Merci beaucoup.
Merci beaucoup de nous avoir invités. Nous sommes ravis d'être ici pour parler de la pêche au homard au Canada atlantique et au Québec. Il s'agit de la pêche qui compte le plus de participants et la plus importante au plan des exportations et de la contribution économique aux pêches canadiennes.
Nous croyons comprendre que le comité voulait poser des questions concernant le homard, en particulier au sujet de la santé des stocks et du homard en général, et peut-être d'autres points. Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions au meilleur de nos connaissances.
Je suis accompagné aujourd'hui de deux de mes collègues de Pêches et Océans. À ma gauche se trouve Nadia Bouffard. Nadia est directrice générale des Politiques sur les pêches et autochtones dans le secteur des politiques relatives aux programmes. À ma droite se trouve Adam Burns, directeur de la Gestion des ressources de la région de l'Atlantique dans le secteur des écosystèmes et de la gestion des pêches. Je m'appelle Kevin Stringer et je suis sous-ministre adjoint dans le secteur des sciences, des écosystèmes et des océans. Nous représentons donc les secteurs de la gestion des pêches, des politiques et des sciences, alors nous espérons pouvoir répondre aux diverses questions.
Comme je l'ai dit, je vais parler brièvement du homard, de la santé de la pêche au homard et de ce que nous savons au sujet de cette pêche. Je vais commencer par des renseignements de base pour vous donner un peu de contexte.
Nous savons bien des choses concernant le homard et il y en a bien d'autres que nous étudions toujours et dont je serai ravi de parler tout à l'heure. Mais il vous faut savoir un certain nombre de choses.
Le homard américain se trouve uniquement au nord-ouest de l'Atlantique, entre le sud du Labrador et la Caroline du Nord. Certains des renseignements sont essentiels à la gestion de ces pêches, notamment le fait que les homards matures ont des mouvements saisonniers entre les eaux peu profondes au printemps et à l'été pour muer, se reproduire et pondre des oeufs, et les eaux profondes à l'automne et à l'hiver. Ces mouvements se font habituellement sur quelques kilomètres. Cependant, des mouvements saisonniers plus longs se produisent dans le golfe du Maine, la baie de Fundy et les régions extracôtières du plateau néo-écossais, sur des dizaines ou des centaines de kilomètres. La zone de pêche du homard 40 est considérée un peu comme un zone d'incubation. Nous l'avons fermée et nous croyons que cela aide vraiment à accroître la population de certaines autres pêches. La topographie sous-marine, la profondeur, la température de l'eau et d'autres facteurs influent sur ces mouvements. Leur cycle de vie compte deux parties. Encore une fois, ce sont des choses cruciales pour nous aider à gérer la pêche au homard.
Il y a d'abord la phase planctonique, qui vient après la ponte. Elle se produit à partir de la fin mai et pendant le mois de septembre, tout dépendant de l'endroit où l'on se trouve au Canada atlantique. Les larves passent par une période au cours de laquelle elles nagent librement dans l’eau, qui dure de 3 à 10 semaines — ce qui est important car, au début, elles ne sont pas au fond — selon les conditions du milieu, en particulier la température de l’eau. Ensuite, elles s'établissent au fond. Il est important de noter que c'est pendant les premières semaines de la vie du homard que le taux de mortalité naturelle est le plus élevé en raison des prédateurs et des courants. Les courants peuvent entraîner les larves vers des habitats qui ne leur sont pas propices. Ainsi, les prédateurs, les tempêtes, les changements climatiques et d'autres facteurs ont une incidence, en particulier au début de la vie d'un homard.
Il y a ensuite la phase benthique. Le homard nouvellement établi traverse un certain nombre de stades, qui durent entre quatre et 10 ans, avant d'arriver à l'âge adulte. Il faut environ huit ans dans la plupart des régions du Canada atlantique. Un homard doit survivre pendant huit ans pour arriver à maturité et au point où il est recruté dans la pêcherie. C'est une longue période. Les prédateurs sont surtout actifs lorsque les larves sont petites. Elles se cachent la majeure partie du temps et sortent de plus en plus au fur et à mesure qu'elles vieillissent et muent davantage. Les taux de mortalité naturelle sont élevés en raison des prédateurs surtout pendant le développement des larves au cours de la phase benthique et lorsque les homards juvéniles sortent de leurs premiers abris.
