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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie et de la technologie


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
45e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 1er octobre 2025

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Traduction]

    Bonjour à tous. J'espère que vous avez passé une bonne semaine jusqu'à présent. Je suis désolé que nous ayons une minute de retard. Je viens d'apprendre une grande leçon. Il ne faut pas rappeler un électeur 25 minutes avant le début d'une réunion de comité, parce que vous risquez de ne pas arriver à temps.

[Français]

    J'espère que tous les députés ont passé quelques jours agréables dans leur circonscription.

[Traduction]

    Il s'agit de la cinquième réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
    Je rappelle à mes collègues et à nos témoins que les casques d'écoute sont destinés à l'interprétation. S'ils ne sont pas branchés, ils peuvent être n'importe où. Cependant, s'ils sont branchés, mais qu'ils ne sont pas sur votre oreille, nous vous demandons simplement de les déposer sur les autocollants devant vous. L'objectif est de protéger la santé, la sécurité et le bien-être de nos interprètes, qui travaillent très fort pour nous.
    Chers collègues, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous avons tout récemment adopté une motion, le 22 septembre, pour faire l'étude d'une stratégie industrielle de défense au Canada., et il s'agit de notre toute première réunion sur le sujet. Nous avons eu une bonne conversation sur la productivité la semaine dernière.
    Nous accueillons aujourd'hui quelques fonctionnaires. Nous recevons Mme Kendal Hembroff, sous-ministre adjointe déléguée du ministère de l'Industrie, qui se joint à nous par vidéoconférence. Nous avons les représentants du ministère de la Défense nationale: Mme Wendy Hadwen, sous-ministre adjointe de Politiques-Industrie, et le major-général Jeff Smyth, chef d'état-major du Développement de la Force aérienne et spatiale à l'Aviation royale canadienne.
    Mesdames Hadwen et Hembroff, je crois que vous parlerez au nom de vos ministères respectifs. Nous vous accorderons donc un maximum de cinq minutes chacune, dans la langue de votre choix. Nous passerons ensuite aux questions des députés à la table. Nous commencerons par les conservateurs, puis nous poursuivrons à tour de rôle.
    Puisque des membres des forces armées en uniforme et en civil sont présents, je veux simplement profiter de l'occasion — en mon nom, en tant que député, et au nom de tout le monde à la table — pour vous remercier sincèrement du service que vous avez rendu à notre pays.
    Sur ce, je cède la parole à Mme Hembroff pour sa déclaration préliminaire.
    Je suis vraiment désolée de ne pas être présente en personne avec vous tous cet après-midi, mais j'ai malheureusement eu un incident il y a quelques semaines, de sorte que je suis en béquilles. Je suis quand même très heureuse de vous donner le point de vue d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada sur la stratégie industrielle de défense.
    Les dépenses prévues en matière de défense représentent une occasion historique d'investir dans l'industrie et l'économie de la défense au Canada alors que de nombreux secteurs manufacturiers au pays rencontrent des défis sans précédent. En 2022, l'industrie canadienne de la défense comptait plus de 620 entreprises, qui ont rapporté plus de 9,6 milliards de dollars au PIB et créé 81 200 emplois dans l'économie canadienne.
    L'industrie canadienne de la défense est à la fine pointe de la technologie, et notre secteur de la défense est un moteur d'innovation, puisqu'il investit plus de trois fois plus en recherche et développement que le secteur manufacturier. Outre ses capacités de calibre mondial dans la conception et la fabrication d'aéronefs commerciaux, le Canada dispose également de solides capacités en matière d'entretien, de réparation et de révision, de systèmes d'instruction et de simulation, de systèmes aériens sans pilote, d'observation de la Terre, de robotique spatiale, de véhicules de combat terrestre, de munitions, de construction navale, de technologies sonar et plus encore. Le Canada a également des capacités établies et émergentes dans des domaines à double usage comme l'intelligence artificielle, le cyberespace, la quantique, la biofabrication et les minéraux critiques.
(1635)

[Français]

    Comme vous le savez, le gouvernement s'est engagé à publier plus tard cette année une stratégie industrielle de défense visant à renforcer notre capacité industrielle nationale, afin de répondre aux besoins des Forces armées canadiennes et à ceux de nos alliés. Notre objectif est de réduire la dépendance de longue date du Canada à l'égard de fournisseurs étrangers en mettant à profit les secteurs traditionnel, commercial et à double usage de la défense pour répondre, dans la mesure du possible, aux besoins des Forces armées canadiennes. Cet objectif nécessitera des investissements ciblés en fonction de priorités industrielles clés en matière de défense, ainsi que l'utilisation de l'approvisionnement fédéral pour renforcer la capacité industrielle à l'aide de divers outils. Le marché intérieur canadien est assez restreint. C'est pourquoi nous nous engageons également à créer une industrie bien positionnée pour saisir les occasions d'exportation.

[Traduction]

    La stratégie industrielle de défense, ou SID, n'est pas encore finalisée, mais Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ou ISDE, et le ministère de la Défense nationale travaillent ensemble pour faire avancer ce dossier. Nous en saurons plus au cours des prochains mois, mais d'ici là, monsieur le président, je me ferai un plaisir de discuter de certains des éléments constitutifs d'une stratégie plus complète.
    ISDE est bien placé pour jouer un rôle de premier plan dans l'élaboration et la mise en œuvre de la stratégie industrielle de défense, ou SID. D'ailleurs, la ministre de l'Industrie a discuté publiquement de sa vision de la stratégie, en parlant d'acquérir, de construire et de s'associer. Ainsi, il faut tirer parti du pouvoir d'achat gouvernemental pour créer des retombées tout au long de la chaîne d'approvisionnement, renforcer la capacité industrielle du Canada dans des domaines clés et instaurer une collaboration stratégique avec des alliés internationaux.
    Comme vous le savez peut-être, depuis la fin des années 1950, ISDE a offert divers programmes pour financer des entreprises pour des activités civiles et en défense. Aujourd'hui, le ministère dispose d'un certain nombre de programmes, comme le Fonds de réponse stratégique, Solutions innovatrices Canada et le programme des Grappes d'innovation mondiales, qui favorisent le développement et la commercialisation de technologies dans l'ensemble de l'économie industrielle, y compris la défense. Il est possible de tirer parti des programmes d'innovation existants à court terme pour verser rapidement des fonds à l'industrie canadienne.
    Toujours dans le portefeuille de mon ministère, le Conseil national de recherches du Canada, ou CNRC, est un partenaire clé de l'industrie canadienne qui aide à faire le pont entre les nouvelles technologies et le marché grâce à des initiatives comme le Programme d'aide à la recherche industrielle. Nous examinons les façons dont le CNRC, avec ses installations d'essai et de recherche de calibre mondial, peut jouer un plus grand rôle dans le soutien à la défense.
    Je tiens également à souligner le rôle que les agences de développement régional peuvent jouer pour soutenir le développement et l'intégration des entreprises, principalement des PME, dans les chaînes d'approvisionnement de la défense. Parmi nos outils, nous avons la Stratégie nationale de construction navale qui, depuis 2010, contribue au rétablissement de nos chantiers navals, à la reconstruction de notre industrie maritime et à la création d'emplois durables au Canada.
    Le Canada a également une politique de compensation, soit la Politique des retombées industrielles et technologiques, ou RIT. En vertu de cette politique, les entreprises qui se voient attribuer des marchés d'approvisionnement en matière de défense ou pour la Garde côtière canadienne sont tenues de mener des activités commerciales au Canada, dont la valeur équivaut à celle du marché. On estime qu'elle a apporté environ 4,7 milliards de dollars au PIB du Canada et créé plus de 40 000 emplois par année au pays. Bon nombre des entreprises dans les domaines de la défense, l'aérospatiale et la marine qui connaissent le plus de succès au Canada ont bénéficié de cette politique, y compris CAE, MDA Space, Héroux-Devtek, IMP, PAL Aerospace et Genoa Design.
    Le dernier point que j'aimerais soulever, c'est qu'une stratégie industrielle de défense doit englober l'approvisionnement, qui est notre outil le plus puissant. Les entreprises de défense canadiennes ont indiqué que la première chose que le gouvernement peut faire pour soutenir leur croissance, c'est que les Forces armées canadiennes achètent auprès de l'industrie canadienne. Nous examinons donc des façons d'améliorer le processus d'approvisionnement et de veiller à ce que l'industrie canadienne participe dès le début.
    En conclusion, et avant de céder la parole à ma collègue, Mme Hadwen, la future SID fera en sorte que nos investissements historiques favorisent l'établissement et le maintien de l'industrie de la défense au pays pour répondre aux besoins des FAC et de nos alliés, tout en stimulant la croissance économique, la résilience et l'innovation dans l'ensemble de l'économie canadienne.
     Je vous remercie.
    C'est merveilleux. Merci beaucoup, madame Hembroff. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Madame Hadwen, je vous cède la parole.
(1640)
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie sincèrement de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui au sujet de la stratégie industrielle de défense.
    Je tiens d'abord à souligner que nous nous réunissons sur le territoire non cédé du peuple anishinabe. Dans le contexte de la journée d'hier consacrée à la réconciliation, je tiens à dire que l'engagement de mon équipe envers la réconciliation et le renforcement des relations avec les communautés autochtones est essentiel au travail que nous accomplissons à la Défense nationale dans le cadre de la stratégie industrielle de défense.
    Ce travail nous offre une occasion unique d'intégrer dès le départ la collaboration avec les communautés autochtones. Nous disposons de forums tels que le Comité de partenariat entre les Inuits et la Couronne pour travailler ensemble, afin de planifier l'équipement des Forces armées canadiennes avec une plus grande portée, une plus grande mobilité et une plus grande capacité à opérer dans le Nord, et d'améliorer l'accès aux ressources clés de la chaîne d'approvisionnement de la défense, tout en apportant des avantages aux communautés locales.
    Permettez-moi de revenir au début.

[Français]

    Il y a près d'un an, j'ai commencé à occuper un nouveau poste au ministère de la Défense nationale, à savoir celui de sous-ministre adjointe aux politiques et à l'industrie. Notre sous-ministre a créé ce poste afin de diriger l'ensemble de l'Équipe de la Défense dans le cadre d'un effort coordonné visant l'élaboration d'une stratégie industrielle de la défense pour tout le Canada. Le major-général Jeff Smyth, chef du Programme de développement des forces aérienne et spatiale, est l'un de mes partenaires très proches dans ce travail.

[Traduction]

    Le major-général Smyth s'est joint à moi au cas où vous auriez des questions sur les capacités dont les Forces armées canadiennes pourraient avoir besoin, et sur la façon dont leurs exigences sont établies. Je travaille aussi en étroite collaboration avec de nombreux collègues des Forces armées canadiennes, principalement ceux qui sont chargés du développement des forces.
    Comme vous pouvez le voir, il s'agit déjà d'un effort de toute la défense qui nécessite l'expertise de nos membres civils et militaires.
    D'un point de vue politique, nous travaillons avec des collègues de toute la fonction publique, mais surtout avec l'équipe de Mme Hembroff à l'ISDE, afin de conseiller le gouvernement sur une stratégie industrielle de défense canadienne.

[Français]

    Je remercie les membres du Comité d'avoir entrepris cette étude à un moment très important pour le Canada. En effet, les menaces s'intensifient et nous sommes témoins d'une rupture des structures économiques et des partenariats qui sous-tendaient notre approche par le passé et que nous avons peut-être tenus pour acquis.
    Pourquoi le Canada devrait-il se doter d'une stratégie industrielle pour la défense? C'est la première question qu'on devrait se poser aujourd'hui.

