Monsieur le Président, je salue tous les citoyens et toutes les citoyennes de Beauport—Limoilou qui nous écoutent en grand nombre ce soir. C'est toujours un bonheur de les représenter ici, surtout ce soir, puisque je veux absolument les informer de ce qui se passe par rapport au projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi électorale du Canada. Celui-ci vise ni plus ni moins à légitimer et à formaliser une forme de corruption palpable et tangible au Canada. On l'a d'abord vue dans les années 1990 jusqu'aux années 2000, sous les règnes subséquents de M. Dalton McGuinty et de Kathleen Wynne, mais c'est également un système que les libéraux fédéraux ont utilisé plus d'une centaine de fois depuis 2015. Ils tentent maintenant de l'utiliser de manière légale et formelle en le légitimant par l'entremise d'un projet de loi à la Chambre des communes.
Quel était ce système tel qu'il a été mis en place par le gouvernement libéral de l'Ontario dans les années 1990? Deux personnes ont travaillé à sa mise en place: M. Butts et Mme Telford. M. Butts est actuellement le secrétaire principal du premier ministre. Il travaille à l'édifice Langevin. J'appellerai toujours cet édifice ainsi, parce que j'en suis très fier. M. Langevin est un Canadien-français qui s'est battu tout au long de sa carrière pour le droit du Québec à une place au sein du Cabinet ministériel, afin que la voix des Québécois et des Canadiens-français soit entendue au début du XXe siècle. M. Langevin a été une très grande fierté au sein du gouvernement Macdonald. C'est donc un affront qu'on ait enlevé son nom à l'édifice Langevin. Bref, je ferme la parenthèse.
M. Butts est donc le secrétaire principal du premier ministre, et Mme Telford, si c'est toujours le cas, est la chef de cabinet du premier ministre. D'ailleurs, le bureau du premier ministre est une autre institution que l'on devrait fermer dès maintenant. Qu'ont fait ces deux personnes lorsqu'elles ont mis en place ce système en Ontario? Elles ont fait en sorte que les ministres, ou tout député d'arrière-ban, comme moi et d'autres députés ici, qui aspirent à un avancement de carrière, comme devenir ministre pour faire de grandes choses pour ce pays, doivent se conformer à un système selon lequel les questions qui les intéressent n'ont aucune importance, comme la Constitution, l'épanouissement du fait français, leur circonscription, leurs concitoyens et les groupes communautaires. On leur a dit que ce qui était important, c'était de faire en sorte que les coffres du parti débordent pour pouvoir gagner les élections, non pas avec des arguments bien réfléchis, mais plutôt en dépensant des milliards de dollars.
Ce système prévoyait des quotas pour chaque ministre ou chaque personne souhaitant le devenir. Il s'agissait d'un demi-million de dollars par année pour le ministre des Finances et la ministre de la Santé de l'Ontario, par exemple. Selon ce système bien orchestré, les cinq à sept et les collectes de fonds organisés par les ministres devaient strictement avoir un rapport avec leur propre portefeuille. D'ailleurs, une autre chose qui m'a surpris tout au long des discours des députés libéraux, c'est qu'ils ne veuillent pas parler de la distinction très nette qui existe entre les collectes de fonds partisanes et les activités de financement donnant un accès privilégié comme celles que les libéraux ont organisées plus de 100 fois entre 2015 et 2017.
Personnellement, j'ai fait des collectes de fonds, comme tous les députés au Canada, avec des membres de mon propre parti, le Parti conservateur, ou des citoyens intéressés à rencontrer les conservateurs afin de mieux comprendre notre philosophie politique, ce que nous pouvons faire pour le Canada, d'où nous venons et où nous allons. Bref, ils veulent connaître nos idées par rapport à cette grande nation. Toutefois, je n'ai jamais été à une activité de collecte de fonds où il y avait 30 personnes de la même organisation ou d'une même profession ayant un contrat actuel, un projet d'affaires ou tout autre intérêt à faire valoir auprès d'un ministère fédéral quelconque.