Je n'ai que deux ou trois autres points à soulever à ce sujet qui se rapportent, encore une fois, à la façon dont nous gérons les pêches. Il existe des renseignements à l'appui de la gestion des pêches. Les homards grandissent en muant. Ils se débarrassent de leur carapace. Ils le font à de multiples reprises. Ils peuvent croître jusqu'à 12, 15 ou 16 p. 100 à chaque mue. Ils sont fortement influencés par la température, ce qui explique pourquoi ils veulent muer dans l'eau chaude parce qu'il y a plus de chances que cela se produise et qu'ils croissent davantage. Il y a aussi d'autres facteurs qui entrent en jeu.
L'accouplement survient juste après la mue des femelles, entre juillet et septembre au Canada atlantique. La femelle a une période de gestation de près de deux ans. Elle expulse des oeufs pour environ une année. Le nombre d'oeufs produits par une femelle augmente avec la taille, alors nous offrons une protection aux grosses femelles. Voilà pourquoi nous avons des tailles maximales ainsi que des tailles minimales. Les femelles transportent leurs oeufs dans des lots sur le dessous de l'abdomen — on les appelle des femelles oeuvées — pendant les derniers 9 à 12 mois. Voilà pourquoi nous offrons aussi une protection aux femelles oeuvées.
Maintenant, je vais parler brièvement de l'état des stocks au Canada atlantique et au Québec.
Au Canada atlantique et au Québec, on gère habituellement la pêche au homard au moyen du contrôle des intrants, notamment le nombre de permis, les restrictions relatives aux engins et les saisons. Soulignons l'exception suivante: la pêche au homard au large de la Nouvelle-Écosse, soit dans la zone de pêche au homard 41, est gérée selon le total autorisé de captures.
En outre, les débarquements constituent à l'heure actuelle le principal paramètre utilisé pour assurer le suivi de l'état des ressources de homard et de la tendance à cet égard. Dans les zones de pêche au homard de la région des Maritimes, du Cap-Breton et de la baie de Fundy, les débarquements sont en hausse ou stables, atteignent des sommets records ou sont près de les atteindre.
Les débarquements sont élevés dans ces régions ainsi qu'à d'autres endroits.
Je vais parler d'autres endroits. Les zones de pêche au homard au sud du golfe du St-Laurent, qui comprennent l'Î.-P.-É., le Nouveau-Brunswick ainsi que la partie sud de Gaspé et des îles de la Madeleine au Québec, affichent aussi des débarquements stables ou à la hausse. Les zones autour de l'Î.-P.-É. et du Nouveau-Brunswick, en particulier, ont une forte abondance ou sont à des niveaux quasi historiques. Les débarquements dans la partie nord du golfe sont généralement stables depuis 2008, à un niveau peu élevé sur la côte nord du Québec et fortement abondants à l'île d'Anticosti. Cependant, les zones 13 et 14, qui se trouvent sur la côte ouest de Terre-Neuve, sont en déclin depuis 2008, même si elles ont, en fait, connu une hausse au cours de la dernière année.
Pour ce qui est des autres zones de pêche au homard dans la région de Terre-Neuve-et-Labrador, nous avons constaté une hausse des débarquements sur la côte sud depuis la fin des années 1990. Cependant, les débarquements de la côte nord-est, celle dans la région de l'Avalon, sont à la baisse depuis le début des années 1990, mais la pêche n'a pas été importante dans cette région.
Comme je l'ai mentionné, la pêche au homard au large de la Nouvelle-Écosse est la seule pêche au Canada à être gérée en fonction du total autorisé des captures. Le total actuel est de 720 tonnes. Il est en place depuis 1985, et nous croyons que les stocks sont stables depuis 1999.
