Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Beauséjour de ses mots sympathiques.
La première chose que j'aimerais dire, c'est qu'il est presque incroyable que ce premier ministre, depuis 2006, n'ait participé à aucune réunion officielle des premiers ministres. À cet égard, il va à l'encontre des précédents premiers ministres du Canada. Tous ont voulu tenir ces réunions afin de gérer la fédération. C'est très simple, le Canada est un pays très décentralisé et il faut travailler ensemble afin de le gérer.
Il y a bien peu de champs de compétence qui relèvent purement du fédéral outre la politique monétaire et, dans une certaine mesure, les affaires étrangères et la défense. Presque tous les autres champs de compétence sont partagés d'une façon ou d'une autre avec les provinces, ou sont purement provinciaux. Par conséquent, les différents ordres de gouvernement n'ont d'autre choix que de collaborer s'ils souhaitent réaliser des choses importantes pour les Canadiens.
Je tiens à citer la première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne, à ce sujet. Voici ce qu'elle a dit il y a quelques jours:
Il y a déjà cinquante ans, Lester Pearson, John Robarts, Jean Lesage et leurs contemporains ont aidé à bâtir une union sociale qui a renforcé notre fédération et qui nous a permis de nous rapprocher les uns des autres. Aujourd’hui, notre génération a besoin d’y puiser l’inspiration alors que nous travaillons ensemble à bâtir une meilleure union économique pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Nous savons que, lorsque nous investissons dans l’infrastructure, nous bâtissons et, lorsque nous bâtissons des routes et du transport en commun ou des hôpitaux et des écoles ou encore des réseaux énergétiques ou des ports, nous progressons.
Voilà ce que la première ministre de l'Ontario pense, et je suis du même avis. Je ne m'attends pas à ce que le premier ministre actuel aille aussi loin vu qu'il ne semble pas toujours être d'accord avec Kathleen Wynne, mais il devrait à tout le moins tenir des réunions pour veiller à la bonne gestion de la fédération.
J'aimerais d'abord proposer deux raisons pour expliquer pourquoi il ne souhaite peut-être pas agir de la sorte, puis je parlerai de quelques secteurs qui revêtent une importance particulière pour l'Ontario et sa première ministre.
Je pense que la première raison pour laquelle le premier ministre est réticent à tenir de telles réunions est qu'il croit fermement qu'il devrait y avoir une division étanche des fonctions. Il voit tout en noir et blanc. Les soins de santé sont du ressort des provinces, alors pourquoi devrait-il les rencontrer? C'est leur responsabilité.
Tout est séparé par des cloisons étanches. Le premier ministre semble croire qu'il peut mener ses affaires indépendamment des provinces, et vice-versa. Cependant, dans le monde complexe où nous vivons, ce n'est pas une idée réaliste parce qu'il y a un chevauchement des compétences et des intérêts dans presque tous les secteurs.
La deuxième raison est que le premier ministre répugne à travailler avec des partenaires. Il aime prendre les décisions lui-même. Toutefois, pour diriger une fédération, il faut être prêt à collaborer. Il faut être prêt à faire des compromis. Il faut procéder à des négociations, parfois délicates, et ce ne sont pas des conditions qui plaisent au premier ministre. C'est pour cette raison que le Canada enregistre des pertes importantes.
Je voudrais me pencher sur quelques secteurs. Je commencerai par l'infrastructure et les pensions, qui revêtent une grande importance pour la première ministre Kathleen Wynne et les Ontariens.
Kathleen Wynne a obtenu, de façon quelque peu inopinée, un mandat majoritaire après avoir soumis à la population deux grandes propositions. L'une était d'accorder plus d'importance aux infrastructures et l'autre, de créer une version purement ontarienne d'un régime de pensions du Canada élargi.
En ce qui concerne la première proposition, je vis dans la région du Grand Toronto, où la congestion routière empire sans cesse. Un volet important de la plateforme pour l'Ontario visait à injecter une bonne partie des ressources dans les infrastructures. Comme le député de Trinity-Spadina en a parlé à la période des questions aujourd'hui, des villes comme Sydney, en Nouvelle-Écosse — et je pense qu'il a mentionné Regina et d'autres municipalités —, attendent, mais le gouvernement fédéral ne fait rien.