[Traduction]

    Lorsque nous réfléchissons à la raison pour laquelle nous voulons faire ce travail, nous pensons qu'il s'agit d'une occasion d'assurer la cohérence des dépenses de défense qui, à tous égards, représentent une somme colossale. Dans la politique de défense de l'année dernière, intitulée Notre Nord, fort et libre, le gouvernement s'est engagé à élaborer une stratégie industrielle de défense, ou SID.
    Cependant, en seulement un an, la situation a radicalement changé. Le premier ministre vient tout juste de s'engager à ce que le Canada investisse 2 % de son PIB dans la défense. Cette année, cette somme représente un supplément de 9 milliards de dollars. La SID est d'autant plus justifiée.
    Cette stratégie peut, selon nous, expliquer comment les dépenses de défense profiteront à l'économie canadienne et comment les résultats profiteront aux Canadiens en ce qui concerne la défense du Canada et notre sécurité nationale partagée.
    Nous croyons également que la SID aidera à renouveler et dynamiser la relation entre l'industrie et l'équipe de la Défense — non seulement les Forces armées canadiennes, mais aussi les civils qui les soutiennent et d'autres membres de la famille tels que la Garde côtière canadienne et le Centre de la sécurité des télécommunications.
    La SID nous aidera à acquérir les capacités industrielles nécessaires pour contrer les menaces actuelles et futures. Comme vous le savez, nos adversaires — la Corée du Nord, l'Iran, la Russie et la République populaire de Chine — renforcent vigoureusement leurs écosystèmes militaro-industriels et ont l'alliance occidentale dans leur ligne de mire. En réponse, le Canada et ses alliés se réarment, rapatrient leurs productions et se livrent à une course effrénée pour s'assurer l'accès aux technologies de défense de nouvelle génération.
(1645)
    Nous sommes guidés par un sentiment d'urgence lorsque nous réfléchissons aux trois priorités de la SID: renforcer la base industrielle canadienne, comme Mme Hembroff l'a décrit, et garantir un accès sûr aux capacités dont nous avons besoin pour défendre le Canada; améliorer la résilience de l'économie canadienne en harmonisant les investissements dans la défense aux atouts industriels nationaux; et surtout, préserver notre souveraineté nationale.
    Nous avons établi ces priorités au cours des dix derniers mois. Permettez-moi de vous dire à quoi cela ressemblait.
    Nous avons établi des indicateurs en menant une analyse approfondie des stratégies industrielles de défense de plus de 15 alliés et partenaires. Bien sûr, nous avons trouvé l'information sur Internet, mais nous avons également interrogé les auteurs, et nos attachés de défense et nos responsables des politiques ont rencontré ces 15 entités. Nous n'hésitons pas à reprendre les bonnes idées.
    Nous avons commencé à discuter avec les acteurs de l'industrie pour connaître leur vision d'une stratégie industrielle de défense. Grâce à beaucoup plus de contacts que je ne peux en compter, nous en avons beaucoup appris sur les attentes qui existent. Et elles sont élevées.
    Nous avons rassemblé ces données et nous les avons analysées. Nous avons fait des constats importants. Nous avons cherché à comprendre comment l'accès au capital peut constituer un obstacle pour les industries opérant dans ce secteur. Nous avons commencé à examiner le rôle de la chaîne d'approvisionnement dans les industries de la défense. Nous avons également examiné les avantages uniques de certains volets des secteurs canadiens, comme la quantique, par exemple. Nous avons un écosystème unique, et c'est un avantage.
    Il y a d'autres secteurs, comme les exportations dans le domaine de la défense.

[Français]

    L'importance de la communication et de la collaboration entre le gouvernement, les Forces armées canadiennes et l'industrie est un sujet qui revient souvent lors de nos interactions. Cette stratégie nous offre une occasion exceptionnelle de créer des partenariats stratégiques. Vous avez peut-être remarqué l'annonce de premiers éléments, notamment la maintenance des aéronefs de prochaine génération et la formation de pilotes.
    Un autre élément qui a été soulevé concerne les nombreux avantages au sein de l'industrie canadienne. Nous disposons de chercheurs renommés dans les grandes universités et les instituts de recherche, d'innovations de pointe dans le domaine quantique et celui de l'intelligence artificielle, ainsi que de réserves de ressources clés.

[Traduction]

    L'un des objectifs de notre stratégie serait d'optimiser la relation entre tous ces avantages au pays pour atteindre un but qui convient à la défense du Canada.

[Français]

    Nos alliés sont très habiles pour trouver et obtenir ce dont ils ont besoin pour se défendre. Nous avons la possibilité de faire de même.

[Traduction]

    Heureusement, de nombreux ministères, programmes et organismes gouvernementaux existent déjà pour soutenir l'industrie. Mme Hembroff a déjà passé en revue une partie de cette liste.
    Je conclurai en disant que notre objectif pour la SID est simple: nous voulons garantir au gouvernement du Canada un accès sécurisé, rapide et fiable aux capacités nécessaires pour défendre le pays, protéger la souveraineté nationale et contrer les menaces actuelles et futures. Et, ce faisant, nous demeurons des gestionnaires responsables des fonds publics et pouvons aider l'écosystème industriel du Canada.
    Nos équipes ont hâte de suivre vos travaux et d'intégrer certaines de vos conclusions dans le développement de la SID.
    Merci beaucoup de nous avoir donné cette occasion.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer notre premier tour de questions, et six minutes sont allouées aux députés de chaque parti.
    Monsieur Falk, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leur comparution cet après-midi. C'est très intéressant.
    Je pense que Mme Hembroff a dit que notre complexe industriel compte plus de 600 entreprises qui approvisionnent l'industrie de la défense. Pourtant, elles ne fournissent qu'environ la moitié de tous nos achats pour le ministère de la Défense nationale. Lorsque vous parlez aux fournisseurs qui approvisionnent notre industrie de la défense, quelles seraient leurs deux principales frustrations dans leurs rapports avec la Défense nationale?
(1650)
    Monsieur le président, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, je dirais que la grande majorité des entreprises de défense canadiennes veulent avoir la possibilité de remporter les processus d'approvisionnement fédéraux. Je pense vraiment que cela nécessite un changement de culture dans la façon dont nous abordons l'approvisionnement. Il faudra peut-être envisager des approches novatrices en matière d'approvisionnement. Par exemple, il pourrait y avoir plus de partenariats stratégiques ou d'approvisionnements directs avec des entreprises canadiennes qui ont une capacité de pointe.
    Je dirais également que la grande majorité des entreprises canadiennes nous ont dit qu'elles cherchaient des occasions de travailler au sein d'une chaîne d'approvisionnement canadienne plus vaste. Nous cherchons des entreprises de premier plan dans l'écosystème de la défense, qu'il s'agisse d'entreprises canadiennes ou d'entreprises étrangères ayant une forte présence au pays, afin qu'elles puissent travailler en étroite collaboration avec des entreprises canadiennes de la chaîne d'approvisionnement.
    Que veulent-elles dire, selon vous, lorsque les entreprises vous confient qu'elles ne sont pas en mesure de travailler assez étroitement avec...?
    Par exemple, je dirais que la grande majorité des entreprises de défense canadiennes sont petites et moyennes. Elles dépendent donc beaucoup de mesures comme la Politique des retombées industrielles et technologiques, qui stimule les investissements dans différents maillons de la chaîne d'approvisionnement.
    Je dirais qu'elles sont également désireuses de s'associer à de grandes entreprises et de travailler ensemble pour trouver des solutions. Elles cherchent l'occasion de proposer des solutions canadiennes dans le cadre du processus d'approvisionnement.
    D'accord.
    Madame Hadwen, vous avez dit qu'il y a actuellement une « rupture » dans notre système. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Je pense que j'essayais de reprendre les propos du premier ministre au sujet d'une « rupture » des relations commerciales et économiques que nous avions auparavant.
    Vous avez également abordé un peu l'approvisionnement. Pouvez-vous nous parler de ce que nos fournisseurs vous disent au sujet de nos politiques d'approvisionnement?
    Dans toutes les stratégies industrielles en matière de défense que nous avons examinées, l'approvisionnement est un élément essentiel de la façon dont les gouvernements soutiennent mieux l'industrie. Le gouvernement a annoncé son intention de créer une agence d'approvisionnement en matériel de défense. Je ne suis pas une spécialiste de l'approvisionnement, mais seulement des politiques. Certains des plus grands esprits de la fonction publique travaillent justement à relever ce défi.
    En ce qui concerne la politique d'approvisionnement, accordons-nous une préférence aux produits canadiens dans notre processus d'appel d'offres? Y a‑t‑il un système pondéré qui donnerait plus de points à un fournisseur ou à un fabricant canadien?
    Je ne peux m'empêcher de céder la parole à Mme Hembroff.
    Il y a quelques semaines à peine, le gouvernement a annoncé qu'il introduirait une nouvelle politique d'achat canadien au processus d'approvisionnement fédéral. La politique s'appliquera à la défense et à d'autres secteurs. De plus amples renseignements seront fournis au cours des prochains mois sur la façon exacte dont cette politique d'achat au Canada fonctionne en pratique.
    En réponse à votre question, nous n'avons pas à l'heure actuelle un régime d'approvisionnement qui donne la priorité aux solutions canadiennes.
    Eh bien, c'est intéressant.
    Ma prochaine question concerne, encore une fois, le processus d'approvisionnement. J'ai récemment vécu une expérience dans mon bureau, ici, sur la Colline. Il y a un renflement dans notre tapis depuis quelques années et nous essayons de le faire réparer. Nous avons reçu neuf ou dix visites d'intervenants de Travaux publics Canada ou du personnel d'entretien de la Chambre des communes pour essayer de régler un problème aussi simple qu'un renflement dans un tapis qui doit être aplati. Le problème n'est toujours pas résolu. Cela dure depuis plus d'un an.
    Est‑ce aussi une source de frustration dans le cadre du processus d'approvisionnement de la Défense nationale? Ne pouvons-nous rien faire sans devoir recevoir dix visites d'une demi-douzaine de personnes chaque fois ou de quatre à six personnes qui viennent examiner un problème?
(1655)
    Monsieur Falk, je suis désolé de vous décevoir, mais il ne vous reste qu'une vingtaine de secondes. Je ne sais pas à qui s'adressait à votre question.
    Elle s'adressait à Mme Hembroff.
    Madame Hembroff, vous avez environ 30 secondes pour répondre à la question.
    Je suis désolée.
    Monsieur le président, pourrait‑on répéter la question?
    Combien de visites faut‑il pour que quelque chose soit fait dans le cadre du processus d'approvisionnement? Combien de propositions faut‑il présenter et combien de réunions faut‑il organiser?
    Nous parlons des avions F‑35 depuis je ne sais combien d'années. Nous avons étudié ce dossier, mais il ne va nulle part.
    Monsieur le président, je ne pense pas pouvoir répondre à cette question. Je ne dispose certainement pas de données sur le temps moyen nécessaire pour mener à bien un processus d'approvisionnement. Chaque processus d'approvisionnement est différent. Il est fort possible que SPAC dispose de données à ce sujet.
    D'accord.
    Je vous remercie beaucoup.

[Français]

     Madame O'Rourke, la parole est à vous pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je suis d'accord avec Mme Hadwen. C'est une période passionnante pour notre économie, notre souveraineté et la réconciliation et c'est le temps d'équiper nos militaires avec des solutions fabriquées au Canada qui sont adaptées aux menaces auxquelles nous faisons face aujourd'hui. Je suis très enthousiaste à cet égard.
    Pourriez-vous nous donner une idée de l'éventail des questions qui seront abordées dans le cadre de la Stratégie industrielle de défense? On mentionne à peu près tout dans la brève description, de l'informatique quantique à l'alimentation en passant par l'intelligence artificielle.
    Pouvez-vous nous donner une idée du contenu de la Stratégie?
    En termes simples, tout ce dont les membres des Forces armées canadiennes ont besoin pour accomplir la tâche que le gouvernement leur confiera est une capacité à laquelle nous aimerions avoir accès, de préférence au Canada. C'est notre point de départ. Cela va de l'alimentation à l'équipement de pointe et tout le reste.
    Lorsqu'on réfléchit à la question, la Stratégie consiste à cerner les lacunes structurelles qui nous empêchent de prévoir les conflits futurs et les capacités dont nous aurons besoin à ce moment‑là. Dans cette optique, nous savons que les technologies de pointe, l'intelligence artificielle, la technologie quantique, la robotique et les systèmes sans pilote feront tous partie des besoins militaires que nous pouvons prévoir.
    Nous savons également qu'il existe certains obstacles structurels qui empêchent l'industrie de travailler avec les Forces armées canadiennes. Parmi ceux‑ci, on peut citer les petites entreprises qui ont du mal à avoir accès au capital parce qu'elles mènent leurs activités dans le secteur de la défense ou parce qu'elles fabriquent des produits qui pourraient causer des dommages dans un conflit militaire.
    Certaines des questions ou frustrations que nous entendons de la part de l'industrie concernent les personnes à qui il faut s'adresser. Certains représentants d'entreprises viennent à Ottawa, où ils rencontrent de nombreux sous-ministres adjoints, comme moi, et ils ont l'impression de ne pas comprendre comment ils peuvent résoudre leurs problèmes ou les transformer en contrats.
    Nous savons que nous voulons doter le Canada de capacités en matière de souveraineté. Le processus de fabrication devrait idéalement se dérouler au Canada du début à la fin et nous voulons pouvoir tirer parti de cette capacité, notamment parce que nous sommes très doués dans ce domaine et parce que c'est essentiel en temps de guerre.
    Notre Stratégie nationale de construction navale représente une capacité en matière de souveraineté, mais on pourrait imaginer d'autres possibilités.
    Je terminerai en mentionnant un autre domaine très important, soit celui de la recherche et développement, ainsi que la commercialisation des technologies et des capacités, depuis les systèmes de train d'atterrissage jusqu'à l'intégration des données. Il y a tellement d'entreprises formidables et compétentes au Canada, et nous avons l'occasion d'améliorer la façon dont elles répondent à la demande dans le secteur de la défense.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je poserai une brève question sur les processus d'approvisionnement puis, si j'ai le temps, j'aimerais aborder la question de la propriété intellectuelle et l'éthique.
    Il existe une entreprise à Guelph qui appartient à une femme et où l'on fabrique des pièces destinées à l'exportation, notamment des pièces usinées pour des chars américains. Les États-Unis ont un volet pour les petites entreprises, ainsi qu'un volet pour les entreprises appartenant à des femmes. Il existe un bassin de contrats pour les plus petits contrats, ce qui facilite la tâche aux petites entreprises qui souhaitent soumissionner. Le Royaume-Uni a une stratégie industrielle en matière de défense et un volet dédié aux petites entreprises.
    Prévoit‑on de faire la même chose dans le cadre de la Stratégie industrielle de défense ou demanderons-nous aux grandes industries, c'est‑à‑dire aux grandes entreprises du secteur de la défense, de s'occuper elles-mêmes de la sous-traitance?
    Je trouve ce modèle intéressant et j'aimerais savoir si nous prévoyons d'adopter un modèle semblable.
(1700)
    Comme Mme Hembroff l'a mentionné — et je vais peut-être lui demander de compléter ma réponse —, les petites entreprises représentent une part importante de l'économie canadienne. La pandémie ne nous a‑t‑elle pas appris qu'elles peuvent s'adapter très rapidement, mais aussi qu'elles sont très vulnérables en période de perturbations économiques?
    Nous tentons absolument de nous assurer que nous pouvons tirer parti des capacités des petites entreprises. Ainsi, Innovation, Sciences et Développement économique Canada a mis en place des programmes expressément conçus pour les soutenir. Ces programmes ne visent toutefois pas le secteur de la défense et on pourrait donc envisager, dans le cadre de la Stratégie, d'ajouter un volet sur la défense qui tire parti de programmes qui ont déjà fait leurs preuves pour les petites entreprises.
    Madame Hembroff, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Nous sommes en train d'examiner très attentivement le processus d'approvisionnement actuel. Dans le cadre de cet examen, nous nous intéressons notamment à ce que font certains de nos alliés. J'ai pris note des exemples concernant le Royaume-Uni et les États-Unis qui ont été fournis par la députée, car je pense que ce sont des exemples très intéressants.
    La Stratégie industrielle de défense est en cours d'élaboration. Ce travail n'est pas encore terminé, mais nous examinons certainement d'autres exemples qui viennent d'autres pays.
    C'est très bien. Je vous remercie.
    Le temps qui m'est imparti est‑il écoulé?
    Il vous reste un peu de temps, mais malheureusement, cela ne sera probablement pas suffisant pour entendre une réponse, madame O'Rourke. Je vais tenter de vous donner un peu plus de temps si possible.
    Nos collègues poseront ces questions.

