La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom des formidables habitants de Cowichan—Malahat—Langford, dans l'île de Vancouver. J'aimerais prendre un instant pour rendre hommage à un résidant de Langford, M. Matt Gariepy, qui a récemment pris sa retraite de la Marine royale canadienne après 23 années de service. Toutes mes félicitations, Matt.
Aujourd'hui, j'ai l'honneur de prendre la parole au nom des personnes courageuses qui servent notre pays au sein des Forces armées canadiennes. En tant qu'ancien combattant, je suis fier d'avoir travaillé avec tant de femmes et d'hommes héroïques et j'ai beaucoup de respect pour ceux qui ont servi sous les drapeaux et ceux qui continuent de le faire. Je suis très bien placé pour comprendre le soutien dont ont besoin toutes les personnes qui revêtent l'uniforme canadien et je me suis donné comme mission de continuer à les écouter et à veiller à ce que leurs besoins soient satisfaits.
Malheureusement, il arrive trop souvent que les militaires soient touchés par des traumatismes sexuels en milieu militaire, un problème que le projet de loi vise à régler. Mes collègues conservateurs et moi croyons sincèrement qu'il faut trouver des solutions réalistes aux problèmes d'inconduite sexuelle, de racisme et de sexisme, ainsi qu'aux autres formes de harcèlement dans l'armée. Tous les militaires méritent un milieu de travail sûr et respectueux, surtout compte tenu de l'ampleur des sacrifices que nous leur demandons déjà, à eux et à leur famille.
Trois anciens magistrats de la Cour suprême du Canada, les juges Deschamps, Fish et Arbour, ont produit des rapports distincts sur l'inconduite sexuelle dans les forces armées, dont le premier a été publié en 2015. Pourtant, nous attendons toujours que la majorité des recommandations soient mises en œuvre. Selon les plus récentes données publiques, moins de la moitié de ces recommandations ont été mises en œuvre, et je ne comprends pas pourquoi le gouvernement est resté les bras croisés et a constamment fait fi des militaires, en particulier des personnes qui souffrent de traumatismes sexuels en milieu militaire. Ces personnes méritent mieux que l'inaction dont le gouvernement libéral a fait preuve jusqu'à présent.
Dans le système actuel, les victimes et leur famille n'ont aucune réponse, et leur dossier reste en suspens, en attendant qu'on prenne les mesures nécessaires. Après 10 ans et 3 rapports distincts, le gouvernement libéral commence enfin à mettre en œuvre des mesures législatives pour remédier aux affreux simulacres de justice, un problème que le gouvernement libéral aurait dû régler il y a des années.
Bien qu'il arrive extrêmement tard, le projet de loi pourrait permettre de donner suite à l'une des nombreuses recommandations des rapports Deschamps, Fish et Arbour qui doivent être mises en œuvre. Les conservateurs souhaitent que ce projet de loi soit renvoyé au comité, où il devra manifestement faire l'objet d'un examen rigoureux. Nous devons entendre les experts, y compris ceux du milieu juridique, ainsi que les victimes et les militaires en poste ou à la retraite.
Malheureusement, ce projet de loi n'est pas sans poser problème. Les conservateurs ont déjà discuté avec de nombreux intervenants au sujet du projet de loi dans sa forme précédente, le projet de loi , et de nombreuses questions et préoccupations doivent être prises en compte. Voilà pourquoi nous appuyons le projet de loi en principe, mais nous estimons qu'il doit faire l'objet d'un examen approfondi par le comité.
L'une des préoccupations exprimées est que le projet de loi ouvrirait la voie à une ingérence politique accrue dans la nomination par le gouverneur en conseil du directeur des poursuites militaires, du directeur du service d'avocats de la défense et du grand prévôt. Ces derniers ne relèveraient plus du juge-avocat général, comme c'est le cas actuellement. Bien que cette modification parte d'une bonne intention, à savoir créer une indépendance vis-à-vis de l'armée et du juge-avocat général, elle donnerait en fin de compte plus de pouvoir au ministre de la Défense nationale.
Non seulement le ministre aurait un contrôle direct sur les postes clés liés aux enquêtes et aux questions juridiques au sein des Forces armées canadiennes, mais ce changement lui permettrait aussi de publier des lignes directrices relatives au projet de loi en matière de poursuites judiciaires. Ce changement atténuerait certes l'ingérence des forces militaires, mais il ouvrirait aussi la porte à une ingérence politique directe. Compte tenu des affaires dont nous avons été directement témoins au cours de la dernière décennie — affaires où le gouvernement libéral a exercé une ingérence politique accrue —, on peut craindre que cette tendance s'aggrave avec l'adoption du projet de loi. Je parle de cas comme celui du vice-amiral Mark Norman et de l'ancien chef d'état-major de la défense Jonathan Vance.
De plus, les modalités relatives à la durée des mandats et au processus de nomination des personnes concernées ne sont pas claires. Il n'y aurait aucune cohérence avec les autres nominations faites par le gouverneur en conseil. Il faut régler ces questions avant de mettre en œuvre le projet de loi.
Le projet de loi indique que, pour les affaires d'inconduite sexuelle survenue au Canada, les enquêtes et les poursuites seraient confiées aux autorités civiles, ce que nous soutenons. Qu'en est-il toutefois des cas qui se produisent à l'étranger pendant un déploiement? Les enquêtes et les poursuites continueraient de relever de la police militaire. Or, déjà sous le régime actuel, celle-ci a souvent du mal à mener des enquêtes fructueuses et à intenter des poursuites; on redoute donc maintenant une atrophie prévisible de ses compétences, puisqu'elle aurait moins d'affaires à traiter. Il faut en tenir compte dans la mesure législative afin que justice soit bel et bien rendue aux membres des Forces armées canadiennes, au pays comme en mission à l'étranger.
De plus, même si la police militaire peut toujours lancer des enquêtes sur les cas survenus en sol canadien, elle doit les confier aux enquêteurs civils dès que possible. C'est un pas dans la bonne direction, mais nous devons veiller à ce que ces enquêtes ne soient pas entravées, ce qui nous ramène à la question de l'ingérence politique.
En effet, les enquêtes civiles menées sans entraves seront essentielles au bon déroulement des affaires portées devant les tribunaux civils. Il est donc primordial de définir le processus dans le projet de loi, en soulignant l'importance pour les enquêtes d'être menées en toute indépendance et sans entrave. Les renseignements liés aux enquêtes doivent être recueillis et communiqués selon des protocoles stricts. Il faut des protocoles solides afin que les enquêteurs civils bénéficient de droits d'accès illimités. Ce ne sont là que quelques exemples des principaux problèmes qui nécessiteront un examen rigoureux du projet de loi par le comité.
La dernière préoccupation dont je souhaite parler, c'est la capacité des tribunaux civils à prendre en charge ces affaires. À cause des politiques laxistes des libéraux en matière de criminalité, les tribunaux civils sont de plus en plus débordés depuis 10 ans. Le projet de loi ne ferait que surcharger un système qui est déjà débordé. Dans ces circonstances, les procureurs pourraient refuser d'intenter des poursuites s'il est peu probable qu'elles aboutissent à une déclaration de culpabilité. De quels recours les victimes disposeront-elles alors? Les sanctions prévues par le code de discipline interne des forces armées pourraient toujours être imposées, mais le seraient-elles?
Je crains que cela ne fasse qu'alimenter la mentalité qui consiste à tolérer les traumatismes sexuels systémiques dans les Forces armées canadiennes. Nos militaires ne se sentent ni en sécurité ni respectés. Ils ne se sentent ni soutenus ni honorés par le gouvernement. Nous devons remédier au problème des inconduites et du harcèlement sexuels pour que nos militaires commencent à ressentir ce respect. De nombreux survivants de traumatismes sexuels en milieu militaire sont libérés des forces armées ou les quittent. C'est le cas aussi pour de nombreuses autres victimes de problèmes systémiques dans l'armée, ce qui a une incidence énorme sur le recrutement et le maintien en poste.
Il manque environ 16 500 membres dans les Forces armées canadiennes. Le Canada manque cruellement de femmes et d'hommes dévoués pour former les troupes qui participeront à des missions. À l'heure actuelle, l'armée compte plus de 10 000 membres en uniforme qui ne peuvent pas être déployés par manque de formation. Autrement dit, ces hommes et ces femmes n'ont pas les compétences ou la formation nécessaire pour accomplir les tâches pour lesquelles ils ont été embauchés.
Cette situation est à la fois intenable et gênante pour le Canada. Nous devons faire tout notre possible pour mettre en place les mesures de soutien réclamées par nos militaires. Ils en ont besoin pour se sentir en sécurité et respectés sur leur lieu de travail, qu'ils soient sur une base au Canada ou en mission en Lettonie.
Au cours des derniers jours de débat, les discussions ont largement porté sur les figures de haut rang accusées d’inconduite sexuelle, comme les amiraux et les généraux, des noms qui font la une. Pourtant, ce qui me préoccupe, ce sont les histoires dont nous n'entendons pas parler aux nouvelles: celle du jeune lieutenant qui a été violé à répétition par son commandant; celle de la caporale qui, après avoir informé ses commandants de ce qui s'était passé, s'est fait dire qu'il n'y avait pas de preuve ou, pire, que les éléments de preuve avaient été balayés sous le tapis; celle de la jeune sergente qui a été immobilisée au sol et violée par ses pairs parce qu'elle avait reçu un prix prestigieux; ou celle de la caporale-chef qui a été violée par un autre membre des forces alliées en Lettonie, hors de la juridiction canadienne, là où les autorités locales refusent d'intervenir. J'ai entendu des membres du Service national des enquêtes des Forces canadiennes dire à une victime qu'ils avaient tout ce qu'il fallait pour obtenir une condamnation, mais qu'on leur avait dit de ne pas intenter de poursuites pour ne pas ternir l'image de l’armée.
Toutes ces victimes de traumatismes sexuels en milieu militaire dont je vous ai parlé, je les connais personnellement. Je les ai rencontrées et elles m'ont raconté leur histoire. Ce sont autant d'exemples de ce que vivent les victimes.