Il convient de mentionner, comme je l'ai déjà fait, la zone de pêche au homard 40, au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Elle est fermée à la pêche au homard, car elle est connue comme frayère où se rassemblent les grosses femelles. La zone a été fermée pour ses avantages potentiels sur le plan de la conservation. Nous croyons qu'elle est en fait un genre de zone d'incubation pour bien des pêches, en particulier au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Dans l'ensemble, les stocks se portent bien, et certains diraient même « remarquablement » bien. Nous reconnaissons qu'ils ont créé des défis de taille dans d'autres secteurs, défis que les pêcheurs essaient de surmonter. Les opinions diffèrent quant à la question de savoir pourquoi la pêche au homard se porte aussi bien depuis les années 1990. Elle a vraiment connu une croissance exponentielle dans certaines régions.
On parle généralement de trois ou quatre facteurs différents — du moins de trois facteurs. Il y a d'abord les conditions environnementales favorables, en particulier la température, mais aussi le manque de prédateurs. Nous savons que les prédateurs du homard, surtout à un jeune âge — la morue, le brosme, la merluche blanche, le chabot et autres — ne se portent pas très bien, alors nous croyons que le manque de prédateurs est un facteur. Il y a aussi les contrôles de gestion que nous avons mis en place. Nous en avons toujours eu, mais ils ont augmenté considérablement au cours des dernières années.
Je vais parler brièvement des contrôles de gestion. Il y a trois contrôles de base. Le premier se rapporte à la saison précise, c'est-à-dire qu'on ne peut pêcher qu'à certains moments de l'année. Le deuxième se rapporte à l'entrée limitée, c'est-à-dire que seulement certains détenteurs de permis peuvent le faire. Et le troisième se rapporte à la limite du nombre de casiers, c'est-à-dire que seulement un nombre x de casiers est autorisé.
En outre, nous avons des règles de conservation dans diverses pêches. Il y a une taille de carapace minimale, c'est donc dire que vous ne pouvez garder un homard que d'une certaine taille. Il est interdit de pêcher les femelles oeuvées qui débarquent et les femelles marquées d'un V. Nous demandons aux pêcheurs de faire une encoche en V sur la queue des femelles oeuvées pour que nous puissions les reconnaître à l'avenir.
Comme je l'ai mentionné, certaines d'entre elles ont une taille maximale, alors nous protégeons les grosses femelles. Il y a des ouvertures dans les casiers pour permettre aux homards de taille inférieure à la limite minimale de s'échapper. Et il y a des casiers biodégradables, qui sont une nouveauté grâce à laquelle les casiers qui sont taillés ne peuvent servir à attraper du poisson indéfiniment.
Voilà certaines des mesures que nous avons prises et qui expliquent, selon nous, pourquoi les stocks se portent aussi bien qu'ils le font.
Nous sommes toujours préoccupés et vigilants. Le taux d'exploitation de certaines de ces pêches est élevé, mais elles continuent à bien se porter. Nous nous en préoccupons et nous continuons de faire de la recherche pour mieux comprendre les homards. Si vous consultez note site Web scientifique, vous verrez les études que nous avons menées au cours des dernières années et les évaluations de toutes les zones de pêche au homard. Nous procédons régulièrement à ces évaluations. Elles ont toutes été faites au cours de la dernière année et, comme je l'ai dit, elles indiquent surtout que les stocks sont en santé.
Nous menons aussi des études spécifiques évaluées par des pairs sur la prédation, les prises accidentelles, c'est-à-dire d'autres espèces prises dans les casiers à homard; l'incidence de la température; l'incidence potentielle de l'acidification de l'océan; l'utilisation de l'habitat et l'habitat préféré; l'échantillonnage des contenus stomacaux pour voir les proies des homards; l'incidence sur le homard des ennemis des poissons et du traitement des agents pathogènes; l'incidence de l'aquaculture sur le homard, et bien d'autres secteurs. Nous menons une bonne partie de cette recherche en partenariat avec les pêcheurs et nous continuerons de le faire.
La pêche au homard compte bien des enjeux, et nous serions ravis d'en parler aujourd'hui. Mais, dans l'ensemble, la santé des stocks est plutôt bonne en ce moment. On se préoccupe des taux d'exploitation dans certaines zones, mais les stocks tiennent bon, et nous croyons qu'ils continueront de le faire. Si vous lisez les évaluations, l'avenir proche est assez prometteur pour les stocks de homards.
Je vais m'arrêter ici. Nous serons ravis de répondre à vos questions.