Monsieur le président, membres du Comité, bonjour.
Je m'appelle Krista Wilcox. Je suis directrice générale du Bureau de la condition des personnes handicapées d'Emploi et Développement social Canada.
Je suis accompagnée de M. Andrew Brown, directeur général Politiques de l'assurance-emploi, Compétences et emploi, de M. Kris Johnson, directeur général de la Direction des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, et de Mme Gertrude Zagler, directrice générale par intérim des Programmes fédéraux, Programme du travail.
Je tiens tout d'abord à remercier le Comité de me donner l'occasion de discuter de cette question très importante. Bien que toutes les personnes ayant un handicap se heurtent à des obstacles à l'inclusion économique et sociale, les personnes ayant des invalidités épisodiques peuvent éprouver des difficultés particulières en raison de leur état.
L'invalidité épisodique est caractérisée par des périodes de mieux-être et des périodes de maladie ou d'invalidité dont la gravité, la durée et la prévisibilité varient. Selon le Réseau des incapacités épisodiques, parmi les « exemples de maladies qui entraînent des invalidités épisodiques », il faut mentionner « la maladie mentale, l'arthrite, le VIH/sida, la sclérose en plaques, la maladie de Crohn et la colite et certaines formes de cancer et de maladies rares ».
Même s'il s'agit d'un bon point de départ, ce sont les variations intermittentes de la capacité d'une personne de fonctionner qui permettent de déterminer un cas d'invalidité épisodique, ce qui peut se produire chez des personnes aux prises avec une ou de multiples affections. Puisque l'invalidité épisodique peut être imprévisible, les personnes ayant ce type d'affection peuvent se heurter à des obstacles particuliers à l'emploi et faire face à l'insécurité financière, puisqu'elles peuvent être complètement exclues du marché du travail à cause de ces obstacles, même si elles possèdent les compétences requises et font preuve d'initiative.
Au cours des dix dernières années, le Bureau de la condition des personnes handicapées a collaboré avec d'autres ordres de gouvernement et des organismes oeuvrant pour les personnes handicapées afin de mieux comprendre l'invalidité épisodique. Dans une grande mesure, il s'agissait de travaux d'avant-garde, car il y avait peu de ressources internationales disponibles.
Par exemple, grâce à un travail de collaboration dans le cadre du forum fédéral, provincial et territorial des services sociaux, le Comité consultatif des personnes handicapées a demandé à la Société de recherche sociale appliquée — la SRSA — de réaliser une étude sur la situation des Canadiens ayant des invalidités épisodiques. Cette étude comprenait une analyse des données, fondée principalement sur l'Enquête canadienne sur l'incapacité de 2012, et une analyse documentaire.
Certaines constatations clés de l'analyse des données étaient que: environ 4 % de la population adulte en âge de travailler avaient des invalidités épisodiques, par rapport à 10 % des personnes handicapées en général; environ 40 % des personnes ayant des invalidités épisodiques étaient atteintes d'une invalidité grave ou très grave — le terme « épisodique » ne signifie pas que l'invalidité est « moins importante »; avoir des invalidités épisodiques signifie avoir de moins bons résultats en matière d'emploi et un revenu inférieur.
Comme dans le cas des invalidités en général, plus de femmes que d'hommes souffrent d'invalidités épisodiques et les chercheurs ont constaté des différences entre les femmes et les hommes à plusieurs égards importants; en particulier, les femmes ayant des invalidités épisodiques étaient moins nombreuses à travailler et plus susceptibles d'avoir un faible revenu que les hommes ayant des invalidités épisodiques. Chez les personnes souffrant d'invalidités épisodiques qui travaillaient, le pourcentage d'emplois à temps partiel ou temporaires était similaire à celui de la population en général. La différence importante étant que moins de personnes occupaient un emploi.
