Monsieur le Président, avant de parler du projet de loi C-47, j'aimerais revenir sur ce que disait mon collègue de Mississauga-Sud à propos des aînés.
Je suis député à la Chambre depuis près de 17 ans, et s'il y a une question à laquelle nous sommes tous sensibles, c'est bien la manière dont nous nous acquittons de nos obligations à l'endroit de nos aînés, de nos hommes et nos femmes en uniforme et de nos jeunes, notamment en créant des programmes et des initiatives jeunesse ou en investissant dans l'éducation. Après tout, nous parlons tous de l'avenir du pays, mais ce sont nos jeunes qui ont besoin de faire des études et qui ont besoin des bons outils.
En ce qui concerne les aînés et le fiasco que l'on sait, je suis ravi que mon collègue de Mississauga-Sud en ait parlé lorsque le vaillant député de Yukon lui a posé la question. Je ne sais pas quoi dire, sinon « laissons le bénéfice du toute aux gens et essayons de tirer quelque chose de positif de tout ça. »
J'aimerais maintenant parler du projet de loi C-47, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 mars 2010 et mettant en oeuvre d'autres mesures. Ceux qui nous regardent à la télévision verront sur leur écran « Projet de loi C-47, Loi de soutien de la reprise économique au Canada ». Pour ce qui est du mot « reprise », on voit bien, avec tout ce qui se passe actuellement ailleurs sur la planète, que le monde entier tente encore de se remettre des mesures toxiques, pour être poli, qui nous viennent des États-Unis et qui ont nui à de nombreux pays et régions du globe.
Nous sommes chanceux à plus d'un égard, ici au Canada, car il y de nombreuses années, le gouvernement libéral dirigé par le premier ministre Jean Chrétien, aidé de Paul Martin comme ministre des Finances, a pris l'initiative de s'attaquer, notamment, au problème des banques. C'est grâce à cela que nous sommes en mesure de traverser la période difficile que nous connaissons actuellement.
Ce projet de loi a suscité plusieurs questions. Le député de Mississauga-Sud l'a décrit comme un projet de loi particulièrement volumineux, avec ses 199 articles. Il a abordé certains éléments de forme, mais ce qui intéresse vraiment le Canadien moyen, c'est d'entendre parler de ce qui le touche au quotidien, de choses concrètes.
En ma qualité de membre du Comité du commerce international, j'ai récemment eu le privilège de m'entretenir avec nos homologues à propos de la progression de l'accord de libre-échange Canada-Europe. Tous les pays du monde qui cherchent à prendre des mesures de relance en vue de stimuler l'emploi et l'économie veulent commercer. C'est magnifique, parce que le Canada est lui aussi un pays commerçant. Tous les pays veulent vendre leurs produits et services, mais pour ce faire, il faut qu'il y ait au moins une économie dans le monde qui soit capable de les acheter. Autrement dit, il faut que les pays mettent de l'ordre dans leurs finances.
Nous sommes en communication avec nos homologues anglais, par exemple. Nous avons suivi de près l'évolution de la situation en Irlande, son effondrement et la prise de contrôle de son système bancaire. Il n'y avait plus aucune liquidité, etc. Le FMI et la Grande-Bretagne devaient intervenir pour aider l'Irlande, et ils auraient raison de le faire car l'Irlande a besoin d'une économie stable ou à tout le moins durable pour pouvoir acheter des biens et services.
Malgré ses difficultés, le Royaume-Uni, par exemple, nous ressemble. J'aimerais en dire quelques mots dans le contexte du projet de loi. Le nouveau gouvernement de coalition anglais s'apprête à prendre certaines mesures. Je n'ai pu m'empêcher de sourire quand j'en ai pris connaissance parce que cela m'a ramené à 1993-1994. Je suis retourné vers le futur. D'autres pays européens et autres prennent les mêmes mesures que prend le Royaume-Uni. Je vais parler de certaines de ces mesures, que nous avons d'ailleurs déjà prises ici.
Le Royaume-Uni connaît des temps difficiles. Il applique actuellement un programme d'austérité, si je puis employer ce mot. Certains domaines seront épargnés, soit la recherche scientifique, la santé, les écoles, ce qui signifie que le gouvernement investit dans l'éducation, le développement international, les énergies renouvelables et les grands projets d'infrastructure. Les domaines qui feront l'objet de compressions sont l'aide sociale, le logement social, les services policiers, ce qui est une erreur, à mon avis, et les services gouvernementaux, ce qui est une bonne chose, selon moi.