C'est pourquoi nous devons transférer ces dossiers aux tribunaux civils et pourquoi les conservateurs appuient dans l'ensemble le projet de loi , même s'il a 10 ans de retard. Une étude approfondie par le comité s'impose pour veiller à ce que les changements soient mis en œuvre efficacement. Il est bon de voir que les députés s'entendent sur certains des objectifs généraux du projet de loi. J'ai hâte de creuser les problèmes en détail dans le cadre des travaux du comité afin que nous puissions passer à l'étape de la troisième lecture et mettre en place une mesure législative appropriée.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet de la modernisation plus que nécessaire du système de justice militaire canadien et de la transformation de la culture au sein des Forces armées canadiennes.
Le projet de loi constitue une étape importante dans le renouvellement des Forces armées canadiennes et les efforts pour que nos institutions militaires reflètent les valeurs de justice et de dignité auxquelles les Canadiens et les membres des Forces s'attendent et qu'ils méritent. Le système de justice militaire du Canada doit non seulement se fonder sur l'équité, la reddition de comptes et le respect, mais aussi maintenir la confiance que les Canadiens accordent aux institutions qui les servent. Avec le projet de loi C‑11, nous avons également la responsabilité de les protéger.
Le projet de loi représente un changement à un moment où le Canada investit considérablement dans les forces armées, mais nous ne pouvons pas investir dans notre armée sans investir dans son personnel, en particulier les femmes, les victimes et les survivantes d'inconduite sexuelle.
Avant mon élection à la Chambre, j'ai consacré ma carrière à promouvoir des solutions systémiques, l'équité dans les systèmes politiques et la réforme des politiques afin de renforcer la représentation des femmes dans la vie publique. Je me suis efforcée de garantir que les femmes et les autres groupes sous-représentés aient leur mot à dire dans les décisions qui ont une incidence sur leur vie, en particulier dans les domaines où leur voix a traditionnellement été absente.
À bien des égards, le projet de loi , Loi sur la modernisation du système de justice militaire, est un prolongement de ce travail. Il vise à donner à tous les membres des Forces armées canadiennes les outils, le respect et le soutien dont ils ont besoin pour servir le pays au sein d'un milieu qui accorde une grande importance à leur sécurité et à leur dignité.
Les Forces armées canadiennes jouent fièrement un rôle essentiel pour défendre notre pays et protéger l'ensemble des Canadiens, au Canada comme à l'étranger, intervenant à la suite de catastrophes naturelles, défendant notre souveraineté et contribuant à la paix et aux efforts de sécurité dans le monde. Les services qu'ils rendent partout au Canada sont une source de fierté nationale.
Depuis trop longtemps, des incidents d'inconduite sexuelle ont une incidence profonde sur des personnes, des familles, et des unités entières. Les examens indépendants des anciens juges Arbour et Fish de la Cour suprême ont produit des recommandations claires.
Le projet de loi donnerait suite à ces recommandations, faisant en sorte que tous les membres des Forces armées canadiennes soient protégés contre le harcèlement et l'inconduite. Le projet de loi renforce le système en mettant en œuvre l'appel du juge Morris Fish à renvoyer les infractions sexuelles aux autorités civiles et en s'appuyant sur les 48 recommandations de Louise Arbour pour régler les problèmes culturels systémiques.
Premièrement, le projet de loi retire aux Forces armées canadiennes le pouvoir de traiter les infractions au Code criminel qui sont de nature sexuelle et qui ont été commises au Canada. Les enquêtes et les procédures à l'égard de ces infractions deviendraient la responsabilité exclusive des autorités civiles.
Il ne s'agit pas d'un ajustement technique. C'est une question de principe. Il faut s'attaquer à la violence sexuelle avec toute la transparence, la reddition de comptes et l'indépendance du système de justice civile. Le projet de loi inscrirait dans la loi que ces infractions ne relèveraient plus de la compétence des Forces armées canadiennes. Les forces et les autorités policières civiles auraient une compétence exclusive sur ces cas, ce qui garantirait une plus grande clarté et une plus grande équité dans leur traitement.
Ces problèmes ne sont pas uniques aux forces armées, mais ils ont été aggravés par un système de justice qui semble parfois mal outillé pour gérer les complexités des inconduites, surtout dans une culture où les dynamiques de pouvoir sont profondément ancrées. C'est pourquoi le projet de loi vise non seulement à réformer les politiques, mais aussi à poursuivre la transformation culturelle au sein des Forces armées canadiennes. Il reconnaît que la justice militaire doit évoluer en même temps que les besoins et les valeurs d'une société en mutation. Nous sommes déterminés à faire en sorte que les Forces armées canadiennes deviennent un lieu où chacun de ses membres, peu importe son sexe, ses antécédents ou son grade, se sent en sécurité, respecté et habilité à servir.
Une autre priorité du projet de loi est de rétablir la confiance du public dans les Forces armées canadiennes pour répondre à des décennies de préoccupations soulevées par les victimes et les survivants des Forces armées canadiennes.
Quand les victimes nous disent qu'elles ont subi des préjudices, nous devons les écouter. Notre gouvernement prend des mesures décisives pour rétablir et renforcer cette confiance au sein des Forces armées canadiennes. Les réformes prévues par le projet de loi renforceraient l'indépendance des principaux intervenants du système de justice militaire, notamment le grand prévôt et le directeur des poursuites militaires.
Le rôle de ces intervenants serait renforcé afin d'accroître leur indépendance et de garantir que les décisions soient prises en fonction du droit et des preuves, et non en fonction de la hiérarchie ou de la politique. Afin de renforcer la transparence, le grand prévôt serait tenu de présenter au ministre un rapport annuel détaillant les activités de la police militaire et du grand prévôt. Cette obligation de rendre compte renforcerait la responsabilité et garantirait que le Parlement et les Canadiens soient tenus informés des progrès et des difficultés au sein du système.
Le plus important est peut-être que le projet de loi renforcerait le soutien aux victimes. Il établirait le droit de demander la nomination d'un agent de liaison de la victime, qui serait chargé d'aider la victime tout au long du transfert des dossiers, quelle que soit l'autorité compétente. Il s'agit là d'une reconnaissance significative du traumatisme que subissent souvent les victimes et de la nécessité d'adopter des approches compatissantes et centrées sur les survivants. Le projet de loi contribuerait à garantir que, peu importe dans quelle instance l'affaire est traitée, la victime ne soit jamais laissée seule face au système.
Pendant que nous débattons du projet de loi aujourd'hui, nous devons garder à l'esprit que, même s'il est important de moderniser le système de justice militaire, il est tout aussi essentiel de soutenir les survivants d'inconduite sexuelle.
Au cours de la dernière décennie, le Centre de soutien et de ressources sur l'inconduite sexuelle a été un élément essentiel de la réponse de l'équipe de la Défense à l'inconduite sexuelle. Grâce au travail du centre, nous avons pu fournir aux survivants et aux personnes touchées par l'inconduite sexuelle les ressources dont ils ont besoin pour amorcer le processus de guérison.
J'aimerais prendre un moment pour mentionner certains des programmes et services essentiels que le Centre de soutien et de ressources sur l'inconduite sexuelle offre aux survivants.
Pour toutes les personnes qui ont été touchées par une inconduite sexuelle, que ce soit en tant que victime, témoin ou même personne qui soutient une victime ou un survivant, le centre offre un accès 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 à des services confidentiels qui tiennent compte des traumatismes. Par exemple, la ligne de soutien 24/7 est accessible à tout membre de l'équipe de la Défense et à sa famille. Le personnel donne des conseils anonymes et bilingues, et renseigne sur les options de soutien disponibles, y compris l'aiguillage vers des ressources communautaires.
De plus, le Programme de coordination de l'intervention et du soutien désigne un coordonnateur chargé de soutenir les survivants à toutes les étapes de leur parcours, de la divulgation initiale à la procédure judiciaire, et même d'aider les survivants à passer à des services civils s'ils le souhaitent. Ces mesures de soutien ne sont qu'une partie des services offerts aux victimes et aux survivants.
Le projet de loi va encore plus loin pour garantir que le système de justice au sein des Forces armées canadiennes soit véritablement conforme aux valeurs canadiennes. L'une des dispositions les plus importantes du projet de loi est le transfert de la compétence en matière d'infractions criminelles à caractère sexuel aux autorités civiles au Canada. Cette disposition est conforme à la recommandation de la juge Arbour visant à garantir que ces affaires soient traitées par les autorités civiles, où elles peuvent faire l'objet d'enquêtes, de poursuites et de jugements indépendamment de la hiérarchie militaire. Cette mesure envoie un message fort, non seulement aux survivants, mais aussi à tous les membres des Forces armées canadiennes, selon lequel les inconduites sexuelles ne seront pas tolérées et seront traitées avec le sérieux qu'elles méritent.
Ce projet de loi ne vise pas seulement à réformer le droit, mais aussi à faire évoluer la culture militaire. Changer la culture n'est pas facile, mais c'est possible. Nous avons constaté des progrès. Nous avons entendu des survivants s'exprimer. Nous avons constaté une prise de conscience croissante du fait que le statu quo n'est plus acceptable. Nous devons sortir du silence et instaurer une culture de responsabilité, de transparence et de respect, non seulement au sein des Forces armées canadiennes, mais aussi dans l'ensemble de la société, sur toutes ces questions.
Je tiens à souligner le rôle extraordinaire joué par des expertes en matière de violence contre les femmes telles que Julie Lalonde, Farrah Khan, Pamela Cross et Emma Phillips, qui ont courageusement milité pour que nos institutions changent et qui nous ont tous invités à jouer un rôle dans l'évolution de notre conception de la violence persistante dans notre société. Ce travail est particulièrement important alors que nous cherchons à recruter et à maintenir en poste la prochaine génération de membres des Forces armées canadiennes.
