La procédure et les usages de la Chambre des communes

Deuxième édition, 2009

La procédure et les usages de la Chambre des communes - 23. Les projets de loi d'intérêt privé - La forme du projet de loi d'intérêt privé

 

Les projets de loi d’intérêt privé sont identiques aux projets de loi d’intérêt public sauf qu’ils doivent comprendre un préambule se terminant par la formule d’édiction suivante :

Considérant que (la personne ou la personne morale) a, dans sa pétition, sollicité l’adoption de la mesure suivante et qu’il y a lieu d’accéder à cette demande. En conséquence, Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte[73] :

En plus de cette formule, le préambule énonce de manière détaillée les raisons pour lesquelles on souhaite faire adopter un projet de loi d’intérêt privé. Dans certains cas, le préambule est court et simple[74], mais la plupart sont longs et peuvent comprendre au besoin un historique de la société concernée[75].

Au cours des 20 premières années de la Confédération, les projets de loi d’intérêt privé étaient rédigés un peu n’importe comment. Les députés et les comités chargés d’examiner les projets de loi se plaignaient fréquemment du manque d’uniformité dans la rédaction, et de la présence de dispositions que des comités avaient déjà rejetées dans d’autres projets de loi d’intérêt privé. À la suite de ces plaintes, la Chambre a adopté en 1883 une recommandation du Comité spécial permanent des chemins de fer, canaux et télégraphes et du Comité spécial permanent des banques et du commerce qui précisait que tout projet de loi constitutive devrait inclure des articles précis de la loi générale relative à ces projets de loi[76]. En 1887, après une autre étude de cette question par un comité spécial, un modèle de projet de loi a été établi, auquel tous les projets de loi constitutive devaient se conformer[77].

Le Règlement précise que tout projet de loi constitutive doit être conforme à un projet de loi‑type qui peut être obtenu du Greffier de la Chambre[78]. Cette disposition vise à s’assurer que tous les renseignements utiles sont fournis. Toute disposition qui n’est pas conforme au modèle doit être placée entre crochets ou soulignée[79]. Lorsqu’un projet de loi d’intérêt privé vise à modifier une loi existante, le nouveau texte doit être souligné et le texte actuel être imprimé du côté droit de la page, vis‑à‑vis du texte proposé[80]. Lorsqu’un projet de loi propose d’abroger des dispositions ou parties d’une loi existante, celles‑ci doivent être imprimées vis‑à‑vis de la clause d’abrogation[81]. Une note indiquant brièvement l’objet d’une disposition de nature exceptionnelle ou dont la teneur s’écarte des dispositions du modèle doit être imprimée en regard de l’article du projet de loi[82]. Enfin, si le projet de loi vise à faire ratifier un accord, une copie certifiée de l’accord doit y être annexée[83].

Le promoteur qui décide de présenter un projet de loi d’intérêt privé à la Chambre des communes devrait d’abord rencontrer un conseiller législatif de la Chambre, qui pourra l’aider à rédiger le projet de loi de manière à ce qu’il soit conforme aux règles et usages de la Chambre[84]. Le conseiller législatif peut également conseiller le comité chargé d’examiner le projet de loi au sujet de toute disposition dérogeant au droit commun ou de toute disposition inhabituelle méritant une attention particulière.



[73] Beauchesne, 6e éd., p. 297.

[74] Voir, par exemple, la Loi concernant l’Institut Canadien des Comptables Agréés, L.C. 1990, ch. 52; la Loi modifiant la Loi constituant en corporation le Queen’s Theological College, L.C. 2004, ch. 29.

[75] Voir, par exemple, la Loi portant fusion de l’Église missionnaire, de droit albertain, avec l’Église missionnaire évangélique, section de l’Ouest canadien, de droit fédéral, L.C. 1995, ch. 50; la Loi autorisant L’Impériale, Compagnie d’Assurance-Vie, à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province du Québec, L.C. 2001, ch. 43.

[76] Débats, 20 avril 1883, p. 788‑789. Tout écart par rapport aux dispositions générales devait être précisé et tout projet de loi qui ne respectait pas cette règle était retourné aux promoteurs (Dawson, p. 246).

[77] Débats, 18 juin 1887, p. 1123‑1124. Les dispositions inhabituelles des projets de loi proposés devaient être marquées et clairement précisées dans l’avis relatif à la demande (Dawson, p. 246). Des modèles de projet de loi ont été préparés pour les lois constitutives des banques et des compagnies de fiducie, de prêts, d’assurances et de chemins de fer.

[78] Art. 136(2) du Règlement.

[79] Art. 136(2) du Règlement.

[80] Art. 136(3) du Règlement.

[81] Art. 136(4) du Règlement.

[82] Art. 136(5) du Règlement.

[83] Art. 138 du Règlement.

[84] Il est arrivé dans le passé qu’un projet de loi d’intérêt privé soit rédigé par le conseiller juridique du promoteur qui agissait ensuite comme agent parlementaire, mais de nos jours, ces textes sont habituellement rédigés avec l’aide du légiste et conseiller parlementaire du Sénat, puisque la plupart sinon la totalité des projets de loi d’intérêt privé sont maintenant présentés dans cette chambre. Si un projet de loi doit être présenté en premier à la Chambre des communes, il faut toutefois, conformément à l’article 134(1) du Règlement, qu’une copie du projet de loi soit déposée auprès du Greffier de la Chambre au plus tard le premier jour de la session. Le texte est ensuite examiné par le greffier en chef des projets de loi d’intérêt privé, en sa capacité d’examinateur des projets de loi d’intérêt privé, afin de s’assurer qu’il remplit les conditions de formes spécifiques (art. 136(1) du Règlement). Le greffier des pétitions conseille également les pétitionnaires concernant les diverses étapes préliminaires de l’adoption d’un projet de loi d’intérêt privé (en précisant, par exemple, quand les avis doivent être publiés dans la Gazette du Canada ou dans les journaux).

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