Monsieur le Président, j'interviens pour parler du projet de loi C-54, la Loi sur la réforme de la non-responsabilité criminelle, qui modifierait la façon dont le système judiciaire canadien traite les accusés qui ont été déclarés non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux.
Certains pourraient avoir une impression de déjà-vu en m'écoutant parler de cette question. En effet, quand j'étais ministre de la Justice et procureur général du Canada, j'ai présenté à la Chambre la mesure législative qui a réformé le système, mesure législative qui, soit dit en passant, a été adoptée avec l'appui de tous les partis en 2005 et qui a fait ses preuves au cours des huit dernières années.
Tout au long du débat et de la discussion sur le projet de loi C-54, j'ai pu constater que les députés éprouvent de la compassion pour toutes les victimes innocentes de violence et leurs êtres chers et qu'ils se soucient clairement de leur sort, que nous voulons tous protéger la population et que nous convenons de la nécessité d'appuyer les victimes et leur famille. Comme je l'ai dit en 2005, lors de la présentation de mon projet de loi sur la réforme du cadre législatif applicable aux troubles mentaux, garantir le bien-être de ces personnes est d'une importance cruciale dans notre système judiciaire. C'est précisément pour cette raison que, lorsque j'étais ministre de la Justice, j'ai mis en place des mesures permettant aux victimes de présenter des déclarations lors d'audiences de la commission d'examen pour les accusés déclarés non criminellement responsables. Nous ne devrions pas croire que c'est la première fois que ces questions sont abordées.
J'étais fier de la mesure législative que nous avons présentée concernant les accusés déclarés non criminellement responsables parce qu'elle permettait l'instauration d'une approche fondée sur les faits et elle tenait compte des principes établis par la Cour suprême du Canada, de l'expertise de juristes et de professionnels de la santé et de rapports de comités permanents de la Chambre. Malheureusement, nous ne pouvons pas en dire autant du projet de loi dont nous sommes saisis: l'approche et le discours du gouvernement en ce qui a trait au projet de loi C-54 semblent être davantage fondés sur la peur et la stigmatisation que sur les faits et les données probantes.
Je commencerai donc mon intervention par un aperçu des données accessibles sur les accusés déclarés non criminellement responsables. J'exposerai ensuite mes réserves concernant cette mesure législative, puis je proposerai d'autres mesures qui seraient vraisemblablement plus efficaces pour prévenir la perpétration d'actes violents par des gens qui souffrent de troubles mentaux; ces mesures permettraient de mieux protéger le public et, du coup, moins de gens seraient victimes de crimes. Enfin, j'expliquerai pourquoi le projet de loi s'inscrit dans la tendance conservatrice en matière de justice pénale, laquelle met trop l'accent sur l'ajout de mesures punitives dans le Code criminel au détriment des mesures préventives.
Je tiens tout d'abord à nous rappeler quelle est la portée du projet de loi. Les accusés déclarés non criminellement responsables ne sont ni coupables ni innocents.
Comme la Cour suprême du Canada l'a expliqué, ce régime « [...] ajoute à la traditionnelle dichotomie opposant culpabilité et innocence en droit criminel. Elle prévoit une nouvelle avenue, soit une évaluation visant à déterminer si l’accusé non responsable criminellement représente toujours un risque pour la société, tout en mettant l’accent sur le fait d’offrir à l’accusé des occasions de recevoir un traitement approprié. » Les personnes déclarées non criminellement responsables ne constituent que 1 % des accusés chaque année. Il faut garder ces faits à l'esprit dans le cadre de l'examen du régime et de l'opportunité de la réforme.
Malgré tout, le jour même où le projet de loi a été présenté, l'ancienne secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, qui est maintenant ministre associée de la Défense nationale, a affirmé ce qui suit sur les ondes de CBC en ce qui a trait aux taux de récidive des accusés déclarés non criminellement responsables: « S'il existe des statistiques sur le sujet, je ne suis pas au courant. Je ne pense pas que la question porte là-dessus. »
Voilà une déclaration qui me laisse perplexe vu que la Cour suprême, dans l'arrêt que je viens tout juste de citer, soit Winko c. Colombie-Britannique, a conclu ce qui suit: « La recherche révèle que l’accusé non responsable criminellement n’est pas plus susceptible, après sa libération, de commettre une infraction, encore moins une infraction violente, que les personnes déclarées coupables [...]. » Cette affaire date de 1999, mais de récentes statistiques contredisent l'approche adoptée par le gouvernement.