Les jeunes Canadiens veulent intégrer des institutions qui correspondent à leurs valeurs. Ils veulent travailler dans des milieux sûrs, inclusifs et respectueux. Ce projet de loi nous aiderait à créer exactement un tel milieu de travail, où tous les membres peuvent s'épanouir.
Le projet de loi est l'incarnation législative de ces progrès. Résultat d'années de militantisme, de consultation et de réflexion, il montre clairement que le gouvernement est sérieux dans sa volonté de transformer les Forces armées canadiennes et les institutions militaires.
Le projet de loi n'est pas une fin en soi: il marque simplement une autre étape dans un long processus de changement institutionnel. Les réformes ne visent pas seulement à réparer un système défaillant, mais à en bâtir un meilleur dans lequel le système de justice militaire reflète l'inclusion, le respect et la reddition de comptes. Ce projet de loi ferait en sorte que chaque membre des Forces armées canadiennes, peu importe son grade, son genre ou ses origines, puisse servir en toute confiance en sachant que ses droits seront protégés et que sa voix sera entendue.
Je tiens à saluer les survivants qui se sont exprimés, les défenseurs des droits qui ont réclamé une réforme, les experts qui ont offert des conseils et les membres des Forces armées canadiennes qui ont réclamé un meilleur système. C'est grâce à leur courage et à leur persévérance que ce projet de loi a été rendu possible.
J'encourage vivement tous les députés à appuyer le projet de loi . Joignons le geste à la parole: soyons solidaires des survivants et de la réforme. Faisons-le en l'honneur des membres des Forces armées canadiennes.
Je suis fière d'appuyer ce projet de loi et j'encourage vivement mes collègues à en faire autant. Bâtissons des Forces armées canadiennes où chaque personne peut servir en se sachant en sécurité, respectée et valorisée.
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Monsieur le Président, c'est un privilège de prendre la parole à la Chambre pour officiellement exprimer mes observations au sujet du projet de loi . Ce projet de loi revêt une importance nationale. Il est grand temps d'adopter ces mesures législatives, compte tenu de toutes les années qui se sont écoulées depuis les recommandations formulées dans le rapport initial. D'ailleurs, je crois que ce dernier avait été commandé par un gouvernement conservateur pour faire la lumière sur les actes odieux commis au sein des Forces armées canadiennes. Il est plus que temps de nous attaquer sérieusement à ces problèmes.
Le projet de loi aurait une incidence indéniable sur les habitants de Brandon—Souris, que je suis très fier de représenter. Parmi mes concitoyens, il y a en effet le personnel dévoué des Forces armées canadiennes en poste à la Base des Forces canadiennes Shilo, où l'on trouve le 2e Bataillon, Princess Patricia's Canadian Light Infantry, le 1er Régiment, Royal Canadian Horse Artillery et les nombreux autres militaires et civils qui travaillent sur cette base, dont l'impact est majeur. Il y a plus de 1 100 employés en tout, un nombre considérable dans l'Ouest du Manitoba. Je ne peux que réitérer ma grande fierté de représenter ces gens depuis des années, d'abord en tant que député à l'Assemblée législative du Manitoba et, aujourd'hui, à la Chambre des communes.
Des problèmes liés aux transgressions sexuelles et aux agressions sexuelles au sein des forces armées nous sont rapportés beaucoup trop souvent à mon bureau de circonscription, tout comme les répercussions du manque de services qui devraient être accessibles à de nombreuses personnes qui subissent des actes aussi dévastateurs de la part de leurs collègues, de leur conjoint ou de toute autre personne. Ces problèmes ne me sont certainement pas étrangers, malheureusement. C'est une réalité très triste, mais c'est la réalité. J'ai donc pensé qu'il était important de prendre la parole et de dire que nous devons mieux aider les personnes qui risquent leur vie pour notre grand pays sous notre fier drapeau canadien.
Il est très important de souligner que les conservateurs ont toujours dit que les membres des Forces armées canadiennes méritent un milieu de travail sûr et respectueux et que ceux qui n'ont pas vécu dans un tel milieu en portant l'uniforme méritent que justice soit faite. Nous avons entendu de nombreux conservateurs donner des exemples personnels — certains très personnels — de milieux qui n'étaient pas sûrs ni respectueux récemment, au cours des dernières années ou, malheureusement, des dernières décennies. Il est temps de mettre en place un système qui fonctionne mieux pour les victimes et qui ne protège pas les acteurs malveillants. Beaucoup de systèmes au pays sont axés sur la protection des mauvaises personnes, alors que les victimes sont laissées pour compte. Ce n'est qu'un exemple, mais il s'agit d'un problème important auquel il faut s'attaquer.
Chose certaine, nous appuyons les recommandations et nous soutenons la mise en place d'un système visant à garantir que justice soit rendue aux personnes qui ont subi ce type de traumatisme au sein des Forces armées canadiennes. Toutefois, nous estimons que le projet de loi doit faire l'objet d'un examen minutieux au comité. C'est pourquoi nous tenons à faire part de notre opinion dans le cadre du débat. Le gouvernement, qui a mis tant de temps à présenter un projet de loi sur cette question, continue de se demander pourquoi les conservateurs prennent la parole à ce sujet. C'est parce que nous avons des questions importantes et que les libéraux doivent avoir du temps pour y répondre. Nous savons qu'ils ne sont pas les plus rapides lorsqu'il s'agit de se pencher sur les préoccupations soulevées par les Canadiens, en particulier par l'opposition officielle, et lorsqu'il s'agit d'examiner les projets de loi qu'ils présentent.
Nous posons ces questions maintenant dans l'espoir que les libéraux pourront y répondre à l'étape de l'étude en comité. Je viens de poser une question à une députée libérale et elle a admis qu'elle ne connaît aucunement la réponse. Je lui ai demandé pourquoi le projet de loi prévoit un traitement différent pour les crimes selon qu'ils sont commis en sol canadien ou au cours d'un déploiement de personnel des forces armées à l'étranger. Je suis reconnaissant à la députée d'avoir été honnête, mais les députés ministériels qui interviennent au sujet d'un projet de loi présenté par le gouvernement dont ils font partie devraient probablement connaître les réponses aux questions avant de prendre la parole pour livrer un discours à la Chambre des communes.
Cela dit, certaines de nos préoccupations concernent les tribunaux civils et leur capacité à traiter les dossiers. Nous comprenons qu'ils ont probablement plus d'expérience pour traiter ce genre d'affaires, mais ils sont déjà engorgés. Régulièrement, des cas d'infractions graves avec violence — qu'il s'agisse d'infractions sexuelles ou de comportements violents — se heurtent au cadre de l'arrêt Jordan, et les délinquants s'en tirent parce que les tribunaux ne parviennent pas à mener à bien la procédure assez rapidement pour que les affaires soient entendues et qu'un verdict soit rendu.
Si on confiait davantage de dossiers au système judiciaire civil, quelles dispositions les libéraux mettraient-ils en place pour que celui-ci puisse gérer cette charge de travail supplémentaire? Le gouvernement libéral est resté muet à ce sujet, ce qui est préoccupant, parce que s'il promet que les affaires seront entendues plus efficacement, il doit affecter les ressources nécessaires au projet de loi et simplifier les procédures pour ne pas que les affaires soient rejetées en raison du cadre de l'arrêt Jordan.
Pourquoi le projet de loi ne s'appliquerait-il qu'aux cas survenus en sol canadien? Je soulève de nouveau cette question parce qu'elle est importante. La police militaire traiterait globalement moins de cas, ce qui, au fil du temps, pourrait entraîner des lacunes dans la formation ou l'expertise relative au traitement des cas, mais elle serait quand même appelée à traiter des cas à l'étranger. Quelles normes et quelles exigences en matière de formation et d'expertise les libéraux mettraient-ils en place pour que la police militaire maintienne — ou même renforce — des normes rigoureuses lors de ses enquêtes sur des cas à l'étranger?
Même dans les meilleures circonstances, la tâche peut s'avérer difficile, compte tenu des différentes administrations et, dans bien des cas, des différents pays et des différentes citoyennetés dont on doit tenir compte lorsque des cas surviennent dans le cadre d'opérations multilatérales, comme le déploiement en cours en Lettonie. Les soldats de la base des Forces canadiennes Shilo, dans ma circonscription, viennent de terminer une affectation de six mois en Lettonie. Qu'advient-il alors des capacités de la police militaire?
Alors que les libéraux sont au pouvoir, les statistiques sur la criminalité sont en hausse au pays. C'est un fait. Nous ne prévoyons pas de baisse de la demande. En fait, elle augmentera probablement pour les tribunaux civils s'ils doivent juger des militaires en plus et leur infliger des peines. Cela pourrait également vouloir dire que les politiques laxistes des libéraux en matière de criminalité, en vertu des projets de loi et qui permettent aux individus ayant commis des infractions sexuelles violentes de purger leur peine à domicile, pourraient également être appliquées aux militaires déclarés coupables de telles infractions s'ils doivent être jugés par la justice civile.
Dans le cas des très petites bases, comme celle de ma circonscription, certaines personnes pourraient habiter à un coin de rue de leur agresseur qui est en détention à domicile pendant que l'affaire est devant les tribunaux et après la déclaration de culpabilité. Nous trouvons qu'une telle situation serait totalement acceptable, compte tenu de ses vastes implications et de ses répercussions sur les victimes, qui devraient être notre priorité. Les libéraux ne font qu'encaisser des défaites dans la guerre contre la criminalité, et nous craignons qu'ils laissent tomber encore d'autres victimes s'ils tentent de faire régner la justice au sein des Forces armées canadiennes.
Je pense que nous avons soulevé des préoccupations importantes pour lesquelles les libéraux n'ont pas fourni de réponse conséquente, et c'est pourquoi il est important que nous débattions en profondeur du projet de loi, tant à l'étape de la deuxième lecture qu'au sein du comité.
Je tiens à dire très clairement que nous voulons que, dans les Forces armées canadiennes, les victimes reçoivent un traitement équitable qui est le même pour toutes les victimes. Elles doivent bénéficier du respect et de la dignité qu'elles méritent, et la justice doit être rendue.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer fermement le projet de loi .
