La procédure et les usages de la Chambre des communes
Sous la direction de Robert Marleau et Camille Montpetit
Édition 2000Plus d’informations …
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Rapports à la Chambre

Les comités communiquent leurs opinions et recommandations à la Chambre au moyen de rapports. Ceux-ci peuvent être de plusieurs types, notamment : rapports traitant d’affaires ordinaires qui touchent le fonctionnement d’un comité (par exemple, demande de prolongation d’un délai ou de permission de se déplacer, ou indication à la Chambre d’irrégularités dans leurs travaux); rapports sur des projets de loi, des prévisions budgétaires ou des personnes nommées ou qu’on propose de nommer par décret; et rapports consécutifs à l’achèvement de l’étude d’une question qui leur a été renvoyée par la Chambre, ou d’une question liée soit au mandat, à la gestion ou au fonctionnement du ministère dont ils s’occupent, soit à leur secteur de responsabilité. Cela comprend les études portant non seulement sur des questions précises, mais encore sur des sujets comme les comptes publics du Canada, la législation par délégation et des questions de procédure particulières, comme les questions de privilège, qui leur ont été renvoyées par la Chambre.

Pouvoir de faire rapport

Pour jouer efficacement leur rôle, les comités doivent pouvoir faire rapport de leurs constatations à la Chambre. Le Règlement attribue aux comités permanents le pouvoir de faire rapport « à l’occasion », ce qui leur permet de présenter des rapports à la Chambre aussi souvent qu’ils le jugent à propos [543] . L’ordre de renvoi établissant un comité spécial comporte habituellement une disposition semblable [544] . Les comités législatifs, pour leur part, sont seulement autorisés à faire rapport du ou des projets de loi qui leur ont été renvoyés, avec ou sans amendement [545] .

Le droit des comités de faire rapport à la Chambre s’étend uniquement aux questions relevant de leur mandat. Ils doivent alors indiquer en vertu de quelle autorité (Règlement ou ordre de renvoi) l’étude a été effectuée. Par le passé, dans les cas où le rapport d’un comité avait dépassé son ordre de renvoi ou abordé des questions non comprises dans celui-ci, le Président a déclaré le document complet, ou la partie incriminée, irrecevable [546] .

Des comités ont déjà tenu des audiences à la seule fin de se renseigner sur une question donnée [547] , mais la plupart des études de comité débouchent sur un rapport à la Chambre. Une même étude peut donner lieu à un ou plusieurs rapports. Outre les rapports administratifs traitant de questions comme les demandes de pouvoirs supplémentaires ou de prolongation du délai de présentation de leur rapport définitif [548] , les comités peuvent présenter des rapports provisoires ou une série de rapports traitant de divers aspects de la question dont ils sont saisis [549] .

Les sous-comités présentent leurs rapports au comité principal [550] . Celui-ci peut simplement les adopter tels quels, ou les modifier d’abord [551] . Ces rapports sont ensuite présentés à la Chambre en tant que rapports du comité principal [552] .

Un comité peut recevoir un ordre de renvoi prévoyant un délai pour la présentation de son rapport. Un comité est réputé avoir fait rapport du Budget principal et du Budget supplémentaire des dépenses ainsi que des projets de loi d’initiative parlementaire s’il ne présente pas son rapport sur ces questions dans les délais prévus par le Règlement [553] . Aucun délai n’est fixé pour les projets de loi d’intérêt privé, mais le Règlement exige qu’il en soit fait rapport à la Chambre dans tous les cas [554] . Dans certains cas, des délais sont aussi prévus pour la présentation des rapports d’examen de lois particulières [555] . Les comités font habituellement rapport de toute question qui leur a été renvoyée par la Chambre, mais, à moins que celle-ci ne leur fixe un délai précis, il leur est loisible de le faire lorsqu’ils le jugent à propos [556] .

Une fois que les membres d’un comité ont convenu du contenu d’un rapport, ils l’adoptent officiellement au moyen d’une motion. Le comité en détermine ensuite la forme clairement et explicitement dans une motion [557] . Puis il adopte une autre motion ordonnant à son président d’en faire rapport à la Chambre [558] . Comme des modifications de dernière minute ont pu être apportées au rapport au cours de la séance qui a précédé son adoption, on adopte en outre habituellement une motion conférant le pouvoir rédactionnel au président afin de garantir que son texte définitif dans les deux langues officielles est conforme aux décisions prises par le comité, à condition qu’il ne fasse l’objet d’aucune modification de fond [559] . Le comité peut également adopter une motion demandant au gouvernement de répondre à son rapport [560] . Il peut enfin décider de tenir une conférence de presse après la présentation de celui-ci afin de rendre publics les résultats de son étude [561] .

Contenu et forme

Les rapports à la Chambre peuvent se présenter sous diverses formes selon le sujet étudié et les conclusions auxquelles le comité parvient. Outre des versions imprimées de leurs rapports, les comités ont présenté ceux-ci en braille, sur audiocassette, sur disquette et sous forme imprimée en gros caractères [562] . Les rapports de fond sont tous publiés en version électronique sur le site Web de chaque comité. Tous les rapports font mention de l’autorité en vertu de laquelle l’étude a été effectuée (ordre de renvoi de la Chambre ou article pertinent du Règlement) et sont signés par le président du comité. Le Procès-verbal relatif à un rapport est déposé au moment où celui-ci est présenté à la Chambre.

