La procédure et les usages de la Chambre des communes

Deuxième édition, 2009

La procédure et les usages de la Chambre des communes - 2. Les législatures et les ministères - Le gouvernement et l'appui majoritaire

 

Selon les règles de notre système parlementaire, les gouvernements doivent pouvoir compter sur l’appui de la majorité des députés à la Chambre des communes. Un gouvernement majoritaire est donc formé par le parti (ou une coalition de partis) qui a remporté la majorité des sièges à la Chambre des communes lors d’élections générales, tandis qu’un gouvernement minoritaire est généralement constitué par le parti qui a remporté le plus de sièges à des élections générales, mais qui ne détient pas la majorité à la Chambre des communes. Le Canada n’a jamais été gouverné par une véritable coalition de partis[1]. Au cours de chaque législature, il arrive que le classement des partis change en raison de décès, de démissions, d’élections partielles, de députés qui changent de parti ou d’autres changements dans le statut des divers députés. Il se peut ensuite que le gouvernement puisse plus facilement ou plus difficilement conserver l’appui de la majorité des députés.

Toutes les questions soulevées à la Chambre doivent être décidées à la majorité des voix parmi les députés présents[2]. Même les règles qui permettent à la Chambre de régir ses propres délibérations sont adoptées par un vote à la majorité simple. Il est donc évident que le gouvernement doit pouvoir compter sur l’appui d’une majorité des députés pour exercer un contrôle sur la gestion des affaires de la Chambre et du même coup de ses comités. Les pouvoirs du gouvernement à cet égard sont contrebalancés par la responsabilité qu’il a de rendre compte de ses actions à la Chambre.

Plusieurs dispositions du Règlement régissent le rôle que le gouvernement joue dans la gestion des affaires de la Chambre, en précisant que c’est le gouvernement ou un ministre qui doit prendre l’initiative de certaines procédures[3]. De la même façon, de nombreuses dispositions du Règlement reconnaissent le rôle que la Chambre doit jouer afin de demander au gouvernement de rendre compte de ses actions[4]. La procédure parlementaire doit assurer un équilibre entre le pouvoir du gouvernement de gérer les affaires de la Chambre et la responsabilité de l’opposition de tenir le gouvernement responsable de ses actions. Le pouvoir du gouvernement subit l’épreuve cruciale lors des votes de confiance, car dans la démocratie parlementaire canadienne, un gouvernement doit pouvoir jouir de la confiance de la Chambre.



[1] Certains historiens ont qualifié de coalition le premier ministère. Dans les années qui ont mené à la Confédération, sir J.A. Macdonald a contribué à la formation de la « Grande Coalition » de 1864, qui regroupait les réformistes du Haut-Canada et le Parti bleu du Bas-Canada. Cette coalition est à l’origine du Parti libéral-conservateur (l’ancêtre du Parti conservateur actuel). Le premier Cabinet Macdonald comptait un nombre presque égal de Libéraux et de Conservateurs. (Bibliothèque et Archives Canada, « Sir John A. Macdonald », La Conféderation canadienne, www.collectionscanada.gc.ca, 2 mai 2005; English, J., « Gouvernement de coalition », L’Encyclopédie canadienne, www.thecanadianencyclopedia.com, 2008). Le deuxième gouvernement souvent qualifié de coalition a vu le jour en mai 1917 dans les derniers jours de la 12e législature, lorsque le premier ministre conservateur, sir Robert Borden, a essayé de persuader le chef de l’Opposition libérale, sir Wilfrid Laurier, de former un gouvernement de coalition pour imposer la conscription par voie législative et faire front commun en temps de guerre. Laurier ayant refusé, Borden a, le 12 octobre 1917, formé un gouvernement dit d’union, qui réunissait 12 Conservateurs, 9 Libéraux et indépendants et 1 représentant « travailliste », tous en faveur de la conscription. Le premier ministre a ensuite déclenché des élections. Se présentant comme le chef du « Parti unioniste », il a remporté une victoire éclatante sur les Libéraux de Laurier. Voir Brown, R.C., Robert Laird Borden: A Biography, Volume II: 1914‑1937, Toronto : Macmillan of Canada, 1980, p. 84-90, 101-110, 123‑125.

[2] Loi constitutionnelle de 1867, L.R. 1985, Appendice II, n5, art. 49. Voir aussi le chapitre 12, « Les étapes du débat ».

[3] Ainsi, la majeure partie du temps de la Chambre est consacrée aux affaires émanant du gouvernement qui sont prises en considération suivant l’ordre établi par celui‑ci (art. 30 et 40(2) du Règlement). De plus, pour ne donner que quelques exemples, c’est le gouvernement qui demande le rappel de la Chambre lorsqu’elle a ajourné ses travaux (art. 28(3) et (4) du Règlement); qui propose le prolongement des heures de séance en juin (art. 27(1) du Règlement); qui fait publier un Feuilleton spécial (art. 55(1) du Règlement); qui propose une attribution de temps (art. 78 du Règlement) et la clôture des travaux (art. 57 du Règlement); qui dépose un avis de motion des voies et moyens et qui désigne un ordre du jour en vue de son étude (art. 83(1) et (2) du Règlement); et qui lance le débat sur le Règlement au début de chaque législature (art. 51(1) du Règlement).

[4] Voir, par exemple, les règles régissant les subsides (art. 81(3), (4)a) et b) du Règlement), les questions (art. 37, 38 et 39 du Règlement), les pétitions (art. 36 du Règlement) et le dépôt de documents (art. 32 du Règlement).

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