Pourquoi est-ce que j'en parle aujourd'hui? Parce qu'il y a des domaines qui ne sont pas abordés dans le budget et qui devraient l'être. Je veux parler de deux d'entre eux.
Mon collègue de Yukon a parlé des soins de santé. Depuis des années, d'aussi loin que je me souvienne, les soins de santé sont un domaine prioritaire pour les Canadiens. Justement, il n'y a pas très longtemps, je suis tombé sur un article selon lequel les Canadiens plaçaient les soins de santé plus haut que l'économie sur l'échelle des priorités. Cela confirme ce que mes électeurs me disent depuis des décennies.
Qu'a fait le gouvernement libéral à l'époque où Paul Martin était ministre des Finances? Il a mis en oeuvre les recommandations du rapport Romanow. Interviewé par Peter Mansbridge, M. Romanow a affirmé que les libéraux étaient même allés au-delà des recommandations. Il s'agissait d'un engagement sur dix ans.
Pourquoi est-ce que je reviens là-dessus? Parce que les conservateurs, après deux mandats en tant que gouvernement minoritaire, n'ont pas fait un seul investissement dans les soins de santé. En réponse à une question à la Chambre, le ministre de la Santé de l'époque, qui est maintenant ministre de l’Industrie, avait dit que le gouvernement maintiendrait le financement après le budget de l'an dernier ou de l'année d'avant. Autrement dit, il allait investir les 58 milliards de dollars que les libéraux avaient réservés pour les soins de santé. Pourtant, les soins de santé étaient la grande priorité des Canadiens, et c'est encore le cas aujourd'hui.
Comme je le disais, le Royaume-Uni maintient ses investissement dans la recherche scientifique, et c'est le deuxième domaine dont je voulais parler. De son côté, le gouvernement conservateur a très peu investi dans la R et D. Tout le monde parle de faire rouler l'économie, de rester concurrentiel dans la nouvelle économie, en investissant dans la R et D. Or, la R et D ne peut créer des emplois que si nous y investissons de l'argent. Bien sûr, c'est un peu cher au début mais, comme on dit, il faut dépenser pour gagner de l'argent, et nous savons très bien que le nouveau gouvernement conservateur n'a pas fait cela.
Je me réfère à un article intitulé « Des chercheurs sont déçus du financement de l'innovation. Seulement de quoi payer les frais courants ». J'en cite un passage, sans faire de partisanerie, ce que je refuse toujours de faire. Je choisis de reprendre les propos d'autres personnalités pour que les gens sachent qu'il ne s'agit pas d'observations partisanes prononcées par un député libéral du Parlement, mais plutôt des propos de Canadiens ou d'autres personnes, des intervenants du milieu, dans ce cas-ci des chercheurs. Voici ce que dit l'article:
Peter MacLeod, qui est rattaché au centre pour l'étude de la démocratie de l'Université Queen's, a déclaré qu'« une bonne partie des fonds promis aux différentes agences ne permettra que de payer les frais courants ».
On a bien consacré certaines sommes; je ne dis pas qu'aucuns fonds n'ont été versés. Mais comment peut-on espérer faire concurrence aux autres afin de créer les emplois de l'avenir lorsque les budgets du gouvernement ne prévoient aucun investissement important?
Pourquoi perdons-nous du terrain? Parce que d'autres pays investissent et que nous ne le faisons pas. Le Canada avait une forte avance sur les autres pays grâce aux huit budgets équilibrés de suite des libéraux et à d'énormes excédents. Si je me souviens bien, le dernier budget des libéraux, lorsque nous avons perdu le pouvoir en 2006, affichait un excédent de plus de 13 milliards de dollars.
Le gouvernement se félicite du fait que la situation de l'économie est bonne et que le Canada est en meilleure position que tous les autres pays. Cela est vrai. Pourquoi alors ne faisons-nous pas les investissements les plus judicieux? Le Canada accuse d'énormes retards. Les États-Unis ont dépensé 594 millions de dollars en 2009 et l'Australie, 123,5 millions. En comparaison, le Canada n'a dépensé que 19 millions de dollars. Comment pouvons-nous alors être concurrentiels?
Nous sommes tous au courant des difficultés que connaissent les États-Unis. Parlant des États-Unis, nous avons pu constater qu’ils ont quelque peu amélioré leur système de soins de santé. Même Sarah Palin a parlé de notre système, après y avoir recouru elle-même. Elle ne s’est pas trompée à ce sujet, même si elle a un peu confondu les deux Corées. Le fait est qu’elle a confirmé que nous avons un meilleur système de santé, qu’elle-même et sa famille ont utilisé.