[Français]

    Monsieur Ste‑Marie, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne suis pas certain que j'emploierais des qualificatifs à la hauteur de ceux qui viennent d'être avancés.
    Je remercie le chef d'état-major et les deux sous-ministres d'être des nôtres et de répondre à nos questions.
    Ma première question concerne l'approvisionnement en pièces de rechange et en logiciels ainsi que l'entretien d'appareils, par exemple, qui se font aux États‑Unis. Nous avons vu le président américain commencer à bloquer des exportations, notamment à destination de la Colombie. L'exportation de moteurs américains pour les Gripen de Saab a été bloquée et on s'est fait dire qu'on n'avait qu'à acheter des avions F‑16V américains à la place. Le président américain a également bloqué 400 millions de dollars en armes et en munitions achetées par Taïwan parce qu'il négocie présentement avec la Chine. Si le président américain voulait faire pression sur le Canada, il pourrait bloquer des mises à jour de logiciels ou des envois de pièces de rechange pour rendre nos appareils inefficaces.
    Dans ce contexte de grande incertitude, quelles sont les analyses de risque en ce qui a trait à la dépendance aux États‑Unis? Quels sont les plans de contingence pour les Forces armées canadiennes ou pour le ministère?

[Traduction]

    Si je comprends bien la question — et je paraphrase —, vous demandez quelles analyses ont été effectuées pour garantir que nous avons accès aux capacités dont nous avons besoin.
    Il est très important de ne pas oublier qu'un très petit nombre de pays sont en mesure de fabriquer de l'équipement comme des avions de chasse ou d'autres capacités de technologie de pointe. Dans les années 1950, le Canada a pris la décision stratégique de ne plus produire d'avions de chasse. Le défi qui se pose actuellement concerne les pays qui ont investi pendant des décennies pour mettre au point ces types de capacités. Il n'existe pas de moyens simples de mettre en place rapidement cette industrie au Canada. Il faudra du temps, beaucoup de financement et le soutien du gouvernement pour nous permettre d'atteindre un point où nous n'aurons plus à dépendre d'autres pays pour ce type de technologie.
    La menace à laquelle nous faisons face tous les jours est extrêmement sophistiquée sur le plan technologique. Ce n'est pas aussi simple que cela aurait pu l'être pendant la Deuxième Guerre mondiale, où nous pouvions transformer une usine automobile pour produire des bombardiers. Lorsque nous atteignons un tel niveau de complexité dans les systèmes d'armes, il est extrêmement important d'avoir un écosystème en mesure de fournir le soutien nécessaire.
    Pour répondre plus précisément à la question, dans le cadre de notre évaluation — et cela ne concerne pas seulement le ministère de la Défense, mais aussi SPAC et ISDE —, lorsque nous évaluons les capacités, nous évaluons aussi la capacité de soutien connexe.
    Même si nous pouvons souhaiter que toutes les composantes restent au Canada, et même si nous disposons d'une industrie de pointe dans de nombreux domaines — par exemple, nous avons de grandes capacités industrielles pour le soutien aux aéronefs —, nous ne disposons toujours pas, au Canada, de toutes les capacités nécessaires pour répondre à nos besoins opérationnels.
    Par conséquent, nous comptons souvent sur d'autres pays pour fabriquer certains équipements dont nous avons besoin. Nous en sommes très conscients et nous en tenons compte lorsque nous déterminons nos exigences en matière d'approvisionnement.
(1705)

[Français]

    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse davantage à Mme Hembroff.
    J'aimerais que nous parlions de l'inverse, en quelque sorte, du sujet qui vient d'être abordé, c'est-à-dire de l'importance que revêt pour les industries du pays l'exportation de matériel militaire vers les États‑Unis, notre voisin du Sud.
    Quelle est l'importance du rôle des exportations vers le client américain pour l'industrie militaire au Canada?

[Traduction]

