Madame la Présidente, c'est toujours pour moi un honneur d'intervenir à la Chambre. Il est regrettable que nous débattions aujourd'hui de la Loi sur les mesures d'urgence. Dans les circonstances actuelles, le recours à cette loi est injustifié. Ce soir, je vais expliquer pourquoi j'estime qu'il faut voter contre cette mesure et pourquoi j'espère que le NPD se rangera de notre côté, qu'il conservera sa raison d'être et qu'il conviendra que cette mesure n'est pas nécessaire en ce moment.
Pour comprendre la situation, nous devons nous demander comment et pourquoi nous débattons actuellement de cette mesure et pourquoi des manifestants ont envahi les rues d'Ottawa. Le rôle des parlementaires consiste à écouter la population. Nous ne partageons peut-être ni le point de vue des manifestants ni l'ensemble des opinions émises par les Canadiens, mais nous écoutons nos concitoyens dans l'espoir de mieux les comprendre. Voilà ce qui a malheureusement fait défaut dans cette enceinte.
Il y a maintenant deux ans que nous sommes en pandémie et que nous en subissons les inconvénients. Tout le monde est écœuré et veut que cela finisse. La bonne nouvelle, c'est qu'il est de plus en plus manifeste que la pandémie tire à sa fin au Canada. Un peu partout au pays, on lève les restrictions. La liberté est de nouveau en marche. Nous pouvons retrouver nos vies. Le match du Super Bowl vient d'avoir lieu en Californie, dans un stade qui comptait 85 000 personnes, et il n'a pas été suivi d'une recrudescence du nombre de cas de COVID. Qu'est-ce qui explique cela? C'est en partie grâce aux vaccins, qui ont aidé.
Le taux de vaccination du Canada est l'un des plus élevés du monde. Il existe maintenant des solutions thérapeutiques. De plus, le variant qui prédomine actuellement est moins virulent. C'est ainsi que se dissipent habituellement les pandémies. La souche dominante devient un virus bénin qui se répand dans la population. On obtient alors une immunité naturelle qui s'ajoute à toutes les autres mesures dont j'ai parlé. Voilà pourquoi nous arrivons à la fin de la pandémie. Nous en voyons le bout. Les unes après les autres, les provinces lèvent leurs restrictions. C'est aussi ce que font de nombreux pays occidentaux. Nous y sommes presque.
Le gouvernement libéral avait qualifié les camionneurs, ceux qui nous ont littéralement approvisionnés en nourriture et autres produits essentiels pendant ces deux dernières années, de héros de première ligne; puis, en janvier, le mois passé, à la fin de cette pandémie, il les a fait passer de héros à zéros. Pourquoi? D’un trait de plume, alors que la pandémie tirait à sa fin, le premier ministre a décidé d’imposer la vaccination obligatoire aux camionneurs transfrontaliers. C’était il y a un mois. Nous parlons d’une petite partie de la population canadienne qui est majoritairement vaccinée et isolée 22 heures par jour. Les libéraux ont ciblé ces personnes. Pire que de les cibler, ils les ont insultées. Ils nous ont divisés.
Quand le convoi pour la liberté s’est mis en branle, le premier ministre a déclaré que ses membres étaient des séparatistes, rien de plus que des gens qui voulaient mettre notre pays en pièces. Or, ils sont arrivés à Ottawa, et je n’ai jamais vu un groupe brandir autant de drapeaux canadiens sur la Colline du Parlement. Ce ne sont pas des séparatistes, ce sont des patriotes. Ils ont été traités de sexistes et de racistes. J’ose espérer que les députés libéraux qui sont ici ont eu l’occasion de rencontrer certains de ces compatriotes et d’entendre leurs histoires. Ils auraient alors vu et entendu qu’ils sont de toutes les nationalités, que toutes les régions du monde sont représentées parmi ces camionneurs et ceux qui se sont joints à eux. Ils n’étaient pas racistes. Ils n’étaient pas sexistes. Ils n’étaient pas séparatistes.
Le premier ministre s’est acharné sur eux, mais dans quel but? On ne peut que supposer que cela visait à servir ses intérêts politiques, ce qui est inacceptable. Dans les deux dernières années, bien des choses regrettables se sont produites, mais au cours des deux dernières semaines ou du dernier mois, ma perception de notre institution et la façon dont les Canadiens voient le Parlement et leur gouvernement ont profondément changé, et pas pour le mieux.