Si nous ne faisons pas les investissements qu’il faut en R-D, nous perdrons la chance de miser sur les emplois de l’avenir. Par exemple, la Chine, pays le plus pollueur du monde, se classe aujourd’hui première au chapitre des investissements dans l’énergie verte. La Chine a joint le geste à la parole. Elle investit. Oui, la Chine pollue, mais elle dit maintenant qu’elle doit s’attaquer à cet horrible problème. En 2009, elle a investi 34,5 milliards de dollars dans les technologies énergétiques à faibles émissions de carbone. J’applaudis la Chine. Je ne dis pas que nous devons investir 34,5 milliards, mais nous pouvons certainement investir un peu plus que nous ne le faisons.
Nous allons perdre notre part des emplois de l’avenir en ne faisant pas les investissements appropriés. Nous avons vu que le Royaume-Uni fait ces investissements, même si sa situation financière est bien pire que la nôtre.
Bien sûr, dans le cas du système de soins de santé qui, à mon avis, a besoin d’être modernisé, l’entente décennale arrive à expiration. Les Canadiens observeront de près le gouvernement pour voir quelles sont les mesures qu’il prendra. On aurait pu penser qu’à l’approche de la date de renouvellement de l’entente, le gouvernement engagerait des discussions avec les provinces, les professionnels et les intervenants. Nous avions au moins demandé à M. Romanow de réaliser une étude. Il nous avait remis ses conclusions, et nous y avons donné suite. L’entente qui en a découlé arrive à expiration, mais le gouvernement n’a même pas engagé de discussions. Cela m’inquiète.
Je suis tellement déçu par le gouvernement que je ne sais même plus par où commencer.
Mon collègue a parlé du compte d’épargne libre d’impôt de 5 000 $. C’est une bonne initiative. Toutefois, compte tenu des circonstances actuelles, on peut se demander combien de familles ont les moyens d’économiser 5 000 $ après impôt. Bien peu de Canadiens peuvent le faire. Les très riches ont peut-être les moyens d’en profiter. S’ils le font, je n’y vois pas d’inconvénients. Je leur souhaite bonne chance. C’est la bonne chose à faire. N’empêche, les Canadiens moyens ne peuvent pas le faire, et il n’y a pas d’autres initiatives pour appuyer les familles. Pourquoi? Il y a encore des gens qui perdent leur emploi. Oui, quelques emplois sont créés par-ci par-là, mais nous savons que l’économie ne croît pas vraiment et que les nouveaux emplois ne sont pas créés aussi rapidement que le gouvernement l’avait prévu. Les finances nationales ne sont pas en aussi bon état qu’elles le devraient. Je vais également aborder ce point.
Aujourd’hui, les Canadiens n’ont plus confiance. Pourquoi? Parce qu’on leur dit des choses qui ne correspondent pas à la réalité.
Par exemple, aujourd'hui, nous sommes aux prises avec un déficit de 56,5 ou 57 milliards de dollars accumulé au cours de la dernière année. Le gouvernement prévoyait qu'il allait se situer entre 52,2 et 53,3 milliards de dollars, environ. Les conservateurs se sont trompés de près de 2 milliards de dollars dans leurs prévisions. À l'heure actuelle, les conservateurs disent que, cette année, on aura un déficit de 55 ou 56 milliards de dollars, pour un total général d'environ 110 milliards de dollars. C'est sans précédent.
Le Canadien moyen n'a qu'à remonter à peine 16 ou 17 ans en arrière et il se rendra compte que notre déficit était alors de 42,3 milliards de dollars. Dix-sept ans plus tard, il a plus que doublé et il n'y a aucune croissance économique. La création d'emplois est nulle. Le gouvernement touche moins de recettes pour résorber ce déficit.
Le prochain budget sera le quatrième du gouvernement. Cela me rappelle le règne de Brian Mulroney. Lorsque les conservateurs dirigés par Mulroney ont été au pouvoir pendant neuf ans, ils n'ont pas atteint une seule cible budgétaire. Année après année, ils nous ont dit qu'ils feraient des dépenses, mais ils ne sont jamais parvenus à atteindre leur objectif. Par conséquent, la dette n'a pas cessé de croître et, en 1993, nous avons pris les mesures qui s'imposaient. Nous avons assumé nos responsabilités, tout comme le Royaume-Uni, l'Irlande et la Grèce assument les leurs aujourd'hui. Apparemment, le Portugal, l'Espagne et d'autres pays de l'Union européenne seront les prochains à faire de même. Ils mettent en oeuvre des programmes d'austérité financière. Ils font aujourd'hui ce que nous avons fait de manière responsable.
