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PACC Rapport du Comité

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Armoiries parlementaires

CHAMBRE DES COMMUNES
CANADA

 


Introduction
Observations et Recommandations
Conclusion


AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADA

 

Conformément à l’alinéa 108(3)e) du Règlement, le Comité permanent des comptes publics a l’honneur de présenter son

QUATORZIÈME RAPPORT

Le Comité permanent des comptes publics a étudié les chapitres 35 et 36 du Rapport du vérificateur général du Canada de décembre 1997 (Suivi des recommandations formulées dans des rapports antérieurs — Affaires indiennes et du Nord Canada — Les immobilisations et leur entretien dans les réserves — 1995, chapitre 23; Autres observations de vérification — L’escalade des coûts d’un projet d’approvisionnement en eau dans une réserve n’a pas été justifiée de façon satisfaisante et l’absence de conformité à une entente de financement) et a adopté le rapport suivant :

 

INTRODUCTION

Les immobilisations et leur entretien dans les réserves est un élément du Programme des affaires indiennes et inuit administré par Affaires indiennes et du Nord Canada (le Ministère). Celui-ci fournit des fonds et un appui aux collectivités indiennes et inuit afin de leur permettre d’acquérir, d’exploiter et d’entretenir des installations de base autres que résidentielles, d’un bout à l’autre du Canada. Le budget alloué à cette activité s’élevait à 806 millions de dollars en 1997-1998.

Au chapitre 23 de son rapport de novembre 1995, le vérificateur général présente les résultats de sa vérification de la gestion par le Ministère de l’activité des immobilisations et de l’entretien dans les réserves. À l’époque, il notait que le Ministère avait délégué aux collectivités des Premières nations la responsabilité de mener à bien cette activité. Le vérificateur général faisait observer que le Ministère n’avait pas établi d’objectifs ni de contrôles pour les secteurs à risque élevé, et recommandait une série de mesures correctives. Dans sa réponse, le Ministère se disait d’accord avec les observations de vérification et faisait part de sa volonté de prendre les mesures nécessaires. Le Ministère a d’ailleurs réitéré ses engagements un peu plus en détail dans une lettre envoyée au Comité permanent des comptes publics au cours de l’été 1996.

Comme le veut le cycle de vérification normal, le vérificateur général a examiné les mesures prises par le Ministère deux ans après la publication des constatations formulées au terme de la vérification initiale et a présenté ses conclusions aux chapitres 35 et 36 de son rapport de décembre 1997.

Le Comité trouve important de s’attarder aux conclusions des examens de suivi effectués par le vérificateur général. Dans ce cas-ci, étant donné l’importance de cette activité pour les collectivités des Premières nations et son coût, le Comité a décidé de se pencher sur les conclusions du suivi. Le 10 mars 1998, il a donc rencontré M. Denis Desautels, vérificateur général du Canada, et M. Grant Wilson, directeur principal, Opérations de vérification, du Bureau du vérificateur général; ainsi que M. Scott Serson, sous-ministre, et Mme Cynthia Williams, sous-ministre adjointe, Secteur des politiques et des programmes socio-économiques et de la restructuration des programmes, qui ont comparu au nom d’Affaires indiennes et du Nord Canada.

 

OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS

À la suite de son examen des mesures prises en réponse à sa vérification de 1995, le vérificateur général signale que le Ministère a fait porter la plus grande partie de ses efforts sur les études et les examens internes. Les résultats effectifs sont décevants. Au chapitre des projets d’immobilisations, le vérificateur général constate qu’il n’y a eu « aucune amélioration importante par rapport à nos principales constatations de 1995 » (35.248). Il souligne que des améliorations s’imposent toujours dans des secteurs comme l’évaluation des risques des projets, la surveillance, les rapports d’achèvement des travaux et l’évaluation des résultats. En ce qui a trait à l’entretien, le vérificateur général signale que bon nombre de problèmes fondamentaux n’ont toujours pas été résolus. Il fait, par exemple, état des conclusions d’une évaluation effectuée par le Ministère en 1997, selon lesquelles certaines Premières nations n’ont pas la formation ni le savoir-faire pour entretenir les immobilisations. Aucune mesure n’est prise pour inciter les Premières nations à entretenir convenablement les immobilisations et certaines ententes de financement ne comportent aucune exigence quant à l’établissement de plans d’entretien. Le vérificateur général souligne aussi que bien que la responsabilité de l’entretien soit dévolue aux Premières nations, toutes n’ont pas la capacité nécessaire pour faire l’inventaire de leurs besoins en matière d’entretien, comme l’exige le Ministère.