La situation a changé. La reine, à 95 ans, a attrapé la COVID. Malgré toutes les précautions prises, la reine n'a pas été épargnée, mais elle va s'en sortir. Nous sommes assurément entrés dans une nouvelle phase de cette pandémie. Nous arrivons à la fin, alors pourquoi continuer d'imposer des exigences qui ne font que diviser les Canadiens plutôt que de les unifier?
Les pouvoirs accordés au gouvernement par la Loi sur les mesures d'urgence sont totalement inadmissibles, et nous savons que c'est vrai. Dans une société libre, nous ne gelons pas les comptes bancaires. C'est la mesure la plus terrible que les régimes en déroute ailleurs dans le monde appliquent. Dans les derniers jours de leur règne, ils impriment de l'argent, suppriment les libertés civiles et gèlent les comptes bancaires.
Il n'est pas si difficile de voir ce qui se passe au Canada d'un œil suspicieux. Les dirigeants devront promouvoir la guérison une fois la pandémie derrière nous. Une fois toutes les exigences supprimées, dans quelques semaines tout au plus selon moi, il faudra surmonter d'énormes divergences. L'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence ne fait que diviser davantage les Canadiens à une période où nous ne devrions pas être divisés.
C'est un peu la raison pour laquelle nous sommes ici, mais comment en sommes-nous arrivés là? Comment se fait-il qu'une manifestation ait pu durer autant de jours? Lorsque l'enquête aura lieu, elle visera, entre autres, à déterminer ce qui s'est passé au début des manifestations et à analyser ces événements. Pendant des semaines, ou du moins des jours, les bulletins de nouvelles nous informaient que le convoi se dirigeait vers Ottawa. Des gens attendaient le long des autoroutes, dans le froid, juste pour le saluer.
Même ceux qui ne souscrivent pas au message du convoi doivent être objectifs et reconnaître le courage qu'il faut pour tout abandonner, prendre la route et venir à Ottawa défendre ses convictions et faire entendre son message par le gouvernement. Ce n'était pas un secret que le convoi s'en venait à Ottawa.
Quand le convoi est arrivé ici, les panneaux électroniques de la Ville d'Ottawa l'ont accueilli et lui ont dit où tourner pour se diriger vers le centre-ville. Qu'a-t-on dit au convoi quand il est arrivé au centre-ville d'Ottawa? On lui a dit qu'il pouvait se stationner sur la rue Wellington. On l'a informé qu'il devait partir dimanche, mais que d'ici là, il était libre de s'y stationner et d'enfreindre la loi. On a invité les gens à s'installer et à manifester.
Au Canada, nous avons le droit de manifester. Ce droit existe toujours. Nous devons offrir un lieu aux gens pour qu'ils puissent manifester, contester le gouvernement et faire entendre leur message. Selon moi, quand on réalisera l'enquête pour déterminer notamment quelles étaient les premières erreurs, on découvrira que ce sont les pressions exercées par le premier ministre libéral qui ont amené le maire libéral d'Ottawa à inviter les manifestants à s'installer sur la rue Wellington. C'est le message qu'ils ont reçu lorsqu'ils sont arrivés à Ottawa.
Les gens se remettent maintenant en question et disent que nous avions besoin de rapports des services de renseignement parce que nous ne savions pas ce qui s'en venait. Il suffisait d'écouter les nouvelles. Tout le pays savait où les manifestants se dirigeaient et pourquoi ils y allaient. Leur gagne-pain était menacé. La pandémie tirait à sa fin, et, pendant les deux premières années de cette dernière, les camionneurs ont été qualifiés de héros pour avoir transporté des marchandises, traversé la frontière et mis leur vie en danger.
Dans les derniers jours de la pandémie, alors que les exigences relatives à la vaccination étaient éliminées partout au Canada, qu'a fait le premier ministre? Il a décidé de diviser les Canadiens, comme il l'a fait lors des dernières élections. Avant ces élections, il a dit: « Non, nous n'avons pas besoin d'exigences relatives à la vaccination. » Il a dû regarder des sondages qui montraient le contraire, puis il a décidé d'utiliser cette pomme de discorde contre son propre peuple pour diviser les Canadiens afin de marquer des points politiques.
Je voterai contre la motion parce qu'elle est inacceptable. Il est inacceptable de geler les comptes bancaires des gens et d'insulter les travailleurs canadiens qui composent le convoi.