Madame la Présidente, j'appuie le projet de loi C-22. Je précise, pour ceux qui s'intéressent à la question, que c'est un projet de loi en trois parties. La première s'attaque sérieusement aux peines minimales; la deuxième rétablit le pouvoir discrétionnaire des juges à l'égard des condamnations avec sursis en mettant l'accent sur la justice réparatrice et la troisième propose de considérer la consommation de drogue comme étant un problème de santé. Je reviendrai sur ce dernier point dans quelques instants.
Je souhaite d'abord parler des peines minimales obligatoires et je partirai du fait simple et massivement étayé qu'elles ne fonctionnent pas. Elles sont inefficaces et n'ont aucun effet dissuasif sur la criminalité. Je suis député de Beaches—East York, et les gens de ma circonscription ont été profondément touchés par la fusillade qui est survenue sur l'avenue Danforth il y a quelques années. Si les peines minimales obligatoires pouvaient prévenir une autre fusillade comme celle survenue sur l'avenue Danforth, je les appuierais, mais ce n'est pas le cas et elles ont plutôt des répercussions négatives disproportionnées sur les Canadiens racialisés. Nous voyons les chiffres. Nous voyons que 9 % des Canadiens noirs sont emprisonnés, bien qu'ils ne représentent que 3 % de la population. Nous voyons que 30 % des Autochtones sont emprisonnés, bien qu'ils ne représentent que 5 % de la population. Évidemment, il existe des crimes odieux pour lesquels l'emprisonnement à vie est le châtiment qui s'impose et qui semble moralement justifié, mais il y a aussi des cas devant les tribunaux, et les avocats peuvent manifestement concevoir un grand nombre d'hypothèses, où les peines minimales obligatoires ne sont pas proportionnelles au crime et où il est important de pouvoir faire preuve de discrétion judiciaire. Nous avons vu des tribunaux déclarer que les peines minimales obligatoires sont inconstitutionnelles en raison de leur caractère injuste. Non seulement elles sont inefficaces, mais elles sont aussi injustes.
C'est la même chose pour les condamnations avec sursis, il y a cette notion d'efficacité, mais aussi d'équité. Les peines et les recours doivent tenir compte du contexte. Il y a des raisons d'équité, telles qu'elles se rapportent à la justice raciale — comme je l'ai mentionné —, mais j'ai aussi déjà entendu un député conservateur mettre l'accent sur la sécurité publique, alors parlons-en. À moins que les délinquants ne soient condamnés à perpétuité ou à une peine similaire, ils seront, de fait, libérés dans la collectivité. Si nous ne mettons pas l'accent sur la justice réparatrice, la réadaptation et la réintégration sociale, nous exposons les collectivités à un plus grand risque. Les preuves sont là. C'est aussi simple que cela. Si la sécurité publique est une priorité, nous devrions nous intéresser à la justice réparatrice.
Pour le reste de mon allocution, je veux parler de la troisième partie du projet de loi C-22, c'est-à-dire de la réforme sensée de nos lois en matière de drogues. Comme tous ceux qui se sont penchés sur la question en conviendront, la soi-disant guerre contre la drogue est un échec lamentable. La Commission mondiale pour la politique des drogues affirme: « les faits démontrent de façon éclatante que les stratégies répressives ne résolvent pas la problématique des drogues, la “guerre à la drogue” est vouée à l’échec. » La réglementation constitue la solution à long terme. Toutes les drogues devraient faire l'objet d'une réglementation stricte établie en fonction de leurs méfaits respectifs. À l'évidence, la caféine diffère de la morphine, alors elles ne devraient pas être réglementées de la même façon. Il s'agit du point de vue qu'a adopté la Commission mondiale pour la politique des drogues, qui se compose d'experts et d'anciens dirigeants mondiaux touchés directement par les ratés de la guerre contre la drogue. La commission a écrit:
La régulation et la gestion des produits et des comportements à risque s’inscrivent dans le monde entier parmi les fonctions premières des pouvoirs publics. C’est une règle que l’on retrouve dans tous les domaines de la politique et du droit — sauf celui des drogues. [...] En termes de santé publique, si on la compare à la législation concernant d’autres comportements à risque — sports de l’extrême, régimes alimentaires insalubres ou pratiques sexuelles à risque — c’est bien la prohibition punitive des drogues, pas la régulation, qui paraît « radicale ». S’il faut réguler les drogues, ce n’est pas parce qu’elles sont inoffensives, mais bien parce qu’elles sont dangereuses.