En juin 1997, le Ministère a publié un projet de lignes directrices en matière de conformité pour l’exploitation et l’entretien des immobilisations dans les réserves. Les lignes directrices sont censées faire en sorte que les fonds d’entretien soient utilisés aux fins prévues, que l’état des immobilisations soit évalué une fois l’an et que des mesures soient prises au besoin, et que des avis et de l’aide en matière d’entretien soient fournis aux Premières nations. Le Ministère s’attend à ce que leur mise en oeuvre soit tout à fait terminée d’ici 1998-1999.

Dans sa réponse aux observations du vérificateur général, le sous-ministre Scott Serson a fait savoir au Comité que « des progrès considérables ont été réalisés quant à chacune des cinq recommandations du vérificateur général » et que « plusieurs initiatives sont en cours » et nous [le Ministère] prévoyons qu’elles seront entièrement mises en oeuvre au cours des prochaines semaines » (1545). Plus tard au cours de son témoignage, il a convenu de fournir au Comité une liste des initiatives prises par le Ministère et des échéances fixées pour leur mise en oeuvre.

Le Comité reconnaît que le Ministère éprouve certaines difficultés à effectuer des changements dans ce secteur. Il est toutefois fermement convaincu qu’un effort plus concerté de sa part aurait considérablement réduit les problèmes relevés lors de l’examen de suivi. Le Comité se réjouit donc de l’engagement du Ministère à pleinement mettre en oeuvre --- bien qu’avec un peu de retard --- toutes les recommandations du vérificateur général à très brève échéance. Au début de juin, M. Serson a fait savoir au Comité dans une lettre que le Ministère avait maintenant adopté des mesures pour donner suite aux recommandations formulées par le vérificateur général dans son rapport de 1995. Toutefois, étant donné les antécédents du Ministère, le Comité exigera des garanties concrètes quant au respect de ces engagements et à l’obtention des résultats souhaités. En conséquence, le Comité recommande:

Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada fasse tout en son pouvoir pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixé en ce qui concerne la mise en oeuvre des recommandations contenues dans le chapitre 23 du Rapport du vérificateur général du Canada de 1995;

Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada surveille la mise en oeuvre des recommandations contenues dans le chapitre 23 du Rapport du vérificateur général du Canada de 1995 et fasse rapport au Comité des résultats d’ici le 30 septembre 1998; et

Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada fasse régulièrement état de sa gestion de l’activité des immobilisations et de l’entretien dans les réserves dans ses Rapports sur le rendement à la Chambre des communes. L’accent doit alors être mis sur les résultats obtenus par suite des dépenses effectuées à ce titre.

L’examen de suivi met en lumière deux cas qui, aux dires du vérificateur général, sont « représentatifs de certaines des difficultés liées au développement de l’infrastructure dans les réserves » (1545). Ces cas ne sont pas uniques puisque, comme le confirme M. Wilson, des exemples semblables peuvent être relevés dans d’autres situations (1630).

Dans le premier cas, le Ministère avait donné son approbation préliminaire pour un nouveau projet d’approvisionnement en eau d’un million de dollars. En avril 1997, les coûts estimatifs avaient grimpé à 2,3 millions de dollars.