Par cette déclaration, la secrétaire parlementaire admettait implicitement que le gouvernement avait rejeté du revers de la main les données empiriques au moment de la rédaction du projet de loi, qui vise expressément à rendre plus difficile, au nom de la sécurité du public, la libération d'accusés tenus pour non criminellement responsables de leur geste. Pourtant, si la loi vise à protéger le public contre une menace particulière, l'information touchant l'étendue de cette menace est fondamentale. Autrement, nous légiférons en nous appuyant sur des idées préconçues, l'instinct et les stéréotypes, ce que le régime s'appliquant aux personnes considérées comme non criminellement responsables veut absolument éviter en ce qui concerne les personne souffrant de troubles mentaux.
Les données auxquelles nous n'avons pas accès — j'ai d'ailleurs fait inscrire à ce sujet au Feuilleton une question à laquelle j'espère obtenir bientôt une réponse complète — révèlent que les personnes souffrant de troubles mentaux qui commettent des actes de violence sont très peu nombreuses, que celles qui reçoivent un verdict de non-responsabilité criminelle le sont encore moins et qu'un très faible pourcentage de celles qui sont déclarées non criminellement responsables récidivent après avoir été traitées.
Signalons d'entrée de jeu que, selon des chercheurs de l'Université McGill et de l'Université du Québec à Trois-Rivières, 90 % des personnes souffrant de maladie mentale ne sont pas violentes. En outre, un rapport rédigé pour le ministère de la Justice révèle qu'en 2004, la dernière année sur laquelle porte l'étude, seulement 0,18 % de toutes les affaires criminelles ont abouti à la conclusion que l'accusé était soit considéré comme non criminellement responsable, soit inapte à subir son procès pour cause d'incapacité mentale. Enfin, une étude réalisée au Canada en 2003 établit à 7,5 % à peine le taux de récidive chez les personnes jugées non criminellement responsables, traitées et libérées. En revanche, le taux de récidive est supérieur à 40 % chez les personnes qui ont été emprisonnées dans un établissement fédéral après avoir été reconnues criminellement responsables de leur geste.
Je me rends compte que je cite beaucoup de chiffres, mais je veux éviter toute confusion. Le projet de loi vise moins de 10 % d'une population qui représente déjà moins de 1 % de toutes les personnes accusées de crime au Canada. Devant tout le battage entourant ce projet de loi, on aurait été porté à penser qu'il ciblerait un groupe important de la population, pas moins de un dixième de 1 %.
Il ne fait aucun doute que la rareté des cas a bien peu d'importance pour les victimes compte tenu des horreurs qu'elles ont vécues. Il se peut donc qu'il vaille la peine de déployer certains efforts pour peaufiner notre régime de non-responsabilité criminelle. En fait, le projet de loi C-54 contient certaines mesures raisonnables et dignes d'être appuyées, comme les dispositions qui visent à mieux informer les familles des victimes et à interdire aux auteurs d'actes criminels de communiquer avec les victimes après leur libération. Toutefois, l'exagération du problème par le gouvernement et les solutions musclées qu'il propose risquent de faire plus de mal que de bien.
Cela m'amène à la deuxième partie de mes observations, au cours de laquelle je parlerai de problèmes spécifiques au projet de loi C-54 et d'aspects particuliers qui peuvent avoir des conséquences négatives imprévues. Pour commencer, le projet de loi C-54 permettrait aux tribunaux criminels, et non à des spécialistes de la santé mentale, de désigner certains accusés déclarés non criminellement responsables comme étant à risque élevé. Cela déléguerait aux tribunaux criminels le pouvoir de prendre des décisions subséquentes au sujet de l'accusé, pouvoir qui relève actuellement de commissions d'examen spécialisées, et ce, je le répète, en dépit du fait que, en général, les tribunaux criminels ne possèdent pas l'expertise nécessaire pour déterminer les risques que posent une personne atteinte de maladie mentale.
