Monsieur le Président, je suis très content de prendre la parole ce soir. J'aimerais saluer tous les citoyens de Beauport—Limoilou qui nous écoutent en temps réel ou qui nous écouteront en rediffusion sur Twitter ou sur Facebook.
Chers citoyens, nous débattons ce soir d'une motion fort importante qui porte sur un sujet très sensible pour tous les Canadiens, étant donné qu'on parle d'autres Canadiens. Nous parlons des combattants canadiens qui ont rejoint le groupe État islamique depuis 2013. Plus de 190 Canadiens ont pris la décision solennelle de joindre les rangs du groupe État islamique, parfois malgré eux, parfois en toute clarté d'esprit. Bien entendu, nous déplorons leur décision d'aller outre-mer pour participer aux campagnes de Daech, plutôt connu sous le nom de groupe armé État islamique, dont la portée a rapetissé de manière importante à la suite des attaques de la coalition occidentale. Le groupe se situe principalement en Syrie et en Irak, au Moyen-Orient.
Ces 190 Canadiens ont décidé d'aller outre-mer pour rejoindre le groupe État islamique, qui combat les pays occidentaux et leurs valeurs, dont la démocratie libérale et l'égalité entre les hommes et les femmes. Ce sont des valeurs qui sont chères à la démocratie parlementaire canadienne.
Aujourd'hui, le député de Winnipeg-Nord et plusieurs de ses collègues libéraux ont mentionné que ces 190 Canadiens se sont radicalisés par l'entremise d'Internet, de lectures ou de propagandistes du groupe armé État islamique sur les réseaux sociaux. Les libéraux nous disent qu'il faut tendre la main aux Canadiens qui sont allés se battre contre les militaires canadiens et les valeurs de la démocratie libérale canadienne. Qui sait, ils sont peut-être allés combattre pour un jour détruire le système politique canadien, parce qu'ils en ont une vision différente. Chaque fois, les libéraux nous disent qu'il faut les prendre par la main parce qu'ils font pitié et qu'ils ont été radicalisés.
Aujourd'hui, nous déposons notre motion pour faire face à la réalité suivante. Certains d'entre eux ont effectivement été radicalisés. Cependant, je suis prêt à dire que la lourde majorité des Canadiens qui sont partis outre-mer pour rejoindre les rangs de Daech l'ont certainement fait pour des raisons qui leur sont propres, rationnelles, objectives et motivées par des raisons politiques qu'ils croient bonnes. Ils ne l'ont pas tous fait parce qu'ils ont été aliénés ou radicalisés. Ils veulent peut-être mettre fin à la démocratie libérale ainsi qu'à l'égalité entre les hommes et les femmes dans le monde. Ils ont plusieurs raisons d'avoir rejoint les rangs du groupe armé État islamique. Ils ne sont pas nécessairement fous ou aliénés.
Comment va-t-on répondre à ces Canadiens qui reviennent sur le territoire canadien? Je ne parle pas de ceux qui sont partis à cause de la maladie mentale ou de l'aliénation, mais bien de ceux qui sont partis sur le territoire où avaient lieu les offensives et les contre-offensives du groupe armé État islamique de leur plein gré pour combattre les militaires canadiens et d'autres militaires alliés à notre cher pays.
Aujourd'hui, les libéraux ont dit que les conservateurs inventent des chiffres. La journaliste Manon Cornellier, responsable de la Tribune de la presse parlementaire, est très reconnue dans le milieu journalistique. Elle est très professionnelle. Dans son article publié dans Le Devoir ce matin, elle écrit:
Ils seraient environ 190 Canadiens actifs à l’étranger, surtout en Syrie et en Irak, dans des groupes terroristes, comme le groupe armé État islamique, Daech. Une soixantaine seraient déjà revenus au pays, mais, jusqu’ici, seulement quatre ont fait l’objet d’accusations.