Cela ne se fera pas du jour au lendemain, alors, d'ici l'atteinte de cet objectif, regardons en toute honnêteté où nous en sommes aujourd'hui et le chemin qu'il faudra parcourir. Pour évaluer la situation actuelle, on peut regarder les cinq ou six dernières années. Le gouvernement a réglementé le cannabis et il est réellement un chef de file en la matière sur la planète. Nous avons multiplié les solutions de réduction des méfaits, y compris en ajoutant des centres de consommation supervisés partout au pays afin de sauver des vies. Nous vivons présentement une crise des opioïdes et les avantages des centres de consommation supervisés ont été prouvés; ils sauvent des vies. Nous avons également bonifié le financement destiné aux traitements dans les provinces.
Nous avons mis en place des projets pilotes d'approvisionnement plus sécuritaire, y compris ici même dans l'Est de la ville. South Riverdale vient de recevoir du financement afin de renouveler son projet pilote d'approvisionnement plus sécuritaire pour deux autres années. Encore une fois, c'est une mesure qui sauvera des vies.
Nous avons mis en place de nouvelles directives à l'intention des procureurs concernant la possession simple de drogue et les poursuites relatives à ce délit. Concrètement, pour ceux qui s'intéressent aux chiffres, de 2014 à 2018, le nombre de poursuites pour possession de drogue a été réduit de moitié, passant de 13 678 à 6 374. Maintenant, il ne fait aucun doute qu'il faut poursuivre sur cet élan et c'est ce qui m'amène à la troisième partie du projet de loi C-22, soit pratiquement un copier-coller du projet de loi d'initiative parlementaire que j'avais présenté en février l'année dernière.
Remontons encore plus loin, c'est-à-dire à l'automne 2019. En pleine campagne électorale, j'étais à la Hope United Church, ici, dans le secteur est de Toronto, et on m'a posé la question suivante: si vous aviez l'occasion de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire, quelle serait la première mesure législative que vous présenteriez? Sans hésiter, j'ai parlé du projet de loi que j'avais présenté à la législature précédente en vue de réformer nos politiques et nos lois en matière de drogue et de traiter la consommation de drogues comme un problème de santé. J'ai dit que je renouvellerais mes efforts dans ce dossier. Au début de 2020, j'ai présenté deux projets de loi à cette fin au cours de la présente législature, et jamais je n'aurais pensé que le gouvernement choisirait de reprendre pratiquement mot pour mot l'un d'eux dans un projet de loi d'initiative ministérielle.
Cela dit, le projet de loi n'est pas parfait. Comme je l'ai dit dans mon discours au sujet de mon projet de loi d'initiative parlementaire, j'aimerais voir une décriminalisation complète de la possession de drogues. Selon moi, on ne devrait infliger aucune sanction. La seule intervention auprès des personnes qui consomment des drogues devrait être une intervention en santé à caractère positif et sur une base volontaire. Nous voulons aider ces gens et non les punir. Cependant, je suis conscient qu'il est difficile de faire franchir toutes les étapes du processus législatif à un projet de loi d'initiative parlementaire et je tiens à modifier la loi.
Les éléments du projet de loi C-22 relatifs à la politique en matière de drogues ne sont pas parfaits eux non plus. Cependant, il ne fait aucun doute qu'ils amélioreront considérablement les choses. Aux termes du projet de loi, il serait pratiquement impossible d'engager avec succès des poursuites pour possession simple. Celui-ci n'accorderait pas plus de pouvoir discrétionnaire aux policiers et aux poursuivants qu'ils en ont déjà, mais il limiterait grandement leur pouvoir discrétionnaire conformément à des principes fondés sur des données probantes, qui sont énumérés dans le projet de loi et qui valent la peine d'être lus. Les voici:
a) la consommation problématique de substances doit être abordée principalement comme un enjeu social et de santé;
b) les interventions doivent reposer sur des pratiques exemplaires fondées sur des données probantes et viser à protéger la santé, la dignité et les droits de la personne des consommateurs de drogues ainsi qu’à réduire les méfaits pour ceux-ci, leurs familles et leurs collectivités;
c) l’infliction de sanctions pénales pour la possession de drogues à des fins de consommation personnelle peut accroître la stigmatisation liée à la consommation de drogues et est incompatible avec les données probantes établies en matière de santé publique;
d) les interventions doivent cibler les causes profondes de la consommation problématique de substances [...]
e) l’utilisation de ressources judiciaires est plus indiquée dans le cas des infractions qui présentent un risque pour la sécurité publique.