    Oui, les États-Unis représentent certainement un marché important pour les exportations canadiennes de biens et de services en matière de défense. Ce pays représente actuellement 63 % des exportations totales du Canada dans ce secteur. Pour vous donner une idée de nos autres principaux marchés d'exportation, l'Europe représente 11 % et le Royaume-Uni représente 5 %.
    C'est la raison pour laquelle la diversification des marchés d'exportation devrait être examinée très attentivement dans le cadre de la stratégie industrielle de défense. Nous devons nous assurer d'offrir des débouchés internationaux aux entreprises canadiennes, d'autant plus que le marché canadien est assez petit par rapport à un grand nombre d'autres marchés internationaux. Nous devons donc nous tourner vers les débouchés internationaux si nous souhaitons bâtir une industrie durable à très long terme.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Hembroff.
    Mon temps de parole est écoulé.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Chers collègues, nous entamons maintenant la deuxième série de questions d'une durée de cinq minutes chacune.
    Monsieur Guglielmin, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Major-général Smyth, je tiens tout d'abord à vous remercier de votre service.
    J'aimerais également remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Major-général, l'examen par le gouvernement fédéral de l'acquisition des avions F‑35 a été reporté à plusieurs reprises, malgré les engagements publics qui avaient été pris de le mener avant la fin de l'été. Êtes-vous d'accord pour dire que ces retards risquent de miner la confiance de l'industrie et de nuire à la livraison en temps voulu de capacités militaires essentielles?
    Je répondrai brièvement que le processus d'examen est en cours. Bien entendu, cette décision est attendue avec impatience au sein de l'Aviation royale canadienne.
    Le rapport de la vérificatrice générale a également fait état d'une augmentation de près de 50 % des coûts, qui s'élèvent désormais à 27,7 milliards de dollars. Seriez-vous d'accord pour dire que sans un contrôle plus rigoureux des coûts et une surveillance plus transparente, cette augmentation des dépenses pourrait représenter un défi pour l'approvisionnement en matière de défense?
    Je dirais qu'en général, le niveau technologique dont nous avons besoin pour être concurrentiels et pour pouvoir lutter contre les menaces auxquelles nous faisons face n'est pas quelque chose que l'on peut acheter tout prêt chez Walmart. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que tout est plus cher compte tenu des événements économiques récents. L'augmentation des coûts dans le cadre de problèmes complexes est un phénomène qui a toujours existé et qui continuera d'exister dans un avenir prévisible.
    Lorsque nous considérons la menace militaire à laquelle le Canada fait face, nous devons certainement nous assurer que nous pouvons combler nos lacunes en matière de capacité pour défendre les Canadiens selon les directives du gouvernement et, essentiellement, conformément aux politiques gouvernementales qui sont établies.
(1710)
    Major-général, j'ai passé ma carrière dans le secteur privé, c'est‑à‑dire dans l'industrie sidérurgique, où l'on accorde une grande importance aux échéanciers et à la reddition de comptes. J'aimerais donc savoir si les futurs processus d'approvisionnement en matière de défense devraient prévoir des échéanciers plus rigoureux, afin d'améliorer la reddition de comptes lors de l'utilisation des fonds publics.
    J'en suis à ma 37e année de service et je ne pense pas que nous n'ayons jamais livré quoi que ce soit assez rapidement pour répondre aux demandes des soldats, des marins et des aviateurs qui sont sur le terrain et dont la vie dépend quotidiennement de ces équipements. Bien entendu, nous aimerions beaucoup tout faire plus rapidement, mais notre capacité à équilibrer les besoins avec les capacités de l'industrie ou la bonne gestion des fonds publics doit évidemment tenir compte du processus à notre disposition. Bien entendu, nous aimerions toujours aller plus vite, mais nous voulons nous assurer que, ce faisant, nous répondons à nos besoins tout en offrant le meilleur rendement aux Canadiens.
    Major-général, selon vous, que disent les retards et les coûts qui ne cessent d'augmenter sur la capacité du gouvernement à gérer des processus d'approvisionnement complexes en matière de défense? Selon vous, quelle incidence cette incertitude a‑t‑elle sur la planification et la confiance de l'industrie de la défense?
    À mon avis, cela relève du domaine d'expertise de SPAC. À bien des égards, je suis responsable des demandes. Comme je l'ai dit, j'aimerais recevoir l'équipement le plus rapidement possible. Toutefois, je ne pense pas avoir l'expertise nécessaire pour répondre de manière satisfaisante à votre question.
    Major-général, en vous fondant sur votre expérience, quelles sont les principales lacunes du système actuel qui continuent d'entraîner des dépassements de coûts et des retards? Y a‑t‑il des réformes précises que vous recommanderiez pour résoudre définitivement certains des problèmes de longue date que vous avez observés?
    Notre capacité à accorder à l'industrie les habilitations de sécurité nécessaires pour faire face à la menace...
    Je pourrais peut-être aborder la question sous un autre angle. Comme je l'ai dit, il s'agit d'une menace extrêmement sophistiquée sur le plan technologique dans laquelle nos adversaires investissent des dizaines de milliards de dollars, voire des centaines de milliards de dollars ou plus. Elle est donc très agile. L'un des défis qui se posent, c'est qu'en général, nous établissons nos besoins et nous demandons ensuite à l'industrie d'y répondre. Ce que nous essayons de faire maintenant… C'est aussi ce que Mme Hadwen tente d'expliquer au sujet de la stratégie industrielle de défense.
    De mon point de vue, nous présentons un problème d'ordre opérationnel aux intervenants de l'industrie, nous en discutons au niveau de classification approprié, puis nous leur demandons de créer des solutions novatrices pour nous aider à résoudre ce problème. Nous voulons collaborer davantage avec les intervenants de l'industrie en leur permettant de comprendre pleinement la menace à laquelle nous faisons face lorsque nous tentons de résoudre un problème opérationnel avec eux. Notre capacité à travailler plus étroitement avec l'industrie dépend de notre capacité à lui accorder les habilitations de sécurité nécessaires et à disposer de l'infrastructure nécessaire, tant sur le plan de la technologie de l'information que sur celui de l'infrastructure physique, pour protéger certains des renseignements en jeu, ainsi que la propriété intellectuelle qui va de pair avec la mise au point de moyens pour contrer la menace.
    Nous devons améliorer ces aspects afin de pouvoir réagir avec la même agilité que la menace à laquelle nous faisons face.
    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Acan, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup d'être venus ici aujourd'hui et de vous être joints à nous.
    Général, ma question s'adresse à vous.
    Madame Hadwen, si vous voulez ajouter des commentaires, je serais heureuse de les entendre aussi.
    En vous basant sur vos déploiements antérieurs, pouvez-vous nous parler de défis opérationnels particuliers attribuables à des lacunes sur le plan de l'équipement, de la logistique ou des systèmes de soutien?
(1715)
    Oui, c'est une excellente question. Il y en a beaucoup.
    En ce qui concerne les défis liés aux déploiements, les conditions de vie en font toujours partie, mais ce n'est pas nécessairement un défi industriel.
    Notre capacité à mettre au point et à déployer des armes pour répondre à la menace très rapidement est toujours préoccupante, non seulement d'un point de vue purement industriel, mais aussi en ce qui concerne l'utilisation de ces armes par nos soldats, nos marins et nos aviateurs, car nous devons nous assurer qu'ils sont adéquatement formés et capables de mener des opérations planifiées. Cela prend du temps, surtout compte tenu de la complexité de certaines de ces armes. De toute évidence, l'ampleur des ressources que nous investissons pour rendre la transition aussi facile que possible pour les personnes qui utilisent un système d'armement a une grande importance.
    Merci.
    De plus, pourriez-vous nous dire dans quelle mesure le plan militaire du Canada, « Notre Nord, fort et libre », s'attaque efficacement à ces problèmes concernant l'innovation en matière d'approvisionnement et le développement des capacités nationales?
    Je n'ai pas nécessairement grand-chose à dire sur « Notre Nord, fort et libre », si ce n'est que ce plan prévoit des investissements dans d'importantes capacités qui vont permettre de combler les lacunes à cet égard qui existent depuis très longtemps. Dans un monde idéal, l'objectif ultime, à mon avis, serait de passer des besoins militaires aux capacités sur le terrain le plus rapidement possible.
    Si vous me le permettez, j'ajouterais simplement que nos collègues de Services publics et Approvisionnement Canada pourraient être intéressés à vous faire part de leurs points de vue dans le cadre de votre étude.
    Nous savons que notre stratégie industrielle de défense impliquera certainement un partenariat étroit avec ce ministère en matière d'approvisionnement, car, comme Mme Hembroff, je crois, l'a fait remarquer, l'approvisionnement est notre outil le plus important. Étant donné que le gouvernement a annoncé la création d'une agence de l'investissement pour la défense et la consolidation des investissements au sein d'une structure plus souple, tout indique qu'il s'engage à résoudre le problème de l'approvisionnement. Notre travail consiste à nous assurer de définir clairement nos besoins, de même que les problèmes à régler et la façon dont l'industrie peut nous aider. Nous n'avons pas le temps de travailler en vase clos.
    Merci beaucoup, madame Hadwen.
    Général, étant donné que vous jouez un rôle de leadership sur le plan des capacités du NORAD et de la surveillance opérationnelle, pouvez-vous nous expliquer l'incidence qu'ont eue les lacunes de la base industrielle de défense canadienne, comme les retards dans l'approvisionnement, les contraintes de la chaîne d'approvisionnement ou l'absence de capacité de production nationale, sur l'état de préparation de nos militaires et notre interopérabilité avec nos alliés?
    Je pense que la façon dont vous avez formulé la question mérite un autre type de réponse. Je dirais qu'étant donné que la politique de modernisation du NORAD a été adoptée après la politique de défense « Protection, Sécurité, Engagement » et avant le plan « Notre Nord, fort et libre », il y a un certain nombre d'initiatives qui progressent très rapidement en ce moment dans le système d'approvisionnement.
    Je ne pense pas qu'il y ait eu une incidence sur notre capacité à réaliser ces initiatives, vu la nature complexe et hautement technique des problèmes opérationnels que nous essayons de résoudre.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Ste‑Marie, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    L'été dernier, le 10 juillet, le ministère de la Défense nationale a attribué un important contrat d'une valeur de 100 millions de dollars pour des jumelles de vision nocturne. Le secteur était très inquiet et disait que les exigences techniques telles qu'elles étaient rédigées garantissaient qu'une seule entreprise américaine était admissible. Un concurrent américain a aussi affirmé que ces exigences ne reflétaient ni les normes de l'industrie ni les exigences des alliés de l'OTAN. Il y a aussi eu une plainte de l'entreprise Cadex, de Saint‑Jean‑sur‑Richelieu. Le Tribunal canadien du commerce extérieur a ordonné au gouvernement de suspendre son achat, le temps de mener l'enquête. Deux entreprises européennes ont envoyé des lettres au Tribunal pour soutenir Cadex dans sa plainte.
    Ça me rappelle ce qui est arrivé lors du remplacement des CP‑140 Aurora: l'entreprise américaine Boeing, plutôt que Bombardier, avait été privilégiée, étant donné la formulation de l'appel d'offres rédigé. On pourrait aussi ajouter l'exemple des F‑35.
    Il y aura quand même des retombées au Québec et au Canada, mais pourquoi les appels d'offres sont-ils si souvent rédigés de façon à exclure des fournisseurs issus de l'économie d'ici?
(1720)
    Je vous encourage encore une fois à inviter nos collègues de Services publics et Approvisionnement Canada pour qu'ils répondent à cette question. J'ose dire que la nouvelle politique « Achetez canadien » du gouvernement vise justement à obliger les fonctionnaires à traiter davantage avec les entreprises canadiennes. Il y aura toutefois des cas spéciaux où les besoins techniques auxquels le général faisait allusion tantôt vont exiger un traitement différent.
    J'aimerais vous poser une très courte deuxième question, qui porte sur un autre sujet.
    Parlez-nous de l'importance des réserves de minéraux stratégiques et critiques pour la défense dans l'économie du pays. En quoi est-ce que l'approvisionnement, notamment pour les membres de l'OTAN et pour le secteur militaire canadien, est si important?
    C'est justement une occasion très importante. Nous travaillons étroitement avec Ressources naturelles Canada, qui a le mandat de gérer les minéraux critiques dont nous possédons une certaine quantité et d'essayer de trouver un moyen pour permettre au Canada de tirer profit des marchés internationaux. Tout récemment, au mois de juin, le ministre de la Défense nationale a signé une entente avec ses homologues de l'OTAN dans le but de travailler davantage dans ce domaine.
     Nous voyons très clairement que le Canada a une chance d'avoir une position de leader, parce que nos ressources naturelles ne sont égalées que par celles de la Russie et de la Chine. Au sein des économies de l'Ouest et des pays de l'Alliance, il y a beaucoup d'occasions. Nous y accordons beaucoup d'attention.
    De plus, dans le contexte de l'établissement d'une stratégie industrielle pour la défense, nous essayons de bien conseiller le gouvernement afin d'appuyer des mécanismes qui permettront à notre ministère, en collaboration avec Ressources naturelles Canada et Innovation, Sciences et Développement économique Canada, de tirer profit de ces occasions.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Monsieur Bains, vous allez conclure ce tour. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités, les sous-ministres, le général Smyth et les membres des forces armées de s'être joints à nous. Je vous remercie de votre service et de votre dévouement à l'égard des efforts visant à faire en sorte que nous puissions améliorer nos capacités de défense nationale.
    Général, vous avez parlé de l'écosystème technologique. Lorsqu'il est question d'investissements dans la défense, dans quelle mesure est‑il important d'avoir des capacités interopérables pour travailler avec nos alliés? Quelle en est l'importance pour la prise de décisions, au sujet de quoi que ce soit, des avions aux navires?
    L'interopérabilité est l'un des aspects qui se trouvent en haut de la liste des exigences, je dirais.
    Lors de la création de l'OTAN, dont le Canada a été un membre fondateur, nous avons pu définir des normes nous permettant de travailler facilement avec nos partenaires. Ce genre de normes d'interopérabilité existent en raison des milliers de pertes que les alliés ont subies pendant la Seconde Guerre mondiale. Nous avons appris — et nous avons payé de notre sang — que nous devons être en mesure de travailler en étroite collaboration avec nos partenaires et alliés.
    Lorsque nous nous penchons sur le domaine aérien et la capacité de défendre l'Amérique du Nord, nous le faisons en général avec les États‑Unis, dans le cadre de notre relation binationale par le biais du NORAD. De même, lorsque nous déployons des forces au sein d'une force de l'OTAN, nous avons des points en commun en ce qui concerne notre doctrine, notre entraînement et notre équipement, de sorte que nous pouvons communiquer ensemble par radio, par exemple, et nous transmettre des renseignements opérationnels essentiels.
    Bref, l'interopérabilité est extrêmement importante en ce qui a trait à notre capacité de travailler avec nos alliés.
(1725)
    Je vous remercie.
    Vous avez évoqué des leçons qui sont troublantes. J'aimerais parler de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et de notre état de préparation en tant que nations démocratiques. On estime qu'il y a actuellement 120 conflits différents dans le monde.
    Selon Reuters, les États‑Unis n'ont pas produit de munitions de 115 millimètres conformes à la norme de l'OTAN entre l'été 2014 et l'automne 2015, l'année de l'annexion de la Crimée par la Russie. La situation était pire avant l'invasion. Le plan industriel de l'armée américaine prévoyait un approvisionnement à l'étranger en explosifs, y compris auprès d'une usine dans l'est de l'Ukraine qui est maintenant contrôlée par la Russie.
    Que faut‑il faire pour assurer la stabilité de ce type de production de défense au Canada? Quels règlements devrions-nous envisager en ce qui concerne la demande, la production, la pollution et ce genre de choses?
    Je dirai très simplement que la stabilité du financement est d'une importance cruciale. En ce qui concerne l'achat de systèmes d'armes au Canada, il pourrait y avoir des cas où nous devrons acheter de tels systèmes à l'étranger pour pallier immédiatement un déficit de capacité. En même temps, nous devons investir dans l'industrie canadienne pour mettre au point le prochain système destiné à remplacer celui acheté à l'étranger. La stabilité du financement est essentielle.
    Je peux parler de l'Aviation royale canadienne. Nous sommes actuellement dans une situation où la plupart de nos avions sont à la fin de leur durée de vie utile, et nous devons en acheter d'autres maintenant pour les remplacer. Les Canadiens s'attendent à ce que l'armée de l'air continue d'être en mesure de défendre le pays. Dans certains cas, un investissement dans l'industrie canadienne pour l'aider à produire le prochain système d'armement ou les prochaines armes est nécessaire, mais il se peut que cette industrie ne livre pas la marchandise avant 10, 15 ou 20 ans en raison de la recherche et du développement de pointe qui s'imposent et du développement de la capacité de production industrielle. C'est pourquoi nous sommes obligés, dans certains cas, d'acheter à l'étranger pour l'instant.
    Je vais m'arrêter là en ce qui concerne les besoins. Je vais céder la parole à mes collègues, qui ont peut-être quelque chose à ajouter au sujet de l'industrie.
    Monsieur le président, je dirais simplement que, surtout compte tenu de la discussion qui a eu lieu au cours de la dernière heure, une chose que nous entendons beaucoup de la part de l'industrie canadienne, c'est la nécessité d'une participation dès le début pour comprendre les besoins des FAC, en vue d'améliorer la planification de la part des entreprises canadiennes. Elles cherchent à savoir comment elles peuvent participer au marché canadien de la défense. Cette participation dès les premières étapes permet également à des programmes du gouvernement fédéral, y compris ceux d'ISDE, de prendre des décisions éclairées concernant les types de projets à financer. Ce genre de discussion et de sélection est très important pour nous assurer que l'offre corresponde à la demande.
    Merci, et j'ai une dernière petite...
    Malheureusement, monsieur Bains, c'est tout le temps que nous avons — et nous avons déjà dépassé le temps imparti. Je suis désolé; je vous ai donné la parole plus rapidement que j'aurais dû.
    Monsieur Guglielmin, je suis désolé. Vous avez la parole pour les cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Major-général, l'augmentation de près de 1 milliard de dollars du coût des navires de ravitaillement de la Marine, qui s'accompagne de retards importants et d'obstacles bureaucratiques, vient faire ressortir encore une fois les problèmes d'approvisionnement en matière de défense du Canada, après ceux déjà rencontrés lors de l'acquisition des F‑35. Le vice-amiral à la retraite Mark Norman a carrément qualifié le système d'approvisionnement militaire et sa relation avec l'industrie de « brisés », en appelant à une reconstruction complète à partir des principes de base. D'après votre expérience, êtes-vous d'accord avec cette évaluation?
(1730)
    Je dirais que, dans tout système complexe, il y a toujours place à l'amélioration, et nous nous efforçons continuellement d'améliorer nos façons de faire au quotidien.
    Madame Hadwen, dans quelle mesure le Nord canadien est‑il vulnérable à l'influence étrangère lorsque nous n'investissons pas dans nos propres infrastructures? Craignez-vous que notre inaction laisse la place à des adversaires pour combler le vide, que ce soit sur le plan économique ou technologique?
    Je pense que la commission d'enquête sur l'ingérence étrangère de l'année dernière a illustré à quel point nos adversaires tentent de manipuler les Canadiens partout au pays.
    Le gouvernement met sur pied le Bureau de gestion des grands projets et lance des projets d'édification de la nation, alors j'y vois une occasion en or pour nous de faire ce qu'il faut pour protéger et bâtir le Canada. En ce moment, j'ai fortement l'impression que nous avons la capacité de relever ce défi, parce que nous voulons tous la même chose.
    Madame Hadwen, compte tenu de l'importance des fonds publics en jeu et, malheureusement, de la perte de confiance de la population, quelles mesures ou réformes précises en matière de reddition de comptes recommanderiez-vous pour accroître la transparence, veiller à ce que les projets d'approvisionnement soient réalisés à temps et sans dépassement de coûts, et pour atteindre nos objectifs militaires et industriels?
    Tous les ministres à la tête des ministères ayant un rôle à jouer dans ce domaine ont beaucoup d'obligations en matière de reddition de comptes. En raison de l'urgence de la menace et du fait que nous disposons maintenant de ressources à la Défense nationale, nous travaillons très fort avec nos collègues des autres ministères pour nous assurer que nous ramons tous dans la même direction et, je dirais, dans le même bateau. Il n'y a pas de place pour le cloisonnement en ce moment; nous ne sommes pas en temps de paix.
    Dans ce cas, recommandez-vous simplement d'élargir l'échange de renseignements entre les différents secteurs du ministère?
    Oui, et avec d'autres ministères. Nous avons donc une très belle occasion d'améliorer grandement nos façons de travailler ensemble pour défendre le Canada.
    Vous avez également parlé en toute franchise du fait que la confiance est difficile à gagner et que les responsables de l'approvisionnement ont moins le goût du risque en raison des scandales passés et des plaintes du public. Pouvez-vous nous en dire plus sur les changements structurels ou culturels précis qui sont nécessaires au sein du ministère de la Défense nationale pour rétablir cette confiance et améliorer la tolérance au risque?
    Je ne suis pas en mesure de commenter la façon dont l'approvisionnement est géré ou organisé, ni d'où vient la confiance. Je pense que nous sommes tous déterminés à mettre les bons équipements entre les mains des Forces armées canadiennes et de tous ceux qui participent à la défense du Canada afin que nous puissions être à la hauteur de la situation.
    Quelles mesures concrètes le ministère prend‑il, ou devrait‑il prendre, pour favoriser une relation plus ouverte et collaborative avec l'industrie?
    Dans le cadre de notre travail sur la stratégie industrielle de défense, nous avons compris très clairement que l'industrie veut comprendre ce que nous faisons et nos intentions par la suite, afin qu'elle puisse nous aider à atteindre nos objectifs et à résoudre les problèmes.
    Pour conseiller le gouvernement à ce sujet, nous réfléchirons donc à la façon de lui faire une place. Il y a déjà beaucoup de tables où nous siégeons avec l'industrie, mais il est peut-être possible d'en ajouter ou de changer leur façon de fonctionner.
    Puis‑je donner à Mme Hembroff l'occasion d'en parler?
    Nous manquons de temps.
    Madame Hembroff, si vous pouvez être brève, ce serait formidable.
(1735)
    Monsieur le président, je ne pense pas avoir quoi que ce soit à ajouter à ce sujet.
    On ne peut pas faire plus vite. Je vous remercie d'être accommodante.
    Chers collègues, cela nous amène à la fin de la première heure de notre réunion.
    Encore une fois, merci beaucoup à nos témoins de s'être rendus disponibles aujourd'hui.
    Major-général, encore une fois, je tiens à vous remercier directement, ainsi que votre personnel et en particulier les membres des forces armées en uniforme ici aujourd'hui, pour votre dévouement envers notre pays. Les sacrifices que vous et vos familles faites pour assurer notre sécurité, aujourd'hui et à l'avenir, ont une valeur incommensurable pour notre pays. Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui.
    Chers collègues, nous allons suspendre brièvement la séance. Nous reviendrons une fois que nous serons prêts pour la deuxième partie de la réunion.
(1735)