Les personnes qui servent notre pays méritent de se sentir protégées et respectées au sein des Forces armées canadiennes. Elles doivent y être à l'abri du harcèlement, de la discrimination et des actes d'inconduite. Lorsque des torts leur sont causés, elles méritent un système de justice où les règles sont claires et équitables et où la priorité est accordée aux victimes et aux survivants.
Depuis beaucoup trop longtemps, les membres des Forces armées canadiennes, en particulier les femmes et d'autres groupes sous-représentés, subissent des actes d'inconduite sexuelle et de harcèlement qui ébranlent la confiance dans le système de justice militaire. Les survivants nous ont dit à maintes reprises que le système leur était hostile. C'est inacceptable.
Le projet de loi repose sur les témoignages de courageux survivants et sur le travail inlassable de deux anciens juges de la Cour suprême, les juges Arbour et Fish, qui ont tous deux étudié les problèmes de près. Le projet de loi répond directement à la recommandation no 5 de la juge Arbour et à plusieurs recommandations du juge Fish visant à renforcer le système de justice militaire.
Le projet de loi retirerait aux forces armées la compétence en matière d'enquêtes et de poursuites concernant les infractions sexuelles visées par le Code criminel et commises au Canada. Ces affaires relèveraient désormais du système de justice civil. Il s'agit d'un changement majeur. Jusqu'à présent, il existait ce qu'on appelle une compétence concurrente, ce qui signifie que les systèmes militaire et civil pouvaient tous deux traiter ces affaires. Dans la pratique, cette situation créait de la confusion et des incohérences, et trop souvent, les victimes ne savaient pas vers qui se tourner.
En conférant aux autorités civiles la compétence exclusive pour traiter ces infractions, nous garantirions la clarté, la transparence et l'équité. Tout comme dans les cas de meurtre ou d'homicide involontaire, les infractions sexuelles présumées commises par des membres des forces armées au Canada seraient jugées par des tribunaux civils. Ce changement garantit que les crimes très graves seraient traités avec le sérieux et l'indépendance qu'ils méritent.
Le projet de loi améliorerait également le soutien aux victimes. Il permettrait la nomination d'un agent de liaison de la victime, qui serait à la disposition des victimes tout au long du transfert des dossiers, quelle que soit l'autorité compétente. Les victimes n'auraient plus à naviguer seules entre deux systèmes. Elles disposeraient plutôt d'un agent désigné pour les aider à comprendre le processus et à faire entendre leur voix.
De plus, le projet de loi renforcerait l'indépendance au sein du système de justice militaire. Les principaux intervenants comme le directeur des poursuites militaires et le directeur du service d'avocats de la défense seraient désormais nommés par le gouverneur en conseil. Cette mesure éliminerait l'influence réelle ou perçue de la chaîne de commandement, ce qui renforcerait la confiance des membres dans l'équité du système.
Le projet de loi vise aussi à corriger la discrimination dont les personnes appartenant aux groupes sous-représentés sont depuis longtemps victimes dans le traitement et le transfert des dossiers. Le projet de loi ferait en sorte que le système de justice militaire continue de s'aligner sur le Code criminel et le système de justice civile. Il y aurait alors une plus grande équité pour tous.
Nous savons que cette situation ne s'inscrit pas dans un contexte isolé. Depuis la recommandation provisoire de la juge Arbour en 2021, le directeur des poursuites militaires a fait en sorte que toutes les accusations d'infraction d'ordre sexuel au Code criminel soient portées devant les tribunaux du système de justice civile. Le projet de loi viendrait inscrire cette pratique dans la loi.
Certains se demandent peut-être pourquoi le projet de loi ne porte que sur les infractions commises au Canada. C'est une question de champs de compétence. Dans le cas des infractions commises à l'étranger, la police militaire devrait toujours...
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Au cours des dernières années, monsieur le Président, les Canadiens ont vu les Forces armées canadiennes faire des efforts considérables pour se moderniser et évoluer en tant que milieu de travail du XXI
e siècle. Même si on a déjà accompli beaucoup de choses à cet égard, il reste encore beaucoup à faire. Le projet de loi constitue une autre étape cruciale vers une réforme institutionnelle significative et durable.
Le projet de loi vise à renforcer la confiance dans le système de justice militaire. Ce serait la prochaine étape dans les efforts du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes pour donner suite aux recommandations issues d'examens indépendants menés par les anciens juges de la Cour suprême, le juge Fish et la juge Arbour. Ces rapports, et plus de 100 recommandations en ayant découlé, demeurent extrêmement importants pour l'ensemble de nos efforts de transformation de la culture. Globalement, ces examens ont contribué à orienter les efforts du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes en vue de transformer le système de justice militaire et de faire évoluer la culture interne. Ces examens ont permis de mettre en place un processus d'évaluation impartial, en soulignant à la fois les efforts qui n'ont pas répondu aux attentes et les barrières qui existent toujours, et de formuler des recommandations pour améliorer la situation. Voilà pourquoi je présenterai aujourd'hui un aperçu de ces examens externes indépendants et des progrès réalisés par le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes pour donner suite aux recommandations jusqu'à présent.
Je commencerai par l'examen externe indépendant et complet, également connu sous le nom de rapport Arbour. Lancé en avril 2021, cet examen dirigé par l'ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour avait pour but de faire la lumière sur les cas de harcèlement et d'inconduites sexuelles à la Défense nationale et dans les Forces armées canadiennes, ainsi que d'examiner les politiques, les procédures, les programmes, les pratiques et la culture, notamment au sein même du système de justice militaire. Le rapport final a été rendu public le 30 mai 2022, et la ministre de l'époque a accueilli favorablement les 48 recommandations. Lorsque le rapport final a été reçu, il contenait 17 recommandations qui pouvaient être mises en œuvre immédiatement.
C'était le cas de la recommandation no 48, qui portait sur la nomination d'un contrôleur externe pour superviser la mise en œuvre des recommandations du rapport Arbour. La ministre de l'époque a confié à Mme Jocelyne Therrien le poste de contrôleuse externe, avec pour tâche de fournir à la ministre des rapports d'étape mensuels sur la mise en œuvre des recommandations et de produire des rapports d'étape semestriels qui seraient rendus publics.
En août 2023, le ministre a annoncé la mise en œuvre des recommandations nos 7 et 9, qui visaient à modifier les processus militaires en matière de grief et de harcèlement. Grâce à la mise en œuvre de ces recommandations, tout membre des Forces armées canadiennes qui a été victime de harcèlement sexuel, d'inconduite sexuelle ou de toute autre forme de discrimination fondée sur le sexe ou le genre dans l'exercice de ses fonctions peut désormais choisir de porter plainte directement à la Commission canadienne des droits de la personne sans d'abord épuiser les processus internes de règlement des griefs et des plaintes de harcèlement.
Les recommandations nos 28 et 29 du rapport Arbour proposaient également des améliorations pour le système des collèges militaires. Voilà pourquoi, en décembre 2023, le ministre a annoncé la nomination de sept personnes à la Commission d'examen des collèges militaires canadiens, chargée d'évaluer les deux collèges militaires du Canada. En mars 2025, cette commission a publié son rapport, qui comprenait 49 recommandations couvrant divers domaines, notamment les coûts, la gouvernance et la qualité de la formation.
Avec le projet de loi , dont nous débattons aujourd'hui, nous répondons également aux principaux aspects de la recommandation no 5 du rapport Arbour en retirant aux Forces armées canadiennes leur compétence en matière d'enquête et de poursuite pour les infractions au Code criminel de nature sexuelle commises au Canada. Depuis décembre 2021, toutes les nouvelles accusations d'infractions au Code criminel de nature sexuelle sont maintenant portées devant le système civil, et aucune nouvelle accusation d'infraction au Code criminel de nature sexuelle n'est jugée par le système de justice militaire. Le Groupe de la Police militaire des Forces canadiennes dirige également un groupe de travail sur le cadre opérationnel des infractions au Code criminel de nature sexuelle avec le solliciteur général et le ministère du Procureur général de l'Ontario afin d'élaborer un cadre pour le transfert des dossiers.
Le projet de loi donne également suite à plusieurs recommandations — huit pour être précis — qui émanent du troisième examen indépendant de la Loi sur la défense nationale, effectué par le juge Fish. Les modifications concernées visent, entre autres, à modifier le processus de nomination du grand prévôt des Forces canadiennes, du directeur des poursuites militaires et du directeur du service d'avocats de la défense, à élargir le groupe de personnes pouvant être nommées à un poste de juge militaire de manière à inclure les militaires du rang, et à confirmer que l'exercice par le juge-avocat général de son autorité sur tout ce qui touche à l'administration de la justice militaire s'effectue dans le respect de l'indépendance des autorités du système de justice militaire.
Ces modifications visent à renforcer la confiance dans les autorités compétentes du système de justice militaire qui agissent indépendamment de la chaîne de commandement et à renforcer la confiance des Canadiens dans le système de justice militaire.
Nous prenons ces recommandations au sérieux et nous agissons rapidement. Nous savons que les membres des Forces armées canadiennes comptent sur nous. Alors que le gouvernement fait un investissement générationnel dans la défense nationale du Canada, nous savons que nous devons aussi investir dans nos gens. Les membres des Forces armées canadiennes sont au cœur de la défense nationale du Canada. Des militaires nous ont dit à maintes reprises qu'ils veulent se sentir en sécurité, protégés et en mesure de servir dans un milieu de travail moderne digne du XXIe siècle.
Les examens externes de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes nous ont également appris que nous devons moderniser le système de justice militaire. C'est précisément ce que nous faisons avec le projet de loi , Loi sur la modernisation du système de justice militaire. Les modifications législatives proposées dans le projet de loi joueraient un rôle essentiel pour nous aider à donner suite à plusieurs recommandations importantes concernant l'inconduite sexuelle et renforceraient la confiance dans le système de justice militaire.
J'encourage tous les députés à unir leurs efforts pour appuyer cet important projet de loi.