Une journaliste professionnelle, employée d'un journal de grande qualité qui existe depuis plusieurs décennies au Canada, doit vérifier les sources et les informations avant de publier ses articles. Mme Cornellier indique exactement les mêmes chiffres que l'opposition officielle. Ce sont des chiffres concrets: 190 Canadiens sont partis; 60 de ces terroristes, qui ont délibérément commis des crimes terribles comme violer des femmes et tuer des enfants, sont revenus au pays; quatre ont fait l'objet d'accusations; et on ne sait pas où sont les 56 autres.
Ce que nous demandons est tout à fait raisonnable et normal dans un État de droit comme le Canada. On demande au gouvernement de mettre de l'avant un plan d'ici 45 jours pour s'assurer de savoir ce que font et où sont les 56 terroristes, connus ou non, et les autres qui vont peut-être venir, et qu'on s'assure de porter, dans les jours, les semaines ou les mois à venir, à des accusations formelles eu égard à ce qu'ils ont fait. Nombreux sont ceux qui l'ont fait pour des raisons objectives, politiques. C'est une sorte de campagne ou une croisade qu'ils ont menée et qui va à l'encontre du droit canadien et du droit international.
Je vais continuer à citer le texte de Mme Cornellier dans Le Devoir:
Daech répond à la définition d'organisation terroriste et ses actions, à celles de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. En vertu du droit international que le Canada a contribué à élaborer, un pays peut poursuivre quiconque a commis ces crimes et se trouve sur son territoire, peu importe où les actes ont été perpétrés. Le Canada a d'ailleurs adopté en 2000 sa propre loi de compétence universelle à la suite de sa ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il s'en est prévalu en 2005 pour poursuivre pour crime contre l'humanité Désiré Munyaneza, un complice du génocide rwandais.
On n'est pas dans une première, ici. Également, elle écrit:
Selon le directeur de l'Institut montréalais d'études sur le génocide et les droits de la personne, Kyle Matthews, le Canada ne doit pas permettre le retour ou le rapatriement de ces combattants canadiens sans les tenir responsables des atrocités dont ils se sont rendus complices. Ils doivent être traduits en justice pour décourager la perpétuation de ces crimes.
En d'autres mots, Mme Cornellier et le directeur de l'Institut montréalais d'études sur le génocide disent exactement ce que nous — la loyale opposition de Sa Majesté — disons, soit que ces crimes doivent être punis devant la justice.
Également, voici une dernière citation tirée de son article que je trouve excellent et qui met en lumière ce que nous disons aujourd'hui:
Les enquêtes et la récolte de preuves admissibles sont difficiles, soit, mais il revient au gouvernement de chercher une solution. Il doit envisager une procédure judiciaire qui permet à la fois de respecter les principes de justice fondamentale et de surmonter les contraintes uniques qui freinent la sanction de ces crimes. Sans cela, justice ne sera pas rendue, et l'impunité restera la règle face à la barbarie.
Je rappelle que je cite la journaliste Manon Cornellier, responsable de la Tribune de la presse parlementaire canadienne, ici, à Ottawa et d'un journal plus tôt à gauche, Le Devoir.
Ce ne sont pas des conservateurs qui parlent, c'est une journaliste professionnelle qui a donné les mêmes chiffres que nous et qui, comme nous, dit que ce sont des gestes barbares qui ont été perpétués par ces 190 Canadiens qui ont participé aux offensives en territoire syrien ou irakien avec le groupe État islamique. Elle dit qu'il est absolument fondamental et nécessaire que ceux-ci, lorsqu'ils sont rapatriés, soient traduits en justice pour des questions de principes fondamentaux et de l'histoire du Canada.
