Madame la Présidente, c'est un plaisir pour moi d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-4. Mais avant de commencer, je précise que je partagerai mon temps de parole avec la députée de Davenport.
J'aimerais tout d'abord faire un court survol de mes antécédents, car je pense qu'il est important pour les députés d'en face de savoir que je suis un de ces dirigeants dont ils se plaisent à parler. Je participais aux plus hautes instances du mouvement syndical des années 1980, même 1970, avant de devenir député. Je dois être celui à qui l'on reproche de n'avoir rendu aucun compte, de ne pas avoir été transparent et d'avoir quelque chose à cacher, le dirigeant problématique auquel s'attaquait le projet de loi en question.
Je voulais d'emblée jouer franc jeu et avouer ma partialité. Je suis un syndicaliste et j'en suis fier. Le mouvement syndical a une longue histoire au Canada, et le Canada a su composer avec les changements qu'il a entraînés.
Parlons un peu de l'histoire du mouvement syndical. Il est évident que ce mouvement a eu d'énormes répercussions sur les cols bleus et les travailleurs du Canada. Il leur a permis, entre autres, de bénéficier de meilleures conditions de travail au chapitre de la rémunération, des heures de travail, de la santé et de la sécurité. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles les syndicats ont été créés. Au début de notre histoire, de très fortes pressions étaient exercées sur les travailleurs pour qu'ils travaillent dans des conditions dangereuses. Le mouvement syndical a vu le jour parce que les travailleurs canadiens n'étaient pas suffisamment protégés.
Je veux parler aux députés de la politique de nivellement par le bas menée par le Parti conservateur — et le Parti réformiste avant lui — à la Chambre des communes au cours des 20 dernières années. J'ai suivi ce dossier, et leur politique m'effraie. Prenons l'exemple du Régime de pensions du Canada et des pensions, en général.
Le mouvement syndical a joué un rôle déterminant dans la décision d'accorder de bonnes pensions aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays afin de leur permettre d'arrondir leur revenu de retraite parce que nous savons, bien sûr, que le gouvernement du Canada ne peut pas s'occuper de toutes les personnes âgées à la retraite. Les régimes de pensions financés par les cotisations des employeurs et des employés occupent une place très importante dans l'économie canadienne d'aujourd'hui.
Nous devons parler non seulement de la structure de négociation collective, mais aussi des aspects sociaux qu'apportent la négociation collective et les syndicats.
J'aimerais parler un peu d'une étude réalisée en 2012 par le Boston Consulting Group, au sujet de laquelle j'ai lu. Voici ce que j'ai découvert. En moyenne, 14 cents de chaque dollar de revenu dans les collectivités de l'Ontario proviennent des pensions. Cela signifie que, en Ontario, 7 % de tous les revenus dans nos villes et villages, ou 27 milliards de dollars, sont dérivés de régimes de pension à prestations déterminées.
Plutôt que de tenter de diminuer le mouvement syndical, nous devrions en fait essayer de renforcer nos relations avec les employeurs et les employés et faire en sorte qu'il y ait davantage de régimes de pension parrainés par l'employeur pour que les retraités, les gens que nous représentons à la Chambre, aient une bonne retraite.
Je suis fier de représenter des cheminots, des travailleurs de scieries et des mineurs retraités, tous ces gens de Kenora—Rainy River, maintenant la circonscription de Kenora, en tant que député depuis 16 ans. Ces gens ont de bonnes pensions. Ces travailleurs étaient représentés par des syndicats. Ils avaient d'énormes avantages sociaux grâce à de bonnes négociations collectives.
Cela ne veut pas dire que les employeurs ne faisaient pas d'argent. J'étais un cheminot. J'ai représenté les syndicats des chemins de fer. Ces sociétés de chemin de fer faisaient de l'argent à l'époque où j'ai négocié des conventions collectives avec elles.
Le fait que le gouvernement précédent a estimé qu'il était dans son meilleur intérêt d'essayer de diminuer le mouvement syndical m'amène à me demander quelle était réellement sa motivation. En fait, cela cause plus de tort que de bien au Canada. Nous devons renforcer la possibilité pour les syndicats de collaborer avec le gouvernement et les employeurs, et non l'inverse.
