Monsieur le Président, je suis très heureuse de prendre la parole au sujet du projet de loi C-76. D'entrée de jeu, j'aimerais en profiter pour expliquer en gros l'historique du projet de loi, mais en remontant seulement jusqu'en 2014. Il est important que les Canadiens sachent ce que le projet de loi accomplira et ce qu'il nous reste à faire. Le projet de loi n'est pas parfait. J'insiste sur ce fait, même si je vais voter en sa faveur. De plus, je me réjouis qu'au moins certains de mes amendements aient été acceptés par le comité qui a étudié le projet de loi.
J'aimerais retourner en 2014, lorsque le député actuel de Carleton était le ministre des Institutions démocratiques. Il a présenté un projet de loi dans la législature de l'époque, le projet de loi C-23, qui avait reçu le titre invraisemblable, compte tenu de sa teneur, de Loi sur l'intégrité des élections. J'étais députée de l'opposition à l'époque, en tant que chef du Parti vert, mais j'ai eu de la difficulté, avec les autres députés de l'opposition, les néo-démocrates et les libéraux, à empêcher la progression du projet de loi, car il avait de toute évidence moins à voir avec l'équité qu'avec la création de conditions favorables pour le parti au pouvoir — les conservateurs, en l'occurrence — à la veille des élections de 2015.
J'ai donc trouvé très ironique d'entendre les députés conservateurs répéter à plusieurs reprises que les libéraux essaient simplement de modifier certaines modalités pour les rendre plus favorables à leur parti.
C'est vraiment important de se souvenir des circonstances de 2014, quand le député de Carleton a mis sur pied le projet de loi. Maintenant, j'espère que ce sera relevé par les changements apportés au projet de loi C-76.
En examinant la teneur de la prétendue Loi sur l'intégrité des élections, on constate qu'elle était imprégnée, comme certains députés le sont toujours, d'un mythe, et je tiens à insister sur le mot « mythe ».
Ce n'est pas du tout vrai. Je veux souligner que nous n'avons pas, au Canada, de problème de fraude lors des élections.
Le problème n'est pas que des gens se déguisent et utilisent une carte d'information de l'électeur ou quoi que ce soit d'autre pour aller voter, comme on l'a laissé entendre à la Chambre lors du dernier débat sur le projet de loi C-76. Le problème n'est pas que des Canadiens votent plus d'une fois en utilisant une fausse identité. Le problème, c'est que des Canadiens votent moins d'une fois. C'est un grave problème, et c'est pourquoi nous avions besoin des dispositions que la prétendue Loi sur l'intégrité des élections a éliminées. Je parle de dispositions comme celles qui permettent d'être le répondant de quelqu'un ou de présenter une carte d'information de l'électeur comme pièce d'identité lorsque l'on va voter.
Rien de tout cela n'aurait été nécessaire, n'eût été des modifications que le gouvernement Harper précédent a apportées au tout début de son premier mandat. Pour la première fois de l'histoire du pays, ils ont obligé les Canadiens a présenter une pièce d'identité avec photo délivrée par un gouvernement pour pouvoir voter. Je le répète, cette mesure a laissé entendre d'un ton sinistre que des gens votaient plus d'une fois parce que l'on n'avait pas ce problème assez à l'oeil. Or, ce problème n'existait pas plus alors qu'il n'existe aujourd'hui. Il n'a jamais existé. Plusieurs directeurs généraux des élections en sont venus à la même conclusion, notamment Marc Mayrand et Jean-Pierre Kingsley, qui ont tous les deux déclaré devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qu'il s'agissait d'un faux problème.
Le projet de loi C-23 a fait quelques autres choses. Il a privé notre directeur général des élections de certaines de ses capacités de nous parler en tant qu’électeurs lorsque nous avions besoin d’information. L’un de ces moments critiques a été, par exemple, les élections de 2011. Le directeur général des élections a diffusé un communiqué de presse, il a fait des appels et est passé à la radio. Il y avait des appels automatisés. On induisait les Canadiens en erreur en leur disant que leur bureau de scrutin avait changé d'adresse. Rien de tout cela n’était vrai. Il y a eu une enquête. Je ne pense pas qu' elle a été adéquate. Nous savons que cela s’est produit, mais nous ne savons pas qui l’a fait. C’est un mystère qui n’a toujours pas été élucidé, mais c’est comme s’il y avait eu une arme à feu par terre, encore fumant, et que plusieurs personnes qui se tenaient autour semblaient l’avoir utilisée. L'enquête n'a pas été concluante, mais nous savons avec certitude que des électeurs qui n’avaient pas l’intention de voter pour les conservateurs se faisaient dire d’aller dans des bureaux de vote qui n’existaient pas.