(1740)
    Chers collègues, nous allons passer à la deuxième partie de notre réunion d'aujourd'hui. Trois nouveaux témoins se joignent à nous pour cette heure.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Ashwin Iyer, qui comparaît à titre personnel et qui est directeur du Centre for Applied Research in Defence and Dual-use Technologies à l'Université de l'Alberta; Madeleine Redfern, cheffe de l'exploitation et directrice régionale du Nord, de CanArctic Inuit Networks Incorporated; et Heather Exner-Pirot, directrice, Énergie, ressources naturelles et environnement, à l'Institut Macdonald-Laurier.
    Vous disposez chacun d'au plus cinq minutes. Je ne suis habituellement pas strict, mais nous avons un peu dépassé le temps prévu pour les déclarations préliminaires lors de la dernière séance, alors si vous pouvez vous chronométrer ce serait bien. Je peux aussi vous faire signe lorsque vous en serez à cinq minutes. Je vous remercie.
    Je vais commencer par vous, monsieur Iyer. Allez‑y, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.
    À l'heure où le Canada prend des mesures historiques pour se doter d'une stratégie industrielle de défense plus autonome, nos établissements postsecondaires doivent être considérés comme des atouts stratégiques. Ils fournissent une infrastructure de pointe, forment la prochaine génération d'innovateurs et relient la recherche prospective aux défis pratiques auxquels font face la sécurité et la souveraineté nationales dans les secteurs essentiels de la défense et des technologies à double usage, qui vont de la fabrication et des matériaux de pointe à la détection et à la navigation, en passant par l'intelligence artificielle et l'informatique quantique.
    Les universités sont des établissements publics de confiance solidement ancrés dans les régions. Ils ont la capacité de réunir les chercheurs, l'industrie et les utilisateurs finaux militaires dans des environnements sécurisés et axés sur la mission. Ils peuvent reconstruire et développer nos capacités industrielles souveraines. Ils peuvent fournir les mécanismes nécessaires afin d'aider les entreprises canadiennes à tirer parti des possibilités qui s'offrent dans les chaînes d'approvisionnement mondiales de la défense.
    L'Ouest canadien, en particulier, est un nouveau bastion pour la sécurité nationale, qui sert de lien économique et stratégique avec les actifs essentiels dans les domaines de l'énergie, de la logistique, de la fabrication de pointe et de l'innovation. Sa proximité géographique avec l'Arctique, combinée à un vaste secteur des ressources et à une solide expertise régionale, le place dans une position de premier plan pour répondre aux besoins en matière de défense dans des domaines émergents tels que la surveillance à distance, les systèmes sans équipage et les opérations par temps froid. Bénéficiant d'infrastructures de pointe et de chaînes d'approvisionnement résilientes dans des secteurs adjacents, comme l'énergie, l'Ouest canadien est bien placé pour jouer un rôle central dans la stratégie industrielle de défense du pays.
    L'Alberta possède la plus grande concentration d'actifs de défense dans l'Ouest canadien. Le tiers de la puissance de combat de l'armée canadienne se trouve à la base des Forces canadiennes d'Edmonton. La 4 e Escadre Cold Lake est le principal centre de formation des chasseurs au pays, tandis que la base des Forces canadiennes Suffield abrite la plus grande zone d'entraînement militaire terrestre au monde.
    L'aéroport international d'Edmonton sera la principale base d'opérations dans l'Ouest de la flotte de CC‑330 Husky de l'Aviation royale canadienne et assurera l'entretien à long terme des chars de combat principaux Leopard 2 du Canada. À l'abondance des ressources dont dispose Edmonton en matière de défense s'ajoute l'écosystème solide et en croissance de l'aviation et de l'aérospatiale de Calgary.
    De plus, une constellation d'entreprises de défense multinationales viennent dynamiser toute cette activité. En effet, Lockheed Martin Canada, General Dynamics Mission Systems, Arcfield Canada, QinetiQ Target Systems et d'autres ont des installations importantes dans la province. L'Alberta compte également plusieurs petites et moyennes entreprises dynamiques dans le secteur de la défense, notamment Landing Zones, Canadian UAVs, UVAD, Scope AR, GN Corporations et Guardian Chemicals Inc.
    L'Université de l'Alberta illustre bien comment les établissements universitaires peuvent mobiliser les forces régionales pour soutenir la stratégie de défense et la prospérité économique du Canada. Historiquement, il s'agissait d'une école de formation des officiers de premier plan pendant les deux guerres mondiales, et elle a créé l'Université Khaki pour consolider la formation des soldats canadiens en service à l'étranger pendant la Première Guerre mondiale.
    Aujourd'hui, elle continue d'exercer son leadership en matière de défense en tant que membre fondateur de l'initiative du Consortium des campus connectés pour les militaires, les vétérans et leurs familles du Canada, et en tant que l'un des deux seuls centres d'essai du DIANA en milieu universitaire de l'OTAN au Canada. L'université est inscrite au Programme de sécurité des contrats et des marchandises contrôlées, ce qui garantit la sécurité des infrastructures et le respect des exigences en matière de sécurité nationale.
    Le Centre for applied research in defence and dual-use technologies, le CARDD-Tech, de l'Université de l'Alberta, est le seul centre universitaire canadien consacré exclusivement à l'innovation en défense et en technologies à double usage. Le CARDD-Tech a collaboré étroitement avec des entrepreneurs principaux, des fournisseurs canadiens et internationaux de premier niveau, des petites et moyennes entreprises et Recherche et développement pour la défense Canada, en mobilisant plus de 25 millions de dollars en projets de R‑D au sein de l'écosystème de défense du Canada au cours de la dernière année seulement.
    L'Université de l'Alberta a donc réussi à concrétiser la vision d'un écosystème régional où l'industrie et les utilisateurs finaux, en particulier les Forces armées canadiennes, sont colocalisés dans des environnements sécurisés pour la recherche, le développement, les essais et l'évaluation. Ce modèle d'innovation collaborative constitue un exemple à suivre pour d'autres établissements postsecondaires au Canada, et montre comment les forces locales peuvent être mobilisées pour répondre aux besoins de la défense nationale. Cette approche s'harmonise étroitement avec l'initiative du Carrefour sécurisé de l'innovation pour la défense récemment annoncée par le gouvernement du Canada, et place les universités et les régions en bonne position pour accélérer l'état de préparation et la commercialisation des technologies de défense à l'échelle du pays.
    Des écosystèmes intégrés situés dans les universités, ancrés dans les régions, seront essentiels pour accélérer l'état de préparation de la défense nationale, pour conserver les emplois, l'expertise et les technologies essentielles au Canada, et renforceront par la même occasion les chaînes d'approvisionnement locales. Les universités constituent le socle de la recherche axée sur la mission, des filières de production de talents et des partenariats agiles et fiables dont le Canada a besoin pour assurer son avenir et respecter ses obligations internationales.
    Je crois que l'initiative stratégique la plus importante qui peut libérer le plein potentiel des universités canadiennes en tant que partenaires stratégiques dans l'élaboration d'une solide stratégie industrielle de défense consiste à accorder un financement durable à l'infrastructure de recherche sécurisée, en le destinant à des partenaires universitaires qui ont fait leurs preuves et qui réussissent à transformer des concepts en technologies opérationnelles avec les utilisateurs finaux et l'industrie.
(1745)
    Ces universités ont besoin d'investissements fédéraux dédiés à l'établissement et au maintien d'environnements de recherche sécurisés et conçus de manière optimale pour l'innovation en matière de défense. Les priorités urgentes en matière d'infrastructure comprennent des installations pour simuler et tester la résilience des technologies canadiennes contre les attaques de guerre électronique, des laboratoires pour mettre au point des matériaux de pointe essentiels aux plateformes de drones et hypersoniques, et la capacité de soutenir un secteur de fabrication de semi-conducteurs souverain et sécurisé. Les universités servent de lien idéal pour gérer ces pôles régionaux sécurisés, en s'appuyant sur les directives opérationnelles de leurs partenaires militaires et industriels de la défense colocalisés. Cette approche accélérera l'état de préparation des technologies canadiennes, renforcera les chaînes d'approvisionnement nationales et facilitera l'accès aux chaînes d'approvisionnement mondiales.
    En conclusion, j'inviterais le Comité à imaginer un avenir où la sécurité du Canada — le bouclier d'une importance vitale qui protège notre souveraineté, notre peuple et notre prospérité — est forgée dans les salles de classe, les laboratoires et les centres d'innovation de nos universités, où certains de nos esprits les plus brillants transforment la science-fiction en technologies essentielles à la mission, en fournissant des solutions aux menaces d'aujourd'hui tout en renforçant les capacités de demain. C'est un avenir où nos universités et leurs réseaux sont considérés comme des puissances stratégiques, très axées sur l'idée de réunir la recherche, l'industrie et l'armée au sein d'un écosystème unique et sécurisé où les concepts deviennent des innovations, où les étudiants deviennent des spécialistes et où la capacité collective et la souveraineté de la base industrielle de défense du Canada sont renforcées.
    Aujourd'hui, le Canada fait face à des défis mondiaux complexes...
(1750)
    Monsieur Iyer, je comprends le tableau que vous brossez. Je suis désolé de vous interrompre, mais nous avons dépassé le temps de 90 secondes. Par respect pour le temps du Comité... Je suis certain que nos collègues auront des questions à vous poser pour que vous puissiez nous en dire plus à ce sujet.
    Je cède maintenant la parole à Mme Exner‑Pirot.
    Vous avez un maximum de cinq minutes pour nous présenter votre déclaration préliminaire. Merci.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je me joins à vous depuis Washington, D.C., où mon groupe de réflexion a coorganisé un événement axé sur le Sommet du G7 sur l'énergie et les minéraux.
    Nous avons tous constaté à quel point la politique étrangère et nationale du Canada a été recentrée, comme l'a dit le ministre Hodgson à Berlin en août, sur l'énergie et les minéraux au cours de la dernière année. Le Canada a la chance de disposer d'énormes ressources, mais nous avons rarement pensé à les utiliser de manière stratégique. Comme nos adversaires tirent parti de leur domination du marché dans les secteurs de l'énergie et des minéraux d'une manière qui nuit à nos intérêts et à ceux de nos alliés, il est essentiel que nous envisagions des façons pour le Canada de contribuer à la sécurité de l'approvisionnement.
    En ce qui concerne les minéraux critiques et la chaîne d'approvisionnement de la défense, l'alliance de l'OTAN n'a mis l'accent sur cette question que récemment, en publiant une liste de matériaux critiques pour la défense en décembre dernier. Les États-Unis ont agi avec plus d'empressement depuis l'invasion russe de l'Ukraine en 2022. Ils ont accordé beaucoup de subventions, de prêts et d'achats de capitaux, notamment dans le cadre de leur Defense Production Act, ou DPA, en vertu de laquelle le Canada est considéré comme un fournisseur national. Les États-Unis ont attribué au Canada sept contrats dans le domaine de l'extraction et de la transformation des minéraux critiques au cours des deux dernières années et demie, six sous l'administration Biden et un sous Trump.
    La principale préoccupation qui retient l'attention de tout le monde est la suivante: en cas de conflit prolongé — par exemple, avec la Chine au sujet de Taïwan —, l'adversaire aurait une capacité inacceptable de restreindre les matériaux et les composantes clés nécessaires à la chaîne d'approvisionnement de la défense. Dans une guerre d'usure, la Chine aurait certainement l'avantage grâce à sa chaîne d'approvisionnement verticalement intégrée et à sa capacité de produire plus de chars d'assaut, plus de navires, plus d'avions, plus de munitions et plus de drones. Nous voyons déjà en Ukraine à quel point un approvisionnement adéquat en équipement et en matériel de défense est important et comment un pays comme la Russie, dont le PIB est tout juste de la taille de celui de l'Espagne, peut tirer parti de son importante base manufacturière de défense.
    La base industrielle de défense du Canada s'est malheureusement atrophiée pendant de nombreuses années, et il faudra du temps pour la reconstruire. Cependant, nous pouvons jouer un rôle très important au sein de l'alliance à court et à moyen terme en fournissant à nos alliés les matières premières dont ils ont besoin pour améliorer leur production d'équipement de défense. De quoi s'agit‑il? La liste devrait probablement être tirée d'un recoupement entre les minéraux et les produits minéraux sur lesquels la Chine a un monopole ou sur lesquels elle a imposé des restrictions à l'exportation, et la liste des matières premières critiques de l'OTAN; il y a un chevauchement considérable entre ces deux listes. Le Canada peut, en particulier, jouer un rôle pour accroître la disponibilité du gallium, du germanium, du tungstène, du titane, du bismuth, du graphite et de certaines terres rares, et le Canada est déjà un producteur assez important de cobalt et d'aluminium.
    Même s'il faut beaucoup de temps pour mettre en valeur de nouvelles mines au Canada, la plupart des produits que je viens de mentionner sont des produits que nous produisons et raffinons déjà, des sous-produits de produits que nous produisons ou raffinons déjà, ou des produits pour lesquels nous avons de vieilles mines où la production pourrait être relancée. Nous pouvons faire beaucoup de choses en quelques années, et non pas en une décennie, et c'est là qu'une stratégie industrielle entre en jeu. Pour la plupart de ces minéraux de niche, la Chine a manipulé le marché, et il n'y a pas d'analyse de rentabilisation solide pour que des acteurs privés les produisent. Normalement, je suis une conservatrice partisane du laisser-faire, mais dans le cas des matériaux de défense, le marché n'est pas libre. Il incombe au gouvernement d'intervenir pour assurer l'approvisionnement.
    Le Canada s'est engagé à augmenter considérablement ses dépenses de défense. L'approvisionnement prend du temps, mais le Canada peut faire des investissements stratégiques dans la production et le traitement des minéraux critiques à court terme et, si c'est à des fins de défense, il pourrait les compter comme des dépenses de défense.
    Je tiens à souligner que le financement accordé par les États-Unis dans le cadre de la DPA a été égalé au Canada par Ressources naturelles Canada, et non par le ministère de la Défense nationale. Je pense qu'il serait très avantageux de financer et de prioriser ces projets par l'entremise du ministère de la Défense nationale, d'augmenter considérablement le financement, d'agir de toute urgence et de les compter comme des dépenses de défense.
    Il faudra probablement une décennie ou plus pour régler le problème de la dépendance à la Chine à l'égard des minéraux critiques, mais la chaîne d'approvisionnement de la défense en tant que telle est un marché relativement petit, et le Canada pourrait contribuer à détrôner la Chine. C'est un problème dont le Canada devrait se saisir, pour lequel il devrait prendre l'initiative et qu'il devrait aider à résoudre pour ses alliés. Nous ne voulons pas nous empêcher d'acquérir les actifs et les systèmes dont nous avons besoin pour notre défense, mais les minéraux critiques peuvent nous aider à accomplir beaucoup à court terme, pendant que nous mettons en place les autres éléments à moyen terme.
    Je vous remercie de votre attention et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1755)
    Merci beaucoup.
    Mme Redfern est avec nous dans la salle.
    Vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.
    Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis une femme autochtone d'Iqaluit, la capitale du Nunavut. Je travaille dans les secteurs de la haute technologie et de l'innovation des télécommunications, du numérique, des transports et de l'énergie. Je suis cheffe de l'exploitation de CanArctic Inuit Networks. L'objectif est de construire 3 000 kilomètres de câbles de fibres optiques maritimes dans l'Arctique canadien et de les relier au plus grand nombre possible de réseaux de fibres optiques sous-marins et terrestres existants ou prévus. Nous avons besoin de structures complémentaires. Bien sûr, je sais que la fibre optique est étroitement liée aux satellites.
    Je suis également PDG de SednaLink Marine Systems. Nous voulons installer des capteurs sur certains éléments stratégiques de la fibre optique sous-marine. Ce faisant, nous pourrons surveiller et obtenir les données nécessaires sur les milieux marins en ce qui a trait aux changements climatiques, mais aussi savoir ce qui se trouve dans notre environnement marin, qu'il s'agisse de sous-marins ou de systèmes sous-marins sans pilote.
    Je suis également la directrice d'Arctic360 dans le Nord. Il s'agit du seul groupe de réflexion sur l'Arctique au Canada.