Pour ajouter à nos connaissances actuelles sur l'expérience des personnes ayant des invalidités épisodiques, l'Enquête canadienne sur l'incapacité de 2017 a été la première enquête nationale renfermant un volet spécifique sur les invalidités épisodiques. Les données concernant les personnes ayant des invalidités épisodiques seront disponibles en 2019, à la suite de la diffusion des résultats initiaux qui a eu lieu hier. Le gouvernement du Canada s'est engagé à promouvoir la participation sociale et économique des Canadiens handicapés, incluant ceux ayant des invalidités épisodiques.
Je vais maintenant vous faire part de renseignements sur les mesures de soutien, la législation et les services pertinents d'Emploi et Développement social Canada. Le projet de loi C-81 — Loi canadienne sur l'accessibilité — est la pierre angulaire du programme d'accessibilité du gouvernement du Canada. Si elle est adoptée, la loi instaurera des mesures au sein de l'administration fédérale visant à améliorer l'accessibilité pour toutes les personnes au Canada, dont les personnes ayant des invalidités épisodiques. Le projet de loi C-81 fait expressément référence aux invalidités épisodiques dans la définition du terme « handicap » et nécessiterait l'examen des besoins d'accessibilité particuliers des personnes vivant avec divers handicaps, dont les personnes ayant des invalidités épisodiques, dans le cadre de la détermination et de l'élimination des obstacles ainsi que la prévention de nouveaux obstacles dans les domaines de compétence fédérale.
Le projet de loi C-81 s'appuie sur l'engagement pris par le Canada dans la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées. Les personnes handicapées, telles que reconnues dans la Convention, appuient fortement le principe du « rien sur nous ne se fera sans nous ».
C'est pourquoi le gouvernement du Canada a mené de vastes consultations sans précédent au Canada auxquelles ont participé des personnes handicapées et non handicapées, et le projet de loi C-81 est fondé sur ce que nous avons appris au cours de ces consultations. Les personnes ayant des invalidités épisodiques et les organisations qui les représentent, comme la Société canadienne de la sclérose en plaques, ont activement participé à ce processus.
Pour renforcer la mise en oeuvre au Canada des engagements de la Convention, le gouvernement fédéral collabore avec les provinces et territoires pour l'adhésion du Canada au Protocole facultatif de la Convention. Ce protocole permettrait aux personnes handicapées de présenter une plainte aux Nations unies si elles croient que leurs droits ont été violés, et qu'elles ont épuisé les recours nationaux.
Les mesures de soutien du revenu pour les personnes handicapées relèvent principalement des provinces et territoires, mais le gouvernement du Canada offre des programmes d'assistance financière à la participation pour le remplacement du revenu destiné aux personnes dans l'incapacité de travailler en raison d'un handicapé. Le Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada offre un remplacement partiel du revenu pour les Canadiens âgés de 18 à 65 ans qui ont contribué au Régime de pensions et qui ne peuvent plus travailler de façon régulière en raison d'une invalidité grave et prolongée. Une prestation est également offerte aux enfants à charge admissibles de bénéficiaires du Programme de prestations d'invalidité.
Pour être admissibles au Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, les demandeurs doivent satisfaire aux critères d'admissibilité liés aux cotisations, ainsi qu'aux exigences médicales établies. Pour répondre aux critères d'admissibilité liés aux cotisations, une personne doit avoir cotisé au Régime de pensions pendant quatre des six dernières années ou trois des dix dernières années dans le cas des cotisants de longue date versant des cotisations depuis au moins 25 ans. Pour satisfaire aux exigences médicales, une personne doit avoir une invalidité grave et prolongée telle que définie dans le Régime de pensions du Canada. « Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable d'avoir une occupation véritablement rémunératrice. » « Par prolongée, on entend une invalidité qui sera probablement de longue durée ou de durée indéfinie ou une invalidité qui mènera vraisemblablement au décès. »
En 2016-2017, le Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada a versé 4,3 milliards de dollars à 335 000 prestataires handicapés et à 83 000 de leurs enfants, ce qui représente environ 10,2 % des dépenses totales du Régime s'élevant à 42,5 milliards de dollars.