Quant au pouvoir discrétionnaire de la police et des procureurs, il pose un vrai problème. Cependant, le système proposé, s'il est mis en œuvre correctement, n'est pas si éloigné du modèle portugais que de nombreux partisans de la décriminalisation appellent de leurs vœux. Dans le cadre de ce modèle, les forces de police restent les premières à intervenir dans de nombreux cas, et les groupes travaillant à la dissuasion disposent d'un pouvoir discrétionnaire important leur permettant d'imposer différentes solutions, dont certaines très coercitives.
J'ai parlé avec Bryan Larkin, chef de police de la région de Waterloo, qui a contribué à ouvrir la voie. Je tiens à féliciter les chefs de police qui ont vraiment réclamé la décriminalisation et la mise en place d'une politique plus raisonnable en matière de drogues. Les procureurs et les chefs de police s'étant ralliés à cette cause, il faut maintenant, assurément, que le gouvernement donne des ressources pour aider les provinces à étendre la gamme des traitements possibles et à élargir leurs services de santé.
Le projet de loi C-22 est une occasion en or d'apporter des changements réels et de mettre effectivement fin à la guerre contre les drogues. Personnellement, je préférerais qu'on abroge simplement l'article 4 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, ce qui est aussi le choix de la Commission mondiale sur la politique des drogues.
Il est important de se rappeler que sur les 250 millions de personnes qui consomment des drogues dans le monde, 10 % sont des cas problématiques. Par conséquent, l'idée de jeter l'opprobre sur les gens et de criminaliser les consommateurs de drogues est tout à fait déconnectée de la réalité que nous décrivent les données probantes. Au lieu de criminaliser et de punir les personnes qui consomment des drogues, nous devrions leur proposer des soins de santé et des traitements.
Madam Speaker, I am in support of Bill C-22. Bill C-22, for those interested in the subject, comes in three parts. It would address mandatory minimum sentences in a serious way; it would restore judicial discretion as it relates to conditional sentencing and an emphasis on restorative justice; and the third piece is an emphasis on treating drug use as a health issue, and I will have more to say about that in a bit.
I want to start by focusing on mandatory minimum sentences with a simple premise that is overwhelmingly supported by the evidence, which is that mandatory minimum sentences do not work. They are ineffective; they do not deter crime. I am the member of Parliament for Beaches—East York, and we were deeply impacted by the Danforth shooting a few years ago. If mandatory minimum sentences could prevent another Danforth shooting from happening, I would support them, but they would not, and instead they disproportionately and negatively impact racialized Canadians. We see the numbers. We see, of Black Canadians, who represent 3% of the population, 9% are imprisoned. We see, of indigenous people, who represent 5% of the population, 30% are imprisoned. There are obviously instances where crimes are so abhorrent that retribution demands a lifetime in prison, and that obviously accords with our sense of justice, but we have seen cases before our courts, and there are obviously any number of hypotheticals that lawyers will devise, where mandatory minimum sentences do not fit the crime and judicial discretion is important. We have seen courts render these mandatory minimums unconstitutional because of their unfairness. They are not only ineffective, but unfair.
It is the same with conditional sentencing, that notion of effectiveness but also fairness. Punishments and remedies need to take into account context. There are reasons of fairness, and I mentioned reasons of fairness as it relates to racial justice, but also I have already heard a question from a Conservative colleague emphasizing public safety, so let us talk about public safety. Unless offenders are sentenced to life or something close to it, they will, as a simple fact, be released into our community. If we do not focus on restorative justice, rehabilitation and reintegration, we put our communities at greater risk. The evidence is there. It is as simple as that. If we care about public safety first and foremost, we ought to care about restorative justice.
