Monsieur le Président, j'ai le privilège de prendre la parole au sujet du projet de loi C-476, qui a été présenté par le chef de l'opposition officielle, le député d'Outremont.
S'il est adopté, le projet de loi C-476 entraînera la création du poste de directeur parlementaire du budget, un poste indépendant et distinct de la Bibliothèque du Parlement, dont il relève pour l'instant. Il élargira également le mandat du directeur parlementaire du budget ainsi que son accès à l'information, exigera le dépôt de rapports annuels à la Chambre des communes et au Sénat, et créera un processus de nomination simplifié et non partisan. Enfin, il fera en sorte que le directeur parlementaire du budget ait une connaissance pratique des deux langues officielles.
Pourquoi ces changements proposés au mandat du directeur parlementaire du budget sont-ils si importants? Le gouvernement a créé ce poste afin d'appuyer ce qui se voulait une nouvelle politique d'ouverture, de responsabilité et de transparence. En fait, dans leur programme électoral de 2006, les conservateurs s'étaient engagés à créer un bureau parlementaire du budget devant fournir, directement au Parlement, des analyses objectives de la situation des finances du pays et des tendances de l’économie nationale. Comme le ministre des Finances l'avait déclaré en 2006:
Les Canadiens sont en droit de connaître la situation réelle de leur économie et de vivre en fonction d'un budget fondé sur des chiffres exacts, transparents et honnêtes. Nous devons mettre fin une fois pour toutes à l'habitude du gouvernement précédent de passer à côté des chiffres exacts. Les gouvernements ne peuvent pas rendre des comptes si le Parlement et les Canadiens ignorent quel est l'état réel des finances publiques.
Le premier ministre avait également dit ceci en parlant du bureau parlementaire du budget en 2006: « Une telle commission assurerait que le gouvernement rend véritablement des comptes au sujet des dollars des contribuables et que l'on se plie à une discipline budgétaire à l'échelon fédéral. »
Revenons maintenant à 2013. Le même ministre des Finances a une toute autre opinion de cette analyse rigoureuse qu'il défendait jadis avec tant d'enthousiasme et qui a maintenant révélé de nombreux problèmes. Le ministre des Finances a tenu des propos accusateurs à l'endroit du directeur parlementaire du budget, déclarant qu'il s'éloignait de son mandat consistant à faire rapport au Parlement au sujet de la façon dont le gouvernement établit son budget.
Comme mon collègue l'a indiqué, nous avons pris note des commentaires du député d'Edmonton—St. Albert, qui s'est dit profondément attristé par le fait que le Parti conservateur s'était éloigné de ses principes d'ouverture et de transparence et que ses députés étaient devenus semblables à ceux qu'ils avaient coutume de critiquer, ce qui l'a incité à quitter ce parti.
En effet, même si, à l'origine, ce gouvernement s'est fait le défenseur de l'ouverture et d'un rôle important pour le directeur parlementaire du budget, force est de constater après sept ans qu'il a rejeté à maintes reprises des demandes d'information du directeur parlementaire du budget en lien avec son mandat prescrit par la loi concernant notamment les coûts estimés de la guerre en Afghanistan, les coûts estimés des chasseurs F-35, le déficit projeté, la viabilité du programme de la Sécurité de la vieillesse et les répercussions estimées des compressions dans le personnel de la fonction publique fédérale qui assure les services de première ligne.
Le mandat et les services du directeur parlementaire du budget sont d'une valeur inestimable pour les députés, quand ils veulent examiner les prévisions budgétaires et les dépenses du gouvernement. Le mandat du directeur parlementaire du budget semble très clair pour la plupart, à l'exception, peut-être, du gouvernement qui a créé la charge. Quel est-t-il? Le poste de directeur parlementaire du budget a été créé en 2006 lors de l'entrée en vigueur de la Loi fédérale sur la responsabilité. La loi précise clairement que son mandat consiste à « fournir au Sénat et à la Chambre des communes des analyses objectives de la situation financière du pays, des prévisions budgétaires du gouvernement et des tendances de l’économie nationale ». Le titulaire du poste est aussi chargé de faire des recherches et d'aider les comités en ce qui touche l'examen et l'analyse des prévisions budgétaires. De toute évidence, le directeur parlementaire du budget doit avoir librement accès aux données financières et économiques pour pouvoir remplir ce mandat.