Les rapports relatifs à certaines questions, comme le Budget des dépenses et les nominations par décret, sont assujettis à certaines limites quant au genre de recommandations qui peuvent y être formulées. Dans le cas du Budget des dépenses, le comité signale à la Chambre qu’il l’a adopté, réduit ou rejeté. Les rapports relatifs aux nominations par décret indiquent que le comité a examiné celles-ci et exposent l’opinion du comité sur les qualités et la compétence des personnes nommées. En raison de leur portée limitée, les rapports portant sur ces questions sont courts et suivent une forme établie. Les comités chargés d’étudier un projet de loi, pour leur part, font rapport du projet de loi à la Chambre, avec ou sans amendement. Lorsqu’un projet de loi est renvoyé à un comité, l’exemplaire qui en a été déposé à la Chambre est remis au greffier du comité. Si celui-ci l’adopte sans amendement, cet exemplaire est renvoyé à la Chambre, dûment signé, en tant que rapport du comité. Dans les cas où le comité ordonne que le projet de loi soit réimprimé pour y intégrer les amendements qu’il y a apportés, un exemplaire de la version réimprimée est déposé en même temps que l’exemplaire initial de la Chambre. La version réimprimée indique clairement les amendements apportés au projet de loi par le comité.

Les comités présentent en outre de temps à autre divers rapports administratifs ou de procédure dans lesquels ils sollicitent des pouvoirs non prévus dans leurs ordres de renvoi permanents ou spéciaux. En cas d’atteinte possible au privilège liée au travail d’un comité, celui-ci n’est pas autorisé à s’occuper de la question lui-même, mais il peut signaler l’incident à la Chambre [563] .

Rapports de fond

Les rapports de fond, en particulier ceux qui sont longs, sont souvent imprimés et revêtus d’une couverture spéciale. Les comités ont une grande latitude quant à la forme de ces rapports, mais ceux-ci comportent généralement un certain nombre d’éléments. Le texte du rapport suit la citation de l’autorité en vertu de laquelle l’étude a été effectuée. Il expose la ou les questions étudiées et renvoie souvent aux parties appropriées des dépositions verbales et mémoires reçus par le comité. Dans le cas des études importantes, le texte est habituellement divisé en chapitres traitant des divers aspects de la question. Les recommandations du comité suivent le texte. La liste des témoins entendus et celle des mémoires présentés au cours de l’étude figurent habituellement en annexe. Si le comité a décidé de demander au gouvernement de répondre au rapport, cette demande est insérée à la fin du rapport, avant la signature de son président. Toute opinion dissidente ou complémentaire que le comité a accepté d’annexer figure après cette signature. Le procès-verbal se rapportant à l’adoption du rapport par le comité est reproduit à la fin du document [564] .

Opinions complémentaires et opinions dissidentes

Le rapport d’un comité reflète l’opinion de celui-ci, et non pas celle de ses membres à titre individuel. Les membres du comité qui se trouvent en désaccord avec la décision de la majorité ne peuvent pas présenter un rapport distinct. Ni le Règlement de la Chambre ni ses usages ne prévoient la présentation de rapports minoritaires [565] . Lorsqu’un ou plusieurs membres d’un comité permanent se trouvent en désaccord avec son rapport ou souhaitent formuler des observations complémentaires, le comité peut décider de présenter ces opinions en annexe au rapport [566] , après la signature du président [567] . N’importe quel membre d’un comité peut présenter des opinions dissidentes ou complémentaires [568] . Même si les comités ont le pouvoir d’annexer ces opinions à leurs rapports, ils ne sont pas tenus de le faire [569] . Lorsqu’un comité accepte d’annexer une opinion dissidente ou complémentaire, il précise souvent la longueur maximale du texte, le délai de présentation de celui-ci au greffier et si le texte doit être présenté dans les deux langues officielles [570] .

Présentation à la Chambre

Les rapports des comités sont présentés à la Chambre sous la rubrique des Affaires courantes ordinaires, lorsque le Président passe à la « Présentation de rapports de comités » [571] . Ils sont ordinairement présentés par le président du comité, sur l’instruction du comité [572]  ou, en son absence, par un autre membre du comité. Le membre du comité qui présente un rapport peut en expliquer brièvement le sujet [573] . Lorsqu’un rapport comporte des opinions complémentaires ou dissidentes en annexe, un membre du comité appartenant à l’Opposition officielle peut en fournir une explication succincte [574] . Le Règlement n’autorise aucun autre membre du comité à commenter le rapport à ce stade. Lorsque le rapport ne comporte aucune opinion dissidente ni complémentaire, aucun autre membre du comité ne peut le commenter au moment de sa présentation. À l’occasion, la Chambre a permis à des députés d’autres partis de faire une brève déclaration touchant soit une opinion dissidente, soit le rapport lui-même [575] .

