propose:
Que la Chambre: a) réaffirme son engagement de faciliter la collaboration en vue de l’établissement d’un système de don et de greffe d’organes et de tissus qui assure aux Canadiens un accès aux soins efficace et en temps opportun, puisque chaque année, plus de 250 personnes meurent parmi les 4 500 qui sont en attente d’une greffe; b) exhorte le gouvernement à soutenir à l’échelle nationale les efforts des autorités provinciales et territoriales et des intervenants pour encourager le don d’organes et de tissus au Canada au moyen de campagnes d’information et de sensibilisation du public, d’une communication suivie et de l’échange de renseignements, notamment sur les bonnes pratiques.
— Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de me lever aujourd'hui, à la Chambre pour parler de la motion M-189 sur le don d'organes. Cette motion pour l'établissement d'un système de dons et de greffes d'organes et de tissus au Canada est avant tout une question d'empathie, d'altruisme, de générosité humaine, ainsi que de respect à la fois pour la vie et pour la mort.
Le don d'organes est l'un des plus grand geste de solidarité humaine qui puisse exister. Il unit le côté irrémédiable de la mort et la beauté de la vie en permettant un nouveau départ pour celles et ceux qui sont en attente d'un don. Il s'agit d'une question humaine très sensible qu'il faut aborder avec respect. Le don d'organes contrecarre certaines croyances et confronte certaines idées. Qu'on me permette d'en parler plus longuement.
Le don d'organes présente un large champ de réalisations et de possibilités. Que cela soit de manière aussi impressionnante que retarder la mort ou redonner la vue, réparer des tissus ou même, comme on l'a vu en première canadienne récemment, effectuer une transplantation faciale comme ce fut le cas à Montréal, ces prouesses médicales n'ont qu'un objectif: redonner une vie qui sera la plus normale possible à des gens qui ont été blessés pour la vie et privés de ce qui est le plus important, soit la santé.
En parlant de première, j'ai eu l'honneur de côtoyer la première personne au Québec à avoir subi une greffe coeur-poumons, il s'agit de Mme Diane Hébert. Elle était une citoyenne de la ville de Lorraine, une ville que j'habite depuis 25 ans et dont j'ai été conseiller municipal et maire.
L'histoire de Mme Hébert a été connue partout au Québec. Cette dame a surmonté beaucoup d'épreuves et elle a été une exception à la règle. Grâce à cette transplantation, elle a bénéficié d'une seconde vie qui a duré plus de 25 ans, alors qu'initialement on estimait cela à deux ans.
À la suite de son rétablissement, Mme Hébert s'est donné comme mission de sensibiliser la population au don d'organes. En 1987, à la suite de ses démarches, la carte d'assurance-maladie est devenue la carte officielle du don d'organes au Québec. Mme Hébert est une source d'inspiration et une figure de proue de mon engagement à promouvoir le don d'organes.
Chaque année au Canada, 4 500 personnes sont en attente d'un don d'organes. Ces personnes vivent avec l'espoir de retrouver la santé, de renouer avec la vie active, de contribuer, de participer à des activités de tous les jours, ou tout simplement de pouvoir apprécier les petits bonheurs de la vie comme tout le monde, et ce, bien avant que la maladie ne vienne chambouler leur quotidien et celui de leurs proches.
Malheureusement, encore aujourd'hui, trop de personnes ne trouveront pas de donneur compatible. Parmi les 4 500 Canadiennes et Canadiens malades qui attendent un don d'organes, 250 personnes meurent chaque année faute d'avoir trouvé un donneur à temps.
C'est pour ces gens-là que la motion M-189 prend toute sa valeur, ainsi que pour toutes celles et tous ceux qui pourront avoir besoin d'un don d'organes. Ces personnes auront plus de chances de survie avec un système amélioré tel que demandé par cette motion, puisque les progrès ne sont pas assez rapides pour aider les milliers de Canadiens et de Canadiennes en attente d'une transplantation qui améliorera leur santé ou qui leur sauvera carrément la vie.
Bien que le nombre de donneurs ait nettement augmenté au cours des 10 dernières années, il reste encore du travail à faire pour réaliser le plein potentiel du Canada en matière de don et de greffe d'organes. En effet, malgré le nombre croissant de dons effectués au Canada, le taux de dons de donneurs décédés au Canada demeure deux fois moins élevé que dans certains des pays les plus performants, comme l'Espagne, le Royaume-Uni et les États-Unis. De plus, le taux de dons d'organes de la part de personnes vivantes par million d'habitants au Canada est demeuré stagnant ou a légèrement diminué entre 2006 et 2015, passant de 17 par million d'habitants en 2006 à 15,7 en 2015.
Notre système actuel ne suffit pas à répondre aux besoins des patients existants ou éventuels. Par exemple, 75 % des personnes figurant sur la liste d'attente attendent un rein, et le délai d'attente médian pour cet organe est de 4 ans, allant de 5,7 ans au Manitoba à 3 ans en Nouvelle-Écosse.