    Enfin — j'occupe de nombreuses fonctions, comme de nombreux habitants du Nord —, je suis conseillère spéciale aux Laboratoires Nucléaires Canadiens et membre autochtone de la table sur le leadership en matière d'énergie nucléaire. Notre objectif est de soutenir et d'examiner les microréacteurs et les petits réacteurs modulaires qui peuvent fournir une solution énergétique permanente dans les régions rurales, éloignées et nordiques du Canada. Presque toutes les grandes infrastructures, des câbles de fibres optiques aux stations terrestres, en passant par les centres de données et les systèmes de radar transhorizon, nécessitent de l'énergie. Nous avons besoin d'une énergie stable, fiable, abondante, abordable et, idéalement, propre, bien sûr.
    J'ai oublié de dire que je suis également une directrice de la Canadian Arctic Innovation Association. Nous avons publié une étude sur la viabilité des dirigeables à des fins civiles et commerciales qui s'ajoute à l'étude sur les dirigeables réalisée par le ministère de la Défense nationale. La capacité d'acheminer de gros articles vers l'Arctique canadien à longueur d'année est une initiative vraiment transformatrice qui soutiendra non seulement nos collectivités, mais aussi l'armée.
    Nous savons que des investissements sont nécessaires dans l'Arctique canadien. Nous avons besoin des meilleures solutions technologiques à long terme qui soutiennent non seulement nos collectivités, mais aussi nos objectifs en matière de sécurité nationale; non seulement maintenant, mais aussi pour les 50 prochaines années. J'ai été mairesse d'Iqaluit pendant deux mandats, présidente de l'Association des municipalités du Nunavut et membre de l'Arctic Mayors' Forum, qui comptait des membres de toutes les nations de l'Arctique, sauf de la Russie. Ce sont, en grande partie, ces expériences qui m'ont poussée à m'intéresser et à participer aux initiatives dont je vous fais part.
    Dans ces divers domaines et fonctions, les discussions ont souvent porté sur ce qui est indispensable en matière d'infrastructures essentielles pour nos collectivités dans nos régions. Comme je l'ai dit plus tôt, on s'est bien sûr concentré sur le transport, comme l'agrandissement des pistes existantes ou l'asphaltage de ces pistes afin que plus d'aéronefs de plus grande taille ou spécialisés puissent atterrir dans ces collectivités. Il a aussi été question d'avoir recours à de plus gros avions pour la livraison de nourriture ou de permettre aux avions des forces aériennes d'atterrir.
    Nous savons que dans l'Arctique, il y a de nombreuses intersectionnalités et que l'intégration est nécessaire. Or, les différents paliers de gouvernement et les divers ministères créent souvent des cloisonnements et, par le fait même, des incohérences et des divisions. Ce que j'ai appris, c'est qu'au bout du compte, les priorités et les besoins de nos collectivités nordiques en matière d'infrastructure correspondent bien à ce que veut l'armée et à ce dont elle a besoin. Mais, malgré cela, il existe encore malheureusement de nombreux investissements non stratégiques et morcelés dans les infrastructures dans l'Arctique canadien.
    Même si le gouvernement du Canada parle de l'importance des investissements à double objectif et à objectifs multiples, il n'en demeure pas moins que presque aucun de nos ministères ne sait comment mettre cela en pratique. De fait, lorsqu'on leur présente une véritable infrastructure à double usage, la plupart des ministères affirment qu'ils n'ont aucun rôle ou responsabilité en la matière. Je pourrais vous donner de nombreux exemples, mais je sais que le temps file.
(1800)
    En conclusion, nous reconnaissons que l'industrie joue un rôle clé, puisqu'elle fait partie de la solution, tout comme, comme vous l'avez également entendu, les universités, le secteur de la défense, nos collectivités nordiques, nos dirigeants du Nord et nos dirigeants autochtones.
    Le défi consiste à savoir comment nous pouvons nous assurer, à mesure que nous déterminons les investissements stratégiques dont l'Arctique a besoin, de choisir les investissements de façon judicieuse afin d'obtenir les meilleurs résultats qui soutiennent non seulement notre sécurité à l'échelle communautaire et nos aspirations sur le plan du développement économique, mais aussi nos grands objectifs en matière de sécurité nationale.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Redfern.
    Madame Dancho, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins experts de leur présence aujourd'hui et du temps qu'il nous consacre dans le cadre de cette importante étude.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Exner-Pirot. Elles concernent votre expertise sur les minéraux critiques et le rôle qu'ils jouent dans notre secteur de la défense.
    Je pense que la plupart des Canadiens savent que le Canada dispose de minéraux critiques, mais ils ne réalisent peut-être pas tout à fait la chance que nous avons par rapport à d'autres pays. Des gouvernements à tous les niveaux se sont opposés à nombre de projets d'exploitation minière, par exemple. Et, s'ils les ont approuvés, ils prennent de nombreuses années.
    Alors que nous envisageons une politique industrielle de défense, pourriez-vous nous donner un peu plus d'information sur les raisons pour lesquelles il est essentiel que nous prenions nos ressources naturelles dans le secteur minier au sérieux et que nous les exploitions plus rapidement?
    Il va sans dire que nous nous trouvons dans une ère géopolitique marquée par des différends, des tensions et peut-être même des conflits purs et simples, car la Russie a envahi l'espace aérien de l'OTAN cette semaine, la semaine dernière et la semaine précédente. J'ai l'impression que nous nous rapprochons d'un conflit. Le Secrétaire à la Guerre des États-Unis vient de convoquer tous les généraux à Washington pour leur dire de se préparer à la guerre.
    Dans le passé, nous avons gagné des guerres grâce à une base manufacturière de défense plus solide, capable d'assurer une production accrue et d'être concurrentielle. Depuis les 20 dernières années, les chaînes d'approvisionnement sont très mondialisées. La Chine a agi de façon parfaitement stratégique en en tirant parti et en dominant d'importantes chaînes d'approvisionnement qui sont essentielles, et que nous qualifions de cruciales.
    Nous devons à tout le moins nous concentrer sur l'indépendance de notre base manufacturière de défense. Nous ne pouvons pas permettre à la Chine, tout d'abord, mais aussi à d'autres adversaires de contrôler ce que nous pouvons produire et d'entraver cette production.
    C'est pourquoi nous devons agir avec une certaine urgence. Peu de nos alliés de l'OTAN ont la capacité de le faire, mais le Canada en a la capacité.
    Je vous remercie.
    Je crois comprendre que, même si nous avons les matières premières — et bien sûr, nous pouvons déployer davantage d'efforts pour les extraire du sol —, et c'est un atout important, ce que nous produisons actuellement et ce que nous pourrions maximiser pour nos alliés... Nous exportons des matières premières, mais nous ne déployons peut-être pas autant d'efforts pour créer du matériel de défense à partir de ces matières premières.
    Cette évaluation est-elle juste, ou faisons-nous bien les deux? Dans l'ensemble, quelle est votre évaluation de la situation?
    Votre évaluation est tout à fait juste. Notre niveau de fabrication a diminué, tout comme dans la plupart des pays occidentaux. Cela dit, le Canada a un avantage concurrentiel avec l'exploitation de matières premières. Nous devrions travailler avec nos alliés pour déterminer quelle partie du processus nous pouvons leur confier. S'agit‑il des matériaux? À quel point doivent-ils être transformés ou raffinés pour qu'ils puissent les intégrer à leur base manufacturière à court terme?
    Sans matières premières, on ne peut rien produire. C'est là un domaine où le Canada peut briller. Nous pouvons nous assurer d'atteindre un stade où nous serons en mesure d'envoyer ces matières premières à nos alliés et à leurs producteurs pour qu'ils puissent les transformer en matériaux.
    Pouvez-vous donner quelques exemples simples aux Canadiens ordinaires — qui peuvent comprendre que oui, bien sûr, des minéraux entrent dans la fabrication de matériaux de défense — des ressources que possède le Canada et des éléments essentiels qu'il doit créer ou apporter à notre approvisionnement en matière de défense?
    Oui, j'en ai plusieurs. Je vais mentionner le gallium et le germanium — qui sont des sous-produits de ce que nous produisons —, car la Chine a récemment imposé des restrictions à leur exportation.
    Si vous n'étiez pas au courant — mais je pense que nous le savons tous —, nous sommes de grands producteurs d'aluminium. Le gallium en est un sous-produit, mais le marché du gallium n'était pas très bon. La Chine a maintenu les prix très bas. Rien n'incitait qui que ce soit à en faire un produit, de sorte que la Chine a presque créé un monopole sur le gallium. Là encore, le marché est très petit et très spécialisé. Il ne génère pas beaucoup d'argent. Cela dit, on a tout de même besoin de ces composantes pour fabriquer du matériel.
    Il en va de même pour le germanium. C'est un sous-produit du raffinage du zinc, que nous effectuons à Trail, en Colombie-Britannique. Encore une fois, le marché était si petit que le secteur privé n'était pas très encouragé à concurrencer la Chine.
    Il ne faudra pas grand-chose pour que nous exploitions les matières que nous possédons au Canada et pour que nous trouvions la façon de les transformer afin de les utiliser dans nos propres chaînes d'approvisionnement.
(1805)
    Que pourrait‑on produire?
    Beaucoup de choses. Il pourrait s'agir de munitions, de minéraux comme le tungstène et le bismuth dont on a besoin pour rendre les matériaux rigides. Évidemment, il y a les composantes des batteries. Les guerres sont maintenant souvent menées à l'aide de drones. Des composantes précises entrent dans la fabrication des batteries de ces appareils. La Chine domine ce secteur. Il y a l'aluminium. Au bout du compte, lorsque l'on fabrique ce matériel, on a besoin d'une grande quantité d'aluminium. L'OTAN affirme d'ailleurs qu'il s'agit d'une matière première essentielle. Pourtant, nous avons du mal à trouver des acheteurs pour notre aluminium canadien en ce moment en raison des droits de douane. On ne voudrait pas perdre cette capacité, parce qu'en cas de conflit, on aurait besoin d'une importante production d'aluminium pour répondre à la demande.
    Merci beaucoup de ces exemples.
    Bien sûr, nous pensons à l'exploitation minière, et cela peut prendre beaucoup de temps au Canada. Vous avez toutefois fait allusion à quelques mesures que nous pourrions prendre assez rapidement. Je pense que vous avez dit que nous pourrions rouvrir les mines qui ont été fermées.
    Pourriez-vous nous donner plus de détails sur ce que nous pourrions faire au cours des deux prochaines années, disons, pour aller dans la bonne direction?
    Oui. Prenons, par exemple, le germanium et le gallium. Il faut raffiner le sous-produit que nous avons déjà et accroître notre capacité en la matière. Pour certains minéraux comme le tungstène, l'antimoine et le cobalt, nous pourrions en faire plus. Nous sommes déjà un petit producteur, et nous pourrions accroître notre production. Je pense que la dernière subvention accordée par l'entremise de la DPA a été attribuée à une mine de tungstène au Nouveau-Brunswick, la mine Sisson. Nous savons où tous ces éléments se trouvent. Certaines mines ont cessé leur production dans les années 1980 ou 1990 en raison de la concurrence chinoise. Elles étaient tout simplement devenues non concurrentielles par rapport aux prix mondiaux des matières premières. Dans certains cas, la ressource est excellente et le gisement important. Nous devons simplement relancer la production. Il faut fixer un prix de la matière première qui fera en sorte qu'il sera sensé de la produire. Au bout du compte, quelqu'un doit l'acheter.
    Merci beaucoup, madame Dancho.
    Monsieur Bardeesy, vous avez la parole pour six minutes.
    J'ai deux questions pour commencer. La première concerne les technologies à double usage et s'adresse à Mme Redfern et M. Iyer. La deuxième question porte sur les objectifs de la politique industrielle de défense et s'adresse à Mme Exner-Pirot, mais les autres témoins peuvent bien sûr intervenir.
    Je tiens à vous remercier, madame Redfern, d'avoir dit que dans l'Arctique, une piste d'atterrissage constitue une technologie à double usage.
    Avec le groupe de témoins précédent, nous avons parlé du fait qu'il faut parfois acheter des technologies toutes faites, car nous ne sommes pas encore en mesure de les fabriquer. Nous avons également discuté du fait que les technologies dont nous pourrions avoir besoin dans 10 ou 15 ans revêtiront une grande importance. Elles ne sont peut-être pas celles que nous soupçonnons ou que nous sommes en train de fabriquer.
    Madame Redfern et monsieur Iyer, étant donné que vous jouez un rôle de premier plan dans les avancées technologiques, quels conseils nous donneriez-vous quant à la façon de définir des politiques qui nous permettront de miser sur certaines de ces technologies plus novatrices auxquelles ceux qui s'occupent du processus d'approvisionnement ne pensent peut-être pas?
    Nous avons la chance d'être dotés de technologies novatrices et très solides dans le secteur maritime sur la côte Ouest et la côte Est. Cependant, d'après mes discussions avec ses représentants, bon nombre des technologies n'ont pas été mises au point ou testées pour les conditions qui existent dans l'Arctique. Par conséquent, ils auraient besoin d'aide et de financement pour pouvoir le faire, car se rendre dans l'Arctique coûte très cher. Idéalement, pour renforcer ces capacités, il faudrait que ces entreprises collaborent avec nos communautés autochtones locales dans le Nord. Il y a des entreprises ou des ONG comme SIKU, qui signifie « glace ». Ces partenariats sont très fructueux.
    Je vais vous donner un autre exemple de technologie à double usage. Des avions sans pilote, des drones, ou encore des technologies sous-marines sans pilote ou des technologies similaires sont utilisés dans le cadre d'activités de surveillance de la faune. Nous pouvons les utiliser — et nous devrions le faire — pour surveiller les navires, les sous-marins ou les véhicules sans pilote dans l'environnement marin, car il pourrait s'agir d'incursions étrangères dont nous devons être informés et auxquelles nous devons savoir comment réagir.
(1810)
    Merci.
    Je pourrais aussi ajouter quelque chose à ce sujet.
    À l'université, notre travail consiste avant tout à nous tourner vers l'avenir. Nous examinons les technologies et leur évolution sur des périodes de cinq à dix ans ou même quinze ans. Nous essayons toujours de trouver un double usage aux technologies de défense. C'est dans ce domaine que nous renforçons nos capacités en matière de science fondamentale, que nous formons nos étudiants des cycles supérieurs, construisons nos laboratoires et menons nos recherches. Nous réfléchissons toujours aux différents usages des technologies de défense.
    Je vais vous donner un bon exemple. En Alberta, nous avons un écosystème très solide de conception de drones, notamment à Medicine Hat, où plusieurs petites et moyennes entreprises participent à la fabrication de drones. Bon nombre d'entre elles interviennent dans la surveillance des incendies de forêt et participent aux levés géophysiques. Les technologies qui protègent les drones dans ces environnements sont les mêmes que celles qui sont nécessaires pour la défense.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Exner-Pirot, mais les autres témoins sont les bienvenus s'ils souhaitent intervenir également.
    Dans 10 ou 15 ans, comment allons-nous mesurer le succès ou l'échec de la politique qui sera mise en place? Est‑ce que ce sera par le nombre d'entreprises qui se seront formées? Par l'augmentation du nombre de femmes dans le secteur? Par le nombre de brevets? Quelles sont les bonnes idées à privilégier pour mesurer les résultats obtenus au bout de 10 à 15 ans?
    C'est une excellente question. Voici quelques pistes pour les minéraux critiques. Il y aurait l'indépendance de la chaîne d'approvisionnement, une connaissance approfondie des composantes qui entrent dans la fabrication de ces biens et l'assurance qu'elles proviennent toutes de l'alliance ou de pays alliés, afin que nous ne dépendions pas de la Chine ni de la Russie, par exemple. Il s'agit de savoir ce qu'il y a dans nos chaînes d'approvisionnement. Habituellement, on a une bonne idée de la première et de la deuxième couches, mais on ne sait pas d'où viennent les produits fournis par l'entrepreneur ou les sous-traitants. À l'heure actuelle, la Chine vend certains minéraux et certaines composantes, mais exige que les entreprises indiquent comment elles vont les utiliser, ce qui donne à la Chine une excellente vue d'ensemble de l'écosystème manufacturier de défense occidental.
    D'un point de vue général et stratégique, si nous voulons d'une telle politique, c'est pour l'en dissuader. Si nous avions une énorme capacité industrielle de défense, si nous pouvions survivre sans la Chine et la Russie et même les surpasser, cela les dissuaderait de vouloir se lancer dans ce genre de campagnes interventionnistes, parce qu'elles sauraient qu'elles n'ont rien à y gagner. C'est ce que nous avons réussi à faire au cours des 50 ou 60 dernières années avec les dépenses de l'OTAN, grâce à une capacité supérieure, surtout avec les Américains. Elles n'osent même pas s'essayer. Je pense que parce que nous ne sommes pas aussi bons dans ce domaine et que ces pays nous ont rattrapés, ils sentent qu'ils peuvent être plus conflictuels.
    Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions, monsieur Bardeesy.