Le gouvernement propose ce changement sans fournir la moindre preuve pour montrer que les commissions d'examen n'ont pas réussi à protéger le public contre un accusé dangereux déclaré non criminellement responsable. Jusqu'ici, le gouvernement semble avoir ignoré dans ses délibérations que, dans le régime actuel, les commissions ne libèrent pas un accusé déclaré non criminellement responsable qui constitue toujours une menace.
La désignation d'« accusé à haut risque », conjuguée à un intervalle trois fois plus long entre les examens puisqu'il passerait de un à trois ans, ferait en sorte que les détenus déclarés non criminellement responsables pourraient demeurer en prison longtemps après la réussite de leur traitement. Il s'agit d'une situation inacceptable étant donné que les accusés déclarés non criminellement responsables n'ont pas été reconnus coupables d'un crime, tel que l'a souligné la Cour suprême. En effet, la cour a déclaré ceci: « [...] que l'accusé non responsable criminellement soit traité avec la plus grande dignité et jouisse de la plus grande liberté possible, compte tenu de son état. Cet accusé ne doit pas être puni. Il ne doit pas non plus [...] être détenu indéfiniment [...] ».
Par conséquent, le projet de loi C-54 pourrait entraîner des contestations en vertu de l'article 7 de la Charte, qui traite du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne; de l'article 9, qui garantit que chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires; et même de l'article 15, qui interdit toute forme de discrimination fondée sur les déficiences mentales. Encore une fois, le gouvernement tente de faire adopter une mesure législative qui entraînera des litiges constitutionnels très longs, coûteux et évitables. Je me permettrai d'ajouter entre parenthèses que j'attends, éternel optimiste que je suis, le rapport du ministre sur les incompatibilités avec la Charte dont il est question à l'article 4.1 de la Loi sur le ministère de la Justice.
Outre les risques de litige, il faut songer au problème très concret du placement des personnes jugées non criminellement responsables qui doivent recevoir un traitement. Pour cette raison, j'ai demandé au gouvernement de me fournir des renseignements sur la capacité des établissements de santé mentale à accueillir ces personnes, sur les mesures prévues pour accroître cette capacité, et sur toute analyse des conséquences possibles du projet de loi C-54 à cet égard.
En ce qui concerne l'institutionnalisation à long terme, il est loin d'être évident que le système actuel est capable d'accueillir un plus grand nombre de personnes jugées non criminellement responsables, et nous risquons de nuire à leur rétablissement en épuisant les ressources des établissements et des personnes en traitement. En raison de l'épuisement possible des ressources, qui pourrait diminuer l'efficacité de ces établissements, et de la possibilité que les personnes jugées non criminellement responsables soient détenues pendant plusieurs années, même après un traitement efficace, il se pourrait que ce projet de loi fasse en sorte qu'un moins grand nombre d'accusés atteints d'une maladie mentale puissent plaider la non-responsabilité criminelle.
Par conséquent, nous aurions encore plus de personnes atteintes de maladie mentale dans notre système carcéral.
Je suis persuadé que les députés connaissent déjà les conséquences tragiques qui peuvent survenir lorsqu'une personne atteinte de maladie mentale est placée dans une prison, plutôt que dans un établissement médical. Il y a des conséquences pour les détenus, comme le montrent les vidéos déchirantes entourant le cas d'Ashley Smith. Il y a aussi des effets sur la sécurité publique, qui est, selon le gouvernement, le principe sous-jacent du projet de loi.
Lorsqu'un détenu atteint d'une maladie mentale réintègre la société sans avoir reçu de traitement, il présente une menace bien plus grande que les personnes jugées non criminellement responsables qui ont été traitées par des professionnels de la santé, et dont l'état a été évalué par des spécialistes. Par conséquent, j'ai proposé, l'année dernière, un amendement au projet de loi omnibus sur la criminalité afin que les délinquants puissent recevoir des soins de santé mentale avant leur incarcération, comme on le fait déjà pour les toxicomanes. Malheureusement, les conservateurs ont rejeté cet amendement.