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Monsieur le Président, en tant que député de London—Fanshawe, c'est un honneur pour moi de prendre la parole pour prononcer un discours sur un sujet aussi important.
Les conservateurs honorent le courage des hommes et des femmes des Forces armées canadiennes. Tandis que leur devoir est de protéger le Canada, le nôtre est de les protéger. Le projet de loi est présenté comme un pas dans cette direction. Il poursuit la modernisation du système de justice militaire, qui est attendue depuis longtemps, dans le but déclaré de rendre justice aux victimes d'inconduite sexuelle dans l'armée. Cependant, les Canadiens s'attendent à des résultats, pas à de beaux discours. Ils veulent que le projet de loi mène à de réels progrès pour les victimes, à l'application régulière de la loi ainsi qu'à la discipline et à l'efficacité de nos forces armées.
Le projet de loi modifierait la Loi sur la défense nationale afin que la plupart des infractions sexuelles présumées avoir été commises au Canada soient transférées aux tribunaux civils. Il harmoniserait le droit militaire avec les récentes mises à jour du Code criminel, y compris les ordonnances de non-publication et la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Ce projet de loi vise à créer une plus grande distance entre la chaîne de commandement et trois acteurs clés de la justice en transférant au gouverneur en conseil le pouvoir d'effectuer les nominations et en faisant en sorte que ces acteurs rendent des comptes directement au ministre. Le projet de loi remplacerait le titre du grand prévôt par celui de grand prévôt général, dont le un grade est plus élevé. De plus, des dates d'expiration de mandat seraient fixées pour les postes de directeur des poursuites militaires et de directeur du service d'avocats de la défense.
Sur papier, ces changements reflètent en partie les recommandations d'experts formulées précédemment par des juristes et des groupes de victimes. Les conservateurs disent depuis longtemps que tous les militaires méritent un milieu de travail sûr et respectueux, exempt de discrimination, de racisme, d'abus d'autorité et d'inconduites sexuelles.
Il ne fait aucun doute que nous appuyons l'objectif de ce projet de loi. Malheureusement, nous savons que la mesure législative, dans sa forme actuelle, ne répond pas à de graves préoccupations quant à la capacité, à la cohérence ou à l'indépendance nécessaires pour rendre véritablement justice sans créer de nouveaux problèmes et sans ouvrir la porte à l'ingérence politique.
Parlons d'abord de la capacité.
Le projet de loi ne prévoit aucun nouveau plan afin de garantir la capacité ou une expertise spécialisée pour les dossiers militaires qui sont envoyés dans les systèmes provinciaux. Depuis 2021, le gouvernement renvoie des cas dans la branche civile. Les victimes et les témoins ont attendu, et de nombreux dossiers historiques n'ont jamais été traités parce que les preuves étaient périmées ou que les enquêtes comportaient des lacunes.
La police civile et les bureaux de la Couronne sont déjà à bout. Le projet de loi ne contient pas de marche à suivre claire pour les dossiers historiques. Une promesse sans plan n'est pas synonyme de justice. Les victimes méritent des échéanciers, des mesures de soutien tenant compte des traumatismes et de vraies perspectives de condamnation lorsque les preuves le justifient.
Ma deuxième préoccupation concerne la cohérence.
Le code de discipline militaire constitue un cadre complet qui maintient la discipline, l'efficacité et le moral. Il s'appliquerait encore à presque tout, sauf aux infractions sexuelles commises au Canada. Les infractions sexuelles commises à l'étranger seraient encore de compétence militaire. Pourquoi une même allégation devrait-elle être traitée différemment?
Cette division risque de nuire à la cohérence. Elle affaiblit les liens entre la responsabilité criminelle et la discipline militaire alors que le comportement en question peut être directement lié aux fonctions militaires et à la cohésion de l'unité. Le projet de loi devrait plutôt faire en sorte que les conclusions des tribunaux civils guident automatiquement la discipline militaire et les conséquences professionnelles. Il devrait également définir comment les forces armées protégeraient les plaignants sur les bases pendant que les processus civils suivent leur cours.
Le gouvernement doit expliquer comment la police militaire pourrait maintenir ses compétences en matière d'enquête si elle ne traite plus ce genre de dossier au Canada, alors que l'expertise est particulièrement importante dans ce domaine. Il n'explique pas comment se ferait la coordination entre les forces armées et les autorités des pays hôtes lors des déploiements en mer ou dans les bases alliées où des civils travaillent aux côtés des militaires canadiens. Si nous ne planifions pas ces éléments dès maintenant, nous risquons d'affaiblir les enquêtes et de soumettre les victimes à un système à deux vitesses fondé sur la géographie.
Parlons maintenant de l'indépendance et du risque d'ingérence politique.
Le projet de loi ferait en sorte que des membres clés du système de justice militaire relèvent directement du ministre. L'objectif déclaré est l'indépendance par rapport à la chaîne de commandement, mais le projet de loi donnerait au ministre le pouvoir de donner des directives écrites ou d'établir des lignes directrices concernant les poursuites. Il déterminerait des durées de mandats différentes selon les postes, d'une façon qui semble arbitraire. Il gonflerait le rang du grand prévôt, qui deviendrait « grand prévôt général ». Il supprimerait les renouvellements de mandat pour deux administrateurs, mais pas pour d'autres.
Quand les nominations sont confiées au Cabinet sans garanties claires et uniformes, les Canadiens y voient un risque d'ingérence politique. Ils ont déjà vu ça auparavant. Ils ont déjà vu de l'ingérence politique et des retards systématiques qui sapent la confiance et font attendre les victimes. Si le gouvernement veut inspirer la confiance, il devrait garantir des critères de sélection clairs, uniformes et transparents, des mandats fixes, et la divulgation publique de toute directive ministérielle.
L'équité est également essentielle. La justice doit fonctionner tant pour le plaignant que pour l'accusé afin que les résultats soient crédibles, durables et acceptés par tous. Un processus qui tient compte des traumatismes subis par les victimes et qui est équitable sur le plan procédural pour les accusés permet d'obtenir des condamnations plus fermes et des acquittements plus légitimes.
Quand les poursuites sont confiées à la justice civile, les militaires devraient avoir un accès clair à une aide juridique pour que chaque affaire soit jugée sur la base des preuves et du droit, et non en fonction des moyens de chacun ou d'une représentation incertaine. Garantir à la fois l'équité et la cohérence permet de rendre véritablement justice aux victimes et de renforcer la confiance dans l'ensemble du système.
Enfin, en matière de culture et de leadership, des rapports ont fait état d'une culture du silence de longue date et d'une pratique courante consistant à négocier les plaidoyers dans les cas d'infractions mineures commises lors du service militaire. Cela n'a pas pris fin comme par magie avec le dépôt d'une nouvelle mouture du projet de loi. Pour que la confiance règne, il faut que les dirigeants rendent des comptes. Pour que la confiance règne, il faut que les hauts gradés ne puissent pas utiliser leur position pour brouiller les enquêtes ou influencer les résultats.
La Chambre doit affirmer clairement que personne n'est au-dessus des lois. Cela vaut pour les ministres qui ont fait fi des preuves, les chefs qui ont été protégés et les officiers supérieurs qui ont négocié pour revoir à la baisse les chefs d'inculpation et minimiser la gravité des faits. Les politiques ne suffisent pas; leur mise en œuvre et leur contrôle sont essentiels.
Comme je l'ai dit, il est clair que les conservateurs appuient l'objectif du projet de loi, mais nous devons adopter une approche responsable à l'égard de la mesure législative, qui est importante. Nous appuierons le renvoi du projet de loi au comité, car les victimes méritent que des progrès soient réalisés, et non que l'on accuse encore plus de retard.
Au comité, nous insisterons pour que des modifications soient apportées, notamment dans les domaines suivants: un plan de capacité civile élaboré avec les provinces et les territoires, comprenant une formation financée, des personnes-ressources dédiées aux dossiers militaires, des normes de service pour les décisions en matière de poursuites et la publication de rapports sur les délais et les résultats; un lien clair entre les verdicts civils et le code de discipline militaire afin que les décisions pénales soient automatiquement suivies d'un examen administratif; de véritables garanties d'indépendance, y compris des mandats uniformes non renouvelables pour les principaux administrateurs, des critères de sélection transparents fondés sur le mérite et la publication de toute directive ministérielle accompagnée de motifs; un cadre d'aide juridique pour les membres accusés dans le volet civil, avec des règles d'admissibilité et des contrôles des coûts afin que la justice soit rendue sur la base des faits et non des finances; un plan pour les enquêtes à l'étranger, qui établit des tâches conjointes avec des partenaires civils, des examens externes des cas graves et des accords clairs pour les navires et les installations des alliés; un soutien pratique offert aux victimes en élargissant le mandat du Centre de soutien et de ressources sur l'inconduite sexuelle, afin de fournir une aide juridique, de planifier la sécurité sur le lieu de travail et de communiquer avec les autorités civiles; une discipline en matière de mandat et de grade qui supprime l'inflation inutile des grades et se concentre sur les capacités et la responsabilité plutôt que sur les titres.
C'est ainsi que l'on honore le courage des gens qui se sont manifestés, notamment ceux qui ont été ignorés ou punis pour avoir parlé. C'est ainsi que l'on protège les membres actuels qui sont postés sur une petite base ou qui font partie d'une unité soudée et qui craignent encore des représailles. C'est ainsi que l'on préserve la discipline et l'efficacité afin que les forces armées puissent recruter des membres, les entraîner et déployer ses troupes avec confiance.
Les victimes veulent obtenir justice rapidement et concrètement. Les membres des Forces armées canadiennes veulent un système équitable et prévisible. Les Canadiens veulent une armée qui reflète nos valeurs et qui peut faire face aux menaces auxquelles nous sommes confrontés. Les conservateurs travailleront de bonne foi pour améliorer le projet de loi. Nous insisterons sur l'indépendance accompagnée d'une reddition de comptes. Nous insisterons sur le renforcement des capacités selon des échéanciers. Nous insisterons sur un leadership qui assume ses responsabilités au lieu de se cacher derrière un processus.