[Français]

    Monsieur Ste‑Marie, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je présente mes salutations à tous les témoins.
    Mes questions s'adresseront d'abord à Mme Redfern.
    Merci beaucoup d'être venue ici pour participer au Comité.
    J'aimerais d'abord vous demander comment se passent, dans votre territoire, les relations entre le ministère de la Défense nationale et votre nation.

[Traduction]

    Je peux vous dire que l'armée ou le ministère de la Défense s'en tire mieux que certains autres ministères pour établir des relations avec nos collectivités du Nord, en particulier en raison des exercices qu'ils effectuent dans le Nord et de leur étroite collaboration avec nos rangers de l'Arctique. Ils ont tiré des leçons des erreurs commises dans le passé. Bien sûr, je rappelle qu'on peut toujours faire mieux, et il y a une volonté de le faire, peut-être par l'élargissement du rôle des rangers au‑delà d'une unique activité, et par l'accompagnement des rangers débutants, parce que sans un programme d'accompagnement des rangers débutants, le programme des rangers de l'Arctique n'est pas viable.

[Français]

    Merci beaucoup pour les exemples que vous venez de nous donner.
    On parle beaucoup de la route maritime dans l'océan Arctique. Quels rôles votre nation peut-elle jouer pour appuyer le ministère de la Défense et les forces armées?
(1815)

[Traduction]

    Notre population est absolument ouverte à acquérir plus de compétences pour pouvoir participer aux avancées technologiques. Mon organisation inuite, la Qikiqtani Inuit Association, offre un programme assez complet sur les SIA, les systèmes d'information automatisés, afin de bien former nos gens au repérage des navires qui entrent dans la région, mais il leur permet également de parcourir davantage le territoire, pour la surveillance maritime ou la surveillance des animaux terrestres. Il leur permet d'acquérir toutes sortes de compétences différentes.
    Le principal problème dont j'entends parler, c'est que tout est très fragmenté. Il vaudrait bien mieux favoriser une approche plus holistique, parce qu'on sait que leurs compétences sont importantes pour la défense, mais elles le sont aussi pour la recherche, l'environnement et l'approvisionnement alimentaire.

[Français]

    Vous en avez parlé dans votre présentation, mais comment pourrait-il y avoir davantage d'activités économiques des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale sur votre territoire qui profiteraient à votre nation?
    Pouvez-vous nous en dire davantage à cet égard et sur ce que vous venez d'aborder?

[Traduction]

    En partie parce que le gouvernement du Canada a engagé des milliards de dollars pour améliorer la sécurité nationale et parce qu'il a réservé 5 % des dépenses à l'approvisionnement auprès d'entreprises autochtones, nous assistons à la création de beaucoup d'entreprises autochtones dans ce secteur. Je tiens à souligner que nous sommes également conscients qu'il y a beaucoup de fausses entreprises autochtones. Services aux Autochtones Canada a retiré leur attestation à plus de 1 000 fausses entreprises autochtones.
    Pour s'assurer que nos entreprises sont vraiment autochtones ou qu'elles ont une participation autochtone adéquate, il faut aller au‑delà de la simple propriété à 51 %. Il faut également, comme au Nunavut, indiquer le nombre d'Inuits qui participeront au projet en tant que tel, dans quel rôle, et préciser l'ampleur de la formation offerte ou du développement des compétences des Inuits. Il doit y avoir des rapports et possiblement des audits pour prouver que les Inuits ou les Autochtones ne sont pas seulement des membres symboliques ou une façade pour l'entreprise.
    En fin de compte, l'objectif de réserver 5 % des marchés aux Autochtones est d'assurer notre véritable participation et de veiller à ce que la richesse qui découle de notre participation revienne à nos familles et à nos collectivités, que ce ne soit pas seulement un effet boomerang par lequel on prélève taxes et impôts, puis tous les avantages vont au Sud.

[Français]

    Merci énormément pour toutes ces réponses. J'ai une dernière question à vous poser.
    En matière de surveillance et de sécurité, avez-vous comparé la collaboration entre votre nation ou votre communauté et le ministère de la Défense nationale ou les Forces armées canadiennes à ce qui se fait au Groenland, par exemple, qui est aussi membre de l'OTAN?

