La procédure et les usages de la Chambre des communes

Deuxième édition, 2009

La procédure et les usages de la Chambre des communes - 16. Le processus législatif - Types de projets de loi

 

Il existe deux catégories principales de projets de loi : les projets de loi d’intérêt public et les projets de loi d’intérêt privé. Les projets de loi d’intérêt public portent sur des questions d’intérêt national (jus generale publicum)[45], tandis que les projets de loi d’intérêt privé visent à accorder des pouvoirs, des avantages spéciaux ou des dérogations à une ou plusieurs personnes, y compris à des personnes morales (jus particulare)[46].

*   Projets de loi d’intérêt public

On appelle « projets de loi émanant du gouvernement » les projets de loi d’intérêt public présentés par des ministres et « projets de loi émanant des députés » ceux qui sont présentés par des députés de l’arrière‑ban.

Projets de loi émanant du gouvernement

Les projets de loi émanant du gouvernement sont des textes législatifs que le gouvernement soumet au Parlement pour approbation et modification, le cas échéant, avant qu’ils ne deviennent loi. Les projets de loi de ce type portent sur des questions d’intérêt public et peuvent comporter des dispositions financières. Ils sont habituellement présentés à la Chambre des communes, bien que ceux qui n’entraînent ni dépenses publiques ni impôts additionnels puissent être présentés dans l’une ou l’autre des chambres.

Projets de loi émanant des députés

Les projets de loi émanant des députés sont des textes législatifs que les députés qui ne sont ni ministre ni secrétaire parlementaire soumettent au Parlement pour approbation et modification, le cas échéant, avant qu’ils ne deviennent loi. Ils sont pour la plupart présentés à la Chambre des communes.

L’étude des projets de loi émanant des députés ne peut avoir lieu que pendant l’heure quotidiennement réservée aux Affaires émanant des députés[47]. Pour qu’un projet de loi de ce type puisse être étudié par la Chambre, il doit avoir été choisi par tirage au sort conformément au Règlement[48].

*   Projets de loi d’intérêt privé

Le projet de loi d’intérêt privé a pour but de conférer à un particulier ou à un groupe de personnes (y compris des personnes morales) des pouvoirs ou des avantages spéciaux (pouvant aller au-delà ou à l’encontre du droit commun) ou de soustraire ces derniers à l’application d’une loi[49]. Il ne peut pas être présenté par un ministre et doit être fondé sur une pétition signée par les intéressés. La distinction entre un projet de loi d’intérêt public et un projet de loi d’intérêt privé est donc principalement basée sur l’objet du projet de loi.

La plupart des projets de loi d’intérêt privé sont présentés au Sénat, mais ils peuvent aussi être présentés à la Chambre des communes, bien que cela soit plutôt rare de nos jours. Les projets de loi d’intérêt privé dont la Chambre est saisie sont traités comme des affaires émanant des députés, car seuls les députés n’occupant pas de fonctions ministérielles peuvent proposer des motions à leur égard. Les projets de loi d’intérêt privé doivent franchir les mêmes étapes que toutes les autres mesures législatives, en plus de certaines étapes préalables à leur dépôt[50].

Les projets de loi qui se réclament à la fois des domaines public et privé sont dits hybrides ou mixtes. Bien que l’usage parlementaire britannique reconnaisse ce type de projet de loi[51], la procédure parlementaire canadienne, pour sa part, exige que tous les projets de loi soient désignés soit d’intérêt public, soit d’intérêt privé[52]. Les projets de loi qui réunissent à la fois des considérations d’ordre public et privé sont traités comme des projets de loi d’intérêt public[53].



[45] Voir, par exemple, le projet de loi C‑2, Loi modifiant le Code criminel et d’autres lois en conséquence (Journaux, 18 octobre 2007, p. 25).

[46] Voir, par exemple, le projet de loi C‑1001, Loi concernant Bell Canada (Journaux, 12 avril 1978, p. 638). Puisque, de nos jours, les projets de loi d’intérêt privé sont rarement présentés à la Chambre des communes, ils sont habituellement numérotés comme des projets de loi du Sénat. Voir, par exemple, le projet de loi S‑1001, Loi concernant Scouts Canada (Journaux, 7 décembre 2006, p. 885).

[47] Voir le chapitre 21, « Les affaires émanant des députés ».

[48] Art. 86 à 99 du Règlement.

[49] Beauchesne, A., Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, Règlement annoté et formulaire de la Chambre des communes du Canada, 6e éd., sous la direction de A. Fraser, W.F. Dawson et J.A. Holtby, texte français établi au Centre de traduction et de terminologie juridique de l’École de droit de l’Université de Moncton, Toronto : Carswell, 1991, p. 295‑296.

[50] Voir le chapitre 23, « Les projets de loi d’intérêt privé ».

[51] Dans une décision du 22 février 1971, le Président Lamoureux déclarait que : « […] le fait que [le projet de loi incluant des caractéristiques d’ordre privé et public] puisse correspondre à ce qu’on appelle un [projet de loi] hybride […] au Parlement britannique ne signifie pas que nous devions le considérer sous cet aspect » (Journaux, p. 351).

[52] Dans une décision du 12 mars 1875, le Président Anglin a conclu qu’un projet de loi ayant des considérations d’ordre privé ne pouvait être présenté à titre de projet de loi d’intérêt public (Journaux, p. 213). Voir aussi Journaux, 23 octobre 1975, p. 795‑796.

[53] Journaux, 22 février 1971, p. 352; Débats, 15 avril 1985, p. 3699‑3700.

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