Le gouvernement fédéral a reporté son financement à tel point que les fonds prévus pour les prochaines années ont fondu de 90 %. Par conséquent, le programme d'infrastructure, qui est si important pour l'Ontario, le Canada, la création d'emplois et la croissance, bat de l'aile. À mon avis, c'est un secteur où un partenariat s'impose, non seulement entre le gouvernement fédéral et les provinces, mais aussi avec les municipalités qui, bien qu'elles ne disposent que de 8 % des recettes totales, possèdent environ la moitié de toutes les infrastructures du pays. C'est un secteur où la coopération entre les gouvernements est absolument indispensable pour mettre sur pied un programme pouvant répondre aux besoins de notre pays, qui doit faire face à un énorme déficit en matière d'infrastructure s'élevant à des centaines de milliards de dollars. Pourtant, c'est un secteur où le gouvernement n'est pas intervenu.
Un second secteur où il y a un besoin criant de coopération entre les gouvernements fédéral et provinciaux — qui ne se rencontrent pas par obligation, mais qui collaborent vraiment —, c'est celui des pensions.
Il y a quelques mois, les provinces et le gouvernement fédéral ont tenu une série de réunions et semblaient en voie d'arriver à un consensus sur une expansion modérée du Régime de pensions du Canada justifiée par le fait que, à l'heure actuelle, les Canadiens n'épargnent pas suffisamment pour vivre confortablement à leur retraite. Que cela plaise ou non au gouvernement, c'est un sujet qui concerne forcément le fédéral et les provinces car, pour apporter un changement au RPC, il faut l'accord du gouvernement fédéral et d'une majorité de provinces.
Le gouvernement, cependant, a préféré opposer son veto à toute modification du Régime de pensions du Canada, laissant les provinces se débrouiller seules. J'estime que cette décision manquait énormément de vision et qu'elle a nui au bien-être des retraités de demain. C'est cependant une des questions sur lesquelles Kathleen Wynne a fait campagne. Il semble qu'elle ait remporté les élections sur la foi de la promesse de mettre au point une version du RPC élargi propre à l'Ontario, initiative à laquelle s'affaire actuellement son gouvernement. Je pense qu'elle a cessé de compter sur le gouvernement actuel dans le dossier et qu'elle espère que notre parti remporte les élections, auquel cas nous avons pris l'engagement d'élargir le Régime de pensions du Canada.
Ces deux grands enjeux ont permi au parti de Kathleen Wynne d'obtenir une majorité en Ontario récemment. L'infrastructure et les pensions sont en difficulté, non pas par simple négligence, mais bien par malveillance de la part du gouvernement fédéral, qui refuse de lever même le petit doigt.
N'oublions pas l'environnement. Lorsqu'il y a un vide, d'autres gouvernements le combleront. Cela fait des années que le gouvernement fait le strict minimum dans les dossiers de l'environnement et des émissions de gaz à effet de serre, et c'est pourquoi nous remportons sans cesse des prix Fossile aux conférences internationales. Les provinces sont intervenues pour combler ce vide créé par le gouvernement fédéral en créant leur propre système de plafonnement et d'échange ou en imposant leur propre taxe sur le carbone.
Voici un exemple du manque total de leadership, de coopération et de réunions fédérales-provinciales dans le domaine de l'environnement. Les provinces ont répondu à l'appel et sont passées à l'action lorsqu'elles ont constaté que le gouvernement fédéral n'allait rien faire. Disons que c'est mieux que rien.
Les pipelines sont un autre exemple. Ce devrait être le point fort du gouvernement fédéral, lui qui a toujours perçu le Canada comme une super puissance énergétique et qui a mis tous ses oeufs dans le panier de l'énergie. S'il y a une chose qu'on pourrait croire le gouvernement capable d'accomplir, c'est de faire en sorte qu'on ait des pipelines pour acheminer tout ce pétrole vers les marchés. Or, jusqu'à maintenant, les conservateurs ont échoué dans les trois directions. Ils n'ont pas réussi à obtenir l'accord des États-Unis pour les pipelines vers le sud. Vers l'ouest, le projet de pipeline Northern Gateway demeure enlisé, en partie à cause du manque de leadership fédéral dans le dossier de l'environnement et auprès des Autochtones. Et voilà que le projet de pipeline en direction est connaît aussi des problèmes.
Les premiers ministres de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec se sont rencontrés pour discuter d'une stratégie nationale en matière d'énergie, et une fois de plus, le gouvernement fédéral brillait par son absence. De toute évidence, l'initiative bat maintenant de l'aile, non seulement à cause du prix du pétrole, mais surtout à cause de l'incapacité du gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements provinciaux pour trouver une solution à la question des pipelines et remédier aux préoccupations concernant l'environnement et à celles des Autochtones.
Je pourrais continuer à énumérer les problèmes, mais voilà la liste des manquements flagrants du gouvernement fédéral à son devoir en raison de son manque de collaboration avec ses homologues provinciaux et municipaux.