Le directeur général des élections avait alors le pouvoir de passer à la radio et de dire: « Si vous recevez un message au téléphone qui vous dit qu’Élections Canada est en ligne et que votre bureau de vote a changé, ignorez-le. Nous n’avons pas changé l’emplacement des bureaux de vote ». C’était important de le dire.
Ce que le projet de loi C-23 a fait en 2014, c’est enlever au directeur général des élections la capacité de faire exactement cela. Il a enlevé au directeur général des élections la capacité de rassurer les Canadiens sur le fait que leur bureau de scrutin n’avait pas changé d’adresse.
Il y a un certain nombre d’autres choses que la soi-disant Loi sur l’intégrité des élections a faites. L’une était de dire que si une campagne électorale était particulièrement longue, davantage de dépenses seraient permises. Cela signifiait que les très grands partis, comme les conservateurs ou les libéraux, et c’était certainement à l’avantage des conservateurs lors de ces élections, pourraient dépenser plus d’argent si la période électorale était plus longue. Ils ont dépensé beaucoup d’argent. Au cours de cette campagne électorale, ils ont dépensé un peu moins de 42 millions de dollars. Les Canadiens leur ont rendu la moitié de cette somme à cause de la façon dont la soi-disant Loi sur l’intégrité des élections a fonctionné à leur avantage.
Rapidement, deux projets de loi ont été déposés au cours de la 42e législature afin de corriger toutes les choses qui avaient mal tourné ou qui étaient perverses en vertu du projet de loi C-23 pendant la 41e législature. En décembre 2016, il y a eu le projet de loi C-33. J’ai été ravie de le voir, mais il ne s’est jamais rendu à l’étape de la deuxième lecture. Tout ce qui se trouvait dans le projet de loi C-33 a été versé dans le projet de loi C-76, qui a été présenté cette année.
Que l'on me permette de passer en revue les excellentes mesures qui figuraient dans le projet de loi C-33 d’origine et dont nous sommes aujourd’hui saisis dans le projet de loi C-76. Le projet de loi C-33 redonnait au directeur général des élections le pouvoir de prévenir les gens, de parler aux Canadiens et d’éduquer les électeurs, sans partisanerie. Il éliminait la période prolongée où les partis pouvaient obtenir plus d’argent de tout le système. C’est maintenant dans le projet de loi C-76. Il abrégeait même la période et limitait les dépenses des grands partis, de sorte que les contribuables aient moins d'argent à leur rembourser à la fin, ce qui est formidable.
La première partie du projet de loi C-33, qui est reprise dans le projet de loi C-76, rétablissait l’essentiel, c’est-à-dire le droit de l’électeur de se faire accompagner au bureau de scrutin par quelqu’un qui dirait: « Je connais Joe. C’est mon beau-frère. Nous vivons dans le même quartier. Il n’a pas de permis de conduire parce qu’on le lui a enlevé. Je suis ici pour répondre de lui. » Les étudiants qui votent à l’université ont beaucoup de mal à prouver où ils habitent et, par conséquent, qu’ils ont le droit de voter.
Beaucoup trop de personnes ont été privées de leur droit constitutionnel de voter en 2015. Les conservateurs ont dit que le taux de participation a augmenté. Bien sûr qu'il a augmenté. Les électeurs voulaient désespérément se débarrasser de Stephen Harper, alors ils se sont présentés en grand nombre aux urnes. Or, la réalité, c’est que des centaines de milliers de Canadiens se sont vu refuser le droit de voter à cause des modifications à la loi électorale que nous nous apprêtons à éliminer.
Ce qui est aussi très bien et tout à fait nouveau, c’est l'idée de permettre au directeur général des élections, c’est-à-dire à Élections Canada, d'aller dans les écoles pour inciter les jeunes de 14 ans à s’inscrire pour qu'ils puissent voter lorsqu'ils auront 18 ans. Sachant qu’ils sont inscrits, ils pourront commencer tout de suite à réfléchir à leur devoir civique de voter.
La faible participation électorale chez nos plus jeunes citoyens est un vrai problème. J’aimerais beaucoup que nous ramenions à 16 ans l’âge du droit de vote. Ce n’est pas dans le projet de loi, mais une bonne première étape consiste à permettre à Élections Canada d’aller parler aux jeunes dans les écoles secondaires. Leur éducation civique sera beaucoup plus concrète s’ils s’inscrivent personnellement pour voter. Cela ne leur donne pas le droit de voter, mais ils seront déjà inscrits lorsqu’ils atteindront 18 ans et qu'ils obtiendront le droit de voter.
