Madame la Présidente, je tiens à souligner que le Parlement du Canada est situé sur le territoire traditionnel du peuple algonquin anishinabe.
C’est un privilège de participer au débat en troisième lecture portant sur la Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation. Je tiens à remercier tous mes collègues de la Chambre qui ont parlé avec tant d’éloquence de l’importance de ce projet de loi.
Au cours de la dernière année et demie, la réconciliation et la relation du Canada avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis ont beaucoup évolué. La découverte de tombes non marquées dans les anciens pensionnats a été un moment décisif. Les survivants et les peuples autochtones de partout au pays ont été entendus. De nouvelles conversations ont alors été amorcées à propos de la dure vérité sur les pensionnats et l'histoire coloniale de notre pays, sur ce que signifie la réconciliation et sur la façon dont nous pouvons avancer tous ensemble.
Nous devons savoir où nous faisons de vrais progrès et, plus important encore, où nous échouons et pourquoi, afin de pouvoir faire mieux. À mesure que nous avançons, nous devons pouvoir mesurer nos progrès afin que le gouvernement fédéral et le Canada tout entier soient tenus responsables de nos promesses envers les peuples autochtones.
Comme la Commission de vérité et réconciliation l'a souligné dans son rapport final, « [l]'avancement de la réconciliation à tous les [...] niveaux de gouvernement et au sein des organisations de la société civile doit également faire l'objet d'une attention vigilante et de mesures d'évaluation afin de savoir si des progrès ont été faits. »
Cependant, comme de nombreux partenaires et organisations autochtones l'ont souligné, le gouvernement ne peut pas s'évaluer lui-même dans le processus de réconciliation. Nous avons besoin d'aide. C'est pourquoi, en 2015, la Commission de vérité et réconciliation a demandé au Parlement du Canada d'établir un conseil national de réconciliation. Justement, nous avons ce projet de loi devant nous.
S’il est adopté, le projet de loi C‑29 fera exactement ce qui a été demandé. Il établira le Conseil national de réconciliation en tant qu’organisme indépendant, permanent et apolitique dirigé par des Autochtones. Le conseil surveillerait les progrès à long terme en matière de réconciliation au pays, et il évaluerait et rendrait compte de la mise en œuvre des 94 appels à l’action.
Cela correspond directement à ce que beaucoup de dirigeants autochtones réclament depuis de nombreuses années, à savoir une plus grande responsabilité, une plus grande transparence et un moyen de tenir le gouvernement et le Canada responsables de notre rôle dans la réconciliation.
Au cours des dernières années, le gouvernement a utilisé les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation comme moyen de mesurer nos progrès en matière de réconciliation. L’établissement de ce conseil national de réconciliation constituerait une étape essentielle sur la voie de la mise en œuvre de tous les appels à l’action. Plus précisément, cela garantirait également la mise en œuvre complète des appels à l’action 53 à 56.
S’il est adopté, ce projet de loi permettra la création d’un conseil national de réconciliation pour répondre immédiatement à l’appel à l’action 53. Il répondrait également aux appels à l’action 54, 55 et 56, qui précisent les rôles, les responsabilités et les attentes à l’égard du conseil et des divers ordres de gouvernement et de leur participation.
Permettez-moi de donner une brève explication en faisant un survol de certains des éléments clés du projet de loi. Ce dernier définit un processus pour la mise en place du conseil, y compris la sélection du premier conseil d’administration. Ce sujet a fait l’objet de nombreuses discussions ce matin.
Le projet de loi stipule qu’au moins deux tiers du conseil d’administration doivent être autochtones. Plus précisément, le conseil doit inclure, au fil du temps, les voix des Premières Nations, des Inuits et des Métis ainsi que des peuples non autochtones du Canada. Les organisations autochtones seraient également incluses, dont un représentant de l’Assemblée des Premières Nations, de l’Inuit Tapiriit Kanatami, du Ralliement national des Métis et de l’Association des femmes autochtones du Canada. Il comprendrait des jeunes, des femmes, des hommes et des personnes de différentes identités de genre, des aînés et des survivants, ainsi que des personnes provenant de diverses régions de notre vaste pays, y compris les territoires ainsi que les régions urbaines, rurales et éloignées.