[Traduction]

    Veuillez répondre très rapidement, madame Redfern.
    Très brièvement, les quatre administrations régionales inuites font partie d'une entreprise appelée Nasittuq, qui travaille en partenariat avec ATCO. Ce sont elles qui s'en occupent, en quelque sorte. Il y a une allocation annuelle de 5 millions de dollars pour renforcer les compétences des Inuits. Je pense que nous pouvons et que nous devons en faire plus.
    Merci beaucoup.
    Madame Dancho, nous revenons à vous pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Redfern, je vous remercie beaucoup de vos observations. J'aimerais parler davantage de ce qu'il faut faire pour la sécurité dans l'Arctique.
    Bien sûr, lorsqu'on parle de la sécurité de l'Arctique, comme vous le savez tous, on ne parle pas seulement de la sécurité de notre Arctique. On parle de la sécurité nationale des 40 millions de Canadiens. On parle également de la défense nord-américaine.
    Lorsque les Canadiens regardent une carte, ils savent que l'Arctique nous appartient et ils veulent le garder, mais nous savons que la Russie et la Chine, qui viennent dans nos eaux territoriales, s'intéressent de plus en plus à la façon dont nous réagissons et à nos capacités, entre autres. Il est clairement établi que nous devons en faire plus dans l'Arctique pour protéger notre souveraineté.
    Par où commenceriez-vous?
    Qu'est‑ce qui vous paraît essentiel dans la politique industrielle de défense et les investissements dans l'Arctique? Que vous faudrait‑il pour avoir la certitude que nous avançons dans la bonne direction pour assurer la défense continentale?
(1820)
    L'une des initiatives réclamées par Arctic360 est la production d'un inventaire de tous les actifs existants, où l'âge et l'état de chacun seraient indiqués. Il s'agit de déterminer où des investissements essentiels doivent être faits dans les télécommunications, les transports ou l'énergie. Nous savons que l'information existe, mais elle n'est pas rassemblée en un seul endroit concis.
    De plus, on pourrait créer un outil comme SimCity — pour ceux d'entre nous qui sont plus âgés, comme moi — qui permettrait de jouer avec les éléments pour voir quelles possibilités s'ouvrent si l'on construit un câble à fibres optiques, par exemple. Eh bien, il s'avère qu'on ne peut pas construire de câble à fibres optiques sans source d'énergie durable en quantité suffisante. Cela montrerait quelles sont les possibilités, mais aussi où se situent les écueils.
    Je crois que l'armée, dans une certaine mesure, fait ce genre d'évaluation pour ses propres besoins. Le problème, c'est que nous ne le faisons pas tous ensemble. Il faudrait inclure les collectivités, l'industrie et les universités du Nord, pour bien déterminer ce qu'il faut faire, où et combien cela va coûter.
    Merci beaucoup.
    Le Canada participe à la défense continentale dans le cadre de l'accord du NORAD. Comme vous le savez, notre travail consiste entre autres à effectuer de la surveillance. Lors d'une conversation précédente avec vous, j'ai été un peu choquée d'apprendre que les radars transhorizon consomment 15 000 litres de diésel par jour. Je doute que les Canadiens soient parfaitement conscients de la dépendance de nos collectivités du Nord au diésel. L'infrastructure des pipelines et du réseau n’est tout simplement pas la même dans l'Arctique.
    Vous avez beaucoup parlé d'énergie, et je sais que vous préconisez beaucoup l'utilisation de microréacteurs modulaires, ou MRM, ou de petits réacteurs nucléaires modulaires, ou PRM. Pouvez-vous expliquer pourquoi au Comité?
    Lorsque j'ai analysé les diverses solutions énergétiques, nous avons appris, grâce à un certain nombre d'études indépendantes différentes, qu'une solution énergétique complète n'est pas possible uniquement avec l'éolien ou le solaire, dans la plupart des cas. L'énergie thermique n'est pas une option non plus en raison des conditions géologiques dans presque tout l'Arctique. Là où il y a des rivières ou des grands lacs, l'hydroélectricité pourrait être une option. Le problème, c'est que même si l'Arctique fond, nous enregistrons moins de précipitations. C'est une situation étrange où deux vérités peuvent coexister. Les villes de Whitehorse et de Yellowknife ont des barrages hydroélectriques qui nécessitent maintenant un système d'appoint au diésel.
    Cela nous laisse très peu d'options. Les microréacteurs modulaires, ou MRM, qui sont en développement, se fondent sur une vieille technologie qui est en train d'être reconvertie. Ils pourraient être utilisés à des fins civiles ou commerciales et constitueraient une solution d'énergie propre.
    Nous voyons l'industrie proposer toutes sortes de produits, d'un mégawatt à 50 mégawatts. Ce n'est pas la centrale de Darlington, qui a une capacité de 500 mégawatts. Les entreprises produisent des choses comme des batteries, donc si on a besoin de 10 mégawatts, on peut en prendre 2 de 5. Je pense qu'il n'y aura que trois à cinq entreprises qui auront de vraies solutions à nous offrir.
    Si nous voulons étendre nos opérations militaires dans le Nord, nous avons besoin d'un meilleur approvisionnement en énergie. Vous avez fait valoir que nous devrions peut-être nous tourner vers le nucléaire.
    Absolument. Sans cela, nous ne parviendrons pas à intégrer l'énergie propre, surtout dans les régions rurales et éloignées du Nord du Canada.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Bains, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie encore une fois nos témoins experts de se joindre à nous aujourd'hui. Les commentaires que nous entendons sont très éclairants.
    Vous parlez beaucoup de nos capacités. Je tiens à remercier M. Iyer de braquer les feux des projecteurs sur ce qui se passe en Alberta. Ma ville natale de Richmond, en Colombie‑Britannique, est une puissance dans le domaine de l'aérospatiale et du renseignement géospatial. Il y a de la construction navale qui se fait en Colombie‑Britannique. Les navires de soutien interarmées seront bientôt mis en service. Nous avons vu bien des navires océanographiques.
    Madame Redfern, vous avez beaucoup parlé de capacité dans l'Arctique et des progrès technologiques applicables aux navires, de la technologie qui existe, mais qui ne fonctionne pas toujours dans l'Arctique. J'ai eu l'occasion de constater les progrès réalisés dans la construction navale. Boeing étant situé dans ma circonscription, nous avons vu l'avion Poseidon et ses capacités dans l'Arctique. On a beaucoup parlé des capacités et des technologies nécessaires dans l'Arctique.
    Que pensez-vous de ces projets d'approvisionnement?
(1825)
    Mon cousin, Kirt Ejesiak, est propriétaire d'Arctic UAV, qui se spécialise dans le secteur, à l'échelle locale, mais il a du mal à obtenir des contrats publics ou des partenariats qui garantiraient des initiatives durables à long terme dans la région. Le défi, dans certains cas, c'est d'être une entreprise nordique ou autochtone en concurrence avec les très grandes entreprises du Sud qui ne veulent parfois pas s'associer à nous ou ne voudraient de nous que comme partenaire symbolique. Le potentiel est là, mais il faut du temps pour bâtir des relations d'affaires, et les entreprises du Sud doivent comprendre que nous avons besoin de temps pour renforcer nos capacités. Nous savons que notre population souhaite participer et qu'elle veut vraiment établir des partenariats de ce type.
    Merci. L'île de Vancouver en est un autre exemple. De nombreuses entreprises autochtones là‑bas participent à la fabrication de nos sous-marins.
    Je peux peut-être passer à vous, monsieur Iyer. Vous avez mentionné l'Alberta et notre capacité. Encore une fois, j'aimerais m'attarder aux autres possibilités, aux marchés spécialisés dans lesquels le Canada pourrait être bien positionné, comme celui des dispositifs optiques à micro-ondes dans le secteur de la technologie de défense. Comme je l'ai dit, nous avons un formidable écosystème technologique en Colombie‑Britannique. Je me demande s'il y aurait là une occasion à saisir.
    Absolument. C'est exactement ce que j'essayais de dire dans ma déclaration préliminaire. Cela correspond tout à fait à ce que vous dites.
    Nous avons beaucoup d'expertise régionale dans de nombreux domaines différents. Comme vous l'avez mentionné, la Colombie‑Britannique est un centre névralgique en aérospatiale, mais aussi dans le domaine maritime, en intelligence artificielle et en technologies quantiques. Il faut profiter de ces forces régionales. Les universités sont au coeur des conversations.
    Pour répondre à la question précédente, les universités étudient déjà les menaces de prochaine génération. Les chercheurs se demandent ce que les économies locales et l'industrie locale ont à offrir. Ils appuient les petites entreprises. Les universités bénéficient d'infrastructures auxquelles ces entreprises peuvent avoir accès. Les universités ont des mécanismes pour accélérer les activités des petites entreprises et les mettre en contact avec les FAC et RDDC. C'est essentiellement ce que nous faisons normalement au quotidien.
    L'Université de la Colombie‑Britannique en est un parfait exemple, tout comme l'Université de la Colombie‑Britannique à Okanagan. Vous avez parlé des micro-ondes. Ces universités sont fortes en micro-ondes, comme nous sommes forts en micro-ondes. Toronto aussi. Il est important que nous décidions quels rôles nous voulons jouer dans l'écosystème élargi de l'innovation technologique en matière de défense et que nous misions vraiment sur nos forces régionales.
    Je vous remercie.
    Bien sûr, encore une fois, je tiens à vanter sans gêne le BCIT, l'Institut de technologie de la Colombie‑Britannique, qui est situé à Richmond et offre de l'excellente formation dans le domaine de l'aérospatiale.
    Je pourrais peut-être...
    Malheureusement, monsieur Bains, votre temps est écoulé. Je vous ai laissé pistonner votre province, mais je ne peux pas vous laisser le faire deux fois.
(1830)

[Français]

    Monsieur Ste‑Marie, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Redfern, les changements climatiques ouvrent la voie maritime dans le Nord, mais ils apportent beaucoup de changements pour votre population et sur votre territoire, par exemple sur la banquise, sur le pergélisol et ainsi de suite.
    Voudriez-vous nous présenter brièvement les enjeux, de votre point de vue, et ceux pouvant toucher à la défense?

[Traduction]

    Je peux vous dire que ce que nous observons dans l'environnement bâti par l'humain, dans nos collectivités, touche également le territoire. Le pergélisol fond. Cela signifie qu'il faut tenir compte de ce risque inhérent dans la construction de presque chaque nouveau type d'infrastructure. Sinon... Je me souviens que je disais, quand j'étais mairesse, que nous avons des milliards de dollars d'infrastructures en péril parce que le pergélisol ne fond pas de façon uniforme.
    De nouvelles technologies sont déployées et utilisées. Je peux vous dire que sous le tarmac de la piste d'Iqaluit, il y a des panneaux d'isolation. De plus, lorsqu'on construit de nouveaux grands bâtiments, surtout pour le gouvernement du Canada ou le gouvernement du Nunavut, des poteaux sont installés près des bâtiments pour essayer de réguler la température et d'atténuer le problème.
    Nous avons également raté des occasions de faire mieux parce que la Ville d'Iqaluit a enfoui ses conduites d'eau et d'eaux usées dans ce que nous pensions être du pergélisol dur comme du béton. Le problème, c'est qu'à mesure que le pergélisol fond, ces conduites brisent. Si on avait installé des capteurs sur ces tuyaux, ou ce qu'on appelle des « attaches flexibles » sur les joints, pour éviter que les tuyaux se brisent... Le défi consistait en fait à obtenir de l'argent des différents ordres de gouvernement pour atténuer les risques.
    Pour l'armée, toutes les infrastructures essentielles qui doivent être construites doivent être résistantes aux changements climatiques, donc nous devons nous assurer qu'elles le sont. Ce que nous avons souvent constaté, c'est que les 10 % supplémentaires qu'il faut prévoir dans un projet d'infrastructure pour la protéger contre les changements climatiques valent bien l'investissement.

[Français]

    Merci beaucoup, nakurmiik.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Chers collègues, merci beaucoup.
    J'aimerais saisir l'occasion de remercier encore une fois les témoins d'avoir pris le temps de venir rencontrer le Comité. Nous avons entendu beaucoup d'idées intéressantes de divers points de vue. Merci beaucoup.
    Chers collègues, je vais libérer les témoins, mais juste avant que vous-mêmes ne partiez, nous avons une petite question à régler. La greffière vous a envoyé les chiffres du budget prévu pour nos études.
    J'ai une brève remarque à faire. Vous avez peut-être sourcillé, comme moi, en voyant certains chiffres. Il importe de souligner qu'il s'agit d'estimations, au cas où nous recevrions des témoins de toutes les régions du pays, qui tiennent compte des coûts associés. Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas du budget réel pour les témoins confirmés. Si nous estimons avoir besoin d'approfondir la conversation pour creuser dans les détails, nous pourrons nous permettre de le faire, mais je voulais d'abord présenter le budget au Comité afin que nous puissions aller de l'avant, s'il y a consentement unanime.
    Je vois que le Bloc est pour, le Parti conservateur aussi. Je ne vois pas d'opposition du côté des libéraux. Je considère la motion adoptée.
    Encore une fois, il ne s'agit pas de ce que nous allons dépenser, mais simplement du plafond que nous nous fixons.
    Chers collègues, cette réunion a été très productive. Merci beaucoup. Nous nous reverrons bientôt.
    La séance est levée.
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