L'ancien gouvernement a créé un dangereux précédent. Il a toujours été difficile de concilier les intérêts des employeurs et des employés. Nous avons passé 100 ans, je dirais, à tenter d'atteindre un juste équilibre aux paliers provincial, fédéral et même municipal. Puis, on nous a imposé un projet de loi d'initiative parlementaire, sans la moindre discussion avec les principaux intéressés — les travailleurs, le gouvernement et les employeurs — au moyen du processus tripartite qu'utilise le ministère fédéral du Travail d'aussi loin que je me rappelle. Voilà qui crée un dangereux précédent, quel que soit le gouvernement.
Même le gouvernement de Brian Mulroney n'aurait pas fait une telle chose. J'étais député de l'opposition lorsqu'il a voulu apporter des changements au Code canadien du travail. Il a eu recours au processus tripartite.
Le Parti conservateur — et je crois qu'il y a encore trop de réformistes dans ce parti — doit sincèrement se demander pourquoi au juste il a voulu intervenir dans des dossiers de compétence provinciale, qui n'ont rien à voir avec le gouvernement fédéral, en utilisant la Loi de l'impôt sur le revenu.
C'est exactement pourquoi le gouvernement actuel veut abroger les mesures législatives en question. D'abord, elles ne sont pas du ressort du gouvernement fédéral. Ensuite, elles sont inconstitutionnelles. Nous le savons tous et nous savons que si nous n'agissons pas, les tribunaux les rejetteront comme ils ont rejeté de nombreuses mesures législatives présentées par le gouvernement conservateur.
Nous faisons ce qui s'impose. Nous sommes en train d'atteindre un juste équilibre, ce qui est toujours difficile à faire. Parfois, les travailleurs font la grève. C'est un fait. Ils doivent être en mesure de faire cela. Ils doivent être en mesure de former un syndicat, et ils doivent avoir la possibilité de le faire sans que tout le monde soit au courant de leur stratégie et de leur plan. Il est très difficile de négocier lorsqu'on a les mains liées. En vertu de cette loi, le gouvernement conservateur souhaitait forcer les syndicats à informer les employeurs de toutes leurs ressources financières, des noms de leurs interlocuteurs et de ce qu'ils entendaient faire.
Un syndicat est libre d'investir dans des causes sociales ou des campagnes. Je le sais, puisque j'ai déjà été dirigeant syndical. Les membres d'un syndicat savent comment leur argent est dépensé. Il est ridicule qu'un parti laisse entendre aux Canadiens moyens que les travailleurs ne savent pas à quoi servent leurs cotisations syndicales. Nous savons tous qu'il s'agit tout simplement de faits inventés de toutes pièces pour démontrer la soi-disant pertinence de ces mesures.
Ces deux mesures législatives ont ébranlé l'équilibre précaire que les législateurs canadiens essaient depuis longtemps de maintenir. Les dispositions législatives en cause seront abrogées parce que nous voulons que les rapports entre le milieu syndical, le gouvernement et les employeurs soient respectés et que les négociations collectives se fassent comme elles se sont toujours faites, c'est-à-dire entre l'employeur et les syndicats. Les parties finiront par s'entendre. Voilà ce que le projet de loi fera pour les travailleurs canadiens et les employeurs.
J'aimerais parler brièvement de l'importance des nouveaux rapports du gouvernement avec le milieu syndical et avec l'ensemble des Canadiens. Au cours des prochains mois, le gouvernement abrogera probablement un certain nombre de mesures législatives que les députés d'en face ont adoptées et qui, selon nous, ne permettent pas de bâtir une société juste. J'espère que les députés de ce côté-ci ne sentiront jamais le besoin de se justifier d'agir ainsi. Nous avons fait campagne en promettant de ne plus permettre que de telles choses se produisent. Nous respecterons le mouvement syndical et les Canadiens. Voilà ce que nous ferons.