Nos militaires sont ce que le Canada a de meilleur. Ils méritent un système de justice digne de leur service.
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Uqaqtittiji, je tiens d'abord à dire que le NPD appuie le projet de loi .
Je dédie mon discours aux victimes d'abus dans l'armée, qui méritent que justice soit faite.
Les Canadiens qui servent et qui ont servi dans les forces armées et dans la réserve méritent notre respect et notre gratitude. Des femmes, des hommes, des membres de la communauté 2ELGBTQIA+, des Autochtones et des personnes issues des minorités racisées ont tous servi dans les forces armées. Un trop grand nombre d'entre eux ont été victimes d'agression sexuelle. Ils sont aussi trop nombreux à être confrontés au racisme, au sexisme, à l'homophobie et à la transphobie dans l'exercice de leurs fonctions.
Les membres des Forces armées canadiennes risquent leur vie pour défendre la souveraineté du Canada, tant au pays qu'a l'étranger. Ces militaires et leur famille font d'énormes sacrifices pour servir le Canada. Le NPD est déterminé à assurer leur santé, leur bien-être, leur sécurité et leur protection. Nous demandons qu'ils aient accès à du soutien et à des services pendant et après leur service militaire.
Les Forces armées canadiennes jouent un rôle essentiel pour assurer la sécurité du Canada et préserver sa souveraineté. Nous sommes tous choqués par les reportages sur les traumatismes sexuels subis dans le monde militaire, et nous voulons tous qu'un véritable changement de culture s'opère au sein des forces armées.
Je vais d'abord vous dire pourquoi, d'un point de vue historique, nous appuyons le projet de loi. En 2015, la juge Deschamps a publié son rapport, qui comportait des recommandations importantes. Il a fallu des années aux libéraux pour y donner suite.
En 2022, les libéraux ont accepté les recommandations du rapport distinct de la juge Arbour. Les libéraux ont dit aux Canadiens qu'ils entameraient le transfert aux tribunaux civils de toutes les enquêtes criminelles relatives à des infractions sexuelles. C'est une autre de leurs promesses non tenues. Trois ans plus tard, environ la moitié des affaires se trouvent toujours devant les tribunaux militaires. Pourquoi? On ne le sait pas.
Il y a eu des problèmes majeurs dans les affaires qui ont été transférées. La caporale à la retraite Arianna Nolet a été parmi les premières victimes de traumatismes sexuels en milieu militaire dont le dossier a été transféré aux tribunaux civils. Malheureusement, son affaire a été suspendue en raison de retards dans les échanges entre la police militaire et la police civile.
Depuis cet incident, de nombreux autres survivants n'ont pas pu obtenir justice parce que leur affaire a été suspendue à la suite de retards. Les retards étaient dus à deux facteurs. Premièrement, les autorités civiles hésitaient à prendre en charge les affaires et, vu qu'il s'agit d'une compétence commune, elles n'étaient pas tenues de le faire. Deuxièmement, il y avait des retards considérables dans le transfert des dossiers par la police militaire, si bien que certains observateurs se sont demandé si la police militaire le retardait indûment.
Les néo-démocrates continuent de militer pour que les survivants de traumatismes sexuels dans l'armée obtiennent de meilleurs résultats. Mon amie la députée néo-démocrate Rachel Blaney a été chargée de mener une étude parlementaire historique sur l'expérience de vétéranes. Celles-ci ont relaté de première main les traitements horribles qu'elles ont subis pendant leur service au sein de l'armée canadienne. L'étude a abouti, en 2024, à un rapport percutant intitulé « Plus jamais invisibles ». Ce rapport a été le catalyseur qui a finalement poussé le gouvernement libéral à agir.
La députée néo-démocrate Lindsay Matheson a mené une série de consultations auprès de survivants pendant l'été, puis a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire. Le projet de loi aurait immédiatement mis fin au conflit de compétences et garanti qu'aucun autre cas ne serait pris dans ce bras de fer. Malheureusement, le projet de loi C‑362 de Lindsay est mort au Feuilleton quand M. Trudeau a prorogé le Parlement.
Compte tenu de l'état du projet de loi et de la manière dont il a été présenté, certaines questions doivent être examinées au comité. J'en citerai quelques-unes. Premièrement, le projet de loi ne traite pas de manière adéquate les incidents survenus dans les réserves, la marine, le programme des cadets ou les déploiements internationaux. Pourquoi ne sont-ils pas inclus? Les victimes de ces incidents ne méritent-elles pas que justice leur soit rendue?
Deuxièmement, les survivants se sentent trahis par le gouvernement fédéral. Les survivants nous disent qu'ils ont besoin de plus de voies d'accès à la justice. Ils disent que des voies d'accès à la justice seront supprimées. Quelles consultations ont inclus les victimes et comment les voix des victimes sont-elles prises en compte dans le projet de loi ?
Troisièmement, le projet de loi pourrait avoir comme conséquence imprévue de créer un système binaire entre les comportements criminels et les formes de harcèlement moins graves, qui pourraient devenir plus tolérées et pour lesquelles les victimes pourraient bénéficier de moins de soutien. Quels amendements seront nécessaires pour que justice soit rendue comme il se doit aux victimes d'abus, quels que soient ces abus?
Quatrièmement, depuis le scandale des inconduites sexuelles commises par de hauts dirigeants, les demandes du NPD visant à faire de l'ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes un mandataire du Parlement se font plus insistantes. Le titulaire de ce poste doit avoir le pouvoir d'exiger des documents et de mener des enquêtes systémiques. Les autres partis appuieront-ils les amendements visant à renforcer la surveillance civile?
Cinquièmement, des amendements sont nécessaires concernant le nouvel agent de liaison de la victime. Il ne faut pas qu'il soit nommé par le commandant. Étant donné que le commandant est impliqué directement ou indirectement dans beaucoup de cas, il faut revoir cette proposition. La nomination doit avoir lieu hors de la chaîne de commandement. De plus, il faut que les parlementaires examinent l'aide juridique pour les survivants et l'indépendance des services de counseling offerts aux membres des Forces armées canadiennes.
Sixièmement, le nous a avertis que le budget en serait un d'austérité. Élargir le mandat des autorités civiles sans hausse de budget correspondante créera des problèmes et risque en fait de coûter plus cher. Le budget de novembre pourrait réduire le financement destiné aux services juridiques et aux forces de l'ordre. Cela n'a aucun sens. Le budget réduira-t-il davantage le financement destiné à la police militaire?
Septièmement, vu la composition des Forces armées canadiennes, les enquêtes pourraient inclure des victimes, des témoins et d'autres personnes d'intérêt dans plus d'une province ou d'un territoire, voire dans des bases militaires d'accès restreint. Une unité de police régionale n'a pas les ressources pour traiter pareil cas. Du point de vue logistique, il pourrait être difficile de recruter et de déployer des forces de l'ordre civiles de façon ponctuelle. Comment les policiers civils vont-ils enquêter sur un incident qui ne se limite pas à leur territoire, surtout si l'incident se produit au cours d'une opération en sol canadien, y compris les opérations de routine dans le Nord et les patrouilles navales côtières dans l'Arctique? Qu'en est-il des incidents qui surviennent à l'étranger? Quels outils les instances judiciaires civiles auront-elles concernant les déploiements à l'étranger, les navires de la marine, et cetera auxquels les civils ne peuvent accéder immédiatement?
Nous devons tenir compte de questions telles que la garde des éléments de preuve pour éviter que des affaires soient rejetées.
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Monsieur le Président, je suis ravi de me lever à la Chambre aujourd'hui pour débattre d'un projet de loi très important pour la communauté militaire, ainsi que pour la population canadienne, soit le projet de loi , la loi sur la modernisation du système de justice militaire.
Cette loi va avoir un impact profond sur les membres des Forces armées canadiennes, mais également sur les vétérans et les vétéranes. En effet, le projet de loi C‑11 permet de répondre aux inquiétudes dont les victimes et les survivants de la communauté militaire canadienne nous ont fait part au cours des dernières années. Il comprend une série de modifications ciblées, qui visent à moderniser le système de justice militaire et à renforcer le soutien aux victimes et aux survivants.
La loi donne suite à la recommandation no 5 du rapport de l'ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour et à huit recommandations du rapport de l'ancien juge de la Cour suprême l'honorable Morris Fish. Plus précisément, le projet de loi propose d'apporter six modifications. Je vais donner un petit aperçu de toutes ces modifications.
Premièrement, il va inscrire dans la loi le fait que les Forces armées canadiennes n'ont plus de compétence en matière d'infractions sexuelles prévues au Code criminel commises au Canada. Deuxièmement, il va inscrire dans la loi que les autorités civiles ont la compétence exclusive pour enquêter et entamer des poursuites relatives à des infractions sexuelles prévues au Code criminel commises au Canada. Troisièmement, il crée un poste d'agent de liaison pour aider les victimes. Cet agent sera à la disposition des victimes tout au long du transfert des dossiers, quelle que soit la compétence. Quatrièmement, le projet de loi vise à renforcer le rôle des principaux acteurs de la justice afin d'accroître leur indépendance. Cinquièmement, il vise à lutter contre la discrimination historique dont sont victimes les groupes sous-représentés dans le traitement et le transfert des affaires. Finalement, il vise à veiller à ce que le système de justice militaire reste aligné sur le Code criminel et le système de justice civile.
Notre gouvernement prend très au sérieux le bien-être des membres des Forces armées canadiennes. C'est pourquoi nous avons travaillé fort ces dernières années pour mettre en œuvre l'ensemble des 48 recommandations du rapport de l'ancienne juge Louise Arbour, dont plus de 30 recommandations ont été mises en œuvre à ce jour. D'ici la fin de l'année, avec l'adoption de ce projet de loi, j'espère que nous serons en mesure de dire que ce ne sont pas 47 recommandations, mais bien toutes les 48 recommandations de l'ancienne juge Arbour qui ont été mises en œuvre.