Pourtant, afin de réduire le risque qu'une personne atteinte de maladie mentale commette un acte de violence et de protéger par le fait même la population, ce qui, au dire du gouvernement, semble être l'objectif de ce projet de loi, la meilleure solution consiste à offrir des soins efficaces aux personnes atteintes de maladie mentale.
Cela m'amène à la prochaine partie de mon intervention, dans laquelle je parlerai des façons de réduire les risques de violence chez les personnes atteintes de maladie mentale sans recourir aux mesures punitives, contre-productives et douteuses sur le plan constitutionnel qui sont proposées dans ce projet de loi.
Le législateur doit promouvoir et favoriser des traitements efficaces et offerts en temps utile, non seulement pour les personnes déclarées non criminellement responsables, mais notamment pour les gens atteints d'un trouble mental, mais à un stade précoce, qui répondraient bien à des traitements. D'ailleurs, selon la Société canadienne de la schizophrénie, la clé, c'est le dépistage précoce, l'intervention et le traitement. Ainsi donc, nous pourrions former les gens qui travaillent auprès des jeunes à reconnaître les premiers symptômes de la psychose, car bon nombre de troubles psychotiques apparaissent à l'adolescence. Nous pourrions contribuer à élargir la portée des cliniques d'intervention à la suite d'un premier épisode psychotique, qui sont spécialement conçues pour aider les jeunes patients et leur famille à gérer la maladie mentale dès le début.
Hélas, trop de gens attendent des années avant de recevoir un traitement, soit parce que leurs symptômes passent inaperçus ou parce qu'ils craignent les préjugés associés à la maladie mentale. Il est donc crucial que les parlementaires donnent l'exemple en s'attaquant à ces préjugés, tant en gestes qu'en paroles.
Au début du mois, les députés de Toronto-Centre et d'Oak Ridges—Markham ont invité les Canadiens à discuter ouvertement de maladie mentale. Ils ont fait valoir qu'il n'y avait rien de honteux à souffrir d'un trouble mental et qu'il était possible d'en guérir. Voilà l'attitude qui doit sous-tendre notre approche des questions de santé mentale, et j'inclus là-dedans l'évaluation et l'amélioration du régime de non-responsabilité criminelle.
Or, si on se fie au discours qu'il tient et à la démarche qu'il préconise dans le projet de loi C-54, le gouvernement voit les personnes déclarées non criminellement responsables comme étant irrémédiablement violentes. Il renforce l'idée que les Canadiens ont beaucoup à craindre des personnes souffrant de troubles mentaux. En exagérant le risque de violence associé à la maladie mentale et en réduisant l'importance ou en faisant fi de l'efficacité possible des traitements, le gouvernement ne fait qu'accroître l'ostracisme contre lequel luttent avec acharnement tant de Canadiens.
Au cours des différentes étapes du processus législatif, je prie les députés de concourir à un débat légitime sur les éléments du régime de non-responsabilité criminelle sans tomber dans les préjugés et les stéréotypes.
J'utiliserai le temps qu'il me reste pour prendre un peu de recul et examiner comment le projet de loi s'inscrit dans le programme général des conservateurs en matière de justice.
Avec le projet de loi C-54, le gouvernement continue de mettre l'accent presque exclusivement sur les sanctions pénales et d'agir comme si l'incarcération était le seul outil à la disposition du ministre de la Justice et que le droit pénal était le seul domaine juridique sur lequel se penche le législateur.
Vu les arguments utilisés pour faire valoir la nécessité de ces réformes, il serait légitime de croire, à tort, que le Canada est envahi de dangereux criminels et de violents psychopathes qui terrorisent la population en toute impunité. En vérité, la vision très étroite du gouvernement à l'égard du droit criminel et l'importance démesurée qu'il accorde au châtiment, au lieu de privilégier la prévention et la réhabilitation, minent non seulement ses propres efforts de promotion de la sécurité publique, mais portent aussi atteinte à d'autres aspects en matière de justice qui sont passés sous silence.