Le projet de loi C-76 comporte un certain nombre d’autres éléments. Je ne crois pas que nous n'en ferons jamais assez pour contrer les menaces qui pèsent sur les médias sociaux, comme Cambridge Analytica, le fait que l’information peut être extraite de Facebook, la façon dont les publicités peuvent être ciblées sur Facebook et la publication de fausses nouvelles. Le projet de loi C-76 tente de régler le problème. Je pense que nous allons devoir y revenir et en faire davantage. J’appuie certainement ce qui figure dans le projet de loi.
Je suis tout à fait favorable à l'idée de plafonner les dépenses électorales en période préélectorale. La législation était muette à ce sujet. Je crois que c’est parce que la dernière fois que la loi électorale a été étudiée, aucun parti politique ne dépensait d’argent avant les élections. Ils gardaient leur argent et commençaient à le dépenser après le déclenchement des élections. Ce n’est que lorsque Stephen Harper s'en est pris à Stéphane Dion, en janvier 2007, que nous avons commencé à voir des publicités négatives en dehors de la période électorale, sans aucun contrôle des dépenses. Maintenant, il y aura des mécanismes de contrôle.
Qu’est-ce qui manque? Voici où se situe la grande lacune: nous avions l’occasion d’assujettir les partis politiques aux lois sur la protection de la vie privée. Le projet de loi dit que les partis politiques doivent adopter une politique sur la protection des renseignements personnels et la présenter, mais c'est loin de les assujettir aux lois dans ce domaine. C'est sur une base volontaire. Nous devons assujettir les partis politiques à la législation en matière de protection de la vie privée et des renseignements personnels.
Quand la Chambre était saisie du projet de loi C-23, en 2014, au moment de l’étude article par article, j’ai essayé de faire adopter un amendement pour assujettir les partis politiques à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Aucun parti n’était d’accord avec cela à l’époque. Je tiens vraiment à remercier le Nouveau Parti démocratique d’avoir appuyé ma proposition d'amendement, qui n’a pas été adoptée, mais qui précisait que les partis devaient respecter la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Nous n’avons pas réussi, mais je remercie le NPD de m’avoir appuyée dans cette démarche.
Nous devons continuer de faire le nécessaire pour assurer l'intégrité des élections au Canada. Le projet de loi C-76 nous fait avancer beaucoup en ce sens.
Mr. Speaker, I am very pleased to rise in debate at this point on Bill C-76. I want to take the occasion to start with a bit of a broad historical sweep, albeit going back just to 2014. It is important for Canadians to know what is being accomplished with this legislation and what remains to be done. It is not perfect. I want to stress that, but I will be voting for it. I am also gratified that at least some of my amendments were accepted in the committee that studied the bill.
I want to go back to 2014, when the current hon. member for Carleton was the minister of democratic institutions. He brought forward a bill in that Parliament, Bill C-23, that was given the unlikely title, given its content, of the Fair Elections Act. I was a member of the opposition at the time, as leader of the Green Party, but I struggled with other members of the opposition, the New Democrats and Liberals, to try to stop that piece of legislation because it clearly had less to do with fairness than with trying to create favourable conditions for the governing party, the Conservatives at that time, going into the 2015 election.
Therefore, it is with a great deal of irony that I have heard a number of times Conservative members say that the Liberals are just trying to change the terms to make them better for their party.
We cannot forget the circumstances in 2014 when the member for Carleton introduced his bill. I hope that this will now be fixed by the changes to Bill C-76.
Going back to what the so-called Fair Elections Act did, it was consumed, as some members of this place still are, with a fiction—and I want to underscore the word “fiction”.
It is completely untrue. I want to stress that Canada does not have a problem with election fraud.
We do not have a problem of people disguising themselves, taking voter cards or any number of things that have been hinted at in the chamber in the last debate on Bill C-76. We do not have a problem of Canadians voting more than once under assumed identities. We have a problem of Canadians voting less than once. That is a serious problem, and that is why we needed the things that the so-called Fair Elections Act got rid of. These were things like being able to vouch for someone and being able to provide one's voter card as a piece of ID when going to the polls.
None of this would have been necessary if it were not for changes that the former Harper Conservatives made back at the very beginning of their first mandate. For the first time, they made it a requirement that Canadians produce a piece of government issued photo ID in order to vote. That, again, hinted darkly at the idea that people were voting more than once because we did not have enough checks on this problem. It was a non-existent problem then and does not exist now. It never existed. That is the evidence of several chief electoral officers, including Marc Mayrand and Jean-Pierre Kingsley, who both testified to the PROC committee that it was a non-problem.
