si le rapport n'est pas satisfaisant. Je ne préciserai pas la date de la comparution du ministre, mais je pense qu'il faut nous laisser des choix pour ne pas compromettre l'intégrité du système des comités, au cas où les fonctionnaires nous diraient, par exemple, qu'ils sont prêts à agir, mais que le ministre ne semble pas déterminé à ce sujet; je ne dis pas que c'est ce qui se passerait, mais au cas où.

+-

    Le président: Il va l'être à ce moment-là.

    Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney: Je ne suis pas en désaccord avec la proposition de M. Sorenson, mais je ne suis pas entièrement convaincu de l'urgence de la situation. Je pensais que notre programme allait nous occuper pour le reste de l'année. Notre programme est-il complet? Allons-nous laisser tomber un dossier ou allons-nous prévoir des réunions supplémentaires? Je ne voudrais pas être critiqué pour ne pas avoir fait quelque chose que nous étions censés faire.

+-

    Le président: Je vous remercie de me donner l'occasion de parler de cela. Dès que nous en aurons fini avec cette question, nous allons examiner un instant nos travaux.

    Essentiellement, notre programme est complet mais, comme vous le savez, nous avons essayé de ne pas prévoir de séances le mardi après-midi en raison de la réunion des leaders à la Chambre. Si, au bout du compte, nous devons apporter certains changements, je pense que ce sera possible sans que nous ayons à laisser tomber quoi que ce soit, parce que notre horaire hebdomadaire nous le permet, et nous allons pouvoir nous arranger. Par exemple, normalement, nous ne nous réunissons pas le jeudi après-midi, mais nous allons le faire demain pour entendre M. Cauchon nous parler de son budget. Ce sont des changements du genre que nous devrons faire.

    Monsieur Grose.

+-

    M. Ivan Grose: Je serai bref, comme d'habitude.

    Monsieur Sorenson, vous avez parlé de déplacements très coûteux dans le pays. Il est évident que vous n'étiez pas du voyage. Cela n'a pas coûté très cher.

    Pour être bien honnête avec vous, je veux aussi savoir ce qui se passe. Je pense que nous sommes tous d'accord, sauf pour ce qui est du solliciteur, pour au moins commencer à fouiller la question. Je veux savoir ce qui est advenu du rapport et pourquoi on n'y a pas donné suite; commençons d'abord par cela avant de chercher un coupable.

+-

    Le président: D'accord. Nous allons d'abord nous prononcer sur l'amendement, qui propose essentiellement de ne pas inviter le solliciteur général pour l'instant.

»  +-(1715)  

+-

    M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Voulez-vous reprendre cela?

+-

    Le président: J'ai une certaine expérience de l'exclusion des solliciteurs généraux. Ce n'est pas agréable.

    Donc, nous n'allons pas inviter le solliciteur général, et nous allons donner suite à la proposition d'ici l'ajournement de la Chambre en juin.

    (L'amendement est adopté)

    (La motion ainsi modifiée est adoptée)

    Le président: Je tiens à préciser que cela n'empêche en rien le comité de vouloir inviter le ministre à comparaître par la suite. Ce sera au comité d'en décider plus tard.

    Avant que trop de gens ne partent, j'aurais quelques questions à régler. Je ne pense qu'il soit nécessaire de siéger à huis clos. Nous allons continuer.

    D'abord, un des fonctionnaires qui a comparu sur la question des troubles mentaux nous demande de nous accompagner à Toronto quand nous irons visiter le tribunal sur les troubles mentaux. Quelqu'un a-t-il des objections à ce qu'un représentant du ministère...

+-

    M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Qui est-ce?

+-

    Le président: Greg Yost du ministère de la Justice veut participer à ce voyage.

+-

    M. Chuck Cadman: À condition qu'il paie ses dépenses.

+-

    Le président: Je considère donc qu'il n'y a pas de problème. Le comité ne peut pas payer ses dépenses de toute façon. Il ne paie même pas les miennes. Non, je blague. Donc, M. Yost va nous accompagner.