L'aide juridique, par exemple, est gravement sous-financée. Le gouvernement ne s'est toujours pas engagé à mettre en place un programme d'aide juridique complet et durable, au civil comme au criminel. De plus, en ce qui concerne la nomination des juges, il ne semble pas que la diversité soit une priorité. D'ailleurs, les seules statistiques compilées par le gouvernement fédéral à cet égard concernent le sexe, sans tenir compte de la nécessité, pour les tribunaux, de refléter la diversité de la population, en ayant des représentants de différents groupes ethniques et religieux.
Le Canada a aussi raté l'occasion d'utiliser le 30e anniversaire de la Charte pour partager sa grande et précieuse expertise juridique avec des organisations judiciaires de pays en développement. Pour marquer cet anniversaire, le gouvernement s'est contenté de publier un communiqué de presse aux faits discutables qui semblait mettre l'accent sur la Déclaration canadienne des droits, à laquelle, ironiquement, le projet de loi C-54 risque également de porter atteinte. Le gouvernement aurait plutôt dû célébrer ce que des juristes du monde entier ont qualifié de document historique et insister sur la vulgarisation juridique, la réforme du droit interne et l'édification du droit international.
Le gouvernement pourrait aussi renouveler les engagements pris concernant la révision des condamnations injustifiées, augmenter le financement du programme de lutte contre les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité ou présenter le projet de loi tant promis pour autoriser les alcootests aléatoires sur les routes.
On me dira que je m'écarte quelque peu du sujet à débattre, mais il vaut peut-être la peine de rappeler au gouvernement que la conduite en état d'ébriété fait plus de victimes au Canada chaque année que les personnes jugées non criminellement responsables de leurs actes. Alors, où est donc le projet de loi pour réduire le nombre de victimes des conducteurs ivres? Quand le gouvernement s'intéressera-t-il aux questions de justice pénale où il a vraiment le pouvoir de prévenir les drames? Le projet de loi C-54 nous montre clairement que le gouvernement est incapable d'établir ses priorités selon les données à sa disposition.
Voici un exemple parmi d'autres. Dans le sillage du mouvement Idle No More, qui s'est peut-être calmé temporairement, mais qui n'a aucunement disparu — et qui ne devrait pas disparaître d'ailleurs —, le moment serait parfaitement choisi pour que le gouvernement prenne l'engagement de mettre en oeuvre une stratégie sur la justice pour les Autochtones, où ces derniers verraient leurs traditions respectées comme il se doit dans nos tribunaux.
Des changements seraient également nécessaires entre autres dans le domaine de l'interprétation des lois, du règlement extrajudiciaire des différends, de la mise à jour des recueils de lois, de la justice réparatrice et des traités. Pourtant, le gouvernement persiste à légiférer presque exclusivement dans le domaine pénal, en trouvant des justifications dans des affaires aussi rares que médiatisées plutôt que de s'appuyer sur des données empiriques. Le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui s'inscrit malheureusement dans cette tendance.
Comme je l'ai mentionné, j'ai mis au Feuilleton une question où je demande qu'on nous présente les données montrant qu'un projet de loi comme celui-ci est nécessaire. Il est possible que le gouvernement puisse déposer des statistiques et des analyses convaincantes. Cependant, pour l'instant, la recherche indique le contraire, c'est-à-dire que le taux de récidive est faible, que les commissions d'examen agissent avec rigueur, que les maladies mentales peuvent bel et bien être traitées et qu'elles doivent l'être comme moyen de prévenir la criminalité.
Je n'ai aucune difficulté à comprendre les craintes et la frustration que beaucoup de Canadiens peuvent ressentir lorsque certaines personnes accusées d'un acte dont elles n'ont pas été tenues criminellement responsables sont remises en liberté. Je comprends l'horreur qu'éprouvent les victimes en pareil cas et les traumatismes qu'elles ont subis. Cependant, nous ne protégerons pas le public en laissant la peur prendre le dessus sur les faits et la raison lorsque vient le temps de légiférer, ou en faisant passer l'approche punitive avant la prévention.