Par conséquent, lorsque le gouvernement nous accuse d'avoir sabré les dépenses, je tiens à lui rappeler que les gouvernements conservateurs de Mike Harris et de Ralph Klein ont fait la même chose. Nous n'avions pas le choix. Il fallait agir pour éviter de s'enliser davantage.
Heureusement, nous avons fait de bons investissements dans la nouvelle économie, par exemple dans la recherche et le développement. Nous avons investi dans l'éducation. Nous avons investi dans les petites et moyennes entreprises, ce qui les a aidées à créer des emplois. Les gens mettaient l'épaule à la roue. Autre chose importante, nous abaissions les charges sociales.
Le gouvernement parle d’abaisser les impôts. Je mets publiquement sa parole en doute quand il dit qu’il a baissé les impôts, car il ne l’a pas fait. Il a dit qu’il augmenterait les impôts de 1,5 p. 100 puis que finalement, ce serait seulement de 0,5 p. 100. Toutefois, 0,5 p. 100 représente quand même une augmentation et le gouvernement essaie de faire passer cela pour une baisse d’impôt. C’est toujours un fardeau pour l’employeur et l’employé. Cela n’incite pas les employeurs à investir dans de nouveaux outils, du nouvel équipement ou dans de nouveaux employés. Cela les en dissuade. Si les Canadiens ne travaillent pas, ils n’ont pas de capacité de gain et n’ont pas de pouvoir d’achat, ce qui veut dire qu’on ne perçoit pas, par exemple, les taxes sur les biens et services que l’on pourrait investir dans les soins de santé, dans l’éducation postsecondaire, dans le logement, etc. C’est un cercle vicieux.
Pour ce qui est de l’essence, mes électeurs se plaignent de payer en moyenne 1,10 $ ou 1,12 $ le litre. Il y a deux ans à peine, le baril de pétrole se vendait environ 148 $ à 150 $ et l’essence à la pompe 85 ¢ à 90 ¢ le litre. Aujourd’hui, mes électeurs disent que le baril de pétrole coûte au plus 80 $ et se demandent pourquoi ils paient 1,10 $ le litre.
Je tiens à dire au sujet de l’essence que le gouvernement actuel a également fait une autre promesse. Il a dit qu’il éliminerait les taxes sur la partie du prix qui dépasserait 85 ¢ le litre. Il ne l’a pas fait.
Vais-je me mettre à parler des promesses qui ont été faites et qui n’ont pas été tenues? Ce n’est pas vraiment mon intention. Mon discours d’aujourd’hui n’a rien de politique. C’est davantage pour souligner l’exaspération des Canadiens. Ils veulent savoir comment nous pourrons faire confiance au gouvernement pour bien gérer l’économie.
Un monsieur m’a dit qu’en fin de compte, la dette s’alourdit et le déficit augmente à un rythme effréné. Nous sommes un des pays les plus lourdement endettés par habitant avec une dette d’environ 42 000 $ par personne contre 31 000 $ par personne pour la Grèce. Ce monsieur a dit que nous étions davantage endettés que ce pays et qu’il voudrait savoir en quoi notre situation est meilleure que la leur.
Nous pourrions continuer pendant des heures. Le gouvernement a perdu le sens des priorités. Deux Canadiens sur trois n’ont pas voté pour les conservateurs principalement parce qu’ils ne peuvent pas compter sur eux et ne peuvent pas leur faire confiance, car ils disent une chose et font le contraire. Ils parlent d’abaisser les impôts, et pourtant ils les augmentent. Les seuls impôts qu’ils ont diminués sont ceux des sociétés.
Ce n’est pas que je sois contre, mais le moment est mal choisi. Nous continuons de réduire les impôts des sociétés année après année alors que notre pays est en difficulté. C’est dans des circonstances comme celle-ci que les sociétés pétrolières, par exemple, doivent se déclarer prêtes à venir en aide aux Canadiens moyens. C’est dans ce genre de situation que nous devons tous nous réunir comme une grande famille et faire des concessions dans l’intérêt de la nation.
Quand nous voyons ce que le gouvernement a fait avec les taxes d’aéroport et ce qui s’est passé du côté des aînés et du SRG, c’est honteux. Quand nous voyons le manque d’investissement dans la R D, c’est honteux. Quand nous voyons le gouvernement dépenser 16 milliards de dollars dans des contrats adjugés sans appel d’offres, c’est tout à fait inacceptable. Quel avantage le Canada va-t-il en tirer?
Le Canada a dépensé plus de 23 milliards de dollars jusqu’ici en Afghanistan et maintenant nous allons...