Madame la Présidente, le projet de loi C-14, soumis à notre étude aujourd'hui, semble donner suite à certaines mesures de l'énoncé économique du gouvernement qui a été présenté en novembre dernier. Il est toutefois fort troublant de constater que, tout comme l'énoncé économique, ce projet de loi demeure toujours muet sur des besoins criants tels que la hausse des transferts en santé et l'aide financière aux aînés.
Il n'y a pas de son ni d'image, alors que cette crise sanitaire sans précédent, qui bouleverse des vies, commande pourtant des signaux forts de la part du gouvernement. « Nous sommes là pour les Canadiens. » « Nous serons toujours là pour les Canadiens. » Ce sont des phrases que nous reconnaissons et qui nous sont familières, car elles ont été maintes fois répétées par le premier ministre. Or elles n'ont que la portée des mots, et non celle des faits. Ce qui manque, c'est une vision concrète et tangible pour à la fois traverser cette deuxième vague et aborder un avenir proche, c'est-à-dire la relance économique. Quel est le plan?
En matière de santé, on ne peut que réitérer à nouveau que l'aide la plus importante, la plus sensible, la plus porteuse et la plus structurante à accorder aux provinces et aux territoires est une hausse tangible et considérable des transferts canadiens en santé. Une telle hausse doit réduire l'écart qui se creuse, année après année, entre la part accordée aux soins de santé par le fédéral et celle des provinces.
En 2019, le Québec, les autres provinces et les territoires finançaient 40 % des dépenses en santé, alors que le gouvernement canadien en finançait seulement 22 %. D'après les données du Conference Board du Canada, le taux de croissance actuellement fixé fera en sorte que la proportion fédérale consacrée au financement des soins de santé chutera à moins de 20 % d’ici 2026.
Nous n'avons pas besoin de savants calculs pour comprendre que ce déficit récurrent pèse lourd sur les moyens des provinces dans leurs efforts pour soutenir et renforcer leur système de santé. Le gouvernement fédéral répétera probablement qu'il est là pour soutenir les provinces et qu'il a notamment injecté 19 milliards de dollars, mais le problème, nous le savons, c'est que ces sommes ne sont pas récurrentes.
Si le gouvernement écoutait et entendait réellement les provinces et le Québec, il saurait que c'est de sécurité et de prévisibilité qu'elles ont besoin et non pas de sommes d'argent accordées à la pièce, selon la température du moment, en y rattachant des conditions.
Ai-je besoin de rappeler que ce sont des milliers de travailleuses et de travailleurs qui sont actuellement en première ligne et qui combattent la pandémie jour après jour depuis 11 mois?
De quoi ont-elles et ont-ils besoin? Ils ont besoin qu'on reconnaisse leur travail et qu'on les appuie dans leur lutte pour soigner des gens et sauver des vies. Comment cela peut-il se faire? C'est en accordant les transferts fédéraux réclamés par ceux qui ont l'expertise et la responsabilité de la prestation des services et de l'organisation des soins, c'est-à-dire les gouvernements des provinces.
Toutes ces travailleuses et tous ces travailleurs n'ont absolument pas besoin que le gouvernement fédéral vienne encore une fois jouer l'apprenti sorcier et qu'il tente de s'ingérer dans les compétences provinciales.
Or, aujourd'hui, le gouvernement annonce une aide de 1 milliard de dollars pour la création d'un fonds pour les établissements de soins de longue durée. Ce fonds sera assorti de conditions et de redditions de comptes.
Le système de santé québécois, qui est actuellement aux prises avec une pandémie, n'a pas besoin d'alourdir ces processus et ces procédés par d'interminables redditions de comptes. Le Québec n'a pas besoin que le gouvernement fédéral vienne s'ingérer en tentant d'élaborer une nouvelle série de normes nationales. Il y a déjà amplement de normes et de règles en place.
