Monsieur le président, c'est un plaisir de prendre la parole ce soir. Il y a quelque temps, j'ai fondé, avec le député de Mont-Royal, l'organisme Parlementaires canadiens pour la démocratie et les droits de la personne en Iran. Cette semaine est la Semaine de la responsabilisation de l'Iran, qui vise à lutter contre la quadruple menace iranienne: l'arme nucléaire, le terrorisme, l'incitation au génocide et, comme les députés l'ont entendu ce soir, les violations des droits de la personne.
Je suis fier de participer au Programme de défense des prisonniers politiques iraniens. Il y a deux ans, je me suis porté à la défense de M. Hamid Ghassemi-Shall, de Toronto, qui a été libéré plus tard au cours de l'année 2013. Cette année, je me porte à la défense de son compagnon de cellule.
M. Omid Kokabee est un physicien de 33 ans spécialisé dans les lasers expérimentaux, qui a fait ses études universitaires en Iran, en Espagne et au Texas. En 2010, M. Kokabee a entamé son second doctorat à l'Université du Texas, à Austin.
En janvier 2011, M. Kokabee s'est rendu en Iran pour visiter sa famille. C'est durant cette visite familiale qu'il a été arrêté; il est détenu depuis dans la tristement célèbre prison d'Evin, à Téhéran. Il a été condamné à 10 ans de prison après avoir été accusé sans fondement d'avoir communiqué avec un gouvernement hostile, à savoir le gouvernement américain, et d'avoir reçu des paiements illégaux. Ces paiements correspondaient en réalité à une allocation que l'Université du Texas verse habituellement à ses étudiants de doctorat.
Depuis qu'il est détenu, M. Kokabee a été placé en isolement cellulaire, a été soumis à des interrogatoires prolongés et à des pressions afin qu'il fasse une confession. Sa peine a été prononcée en mai 2012, après un procès inéquitable dans une cour révolutionnaire; aucune preuve n'a été présentée contre lui. M. Kokabee a déclaré publiquement qu'il était victime de persécution parce qu'il avait refusé à maintes reprises de travailler à des projets militaires iraniens et d'aider l'Iran à assouvir ses ambitions nucléaires.
Le régime iranien garde M. Kokabee en prison parce qu'il refuse de l'aider dans son programme militaire. L'objectif du régime de mettre au point un programme nucléaire sera probablement la pierre angulaire d'une politique visant à intimider les autres pays du Moyen-Orient. L'Iran est une force déstabilisatrice dans la région, et il ne donne à l'Occident aucune raison de croire qu'il utilisera l'énergie nucléaire de manière pacifique ou responsable.
M. Kokabee est emprisonné depuis trois ans et demi. On lui a refusé les soins médicaux dont il a besoin. Il souffre de palpitations cardiaques, d'essoufflement et de douleurs à la poitrine, des symptômes qui requièrent l'attention immédiate d'un cardiologue. M. Kokabee présente également des antécédents de problèmes rénaux et il souffre beaucoup. De plus, il a souffert en prison de troubles stomacaux et il a des antécédents familiaux de cancer de l'estomac. Son état de santé précaire souligne l'urgence de demander sa libération immédiate.
M. Kokabee a reçu de nombreux prix de la part d'organismes scientifiques américains pour son geste courageux, sa détermination à demeurer en prison au lieu de violer sa position morale de ne pas utiliser son expertise scientifique à des fins destructrices et pour les efforts qu'il déploie afin d'offrir espoir et instruction à ses compagnons d'infortune.
M. Kokabee est un autre exemple du simulacre d'injustice en Iran. Je demande au président Rohani de faire preuve de clémence, d'annuler la sentence de M. Kokabee et de le libérer.
Il n'y a pas de plus grande menace à la paix et à la sécurité internationales que le régime iranien. Nous ne devons pas oublier les atrocités quotidiennes qui se produisent en Iran, et nous devons continuer d'attirer sur elles l'attention de la communauté internationale. Le peuple iranien mérite la dignité, le respect et la liberté qu'on leur refuse depuis trop longtemps.
Bien que l'Iran nie l'existence de prisonniers politiques sur son territoire, comme nous en avons déjà parlé ce soir, comme l'a indiqué en mars 2014 le rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de la personne en Iran, en date du 14 janvier 2014, au moins 895 prisonniers d'opinion et politiques étaient apparemment emprisonnés en Iran. On parle ici d'activistes politiques, d'adeptes religieux, de défenseurs des droits de la personne, d'activistes civiques, de journalistes, de blogueurs et d'étudiants militants. Le taux d'exécution a augmenté en Iran au cours des 10 dernières années, et il a atteint des sommets après l'élection présidentielle de 2013. Selon Amnistie internationale, en 2014, l'Iran occupait le deuxième rang mondial au chapitre des exécutions, derrière la Chine.
Le rapporteur spécial sur la situation des droits de la personne en Iran a recensé au moins 753 exécutions en 2014, et des groupes crédibles de la société civile ont rapporté qu'au moins 329 exécutions ont eu lieu en Iran au cours des trois premiers mois et demi de 2015.
Dans le sillage des négociations sur les armes nucléaires qui se déroulent à l'heure actuelle, on constate une vague d'exécutions horribles en Iran. Par exemple, 43 personnes ont été exécutées en l'espace de seulement trois jours en avril. Ces crimes sont commis sans égard à l'application régulière de la loi et à la primauté du droit. Comme les députés en ont déjà entendu parler, l'Iran continue d'agir en tant que force déstabilisatrice dans la région en offrant de l'aide économique et matérielle au régime Assad, aux milices chiites en Irak, aux militants houthis au Yémen et à d'autres groupes terroristes affiliés tels que le Hamas et le Hezbollah. Le bilan de l'Iran en matière des droits de la personne continue d'empirer.