Les prestations de maladie du régime d'assurance-emploi sont versées aux demandeurs admissibles qui ne peuvent pas travailler en raison d'une maladie ou d'une blessure. Les prestations offrent jusqu'à 15 semaines de remplacement partiel du revenu pour permettre aux travailleurs de se rétablir afin de pouvoir retourner au travail. En 2016-2017, des prestations de maladie s'élevant à 1,6 milliard de dollars ont été versées à environ 379 000 demandeurs.
Les demandeurs de prestations de maladie du régime d'assurance-emploi ont la possibilité d'utiliser les 15 semaines de prestations pendant leur période de prestations de 52 semaines. Par exemple, une personne peut choisir de recevoir trois semaines de prestations de maladie et de retourner ensuite au travail, si elle se sent suffisamment bien, en sachant qu'il lui reste 12 semaines de prestations supplémentaires pendant cette période.
Plus tôt cette année, des changements ont été apportés pour offrir plus de souplesse en réponse aux recommandations de la Société de la sclérose en plaques et d'autres organismes de bienfaisance en santé. Plus précisément, les dispositions du projet Travail pendant une période de prestations du régime d'assurance-emploi ont été élargies pour inclure les demandeurs de prestations de maladie et de maternité afin de leur donner plus de souplesse pour gérer leur retour au travail et conserver une plus grande partie de leurs bénéfices.
En vertu du Code canadien du travail, pour compléter les prestations du régime d'assurance-emploi, les employés du secteur privé assujettis à la compétence fédérale ont droit à un maximum de 17 semaines de congé de maladie sans risque de perte d'emploi s'ils ont travaillé pendant au moins trois mois consécutifs pour le même employeur. De plus, la Loi no 2 d'exécution du budget de 2017 a modifié le Code pour permettre aux employés de demander des modalités de travail flexible qui pourraient être bénéfiques pour un employé ayant une invalidité épisodique.
Le projet de loi C-86 — Loi no 2 d'exécution du budget de 2018 — propose d'autres modifications du Code qui pourraient être bénéfiques en cas d'invalidité épisodique, y compris: éliminer la période d'attente de trois mois liée aux congés de maladie pour que les employés sous réglementation fédérale aient accès à la protection, peu importe depuis combien de temps ils travaillent pour leur employeur; permettre l'utilisation des congés de maladie pour les rendez-vous médicaux; ajouter un nouveau congé personnel de cinq jours, dont trois jours payés; et permettre à l'employeur de demander un certificat médical uniquement lorsqu'un employé est absent pendant trois jours consécutifs ou plus.
Pour renforcer et élargir la classe moyenne, et pour aider les Canadiens à obtenir et à conserver de bons emplois, le gouvernement fédéral a conclu de nouvelles ententes sur le développement de la main-d'oeuvre avec la plupart des provinces et des territoires. Des détails seront annoncés bientôt. Les nouvelles EDMO regroupent et remplacent les Ententes sur le Fonds canadien pour l'emploi — qui comprenaient la Subvention canadienne pour l'emploi —, les Ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées et l'initiative ciblée pour les travailleurs âgés.
Les EDMO permettent aux provinces et aux territoires d'offrir une aide à l'emploi et de la formation axée sur les compétences tout en ayant la souplesse nécessaire pour répondre aux besoins divers de leurs clients respectifs. Dans le cadre des EDMO, le gouvernement du Canada verse 722 millions de dollars par an aux provinces et aux territoires; il leur versera aussi 900 millions de dollars supplémentaires sur six ans, de 2017-2018 à 2022-2023. Les EDMO permettront d'accroître le soutien fourni aux personnes handicapées au-delà de ce qu'offraient les anciennes ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées. De 2017-2018 à 2022-2023, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires investiront environ 2,7 milliards de dollars dans de la formation et des soutiens à l'emploi ciblés.