    Il y aura des mises aux voix à la Chambre mardi, et aussi l'assermentation de quelques nouveaux députés. Le greffier m'a donc judicieusement demandé de vous le signaler, sans présumer de l'intérêt des gens. Nous pourrions évidemment renégocier la date avec le juge Ormston, ou faire comme prévu. Je précise que les leaders à la Chambre ont approuvé la demande de fonds et qu'ils savent ce que nous faisons. Si personne n'a d'objection, je propose que nous fassions comme prévu à moins que les leaders à la Chambre ne soient plus d'accord, ce sur quoi nous n'avons aucune influence de toute façon. Avez-vous des objections? D'accord, nous allons faire comme prévu le 21 mai.

    Au départ, nous voulions commencer l'étude du rapport sur les troubles mentaux d'ici la fin de mai. J'aimerais savoir s'il est possible de la reporter en juin, seulement parce que la charge de travail des attachés de recherche est assez lourde. Je ne voulais simplement pas laisser croire que nous changeons nos plans. Nous allons probablement avoir besoin de deux ou trois semaines de plus, si vous n'avez pas d'objection, pour préparer l'ébauche de notre rapport.

    Voici ce que je proposerais, si vous le voulez bien. Nous ne pourrons probablement pas présenter une réponse détaillée ce printemps, et cela dépend non pas du comité mais de tout le travail que chacun de nous a à accomplir. Pour la produire, nous devrons probablement attendre à l'automne. Cependant, je pense qu'il serait peut-être raisonnable de déposer un rapport en juin avec des recommandations. Le personnel est d'avis que nous pourrions probablement le faire. Nous pourrions déposer un rapport en juin qui obligerait le gouvernement à répondre à nos recommandations, mais il ne serait pas aussi détaillé que celui que nous pourrions présenter à la fin d'octobre. Nous savons tous qu'il est possible que la Chambre proroge ses travaux durant l'été ou au début de l'automne, et j'aimerais vraiment que le comité produise un rapport, même s'il n'est pas aussi détaillé que nous l'aimerions. Toutefois, si, à l'automne, les travaux n'ont pas été prorogés, et que notre comité existe toujours, nous pourrions le compléter. Nous aurions toujours cette possibilité à l'automne.

    Monsieur McKay.

+-

    M. John McKay: S'agirait-il d'un rapport provisoire?

+-

    Le président: Ce serait un rapport provisoire, mais il faudrait préciser que nous voulons que le gouvernement y réponde, et il faudrait voter là-dessus. Ainsi, si nous ne le complétons pas, le gouvernement est tenu de répondre. Si nous avons la possibilité de le compléter à l'automne, nous pourrons le faire et présenter notre rapport final, ce qui dégagerait le gouvernement de l'obligation de répondre.

    Monsieur McKay.

»  +-(1720)  

+-

    M. John McKay: Votre proposition paraît ne comporter aucun inconvénient.

+-

    Le président: Je le pense. S'il y en avait, brillants comme nous le sommes, nous les découvririons.

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: Je n'ai aucune objection à accepter cette proposition. Je pense qu'elle est raisonnable. Pour l'instant, je n'y vois aucun inconvénient.

+-

    Le président: Nous voulions entendre d'autres témoins au sujet de la teneur du projet de loi C-284. Étant donné que nous repoussons le rapport, nous aurions le temps de le faire. Nous voulons aussi donner suite à la motion que nous venons d'adopter, ce qui demandera un peu de temps. Il nous faudra prévoir une autre réunion pour la réponse à la demande faite par M. McKay hier. J'inviterais aussi peut-être certains des témoins proposés sur la teneur du projet de loi C-284, à propos de la mine Westray.

    Il n'y a pas d'objection; alors, c'est réglé.

    On vient aussi de nous renvoyer un nouveau projet de loi, le projet de loi C-400 de Bob Mills. Je pense que nous en avons été saisis de façon assez urgente. Comptons-nous l'étudier de façon tout aussi urgence?

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: Nous considérons que c'est une question urgente et, comme nous avons le généreux appui des députés libéraux et de tous les partis de l'opposition, je pense, nous devrions aller de l'avant, à mon avis.

+-

    Le président: D'accord. Nous allons suivre cette recommandation.

    Monsieur Macklin.