Je me permets de donner un aperçu des recommandations de la juge Arbour. Il y a trois ans maintenant, Mme Arbour a remis au ministre de la Défense nationale son rapport final sur l'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes. Ce rapport, intitulé « Rapport de l’examen externe indépendant et complet du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes », contient 48 recommandations axées sur la réforme des « lacunes institutionnelles » et des « obstacles structurels » qui ont permis au problème de persister.
Dans la recommandation no 48 de son rapport, la juge Arbour demandait au ministre de la Défense nationale de nommer un contrôleur externe mandaté pour superviser la mise en œuvre des recommandations de ce rapport et des autres recommandations externes qu'elle accepte. La contrôleuse externe Mme Jocelyne Therrien a fait part de son cinquième rapport en juillet. Mme Therrien a souligné que nous continuons de progresser et sommes sur la bonne voie pour respecter l'objectif des 48 recommandations d'ici la fin de l'année 2025.
En effet, nous avons réalisé des progrès considérables à l'égard de la clarification des définitions et de la terminologie dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations nos 1 et 2.
En juin de l'an dernier, l'Équipe de la Défense a annoncé que les politiques utilisant le terme « inconduite sexuelle » seraient mises à jour pour remplacer ce terme par « harcèlement de nature sexuelle », « manquement à la conduite de nature sexuelle » et « crime de nature sexuelle ». De plus, la notion d'« agression sexuelle » sera définie séparément dans les politiques concernées.
En mars de cette année, les Forces armées canadiennes ont adopté la définition de harcèlement et de violence du Code canadien du travail, harmonisant ainsi leur programme de lutte contre le harcèlement avec le programme de prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail pour les employés de la fonction publique. Cela a donné lieu à une politique de lutte contre le harcèlement et la violence dans le lieu de travail unifiée et applicable à la fois aux employés de la fonction publique du ministère de la Défense nationale et aux membres des Forces armées canadiennes.
Ce changement a également répondu à la recommandation no 3 du rapport de la juge Louise Arbour. Les membres des Forces armées canadiennes qui sont victimes ou témoins de harcèlement ou de violence dans le lieu de travail bénéficient maintenant d'un moyen plus simple pour signaler les incidents, de mécanismes de résolution informels et d'un processus d'enquête simplifié.
Nous avons également réalisé des progrès à l'égard de la prestation d'une gamme de services et de soutien pertinents aux victimes. En réponse à la recommandation no 14 du rapport de la juge Arbour, le Centre de soutien et de ressources sur l'inconduite sexuelle a bonifié ses services pour inclure une ressource juridique à temps plein responsable de fournir des renseignements et de l'assistance aux personnes qui ont été victimes d'inconduite sexuelle dans le contexte de la défense. La prochaine étape consistera à offrir un accès à des avocats civils qui pourront apporter leur aide dans différents endroits du pays, sans frais pour les victimes.
Avec le projet de loi , nous faisons un autre pas en avant en améliorant le soutien aux victimes et en donnant une compétence exclusive aux autorités civiles pour enquêter sur les infractions sexuelles au Code criminel commises au Canada et engager des poursuites. Notre gouvernement persiste dans son engagement permanent à lutter contre toutes les formes d'inconduite et de comportement non professionnel au sein des Forces armées canadiennes. Il est impératif de s'assurer que les victimes et les survivants reçoivent le soutien et la justice qu'ils méritent.
En conclusion, les membres des Forces armées canadiennes sont toujours là pour assurer la sécurité du Canada, et il est de notre devoir de les protéger contre le harcèlement et l'inconduite. Les 48 recommandations formulées par l'ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour nous ont clairement montré la voie à suivre pour changer la culture de notre institution, et la contrôleuse externe, Mme Jocelyne Therrien, veille à ce que nous respections cet engagement, cette nouvelle voie.
Pour finir, j'aimerais remercier les membres des Forces armées canadiennes et les vétérans et les vétéranes pour leur service au Canada. J'espère que tous mes collègues à la Chambre vont appuyer ce projet de loi pour que nous puissions assurer la justice pour les victimes de harcèlement et d'inconduite sexuelle.
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Monsieur le Président, nous discutons aujourd'hui du projet de loi , Loi sur la modernisation du système de justice militaire. Ce projet de loi aurait pour effet de retirer aux tribunaux militaires la compétence de juger les infractions à caractère sexuel et de la transférer aux tribunaux civils, qui auraient alors la compétence exclusive.
Nos fières Forces armées canadiennes sont aux prises avec un problème bien ancré que le projet de loi vise à contrer. Ce n'est pas une nouvelle information; c'est quelque chose que nous savons depuis longtemps. Je vais lire ce qu'a écrit la juge Marie Deschamps dans son rapport publié il y a 10 ans, qui avait été commandé par le gouvernement conservateur de l'époque. Il s'agit d'un rapport sur les inconduites sexuelles et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes. Elle a constaté « un manque de cohérence entre les normes professionnelles élevées établies dans les politiques des FAC sur les comportements sexuels inappropriés [...] et la réalité vécue par bon nombre de militaires dans leur quotidien ».
Autrement dit, tout semblait parfait en théorie, mais la réalité était toute autre. La juge a entendu de nombreux témoins et résumé certains des éléments de preuve dans son rapport. C'était il y a 10 ans. Nous sommes maintenant en 2025 et nous agissons enfin. Le Parti conservateur a toujours appuyé toutes les recommandations du rapport Deschamps, et il est regrettable qu'elles n'aient pas encore toutes été mises en œuvre.
Nous sommes maintenant saisis du projet de loi . Avant d'entrer dans les détails du projet de loi et de parler de ses aspects positifs, de ses aspects négatifs et des améliorations qui s'imposent, je tiens à mettre en lumière les mérites de nos fières Forces armées canadiennes. Nous pouvons être fiers de nos militaires. Je voudrais donner quelques exemples de leurs grandes réussites.
Dans l'opération Reassurance, le Canada occupe la fonction de pays-cadre pour le groupement tactique multinational de l'OTAN en Lettonie, un élément clé de la présence avancée renforcée de l'OTAN visant à dissuader toute agression en Europe de l'Est, ce qui est plus important que jamais. L'opération Unifier est la mission d'instruction militaire du Canada visant à soutenir les forces armées en Ukraine. C'est également très important à l'heure actuelle. Bien sûr, le Canada participe également au NORAD, le partenariat militaire binational entre le Canada et les États‑Unis, un pays qui demeure notre meilleur ami.
Dans toutes ces missions, les Forces armées canadiennes se distinguent par leur grand professionnalisme et leur efficacité et elles ont gagné le respect de nos partenaires de l'OTAN. Tout cela malgré le fait que, depuis 10 ans, le gouvernement libéral sous-finance les Forces armées canadiennes et ne respecte pas nos engagements envers l'OTAN. Or, nos partenaires de l'OTAN comptent sur nous.
Je tiens à prendre un moment pour souligner le travail de l'association conservatrice de ma région, un groupe de bénévoles qui m'aident à garder les pieds sur terre et à rester proche de ma collectivité. Cela inclut également mes conseillers. Ils travaillent actuellement à un énoncé de politique qui, ils l'espèrent, se rendra jusqu'au congrès du Parti conservateur qui devrait avoir lieu à Calgary au début de l'année prochaine. Cet énoncé porte sur le financement des Forces armées canadiennes qui est requis pour répondre aux exigences de l'OTAN. Je tiens à remercier l'équipe qui travaille, dans ma région, sur cet enjeu crucial. Je salue aussi chaleureusement la présidente actuelle, Reese Yearwood, et l'ancien président, Wout Brouwer, qui travaillent avec diligence sur ce dossier.
Je reviens maintenant au projet de loi , rédigé en réponse à deux rapports. J'ai déjà parlé du rapport Deschamps. Il y a aussi le rapport du juge Fish, publié en avril 2021, qui présente une critique en profondeur du système de justice militaire du Canada et une feuille de route pour sa réforme. Le deuxième rapport a été rédigé par Louise Arbour un an plus tard, en 2022. Il présente une évaluation cinglante de la façon dont le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes traitent l'inconduite sexuelle et la responsabilité institutionnelle.
Je vais lire quelques citations tirées de chacun de ces rapports, parce que j'estime qu'elles sont importantes. Il s'agit de deux rapports très exhaustifs; je ne les ai pas lus au complet, mais j'en ai lu de grandes parties. J'ai surligné quelques paragraphes à citer.
La citation suivante est tirée du rapport du juge Fish:
Mon examen a confirmé les conclusions de fait de l'honorable Marie Deschamps qui, en 2015, a réalisé son examen indépendant sur l'inconduite sexuelle au sein des [Forces armées canadiennes]: la nature, l'étendue et les coûts sur le plan humain de l'inconduite sexuelle dans les FAC demeurent aussi débilitants, endémiques et destructeurs qu'en 2015.
Pendant toutes ces années, il n'y a pas eu beaucoup d'amélioration.
Louise Arbour a écrit ces mots, qui m'ont vraiment touché:
Les [Forces armées canadiennes] recrutent depuis longtemps au sein des familles de militaires. J'ai été plutôt surprise d'entendre que plusieurs membres actifs des FAC, y compris des officiers supérieurs, n'encourageraient pas leur(s) fille(s) à s'enrôler aujourd'hui. En effet, le dévoilement au grand jour de l'inconduite sexuelle dans les FAC a été aussi néfaste que l'aurait été une défaite au combat pour démoraliser les troupes et choquer les Canadiens et Canadiennes.
Il y a un grave problème d'inconduite dans les Forces armées canadiennes. Ce problème existe depuis longtemps et est profondément ancré dans la culture. Il est difficile à résoudre parce qu'il est difficile de changer la culture d'une organisation.
C'est exactement ce que le projet de loi tente de faire. Nous l'appuyons. On croit qu'en retirant du système de justice militaire canadien les enquêtes et les poursuites relatives aux crimes de nature sexuelle pour les confier au système de justice civile, on encouragera les victimes à porter plainte sans craindre de nuire à leur avancement professionnel, sans craindre d'être isolées par leurs pairs ou d'être étiquetées comme des fautrices de troubles.