I want to move to, for the remainder of my comments, the third part of Bill C-22, which is the reform, in a more sensible way, of our drug policy laws. This is roundly accepted by anyone who has studied the issue, but the so-called “war on drugs” is an abject failure. I will read from the Global Commission on Drug Policy. They write, “the evidence overwhelmingly demonstrates that repressive strategies will not solve the drug problem, and that the war on drugs has not, and cannot, be won.” The long-term answer is regulation, that all drugs should be, in many cases, strictly regulated according to their respective harms. Caffeine is different from morphine and they should be regulated, of course, differently. Again, this is the view of the Global Commission on Drug Policy, a commission made up of experts and former world leaders who have been deeply impacted by the failings of the war on drugs. They write:
Regulation and management of risky products and behaviors is a key function of government authorities across the world. It is the norm in almost all areas of policy and law – except drug policy. ... In the field of public health, when compared with policy responses to other risky behaviors – such as dangerous sports, unhealthy diets or unsafe sex – it is punitive drug prohibitions that are the “radical” policy response, not regulation. Drugs should be regulated not because they are safe, but precisely because they are risky.
We are not going to get there tomorrow, so on the road to that goal, let us first take stock of where we are and where we will go from here, realistically. In taking stock, we can look over the last five or six years. We have as a government regulated cannabis, a real model for the world. We have expanded harm reduction options, including safe consumption sites across this country to save lives. We are in the midst of an opioid crisis, and we know that the benefits of safe consumption sites have been proven and that they save lives. We have also increased money for treatment options for the provinces.
We have implemented safer supply pilot initiatives, including here in the east end. South Riverdale just received funding to renew its safe supply pilot for another two years. Again, this will save lives.
We have established new guidelines for prosecutors in relation to the simple possession of drugs and the prosecution of simple possession of drugs. In practice, for those interested in the numbers, from 2014 to 2018 we saw drug possession prosecutions cut in half, from 13,678 to 6,374. Now, we unquestionably need to build on that progress, and that brings me to the third part of Bill C-22, which is nearly a cut-and-paste of a private member's bill I introduced in February of last year.
To go even further back to the fall of 2019, in the midst of an election I was at Hope United Church here in the east end of Toronto and I was asked this question: If you had the opportunity to introduce a private member's bill, what is the first private member's bill would I introduce? I very quickly said that I had had a bill in the last Parliament to reform our drug policy laws and to treat drug use as a health issue, and I would revisit that issue. Early in 2020, I introduced two bills in this Parliament to that end, and I never expected that one of those bills would be picked up so quickly as a government bill in an almost identical fashion.
Now, the bill is not perfect, and I said in the course of my speech on my private member's bill that I would like to see full decriminalization. I do not think that there should be any penalty. There should be no intervention other than a positive, voluntary health intervention for people who use drugs. These are the people we want to help, not the people we want to punish. However, I also recognize the reality of the ability to move a private member's bill forward, and I want to make difference in the law.
The elements in Bill C-22 as they relate to drug policy are not perfect either, but they unquestionably will make a significant difference. The bill would make it virtually impossible for a prosecution of simple possession to proceed successfully. It would not give discretion to police, as they have discretion already, and it would not give discretion to prosecutors, as they have discretion already, but it would significantly fetter their discretion in accordance with evidence-based principles, which are simply worth reading from the bill. These principles are:
(a) problematic substance use should be addressed primarily as a health and social issue;
(b) interventions should be founded on evidence-based best practices and should aim to protect the health, dignity and human rights of individuals who use drugs and to reduce harm to those individuals, their families and their communities;
(c) criminal sanctions imposed in respect of the possession of drugs for personal use can increase the stigma associated with drug use and are not consistent with established public health evidence;
(d) interventions should address the root causes of problematic substance use...; and
(e) judicial resources are more appropriately used in relation to offences that pose a risk to public safety.
Now, there are real challenges to police and prosecutorial discretion, but the proposed system, if implemented well, is not so far away from the Portugal model that we hear many advocates of decriminalization call for. In this model, police remain first responders in many cases, and dissuasion panels have significant discretion to mete out different remedies, including some that are quite punitive.
I have spoken with Bryan Larkin, chief of police for the Waterloo area, and he has helped to lead efforts. I want to credit the chiefs of police for really pushing for decriminalization and a more sensible drug policy. I can tell members that with prosecutors and chiefs of police on board, we now unquestionably need resources from the government to expand treatment options and health services for the provinces.
There is a real opportunity with Bill C-22 to make a meaningful difference and to effectively end the war on drugs. My preference would be to simply delete section 4 of the CDSA, which is the preference of the Global Commission on Drug Policy as well.
It is important to remember that of the 250 million people around the world who use drugs, 10% are problematic cases. Therefore, the idea of throwing the book at people and that people who use drugs ought to be criminalized is significantly divorced from the evidence. We need to replace the criminalization and punishment of people who use drugs with the offer of health and treatment services.