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je ferais une petite mise en garde, pour nous assurer d'interroger tous les témoins nécessaires sans précipiter les choses. L'idée est bonne et il faut essayer de bien la développer, mais cela peut nous demander plus de travail que nous pensons.

+-

    Le président: Il est certain que nous allons entendre des témoins, puisque cela fait partie du processus, mais nous commencerions rapidement.

+-

    M. Paul Harold Macklin: Pour commencer, ça va.

+-

    Le président: Enfin, la motion de M. MacKay fera en sorte que le comité va recevoir un rapport de deux pages. Allons-nous nous contenter de le recevoir ou voulons-nous convoquer un fonctionnaire du ministère pour répondre à nos questions? Les fonctionnaires ne peuvent répondre à toutes les questions, mais il peut y avoir des questions d'ordre technique, comme pourquoi le rapport est ainsi libellé.

    Monsieur Cadman.

+-

    M. Chuck Cadman: Je pense que nous aimerions d'abord en prendre connaissance, plutôt que d'inviter un fonctionnaire à venir nous le remettre. C'est ce que je préférerais.

+-

    Le président: Nous allons donc d'abord en prendre connaissance, puis nous déciderons.

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: On semble reléguer au second plan la question des condamnations avec sursis. Notre comité est obligé de se pencher sur ce dossier. Je me demande si vous pourriez nous faire part de vos réflexions générales à ce sujet, monsieur le président?

+-

    Le président: Je vous remercie de l'invitation.

    Depuis que je suis président, il y a probablement eu quatre ou cinq réunions au cours desquelles il a été question de notre plan de travail. En général, nous étions d'accord avec les décisions qui ont été prises, et le moment est probablement venu de réexaminer la chose. Les choix sont simples. Nous pourrions commencer cette étude avant la fin de juin. Je pense que nous pourrions y consacrer une réunion et inviter des fonctionnaires. Par contre, il faut se demander combien de dossiers nous voulons examiner en même temps. Nous aurions l'étude sur les troubles mentaux, celle sur la mine Westray, l'examen de l'ADRC—et nous ne savons pas à quoi nous attendre, franchement; cela nous en fait beaucoup—et il y a le projet de loi C-400.

+-

    M. Vic Toews: L'ancienne ministre de la Justice avait-elle promis de respecter un échéancier précis? Si oui, je pense que c'est assez urgent. Sinon, je n'aurais pas d'objection à amorcer l'étude pour pouvoir recevoir les rapports des fonctionnaires. Nous aurions ainsi la possibilité de les examiner sans monopoliser le temps du comité.

»  -(1725)  

+-

    Le président: La ministre n'est plus en cause d'une certaine façon, étant donné qu'elle nous a écrit pour nous confier l'étude et nous lui avons indiqué, lors de nos rencontres, que nous acceptions de faire cette étude, mais que nous avions autre chose à faire avant. La dernière fois, c'était quand nous avons décidé d'examiner la question des troubles mentaux, parce que c'était prévu par la loi. Voilà une autre occasion parmi tant d'autres, et M. Toews propose que nous prenions, d'ici la fin de juin, une journée pour commencer l'étude des condamnations avec sursis.

+-

    M. Vic Toews: Ne serait-ce que pour recevoir un rapport, pas pour interroger des témoins. Je veux simplement savoir si le ministère s'est penché sur la question. La ministre nous a demandé d'étudier le dossier, et je suis convaincu qu'elle ne l'aurait pas fait sans l'aide de ses collaborateurs.

+-

    Le président: Monsieur McKay.

+-

    M. John McKay: Je comprends les préoccupations de M. Toews, mais il y a quatre ou cinq sujets au programme, et commencer quelque chose pour arrêter pendant l'été est inutile, à mon avis. Nous pourrions commencer cette étude à notre retour, qu'il y ait prorogation ou non.

-

    Le président: Monsieur Toews, il faut dire aussi que, si nous entreprenons cette étude maintenant, on devra nous rafraîchir la mémoire à l'automne de toute façon.

    Nous allons poursuivre nos travaux à huis clos. La séance est levée.

    [Note de la rédaction: La séance se poursuit à huit clos]