S'il y a reddition de comptes à faire, c'est au gouvernement fédéral et au sujet de son incapacité à développer une autonomie financière en matière de vaccination. On le sait, on observe les retards. Au Québec, on dit qu'il y a, depuis la semaine dernière, des retards dans la livraison des vaccins. On ne pourra pas vacciner les gens au rythme prévu. En matière de reddition de comptes, il est grand temps que le gouvernement nous donne l'heure juste sur le carnet de livraison des vaccins.
Je le répète, les travailleuses et les travailleurs de première ligne du Québec ont besoin de deux choses: que le gouvernement fédéral procède à une hausse des transferts en santé, et qu'il le fasse sans condition.
Du côté de l'industrie, les entreprises et les travailleurs souffrent de cette pandémie, et la réponse du gouvernement doit être adéquate. D’abord, le Bloc québécois a mentionné à plusieurs reprises l’inefficacité de la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer.
En fait, depuis juin dernier, tant le gouvernement du Québec que la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante dénoncent le manque d’adaptation du programme et sa grande complexité. Nous saluons donc les ajustements au programme qui sont proposés aujourd’hui, même si ceux-ci auraient dû être faits bien avant.
Pour ce qui est des aides spécifiques accordées aux secteurs les plus touchés, comme le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, l'hébergement, les arts, la culture, et les communications, le 3 novembre dernier, j'informais la Chambre, chiffres à l'appui, des difficultés particulières que rencontraient ces secteurs.
À ce moment-là, plus de 56 000 travailleurs avaient perdu leurs emplois dans ces secteurs seulement pour le Québec. Nous savons maintenant que la situation a empiré et le Bloc québécois n'a eu de cesse de demander des mesures structurantes et spécifiques pour ces secteurs névralgiques de l’économie québécoise.
Le projet de loi annonce le versement de 206 millions de dollars au Fonds d’aide et de relance régionale, le FARR, pour les entreprises ne pouvant bénéficier des autres programmes fédéraux. Vingt-cinq pour cent de ce financement devraient aller aux entreprises touristiques.
Que le gouvernement ait entendu raison et ait répondu à nos nombreux appels à ce sujet nous satisfait. Cependant, outre les annonces destinées au FARR, nous n’avons encore aucun détail sur la forme que prendront certains autres programmes annoncés, comme le Programme de crédit aux entreprises pour les secteurs durement touchés.
Comment se fait-il que, près de deux mois après l’avoir annoncée, le gouvernement ne soit toujours pas en mesure de nous donner les modalités de cette mesure? La crise est loin d’être terminée et les travailleurs et les propriétaires ont besoin de soutien spécifique.
Aujourd’hui, 181 000 propriétaires de petites et moyennes entreprises envisagent une fermeture définitive. Plus de la moitié des 40 000 travailleurs du secteur hôtelier sont sans emploi.
Finalement, l’industrie de l'aérospatiale et le secteur du transport aérien semblent être les grands oubliés. Rappelons que ces secteurs sont en crise. En septembre, les entreprises du secteur québécois de l'aérospatiale avaient mis à pied plus de 4 000 des 43 000 travailleurs de l’industrie, selon la grappe Aéro Montréal. Le gouvernement doit prendre ses responsabilités et développer une stratégie canadienne pour l'industrie aérospatiale. Le Bloc Québécois l’a demandé à plusieurs reprises. Qu'attend le gouvernement pour soutenir les travailleurs?
En conclusion, les demandes du Bloc québécois envoient un signal fort concernant la santé. L'aide et le soutien aux travailleuses et aux travailleurs sont prioritaires. On sait que le transfert entre la Prestation canadienne d'urgence et la Prestation canadienne de la relance économique connaît des ratés. Jour après jour, les travailleurs font face aux retards interminables de leurs demandes de soutien à la PCRE.
On l'a vécu avec le Régime québécois d'assurance parentale, et maintenant avec les travailleuses autonomes. Cela prend de six à huit semaines avant d'avoir des réponses, car on nous dit que des vérifications doivent être faites. C'est inacceptable. Ces travailleuses et ces travailleurs sont sans emploi et sans revenu.
Que les vérifications se fassent, soit, mais qu'on raccourcisse les délais. Encore une fois, on voit que le gouvernement n'était pas prêt à répondre à cette crise.