Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd’hui et de partager le temps dont je dispose avec le député de Windsor-Ouest.
La politique est une question de choix. Peu importe le côté de la Chambre où ils siègent, les députés se présentent ici parce qu’ils estiment avoir de bonnes idées quant aux choix que le gouvernement devrait faire dans l’intérêt de leurs collectivités. Bien sûr, il arrive parfois que nous ne soyons pas d’accord sur la nature de ces choix et sur la voie à suivre à la lumière des choix que nous présentons à la Chambre.
Aujourd’hui, le NPD souhaite placer la Chambre devant un choix: il s’agit de déterminer si l’on prêtera main-forte aux Canadiens qui n’ont pas accès aux soins dentaires. Une bonne santé bucco-dentaire est importante pour la santé globale. Nous savons également, grâce aux témoignages entendus lors de la campagne de l’automne dernier, que cet aspect revêt une grande importance pour les personnes à la recherche d’un emploi et que la société entretient des préjugés négatifs envers ceux qui ne sont pas en mesure de soigner leur santé bucco-dentaire.
Une résidante de la Villa St. Michael’s, à Transcona, nous a fait part des conséquences que la mauvaise santé dentaire avait eues sur sa famille; en effet, certaines personnes âgées se sentent incapables de sortir ou de socialiser parce qu’elles sont gênées par l’état de leur dentition. Au sein du caucus, nous avons entendu des témoignages de personnes qui aimeraient trouver un emploi, mais qui ont parfois honte de se présenter à une entrevue. D’autres ont I'impression que leur candidature n’est pas retenue en raison des préjugés dont j’ai parlé précédemment.
On s'oppose souvent à la mise en œuvre d'un tel projet, qui vise à aider concrètement les gens. On ne s'oppose pas au fait que le gouvernement prenne des mesures que les gens ne peuvent pas prendre autrement, mais plutôt au fait que le gouvernement soit un instrument de mobilisation collective visant à aider les gens qui, individuellement, n'ont pas une grande influence. On ne peut en dire autant de certaines grandes sociétés, qui sont un sujet brûlant au cours de la période des questions parce qu'elles ont beaucoup d'argent et qu'elles peuvent investir. On n'accorde pas autant de temps et d'attention à la plupart des Canadiens ordinaires. L'objet de la motion d'aujourd'hui est d'accorder du temps et de l'attention aux Canadiens ordinaires et de défendre leurs intérêts, eux qui en arrachent simplement pour prendre soin de leurs dents.
C'est la proposition que les députés néo-démocrates ont choisi de présenter à la Chambre aujourd'hui. Souvent, même s'il s'agit d'une bonne mesure et que les députés néo-démocrates sont gentils, on s'y oppose parce qu'on dit que ces derniers ne savent pas combien elle coûte. Le NPD ne sait pas comment la mesure sera mise en œuvre, et le gouvernement n'a pas les moyens d'offrir une telle chose à tout le monde.
Au bénéfice de ceux qui pourraient nous écouter à la maison, je vais lire la motion, qu'on n'entendra pas pour la première fois aujourd'hui, j'en suis convaincu. Le libellé montre bien que nous avons les moyens de le faire, car le gouvernement avait déjà prévu d'utiliser cet argent pour offrir des allégements fiscaux qui vont profiter de manière disproportionnée aux Canadiens les plus riches au pays.
La motion est libellée comme suit:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier les réductions d’impôts proposées en s’efforçant de procurer des avantages aux personnes qui gagnent moins de 90 000 $ par année et d'utiliser ces économies pour investir dans des priorités qui apportent une aide réelle aux Canadiens, y compris l’assurance des soins dentaires des familles qui n’ont pas d’assurance et dont le revenu annuel est inférieur à 90 000 $.
Il s'agit donc d'une mise de fonds initiale pour instaurer une couverture universelle avec de l'argent qui est déjà disponible, puisque le gouvernement a déjà dit ne pas en avoir besoin, car il est prêt à le remettre dans les poches des gens. Dans les poches de qui ira l'argent de ces réductions d'impôt? Dans la très grande majorité des cas, l'argent retournera dans les poches de ceux qui gagnent plus de 100 000 $ par année.
Le montant le plus élevé qu'un particulier pourrait recevoir serait d'environ 300 $ par année, ce qui n'est pas beaucoup. Les gens pour qui ce 300 $ par année représenterait une somme considérable n'obtiendront pas ce montant. Au lieu de donner 300 $ par année à des gens qui gagnent déjà au moins 113 000 $ par année, nous pouvons offrir aux familles les moins fortunées au Canada l'accès à un service qui n'est pas à leur portée actuellement.
Notre chef a parlé plus tôt à la Chambre des longues files d'attente dans les cliniques dentaires des universités où on offre des soins gratuits. Je pense qu'il a donné l'exemple de Montréal, mais la même situation se produit partout au pays. Ces services ne sont pas à la portée de tous.