Est-ce que ça va fonctionner? C'est possible. Je l'espère. Il est difficile de changer la culture d'une organisation, qui est à la base de ce problème.
Voici ce que la juge Deschamps a dit au sujet de la culture des Forces armées canadiennes en matière d'inconduite sexuelle. Elle a souligné l'échec des tentatives précédentes de résoudre le problème.
Voici ce qu'elle a dit:
[...] un changement culturel s'impose. La modification des politiques ne pourra sans doute être efficace que si elle s'inscrit dans la mise en œuvre d'une réforme culturelle à grande échelle. Pour y parvenir, les [Forces armées canadiennes] doivent traiter non seulement les incidents graves de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle, mais aussi les cas de harcèlement sexuel de bas niveau, par exemple le harcèlement qui prend la forme de propos humiliants et à caractère sexuel et qui contribue à créer un climat hostile [...]
J'en conclus que renvoyer les cas graves de harcèlement sexuel aux tribunaux civils n'est que la pointe de l'iceberg. Il y a un problème plus fondamental qui doit être réglé.
Quelques cas très médiatisés permettront peut-être de mettre en évidence les problèmes, comme ce qui s'est passé avec le général Vance. Ces cas permettront peut-être d'améliorer la situation, mais pas sans l'appui inconditionnel des dirigeants.
Il est important d'entendre les dirigeants des Forces armées canadiennes.
Voici ce que la générale Jennie Carignan, l'actuelle cheffe d'état-major de la défense, a à dire à ce sujet: « Ces réformes [favoriseront l'efficacité opérationnelle] et un milieu de travail respectueux afin que notre institution continue de mériter la confiance de notre personnel et de la population canadienne que nous servons. »
Si elle est optimiste, je veux bien croire que ce projet de loi nous mènera dans la bonne direction. Les problèmes ne datent pas d'hier. Ce n'est pas la première fois que des mesures sont prises pour tenter de changer les choses. Je pense à l'opération Honour. Nous avions bon espoir que celle-ci permettrait d'aller au fond du problème. En fin de compte, le programme a été abandonné parce que ni les dirigeants ni les simples soldats ne l'ont pris au sérieux.
Nous appuyons le renvoi du projet de loi au comité. J'espère que la cheffe d'état-major de la défense viendra témoigner. Si l’occasion se présente, je lui demanderai comment cette démarche permettra de régler un problème culturel profondément enraciné.
:
Monsieur le Président, je prends la parole pour exprimer ma solidarité envers les courageux militaires qui ont été victimes d'inconduite sexuelle au sein des Forces armées canadiennes. Le courage dont ils font preuve en se manifestant a mis au jour des échecs systémiques qui se perpétuent depuis beaucoup trop longtemps, et ces échecs exigent que nous leur portions une attention sans faille.
Je tiens à préciser dès le départ que les conservateurs soutiennent sans équivoque les victimes d'inconduite sexuelle. Nous croyons qu'elles méritent la justice, la transparence et un milieu de travail exempt de harcèlement, de discrimination et d'abus de pouvoir. Il ne s'agit pas d'une question partisane. Nous devons rendre hommage à ceux qui servent notre pays et assurer leur sécurité et leur dignité.
Cependant, même si les victimes méritent que justice soit faite, elles ont été laissées pour compte à maintes reprises, non seulement par certains individus, mais aussi par le gouvernement qui est chargé de les protéger. Le gouvernement libéral a eu toute une décennie pour régler les problèmes, mais il laisse continuellement tomber les Canadiens et les militaires. On se demande pourquoi les Canadiens, en particulier les militaires, devraient faire confiance au gouvernement.
On en a vu un exemple flagrant quand l'ancien ministre de la Défense nationale, Harjit Sajjan, s'est rendu complice d'une opération visant à étouffer des allégations d'inconduite sexuelle visant l'ancien chef d'état-major de la défense, le général Jonathan Vance. Quand le ministre Sajjan a reçu des preuves, il a refusé de les accepter. Qui plus est, le premier ministre Justin Trudeau a été complice de cette opération de dissimulation pendant trois longues années, des années de silence et d'inaction pendant que les victimes attendaient que justice soit faite. N'oublions pas que le rapport de la juge Deschamps, commandé par le gouvernement conservateur précédent, a été présenté en 2015, avec des recommandations claires pour lutter contre l'inconduite sexuelle. Pourtant, les libéraux n'ont pas donné suite au rapport, le laissant dormir sur les tablettes pendant que les problèmes s'aggravaient.
Des années plus tard, que se passe-t-il? Le gouvernement présente enfin le projet de loi , mais seulement après une décennie de retards et seulement au moment où une couverture politique est devenue nécessaire. Bien que le projet de loi contienne des changements positifs, il soulève plus de questions qu'il n'apporte de réponses, et il suscite des préoccupations au sujet d'éventuelles manœuvres d'ingérence politique qui pourraient porter davantage préjudice aux victimes comme aux militaires.
La défense nationale ne se résume pas à des chars, des avions et des navires. C'est aussi des gens, des hommes et des femmes courageux qui revêtent l'uniforme tous les jours pour protéger notre pays. Ils méritent respect et protection. Nous devons investir non seulement dans leur équipement et leur entraînement, mais aussi dans la création d'une culture militaire exempte de harcèlement et d'inconduite. Comment peut-on espérer instaurer une culture de responsabilité et de préparation quand le gouvernement continue de négliger le financement, l’équipement et la modernisation de nos forces armées?
Je rappelle à la Chambre que la Marine royale canadienne utilise des navires de guerre qui datent de plusieurs décennies et qui ont connu des jours meilleurs. L'Aviation royale canadienne utilise des CF‑18 vieux de 40 ans qui ont dépassé leur durée de vie opérationnelle, tandis que le gouvernement tarde à les remplacer. L'armée canadienne manque de ressources de base, qu'il s'agisse d'équipement de protection individuelle ou d'artillerie moderne. On rapporte que des soldats achètent leur propre équipement et que des entraînements ont été annulés à cause des compressions budgétaires. Pendant ce temps, le Canada demeure bien en deçà de l'objectif de dépenses en matière de défense de l'OTAN, soit 2 % du PIB.
En ce qui concerne le recrutement, les Forces armées canadiennes ont 16 000 postes à pourvoir.
La première responsabilité du gouvernement fédéral est de protéger le Canada et ceux qui nous servent. Nous devons faire face à un environnement mondial en constante évolution, marqué par des menaces telles que l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'instabilité au Moyen‑Orient et des tensions croissantes dans la région indo-pacifique. Notre armée doit être forte, préparée et respectée et, pour ce faire, elle doit pouvoir bénéficier d'un système de justice équitable et fiable.
Les conservateurs appuient pleinement le transfert de la compétence relative à la plupart des infractions de nature sexuelle commises au Canada du système de justice militaire vers les autorités civiles, comme l'ont recommandé les rapports Deschamps, Arbour et Fish produits par trois juges respectés.
Malheureusement, ce n'est pas la réalité. Nos tribunaux civils manquent de ressources et sont débordés. Les retards judiciaires sont courants, les victimes d'agression sexuelle voient souvent leur cas rejeté ou retardé et le principe de Jordan fait tomber les chefs d'accusation si le procès n'a pas lieu dans un délai raisonnable. Cela exacerbe le traumatisme et l'incertitude des survivants. Selon les témoignages que le Comité de la condition féminine a entendus, une infime fraction des cas d'agression sexuelle signalés mènent à une condamnation. Même là, les peines imposées sont minimes.
Les victimes méritent d'obtenir justice sans manœuvres politiques, et les accusés méritent un processus juste et impartial.
Souvenons-nous de la manière dont l'affaire Jonathan Vance a été traitée. Malgré la crédibilité des allégations, le gouvernement a offert une augmentation de salaire à Vance pendant qu'on enquêtait sur ses actes répréhensibles. C'était un signal clair aux victimes que leur souffrance passe après l'opportunisme politique. De plus, le comité de la défense, qui aurait dû servir de tribune redditionnelle, a suspendu ses travaux pendant des mois en raison de l'obstruction des libéraux, ce qui l'a empêché d'assurer une surveillance adéquate et de faire enquête.
On ne peut fermer les yeux sur l'habitude qu'a le gouvernement de retarder, de nier, de protéger les hauts fonctionnaires et d'entraver le processus judiciaire. Nous avons entendu des témoignages déchirants de survivants racontant des viols collectifs, des sévices sexuels et l'omniprésente culture du silence au sein du milieu militaire. Ces personnes attendent depuis des années les réformes qui viennent tout juste d'être proposées. Le projet de loi est peut-être un pas dans la bonne direction, mais il se fait attendre depuis beaucoup trop longtemps et demeure incomplet. Les victimes méritent mieux que de servir de pions sur l'échiquier politique.
Les conservateurs demandent au gouvernement d'assumer enfin ses responsabilités, de mettre en œuvre dès maintenant des changements significatifs, de veiller à ce que le système judiciaire civil dispose de toutes les ressources nécessaires pour traiter ces affaires, de protéger les victimes contre tout nouveau traumatisme et de faire en sorte qu'elles obtiennent véritablement justice.
Je tiens à ce que ceux qui souffrent sachent que nous les voyons et que nous les entendons. Nous sommes à leurs côtés. Cependant, pour ceux qui ont laissé ce problème persister pendant une décennie à cause de jeux politiques et de dissimulations, le temps des excuses est révolu. La sécurité nationale dépend non seulement des armes et des stratégies, mais aussi de la force morale de nos institutions. Nous devons à tous les hommes et toutes les femmes des forces armées de maintenir la justice, l'intégrité et le respect.
Les conservateurs continueront à exiger des comptes au gouvernement pour ses échecs et à faire pression pour que de véritables réformes soient mises en place afin de venir en aide aux victimes, d'assurer l'application régulière de la loi et de rétablir la confiance au sein des Forces armées canadiennes.