Les provinces et les territoires peuvent continuer à offrir des programmes semblables à ceux qu'offraient les ententes précédentes; toutefois, ils ont la souplesse nécessaire pour adapter ces modèles ou créer de nouvelles interventions, y compris des interventions particulières pour soutenir des personnes souffrant d'invalidité épisodique afin de répondre aux besoins de leur propre marché du travail. De plus, EDSC investit environ 40 millions de dollars par an dans le Fonds d'intégration pour les personnes handicapées. Ce programme fédéral est mis en oeuvre au moyen d'ententes de contribution conclues avec des prestataires de service qui proposent une vaste gamme d'outils pour aider les personnes handicapées, y compris celles qui souffrent d'une invalidité épisodique, à se préparer au marché du travail, à trouver un emploi et à le conserver ou à devenir travailleurs autonomes.
Le Fonds d'intégration est unique, car il offre des interventions et de l'aide axées sur l'emploi afin d'améliorer la situation de l'emploi d'un segment particulier de la population des personnes handicapées, c'est-à-dire les personnes qui sont peu ou pas intégrées au marché du travail. À partir de 2018-2019, quelque 18 millions de dollars sur six ans seront investis dans le Fonds d'intégration pour mieux appuyer les employeurs qui se sont engagés à embaucher des personnes handicapées, mais qui ont besoin d'aide pour trouver la bonne personne et pour créer des lieux de travail qui permettent aux employés handicapés d'atteindre leur plein potentiel.
En outre, le gouvernement du Canada offre un soutien aux Canadiens handicapés pour les aider à améliorer leur sécurité financière au moyen de programmes comme le Programme canadien pour l'épargne-invalidité. Lancé en décembre 2008, le Programme canadien pour l'épargne-invalidité est un programme d'épargne conçu pour contribuer à la sécurité financière à long terme des Canadiens ayant une invalidité grave et prolongée, et de leur famille.
Le gouvernement du Canada accorde des subventions et des obligations équivalant aux investissements des particuliers. En reconnaissance des invalidités intermittentes, mais ayant des répercussions à long terme, le gouvernement du Canada a introduit un nouveau règlement en 2012. Celui-ci permet aux bénéficiaires qui ne sont plus admissibles au crédit d'impôt pour personnes handicapées de continuer à contribuer à leur REEI si un professionnel de la santé témoigne du fait que ces bénéficiaires seront probablement admissibles au crédit à nouveau dans un avenir rapproché. Cette mesure permet d'aider les personnes ayant des invalidités épisodiques pouvant perdre leur admissibilité au crédit pendant des périodes de mieux-être.
EDSC soutient également les personnes handicapées en finançant le Programme de partenariats pour le développement social, Composante personnes handicapées en vue d'améliorer l'intégration sociale et économique de ces personnes dans nos communautés. Il s'agit d'un programme de subventions et de contributions de 11 millions de dollars qui permet d'offrir un financement à des organismes sans but lucratif voués aux personnes handicapées. Le Programme finance les activités et les projets de tels organismes pour que ceux-ci puissent accomplir ce travail.
Récemment, nous avons financé des projets dans le cadre de ce programme. Par exemple, la Société pour les troubles de l'humeur du Canada, en partenariat avec la Société de l'arthrite, a reçu un peu plus d'un demi-million de dollars pour un projet intitulé « Travaillez avec nous ». Celui-ci aborde des enjeux complexes qui touchent les personnes atteintes de maladies chroniques, en particulier la dépression, l'arthrite et la douleur chronique. Ce projet a eu recours à une approche intersectorielle novatrice pour offrir une éducation et un soutien aux personnes atteintes de dépression, d'arthrite et de douleur chronique ainsi qu'aux collègues, aux employeurs, aux syndicats, aux familles et aux amis.
Je termine ici ma déclaration préliminaire. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.