Bill C-23 did a few other things. It took away some of the abilities of our Chief Electoral Officer to speak to us as voters when we needed information. One of those critical moments was, for instance, the election in 2011. The Chief Electoral Officer sent out a press release and got on the phone and radio. Robocalls were going on. Canadians were being misdirected, being told that their polling stations had changed. None of that was true. We had an investigation. I do not think it was ever adequately investigated. We know it took place, but we do not know who did it. That is a mystery that remains unsolved, but I think we know there was a gun lying on the floor, it was smoking, and several people standing around appeared to have used it. We have no conclusion, but we know for sure that voters who did not intend to vote Conservative were being told to go to polling stations that did not exist.
The Chief Electoral Officer then had the power to get on the radio and say “If you get a message on the phone that tells you it's Elections Canada on the line and your polling station has changed, ignore it. We have not changed any polling stations”. That was important.
What Bill C-23 did in 2014 was to take away the ability of the Chief Electoral Officer to do exactly that. It took away the ability of the Chief Electoral Officer to reassure Canadians that their polling stations had not changed.
There were a number of other things that the so-called Fair Elections Act did. One was to say that if there were a particularly long writ period, more spending would be permitted. That meant that the really big parties, like the Conservatives or the Liberals, and this was certainly to the advantage of the Conservatives in that election, could spend more money if the writ period were longer. They spent a lot of money. In that election, they spent just shy of $42 million. The people of Canada gave them half back, because of the way the so-called Fair Elections Act operated to their benefit.
Moving quickly, we had two pieces of legislation tabled in this 42nd Parliament to deal primarily with fixing all of the things that had gone wrong or were perverse under Bill C-23 in the 41st Parliament. In December 2016, we got Bill C-33. I was thrilled to see it, but it never got to second reading. Everything in Bill C-33 was added to Bill C-76, which emerged this year.
Let me just go through the great things that were in the original Bill C-33 and are now before us in Bill C-76. It gave the Chief Electoral Officer back the powers to warn people, to talk to Canadians, and to educate people in a non-partisan fashion. It got rid of the extended period in which parties could get more money out of the whole system. That is now in Bill C-76. It actually shortened up the period and restricted how much money big parties could spend, which means that the taxpayers will reimburse them less at the end, which is great.
The first part of Bill C-33, which has now come forward within Bill C-76, brought back the basics, namely that people are allowed to bring someone with them to the polls to say, “I know Joe. He's my brother-in-law. We live in the same neighbourhood. He's missing a driver's licence because his driver's licence has been taken away from him. I am here to vouch for him.” Students voting at university have a very difficult time proving where they live and thus that they have the right to vote.
Far too many people were denied their constitutionally enshrined right to vote in 2015. The Conservatives said that voter turnout went up. Sure it did. Voters were desperate to get rid of Stephen Harper, and they showed up in large droves. However, the reality is that hundreds of thousands of Canadians were denied the right to vote because of the changes to the Elections Act that we are now getting rid of.
What is also really good and entirely new is the concept that the Chief Electoral Officer, that is, Elections Canada, can go into schools and try to encourage 14-year olds to register to vote for when they turn 18. They can start, right away, knowing that they are registered so that they can begin to think about their civic duty to vote.
The lack of voter turnout among our youngest citizens is a real problem. I would love to see us reduce the voting age to 16. That is not in this bill, but a good first step is allowing Elections Canada to go into the schools to talk to the young people when they are in high school. Their civics education will feel far more real when they are personally registering to vote. It is not that they have the right to vote, but they are pre-registered for when they turn 18 and do have the right to vote.
Bill C-76 does a number of other things. I do not think we will ever do enough to deal with the threats to social media, things like Cambridge Analytica, the way that Facebook information can be mined, the way that Facebook ads can be targeted, and the use of fake news. Bill C-76 attempts to deal with this. I think we are going to have to come back to it and do more. I certainly support what they have done in this bill.
I certainly support having pre-writ election spending limits. This was a big vacuum in our laws. I think it is because the last time we looked at the Elections Act, no political party was spending money pre-writ. They kept their money and started spending it after the writ fell. It was not until Stephen Harper's attacks on Stéphane Dion in January 2007 that we started having attack ads outside of a writ period with no spending controls at all. Now we have spending controls.
What is missing? Here is the big gap. This was our opportunity to put political parties under our privacy laws. This legislation says that political parties must develop privacy policies and table them, but that is a far cry from having them under our privacy laws. It is a voluntary scheme. We need to put political parties under our privacy laws.
Back when Bill C-23 was going through the House in 2014, during clause-by-clause consideration of the bill, I did try to get an amendment passed that would make political parties subject to the Privacy Act. No party supported that then. I really want to thank the New Democratic Party for supporting my amendment, which did not succeed, to set out that parties must adhere to the Personal Information Protection and Electronic Documents Act, PIPEDA. We did not succeed, but I thank the NDP for being with me on that.
We need to keep working for fair elections in Canada. Bill C-76 gets us a long way toward them.