Malheureusement, le directeur parlementaire du budget doit constamment se battre pour avoir accès à tous les renseignements pertinents. Toutes ces entraves à l'accès l'ont même forcé à faire appel aux tribunaux. Le renvoi à la cour portait sur des demandes du chef de l'opposition officielle, qui voulait que le directeur parlementaire du budget analyse les effets des coupes dans la fonction publique fédérale sur les services de première ligne. Voici la décision qu'a rendue la cour sur le mandat du directeur parlementaire du budget.
Le Parlement du Canada a légiféré pour conférer au directeur parlementaire du budget, entre autres, le mandat « d’évaluer le coût financier de toute mesure proposée relevant des domaines de compétence du Parlement » à la demande de tout député ou de tout sénateur [...] Pour donner force exécutoire à ce mandat, sous réserve de certaines exceptions, l’article 79.3 [...] autorise le directeur parlementaire du budget, sur demande faite à l’administrateur général d’un ministère ou à son délégué, à « prendre connaissance, gratuitement et en temps opportun, de toutes données financières ou économiques qui sont en la possession de ce ministère et qui sont nécessaires à l’exercice de son mandat ».
Le Comité des opérations gouvernementales, dont je fais partie, a, lui aussi, cherché comment les députés pourraient étudier plus efficacement les prévisions budgétaires et les dépenses. Il a, à cette fin, entendu un certain nombre d'experts.
De nombreux experts internationaux ont affirmé qu'ils appuyaient l'attribution d'un mandat solide au directeur parlementaire du budget, dont l'OCDE. Il est indiqué dans notre compte rendu que, selon l'OCDE, les meilleures pratiques de transparence budgétaire exigent que les parlementaires aient la possibilité et les moyens d'examiner de près les rapports budgétaires lorsqu'ils le jugent nécessaire.
Notre comité a entendu, notamment, M. Joachim Wehner, professeur agrégé de politique publique à la London School of Economics and Political Science, qui a déclaré que, pour améliorer l'examen du Budget des dépenses et des crédits:
Premièrement [...] il faut protéger et améliorer le rôle du directeur parlementaire du budget. [...] Le travail du directeur parlementaire du budget a reçu des éloges à l'échelle internationale, et cela constitue un changement majeur, [...] ne serait-ce que pour l'accès du Parlement à une capacité de recherche indépendante et hautement professionnelle.
M. Wehner a cependant ajouté que, d'après ce qu'il connaît d'agents de ce genre dans d'autre pays, on aurait pu hausser le statut du directeur en faisant de lui un haut fonctionnaire du Parlement à part entière et en lui donnant ainsi un accès total à tous les renseignements pertinents.
M. David Good, professeur à l'École d'administration publique de l'Université de Victoria, a, lui aussi, témoigné devant notre comité:
D'abord, je ferais du directeur parlementaire du budget un véritable haut fonctionnaire du Parlement, qui aiderait les parlementaires et les comités. Je pense qu'il faut clarifier et renforcer son rôle et son mandat, en le rendant indépendant, par voie législative, de la Bibliothèque du Parlement. Il deviendrait ainsi un véritable haut fonctionnaire du Parlement.
Malheureusement, l'actuel directeur parlementaire du budget doit constamment se battre pour avoir accès à tous les renseignements pertinents. Comme je l'ai mentionné, toutes ces entraves à l'accès l'ont même forcé à faire appel aux tribunaux. La demande présentée par le chef de l'opposition n'est pas étrangère à l'intervention des tribunaux.
Je peux personnellement témoigner de la valeur des rapports et des analyses du directeur parlementaire du budget. En effet, j'ai participé à l'examen parlementaire des prévisions budgétaires et des crédits, ainsi qu'aux examens subséquents des priorités et des dépenses du gouvernement, ce qui m'a ouvert les yeux sur le décalage entre les renseignements que le gouvernement accepte de divulguer et les renseignements dont les parlementaires ont besoin pour prendre des décisions éclairées concernant l'affectation de l'argent durement gagné par les contribuables.
En tant que députés élus, nous sommes censés être les gardiens des deniers publics. Nous pouvons choisir de prendre des décisions éclairées. Nous pourrions le faire en renforçant le mandat du directeur parlementaire du budget, tel que prévu dans le projet de loi C-476.
J'encourage tous les députés à appuyer le projet de loi C-476 du député d'Outremont visant à créer un bureau indépendant pour le directeur parlementaire du budget, à élargir son mandat, à exiger la présentation de rapports annuels et à créer un processus non partisan simplifié pour les nominations à ce poste.