La Chambre prévoit parfois que les rapports de comités seront présentés pendant des périodes d’ajournement, en les faisant déposer auprès du Greffier. Cela a été fait dans le cas de rapports particuliers ainsi qu’à titre général pour tout rapport de comité achevé pendant une période d’ajournement [576] .

Les rapports de comités doivent être présentés à la Chambre avant de pouvoir être rendus publics. La majorité des rapports de comités sont étudiés et adoptés lors de séances à huis clos. Même lorsqu’un rapport est adopté en séance publique, il est considéré comme confidentiel jusqu’à sa présentation à la Chambre. De plus, lorsqu’un rapport de comité a été étudié et approuvé pendant des séances à huis clos du comité, toute divulgation de son contenu avant sa présentation, par des membres ou des non-membres, peut être jugée comme une atteinte au privilège. Des Présidents ont jugé que les questions de privilège relatives à des rapports ayant fait l’objet d’une fuite ne seraient pas prises en considération à moins qu’une accusation précise ne soit portée contre une personne, une organisation ou un groupe, cette accusation devant non seulement viser les personnes de l’extérieur de la Chambre qui ont rendu publics des documents étudiés à huis clos, mais encore désigner la source de la fuite au sein de la Chambre elle-même [577] .

Il est antiréglementaire pour des députés de faire allusion, à la Chambre, aux délibérations de comités ou à des témoignages reçus par eux avant qu’ils n’aient présenté leur rapport à la Chambre. Cette interdiction s’applique aux allusions faites par des députés au cours d’un débat tout comme pendant la Période des questions orales [578] . S’il se produit une irrégularité dans les travaux d’un comité, la Chambre peut seulement en être saisie au moment où il lui en est fait rapport [579] .

Adoption

Tout député peut proposer l’adoption d’un rapport de comité, moyennant un préavis de 48 heures, pendant la période réservée aux Affaires courantes ordinaires. La motion à cet effet est proposée sous la rubrique « Motions » [580]  et peut faire l’objet d’un débat [581] .

Une motion portant adoption d’un rapport relatif au Budget des dépenses peut seulement être débattue un jour désigné lors de la période réservée aux travaux des subsides [582] . Le Règlement prévoit en outre une procédure spéciale pour l’adoption des rapports relatifs à l’abrogation d’un Règlement, contenue dans un rapport du Comité mixte permanent d’examen de la réglementation [583]. Lorsqu’un comité a fait rapport d’un projet de loi, celui-ci est assujetti aux règles et pratiques régissant le processus législatif, plutôt qu’à celles qui visent les rapports de comités en général [584].

La Chambre consent souvent à renoncer au préavis de 48 heures exigé par le Règlement [585]  afin d’adopter un rapport relatif à certaines questions administratives, comme la modification de la composition des comités. Les rapports relatifs au choix des affaires votables parmi les Affaires émanant des députés et à la composition des comités législatifs sont réputés adoptés au moment de leur présentation à la Chambre [586] .

Les recommandations contenues dans les rapports de comités sont rédigées sous la forme de motions de telle sorte que, une fois les rapports adoptés, elles deviennent des ordres clairs ou des résolutions de la Chambre [587] . Lorsqu’ils formulent leurs recommandations, les comités ne peuvent outrepasser l’autorité de la Chambre. Par-dessus tout, lorsqu’il est question de dépenser des fonds ou de présenter des projets de loi, ils peuvent seulement recommander que le gouvernement « envisage l’opportunité » de telles mesures [588] .

Lorsque la Chambre est saisie d’une motion portant adoption d’un rapport, elle étudie l’adoption du rapport dans son ensemble. Aucun amendement ne peut être proposé au texte de celui-ci [589] . On peut proposer une motion visant à renvoyer le rapport au comité pour réexamen [590] .

Réponse du gouvernement

Lorsqu’un comité permanent ou un comité spécial présente un rapport à la Chambre, il peut demander que le gouvernement dépose, dans un délai de 150 jours [591] , une réponse globale à l’ensemble du rapport ou à l’une ou plusieurs de ses parties [592] . La demande de réponse partielle n’empêche pas le gouvernement de répondre au rapport intégral. Les Présidents ont systématiquement refusé de définir « globale » dans ce contexte et soutenu que la nature de la réponse doit être laissée à la discrétion du gouvernement [593] . Lorsque la Chambre siège, la réponse peut être déposée par un ministre ou par un secrétaire parlementaire pendant la période consacrée aux affaires courantes, sous la rubrique « Dépôt de documents », ou remise au Greffier [594] . Lorsque la Chambre est ajournée, elle peut être remise au Greffier, ou le ministre peut attendre que la Chambre reprenne ses travaux pour la déposer [595] . Le Président a jugé qu’une demande de réponse du gouvernement survit à une prorogation de la même manière que les ordres de dépôt de documents [596] . Le Règlement ne prévoit aucune sanction pour le cas où le gouvernement ne se conformerait pas à l’exigence de présenter une réponse [597] .


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