J'aimerais également lire la motion que nous présentons aujourd'hui et que les libéraux ont accepté d'appuyer. Cela dit, comme dans nombreux cas où ils ont décidé d'appuyer notre motion, aucune action concrète de leur part ne s'en est suivie:
Que la Chambre appuie les sentiments exprimés par Nadia Murad, lauréate du prix Nobel de la paix, qui, dans son livre intitulé Pour que je sois la dernière, déclare: « Je rêve qu’un jour tous les militants seront traduits en justice. Pas seulement les dirigeants, comme Abou Bakr al-Baghdadi, mais aussi tous les gardes et les propriétaires d’esclaves, tous les hommes qui ont appuyé sur une détente et ceux qui ont poussé mes frères dans leur charnier, tous les combattants qui ont essayé de mettre dans la tête de jeunes garçons qu’ils haïssaient leur mère parce qu’elle était yézidie, tous les Iraquiens qui ont accueilli les terroristes dans leur ville et qui les ont aidés en se disant qu’ils allaient enfin pouvoir se débarrasser des mécréants. Ils devraient tous être jugés devant le monde entier, comme les dirigeants nazis après la Deuxième Guerre mondiale, et ils ne devraient pas avoir la possibilité de se cacher. »; et exhorte le gouvernement à : a) éviter de répéter les erreurs du passé en payant des terroristes avec l’argent des contribuables ou en tentant de réintégrer dans la société canadienne des terroristes de retour au pays; b) déposer dans les 45 jours suivant l’adoption de la présente motion un plan visant à traduire immédiatement en justice quiconque a combattu au sein du groupe terroriste EIIL ou participé à une quelconque activité terroriste, y compris les personnes qui se trouvent au Canada ou qui ont la citoyenneté canadienne.
Voilà la motion que nous avons déposée ce matin et sur laquelle nous voterons très bientôt.
Dès la semaine prochaine, si possible, nous voulons que le gouvernement libéral se concentre sur les poursuites judiciaires contre les auteurs de génocides ou d'actes terroristes et qu'il s'assure que les tribunaux ont accès aux preuves recueillies sur certains terroristes soupçonnés.
Nous voulons qu'il cherche à protéger les Canadiens contre les gens soupçonnés d'avoir commis des actes terroristes et qu'il prenne des mesures spéciales comme celles que notre précédent gouvernement conservateur avait mises en place dans la foulée des attentats terroristes qui ont eu lieu ici même, sur la Colline du Parlement, ainsi qu'à Saint-Jean-sur-Richelieu, qui est tout près. Nous avions mis en place le projet de loi C-51.
Nous voulons que les libéraux encouragent l'utilisation accrue d'outils afin d'imposer des conditions aux gens soupçonnés d'activités terroristes ou de génocide, comme on le faisait dans le projet de loi C-51.
Nous voulons que les libéraux mettent en place des processus visant à traduire les auteurs d'atrocités en justice, puisque le processus actuel est trop lent, nuit aux victimes et les empêche de rentrer chez elles.
Enfin, nous voulons que les libéraux soutiennent des initiatives comme celles proposées par le premier ministre Doug Ford pour s'assurer que les terroristes qui reviennent au Canada ne peuvent pas profiter des généreux programmes sociaux du Canada dans le cadre de leur réintégration.
Dans ma circonscription, toutes les fins de semaine, que ce soit lors des soupers spaghetti ou quand je fais du porte-à-porte, à tous les événements où je vais à la rencontre de mes concitoyens, ceux-ci me demandent comment il est possible que le gouvernement libéral ait toujours comme objectif premier d'aider des gens qui ne sont pas encore citoyens ou d'aider des Canadiens qui ont combattu nos propres miliaires.
Au Canada, on devrait d'abord et avant tout aider les Canadiens qui peinent à joindre les deux bouts et à trouver un emploi, ainsi que ceux qui ont de la difficulté à entrer sur le marché du travail pour des raisons d'incapacité ou autres.
Nous espérons qu'au-delà de leur appui à l'égard de notre motion, les libéraux vont mettre en place un plan réel qui s'attaque au problème du retour des combattants islamiques, ces Canadiens qui ont pris la décision bien triste de combattre nos valeurs et notre pays.