Chaque fois que je participe à une collecte de fonds, de nombreux citoyens canadiens intéressés à la politique viennent rencontrer les conservateurs pour en savoir plus sur notre parti politique. Toutefois, les activités de financement donnant un accès privilégié découlent d'une grande pression au sein du bureau du premier ministre. On exige du ministre de la Justice ou du ministre des Finances, par exemple, qu'ils amassent un certain montant, qui se chiffre à des centaines de milliers de dollars par année. Dans ce système, chaque ministre organise sciemment des listes d'invitation détaillées sur lesquelles se retrouvent des organismes ou des individus qui font du lobbying concernant des dossiers liés à son portefeuille.
Voici deux exemples palpables. Pas plus tard qu'en 2016, la ministre de la Justice a organisé un événement à Toronto. Je ne me souviens plus de la date exacte, mais cela a été discuté longuement aujourd'hui. La forte majorité des gens qui étaient présents faisaient du lobbying pour faire valoir des changements au Code criminel ou à la magistrature canadienne, voire même pour devenir juges. J'aimerais bien savoir s'il y avait au moins un seul député libéral à cet événement ou si un citoyen ordinaire de Toronto y est allé pour connaître un peu la philosophie politique des libéraux, s'il y en a une de ce côté de la Chambre, mis à part leur volonté d'être au pouvoir. Bref, la ministre de la Justice a dû s'excuser d'avoir organisé cet événement, tellement c'était flagrant.
La même chose est arrivée au ministre des Finances, à Halifax, avec les autorités portuaires. Il y avait également des hommes d'affaires qui avaient des intérêts très importants à faire valoir au ministre des Finances. Encore une fois, ce n'était pas des membres en règle du Parti libéral intéressés à découvrir sa vision du pays. Ce n'était pas non plus des citoyens d'Halifax qui voulaient découvrir ce que leurs 35 ou 36 députés libéraux font pour l'Atlantique. C'était des lobbyistes avec des intérêts précis qui savaient très bien qu'en payant 1 500 $ — c'est maintenant 1 575 $ —, ils allaient avoir un accès direct au ministre pour lui faire part de leurs problèmes ou de leurs demandes express.
Ces deux exemples sont quand même flagrants, et bien heureusement, ils se sont rendus sur les pupitres des éditorialistes en chef des grands journaux quotidiens du Canada. Ce gouvernement est plutôt bien traité par les journalistes, mais ces deux événements typiques de financement donnant un accès privilégié sentaient tellement la corruption que les médias en ont parlé.
Le premier ministre a même dit que cette pratique manquait de transparence et qu'il ne fallait fort probablement pas la cautionner en politique canadienne, puisque cela augmente le cynisme des Canadiens et leur enlève le désir de participer à la démocratie lorsqu'ils constatent que cela prend 1 500 $ pour avoir accès au ministre des Finances. Lorsque les médias ont rapporté cela et que le premier ministre et le gouvernement libéral ont reconnu que c'était déplorable pour la démocratie canadienne, les libéraux ont décidé de résoudre le problème en présentant le projet de loi C-50, qui, comme je l'ai dit au tout début, vise à formaliser et à rendre légitimes les activités de financement donnant un accès privilégié.
Quelques questions ont été soulevées à la Chambre par mon collègue de York—Simcoe: « Revenons au texte et voyons quels en seront les effets. Y a-t-il quoi que ce soit là-dedans [dans le projet de loi] qui empêcherait une telle chose de se produire de nouveau? » La réponse est non.
Il poursuivait: « Y a-t-il quoi que ce soit qui puisse dissuader ces gens de refaire la même chose, dans la mesure où les dons correspondant au montant maximal autorisé sont rendus publics de toute façon? »
Non, cela n'empêchera pas les activités de financement donnant un accès privilégié d'arriver de nouveau. Il s'agit d'un écran de fumée. Il n'y a absolument rien dans ce projet de loi qui va empêcher ce phénomène qui est une forme de corruption au Canada. Au contraire, le gouvernement libéral ne fait que rendre légitime et formaliser une corruption palpable et se donner, comme le dit mon collègue, une force systématique en ce qui a trait à la collecte de fonds au Canada.
Il faut décrier cela. C'est extrêmement déplorable.
En tant que député de Beauport—Limoilou, je m'oppose fortement à ce projet de loi.