Le Ministère savait toutefois que le système d’approvisionnement en eau existant pouvait être réparé moyennant un coût approximatif de 26 000 $. Cette solution aurait permis d’éviter d’avoir à lancer un projet d’infrastructure. Aux dires du vérificateur général, elle n’a toutefois pas reçu toute la considération voulue. Celui-ci constate en outre que même si le Ministère avait versé 30 000 $ à la collectivité en question pour mettre en oeuvre la solution la moins coûteuse, « il n’était pas en mesure de démontrer quelles améliorations avaient été apportées grâce à ces fonds » (36.37). Dans son témoignage devant le Comité, le sous-ministre n’était pas prêt à affirmer que les fonds dépensés par le Ministère dans ce cas-ci avaient été optimisés (1645). Cet exemple démontre que le Ministère doit se montrer plus vigilant au chapitre de l’optimisation des ressources, de la surveillance des projets et de l’évaluation des résultats.

Dans le deuxième cas, le vérificateur général a constaté que le Ministère avait approuvé un projet de 8,9 millions de dollars pour la construction d’une infrastructure par une Première nation sans faire d’appel d’offres; ce qui va nettement à l’encontre de l’entente de financement conclue entre le Ministère et la Première nation, en vertu de laquelle tous les projets de construction doivent faire l’objet d’un appel d’offres. Le vérificateur général a indiqué au Comité que « des surcoûts allant jusqu’à un million de dollars pourraient avoir été engagés, donnant lieu à des avantages discutables » (1545).

M. Serson a fait savoir au Comité que le Ministère avait mis en oeuvre une politique pour obliger les Premières nations à procéder à des appel d’offres publics pour tous les marchés, financés par le gouvernement fédéral, d’une valeur de plus de 500 000 $. Toutefois, plutôt que de rassurer le Comité quant à la volonté du Ministère de faire en sorte que ce genre de situation ne se reproduise plus dans l’avenir, ces propos soulèvent d’autres préoccupations. Le Comité prend note de ce qui suit :

  • Le Ministère a conclu une entente de financement qui oblige à procéder par appel d’offres, mais il ne l’applique pas. Il a au contraire permis qu’un contrat de 8,9 millions de dollars soit accordé sans appel d’offres.
  • La décision de ne pas appliquer l’exigence relative aux appels d’offres a été prise au niveau régional et n’a pas fait l’objet d’un examen de la part de la haute direction du Ministère.
  • Au cours de son témoignage, le sous-ministre a fait savoir que le Ministère essayait « d’encourager une certaine créativité et une certaine souplesse » de la part de ses bureaux régionaux en ce qui a trait à l’application des politiques d’adjudication (1645).
  • Le vérificateur général signale que les Premières nations ne sont pas toutes d’accord sur la question de savoir si le choix des entrepreneurs en construction doit se faire par voie d’appel d’offres (35.249).
  • Ensemble, ces facteurs tendent à démontrer hors de tout doute que le Ministère peut avoir du mal à faire observer ses politiques d’adjudication.

    Le seuil à partir duquel les projets doivent faire l’objet d’un appel d’offres, que le Ministère a fixé à 500 000 $, constitue un autre sujet de préoccupation. Comme l’a indiqué à maintes reprises le vérificateur général, ce seuil est très élevé et est supérieur à celui applicables aux ministères et organismes fédéraux lorsqu’ils accordent des contrats de construction et d’entretien. Le Comité souscrit à cette préoccupation; les affirmations de Mme Williams à l’effet que le Ministère n’essaie pas de dissuader les Premières nations de procéder par appel d’offres pour des projets évalués à moins de 500 000 $ (1635) ne sont guère rassurantes.

    Le Comité est fermement convaincu que l’octroi de contrats de construction d’immobilisations et d’entretien doit se faire selon des règles clairement définies et connues. Les situations justifiant une modification de ces règles devraient être extrêmement rares et faire l’objet de lignes directrices strictes et d’un examen de la part de la haute direction du Ministère.

    Les règles applicables aux ministères et organismes fédéraux, notamment aux Affaires indiennes et du Nord Canada, lors de l’octroi de contrats sont énoncées dans la Politique sur les marchés du Secrétariat du Conseil du Trésor. Ces règles et les principes qu’elles sous-tendent, contrastent manifestement avec la politique du Ministère en ce qui a trait aux projets de construction financés par le gouvernement fédéral.