Qu'arriverait-il si Téhéran mettait la main sur des armes nucléaires? L'Iran doté d'armes nucléaires deviendrait-il une force positive dans le monde? Ne serait-il pas plus vraisemblable qu'un Iran doté d'armes nucléaires deviendrait plus enhardi, ce qui aggraverait l'instabilité dans la région et intensifierait la répression au pays? Un Iran doté d'armes nucléaires ne s'en prendrait-il pas encore plus aux défenseurs des droits de la personne, aux minorités et aux activistes politiques? On s'inquiéterait beaucoup plus concernant la prolifération d'armes si l'Iran possédait des armes nucléaires. La prolifération pourrait s'étendre à d'autres pays ou même à des acteurs non étatiques. C'est une source de grande inquiétude au Moyen-Orient. L'Iran refuse non seulement de reconnaître le droit d'exister d'Israël, mais en a aussi réclamé à plusieurs reprises la destruction. Un Iran doté d'armes nucléaires, qui rendrait encore moins de comptes à la communauté internationale et respecterait encore moins les normes internationales généralement reconnues, déclencherait une course aux armements au Moyen-Orient et accroîtrait énormément l'instabilité.
Nous ne pouvons pas permettre que l'Iran ait les capacités de fabriquer des armes nucléaires. L'Iran prétend que son programme d'enrichissement de l'uranium sert des fins strictement pacifiques, mais cette affirmation résiste-t-elle à un examen indépendant? La Russie fournit tout le combustible nucléaire nécessaire pour alimenter la centrale nucléaire iranienne située à Bushehr et elle fournira le combustible pour toute nouvelle centrale nucléaire qu'elle bâtira pour l'Iran. Par conséquent, l'Iran n'a pas besoin d'enrichir de l'uranium pour ces centrales électriques. L'Iran peut aisément se procurer du combustible nucléaire pour les réacteurs de recherche et les centrales nucléaires sur le marché international, à une fraction du prix que lui coûterait la production nationale d'uranium enrichi. Je souligne que c'est une façon extrêmement coûteuse de produire de l'électricité pour un pays qui possède l'une des plus importantes réserves de gaz naturel dans le monde.
Le Conseil de sécurité des Nations Unies considère que les activités nucléaires de l'Iran sont une menace pour la paix et la sécurité internationales, en vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, et lui a donc imposé des sanctions. Le Canada a imposé d'autres sanctions à l'Iran et notre régime de sanctions est l'un des plus sévères au monde. L'Iran reste assujetti à 10 résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et à 12 résolutions du conseil d'administration de l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'AIEA, en raison de ses activités nucléaires non déclarées. Le conseil d'administration de l'AIEA a, à maintes reprises, reconnu l'Iran coupable de non-respect de son accord de garanties aux termes du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. L'Iran continue d'enfreindre nombre d'aspects de ces résolutions qui exigent notamment que l'Iran mette un terme aux activités d'enrichissement de l'uranium et qu'il ratifie et mette en oeuvre le protocole additionnel de l'AIEA.
Dans le passé, l'Iran a volontairement accepté de mettre en oeuvre le protocole additionnel de vérification des garanties de l'AIEA qu'il a signé en 2003. Il a toutefois arrêté de le mettre en oeuvre en 2006. Pour que le système de vérification des garanties fonctionne, il faut que tous les États parties au Traité sur la non-prolifération respectent les règles. Nous ne pouvons pas permettre à l'Iran de modifier unilatéralement les règles, au risque de miner le régime mondial de non-prolifération.
Je dois insister sur le fait que nous ne devons pas nous laisser berner par l'opération de charme du président Rohani. Même si sa présence et ses propos sont plus agréables que ceux d'Ahmadinejad, comme je l'ai déjà dit, le nombre d'exécutions a augmenté. Le président Rohani est l'homme qui occupait le poste de ministre responsable du programme nucléaire iranien, et qui s'était vanté de duper l'Ouest quant aux aspirations nucléaires du pays. En 2006, pendant une réunion à huis clos d'éminents ecclésiastiques islamiques et universitaires, Rohani a révélé de quelle façon Téhéran avait cherché à gagner du temps et tenté de duper l'Ouest après que l'opposition eût dévoilé le programme nucléaire secret en 2002. Il se vantait que, pendant que les pourparlers avaient lieu à Téhéran, l'Iran était en mesure de terminer l'installation de l'équipement nécessaire pour convertir le concentré de minerai d'uranium à l'usine d'Isfahan, une étape essentielle du traitement du combustible nucléaire. Il avait toutefois réussi à convaincre les diplomates européens qu'il n'y avait pas de projet.
Voici ce qu'il avait dit:
Dès le départ, les Américains n'ont cessé de dire aux Européens: « Les Iraniens mentent et vous trompent, et ils ne vous ont pas tout dit. » Les Européens répondaient: « Nous leur faisons confiance. » [...] Lorsque nous négociions avec les Européens à Téhéran, nous étions encore en train d'installer des équipements dans le site d'Ispahan. Il y avait beaucoup de travail à faire pour finir le site et les travaux là-bas. En réalité, en ayant l'air de collaborer, nous avons réussi à terminer Ispahan.
L'Iran refuse de reconnaître la légitimité des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU et admet ouvertement qu'il essaie de contourner le régime de sanctions, notamment par des efforts continus pour se procurer des marchandises nucléaires et à double usage pour son programme nucléaire.
Tout ce que je soutiens, c'est que nous ne pouvons pas faire confiance à ce régime et que nous devons veiller à continuer de promouvoir les droits de la personne en Iran. Nous devons en outre nous assurer que ce pays n'ait jamais d'armes nucléaires.