Ce sont les peuples autochtones qui nous demandent des comptes. Au total, de 9 à 13 administrateurs siègeraient à ce conseil d'administration. Le projet de loi stipule que le ministre responsable travaillera conjointement avec le comité de transition pour sélectionner le premier conseil d'administration. Le conseil établira ensuite le processus d'élection des futurs administrateurs.
Notre gouvernement établira un protocole pour la divulgation de l'information au conseil national de réconciliation par le gouvernement du Canada, dans les six mois suivant sa création. Tout comme nous avons divulgué des documents sur les pensionnats indiens au Centre national pour la vérité et la réconciliation, il est impératif que nous nous assurions que le conseil national de réconciliation dispose de l'information dont il a besoin pour faire son travail.
Je tiens également à souligner que le conseil national de réconciliation serait complètement indépendant du gouvernement et qu'il fonctionnerait comme un organisme sans but lucratif. Ainsi, il ne serait pas lié au fédéral ni à la Couronne. Nous n'aurons pas le contrôle sur ce conseil. Le gouvernement du Canada lui fournirait un fonds de dotation et un financement initial, mais il serait dirigé par des Autochtones.
Même s'il est établi en tant qu'organisme sans but lucratif, le conseil serait tenu de faire rapport annuellement sur les progrès réalisés en matière de réconciliation au Canada et de formuler des recommandations pour faire progresser le travail. Cela signifie que le conseil devrait fournir des rapports annuels et financiers auxquels le gouvernement doit répondre. Ces rapports aideraient le gouvernement fédéral à établir des objectifs et nous permettraient d'élaborer nos plans pour faire progresser la réconciliation en fonction de leurs recommandations.
Le mécanisme de déclaration prévu dans le projet de loi garantit la transparence et la responsabilité et permettra de faire avancer davantage les appels à l’action.
Je soulignerai simplement un dernier élément du projet de loi, qui décrit l’objectif et les fonctions du conseil. Il s’agit, à mon avis, de la partie la plus essentielle de la mesure législative. Pour résumer, le conseil aurait pour mission de demander des comptes au gouvernement du Canada et à tous les ordres de gouvernement sur la réconciliation et les appels à l’action. Le conseil serait chargé d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action national pluriannuel pour faire avancer les efforts de réconciliation.
Pour avoir une idée exacte de ce qui passe sur le terrain, le conseil effectuerait des recherches et discuterait avec des partenaires des progrès réalisés à l'égard de la réconciliation dans tous les secteurs de la société canadienne et par tous les gouvernements. Cela comprendrait le suivi des efforts de mise en œuvre des appels à l'action.
Cela comprendrait également la surveillance des politiques et des programmes du gouvernement, ainsi que des lois fédérales qui touchent les peuples autochtones, et la production de rapports sur leurs progrès.
En se fondant sur cette recherche, le conseil serait également chargé de recommander des mesures pour promouvoir, prioriser et coordonner les efforts de réconciliation.
Le conseil définira certainement sa propre voie, mais son rôle consistera en partie à établir des liens et à harmoniser le travail accompli dans tous les secteurs de la société canadienne, y compris dans tous les ordres de gouvernement.
Bref, l’objectif et les fonctions du conseil seraient multiples. Il serait là non seulement pour réagir et rendre compte des progrès réalisés par le Canada, mais également pour diriger les mesures nous prenons en tant que pays à l’appui de la réconciliation.
Je veux insister sur un dernier point important. Le projet de loi doit absolument être adopté sans plus tarder. Les survivants, les aînés, les gardiens du savoir et les familles vieillissent. Il y a urgence. De nombreux survivants sont déjà décédés sans avoir vu toute la portée des mesures que nous avons prises pour promouvoir la réconciliation. C’est pourquoi je demande aux députés qui sont ici aujourd’hui d’aller de l’avant pour soutenir la création de ce conseil le plus rapidement possible. Nous le devons aux survivants, aux peuples autochtones et à tous les Canadiens.
J’aimerais remercier les survivants des pensionnats indiens de nous avoir transmis leurs vérités et leurs expériences. Sans eux, nous ne serions pas ici aujourd’hui à discuter de l’importance de notre histoire. Meegwetch.