Il n'est tout simplement pas vrai que nous ne pouvons pas nous le permettre. Les gens qui affirment que nous n'avons pas les moyens d'investir dans les Canadiens pour qu'ils aient accès aux services dont ils ont besoin forment ces deux partis qui sont à la tête du pays depuis un long moment, en fait tout au long de son histoire. C'est particulièrement le cas depuis 30 ans. Il y a eu une gigantesque déréglementation. À compter des années 1990, le gouvernement fédéral a fait des compressions massives dans les programmes sociaux. Nous sommes donc engagés sur cette voie de la déréglementation et des réductions de services, en refusant d'investir dans la population. C'est la trajectoire que nous suivons depuis 30 ans, mais elle ne fonctionne pas. Les Canadiens peinent de plus en plus à joindre les deux bouts à la fin du mois. Ils ont l'impression de ne plus recevoir le même niveau de services qu'avant.
Pendant la période des questions aujourd'hui, on a parlé de gens qui n'arrivent pas à joindre quelqu'un de l'Agence du revenu du Canada par téléphone. Il est impossible de se rendre dans un bureau pour obtenir de l'aide en ce qui concerne la présentation d'une demande d'assurance-emploi ou la façon de produire une déclaration de revenus. Les services offerts par le gouvernement fédéral sont en baisse constante, et ce, au nom d'une prospérité accrue qui ne s'est jamais concrétisée.
Beaucoup d'éléments nous prouvent que nous devons investir dans les gens pour les aider à obtenir ce dont ils ont besoin pour retomber sur leurs pieds. S'ils peuvent prendre soin de leurs dents, par exemple, ils auront peut-être suffisamment confiance en eux pour passer une entrevue et décrocher un emploi, ou pour ne pas s'isoler dans leur appartement, une fois à la retraite, de crainte de faire rire d’eux ou de ne pas se faire comprendre à cause de leurs problèmes de dents. Il n’y a vraiment pas de quoi rire. Les gens se soucient de ces choses, qui finissent par peser lourdement sur leurs vies.
Le gouvernement a choisi les coupes. Il a choisi d'aider les grandes sociétés en leur accordant des allégements fiscaux massifs dans l’espoir qu’elles investiraient en retour dans l’économie, ce qu’elles n’ont pas fait, et qu’il y aurait des effets de retombée. Or, cette façon de penser a été discréditée.
Au lieu d’accorder un autre allégement fiscal à des gens qui gagnent dans les six chiffres, nous devrions prendre cet argent et l’investir dans quelque chose d’utile pour d’autres personnes. Ces personnes ont besoin d’un gouvernement désireux de coordonner ces nombreuses voix. Elles sont beaucoup plus nombreuses que celles qui gagnent le plus, mais elles n’ont pas les moyens de faire entendre clairement leur voix. Elles ont besoin d’un gouvernement désireux de coordonner cette mesure de façon à ce que tous ces gens, qui composent la majorité, puissent commencer à obtenir ce dont ils ont besoin.
Voilà ce que le NPD est déterminé à défendre à la Chambre. Nous ne nous en excusons pas. Nous continuerons de formuler des propositions. Nous ne sommes pas ici seulement pour critiquer. Il y a assurément beaucoup de choses à critiquer, et nous n’hésiterons pas non plus à le faire. Au lieu de chercher à marquer des points politiquement de façon mesquine, comme c'est trop souvent le cas dans cette enceinte, critiquer réellement consiste, en partie, à formuler de véritables propositions et solutions de rechange pour faire les choses différemment. Voilà ce que nous ferions différemment, mais il ne faut pas se limiter à notre idée. Nous préférerions que ce ne soit pas seulement notre idée, mais que les partis participent activement au projet. L’argent est là. Nous pouvons nous en servir, et il est grand temps que nous le fassions.
C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui. C'est ce que nous sommes venus dire. Je ne pense pas qu'on doit renvoyer la question au comité pour qu'il l'étudie encore et encore. Voici ce qu'il en est: les libéraux ont promis un régime d'assurance-médicaments en 1997. On sait bien ce qu'ils entendent par « étudier la question ». C'est une façon de pelleter la neige par en avant pour envoyer la question aux oubliettes. À un moment donné, les libéraux ont dit aimer l'idée de confier la question du régime d'assurance-médicaments à un comité parlementaire; puis, ils ont créé leur propre commission. Le problème, c'est que ce ne sont pas les informations qui manquent, mais bien la volonté politique. Le gouvernement a beau étudier la question autant qu'il le veut, rien ne remplacera la volonté politique.
La motion à l'étude aujourd'hui ne modifie pas le budget. Elle demande plutôt à la Chambre d'affirmer son intention d'agir. C'est certain que le gouvernement a les ressources nécessaires, donc, si nous avons la volonté de le faire, nous pouvons le faire, et rapidement. C'est ce que nous demandons à la Chambre.