    L’objectif de la Politique sur les marchés est de permettre l’exécution de travaux de construction, d’une manière « qui contribue à accroître l’accès, la concurrence et l’équité, qui soit la plus rentable ou, le cas échéant, la plus conforme aux intérêts... ». La politique stipule que les marchés publics doivent être organisés de façon à « résister à l’examen du public au chapitre de la prudence et de l’intégrité, faciliter l’accès, encourager la concurrence et constituer une dépense équitable de fonds publics » et « favoriser le développement industriel et régional à long terme et les autres objectifs nationaux pertinents, incluant les objectifs de développement économique autochtones ».

    En vertu de ces règles, tous les projets évalués à 25 000 $ ou plus doivent faire l’objet d’un appel d’offres public.

    Le Comité est d’avis quels règles régissant les politiques d’adjudication des Premières nations en ce qui a trait aux projets d’immobilisations financés par le gouvernement fédéral doivent être semblables à celles auxquelles le Ministère est lui-même assujetti lorsqu’il octroie des contrats de construction. Le Comité recommande donc : 

    Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada modifie sans délai sa politique en ce qui a trait aux contrats de construction dans les réserves financés par le gouvernement fédéral pour y préciser que tous les contrats doivent respecter les lignes directrices établies par le Secrétariat du Conseil du Trésor en matière d’appel d’offres public.

    Même s’il préférerait que cette politique soit rigoureusement appliquée, le Comité reconnaît que dans certaines circonstances, il faudra laisser une certaine marge de manoeuvre. Toute dérogation à cette politique doit toutefois respecter des critères clairement établis et faire l’objet d’un examen. Le Comité recommande donc :

    Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada établisse des critères stricts et précis en ce qui a trait aux dérogations à sa politique relative aux contrats de construction financés par le gouvernement fédéral;

    Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada exige que les dérogations à sa politique relative aux contrats de construction financés par le gouvernement fédéral fasse l’objet d’un examen et d’une approbation préalable de la part du sous-ministre adjoint; et

    Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada fasse rapport au Parlement du Canada dans son Rapport sur le rendement des cas de dérogation à sa politique relative aux contrats de construction financés par le gouvernement fédéral et en explique les raisons.

    Le Comité s’inquiète aussi des possibilités de fractionnement des projets ou des marchés. Même si le vérificateur général a indiqué au Comité qu’il n’avait pas relevé de cas semblable au cours de sa vérification (1655), le Comité estime nécessaire de prévoir des mesures pour gérer ce risque particulier. Il s’inquiète aussi de ce que l’octroi sans appel d’offres de marchés à des fournisseurs exclusifs puisse ne profiter qu’à un petit nombre d’entrepreneurs. Il recommande donc :

    Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada surveille étroitement le processus d’adjudication pour tous les projets de constructions dans les réserves financés par le gouvernement fédéral, quelle qu’en soit la valeur, et qu’il travaille en étroite collaboration avec les collectivités des Premières nations pour favoriser l’accès, la concurrence, l’équité et la transparence, et faire en sorte que les projets soient les plus rentables ou, le cas échéant, les plus conformes possible aux intérêts généraux en ce qui a trait aux résultats.

     

    CONCLUSION

    Le Comité est déçu des conclusions de l’examen de suivi. Les mesures prises par le Ministère en réponse à la vérification initiale sont insuffisantes et lentes. Les deux cas relevés lors du suivi en sont la preuve.

    Le Comité s’attend maintenant à ce que le Ministère fasse tout en son pouvoir pour remédier aux problèmes relevés par le vérificateur général il y a déjà quelque temps. Les mesures prises à la suite de ces recommandations et de celles du Comité devraient assurer une bonne gestion des immobilisations et de leur entretien dans les réserves et permettre à ceux qui habitent au sein des collectivités des Premières nations de pleinement profiter de cette activité de première importance.

    Conformément à l’article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le Comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale au présent rapport.

    Une copie des Procès-verbaux pertinents (réunions nos 21 et 38 ) est déposée.

    Respectueusement soumis,

    Le président,

     

     

     

    JOHN WILLIAMS