Cela m'amène à parler de la grande disparité entre les provinces en ce qui concerne les taux de donneurs. Les chiffres s'échelonnent ainsi pour l'année 2015: entre 250 et 300 donneurs sont décédés en Ontario, environ 150 sont décédés au Québec, 100 sont décédés en Colombie-Britannique et moins de 50 sont décédés au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, au Manitoba, en Saskatchewan, et à Terre-Neuve-et-Labrador. Ces disparités créent un système de don d'organes inéquitable pour les Canadiens.
Une autre donnée importante à souligner en ce qui a trait aux limites de notre système actuel de don d'organes concerne le consentement. Le pourcentage de Canadiens inscrits sur un registre de don d'organes est de 20 % seulement. Pourtant, 90 % d'entre eux se disent en faveur du don d'organes. De plus, dans 10 % à 15 % des cas, le consentement est retiré par la famille du futur donneur au moment du décès, car elle n'avait pas été informée de son intention.
Le Comité permanent de la santé, dont je suis membre, a déposé mardi un rapport sur le don d'organes au Canada adopté à l'unanimité par tous les membres du Comité. L'étude du Comité souligne l'importance pour notre pays de se doter d'un système de don et de greffe d'organes plus solide afin d'améliorer la qualité de vie de bon nombre de Canadiens.
À la lumière des témoignages des experts, des chercheurs, des organismes provinciaux et des organismes du domaine de la santé, nous avons pu constater qu'il reste encore du travail à faire pour réaliser le plein potentiel du Canada en matière de don et de greffe d'organes. Nous devons faire mieux pour répondre aux besoins actuels et futurs des patients en matière de don d'organes, d'autant plus que ceux-ci varient considérablement d'un bout à l'autre du pays.
La motion M-189 demande donc au gouvernement de réaffirmer son engagement à faciliter la collaboration en vue de l'établissement d'un système de don et de greffe d'organes qui assurera aux Canadiennes et aux Canadiens un accès efficace à des soins en temps opportun. L'écart considérable d'une province à l'autre en ce qui concerne le don d'organes est attribuable à l'inégalité de leurs capacités et de leurs ressources leur permettant de refléter les pratiques exemplaires en la matière.
Les provinces comme l'Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec sont des pionniers au Canada, tandis que dans d'autres provinces, les programmes et services de don d'organes après le décès sont quasi inexistants. Les facteurs contribuant à des taux supérieurs dans certaines provinces sont les suivants: la référence obligatoire d'un donneur décédé; la présence, en milieu hospitalier, de spécialistes du don d'organes qui doivent rendre compte de l'efficacité et de la qualité du système; les programmes de diagnostic de décès neurologique et de décès d'origine cardiovasculaire optimisés; et l'application systématique de pratiques perfectionnées.
Ces différences entre les programmes et les services offerts dans les provinces entraînent un accès inéquitable aux soins et donc des occasions manquées de don d'organes lorsque l'occasion se présente, faute de donneurs potentiels. C'est pourquoi cette motion demande au gouvernement canadien de soutenir, à l'échelle nationale, les efforts des autorités provinciales et territoriales ainsi que des intervenants pour encourager le don d'organes et de tissus au Canada. Il est regrettable et tout à fait inacceptable que la probabilité de recevoir un don d'organe dépende du lieu de résidence du patient au Canada.
La motion M-189 aborde aussi l'amélioration de la communication soutenue et de l'échange de renseignements entre provinces, notamment sur les meilleures pratiques. Même si les dons et les greffes d'organes à l'hôpital relèvent des provinces et des territoires, le gouvernement fédéral peut et doit jouer un rôle en favorisant la mise en commun et la mise en oeuvre des pratiques exemplaires ou des composantes essentielles des systèmes de don d'organes à haut rendement qui existent dans certaines provinces pour que, dans un avenir rapproché, ce ne soit pas seulement au Québec qu'on réalise des greffes du visage, mais bien partout au Canada.
La motion M-189 demande également au gouvernement d'encourager le don d'organes au moyen de campagnes d'information et de sensibilisation du public.
Comme je l'ai mentionné auparavant, une des limites de notre système de don d'organes est le consentement. Celui-ci passe par l'éducation, la prise de conscience et la connaissance de la bonne information. C'est crucial pour les donneurs de comprendre l'importance de leur geste et de leur engagement. Il ne suffit pas seulement de signer l'endos de son permis de conduire ou de sa carte d'assurance-maladie pour le faire. Il faut aussi en parler à ses proches. Il faut sensibiliser les donneurs et leurs proches. Nous avons tous cette formidable capacité de faire un don d'organes.
Certains mythes entourent les dons et contribuent à la statistique selon laquelle seulement 20 % des Canadiens ont manifesté concrètement leur volonté d'être un donneur. Certains estiment que leur âge pourrait les empêcher de devenir un donneur d'organes, ou encore que donner des organes aurait des répercussions sur les services hospitaliers qui leur sont offerts.
C'est pourquoi cette motion vise à transmettre de l'information de qualité entre tous les principaux acteurs, et ce, tout en accordant une place importante à la sensibilisation du grand public, une pierre angulaire du bon fonctionnement du don d'organes.
Voici un exemple qui démontre combien les Canadiens sont généreux: lors des événements tragiques qui frappèrent l'équipe de hockey de Humboldt, en Saskatchewan, une des victimes était inscrite à un registre de don d'organes, ce qui a permis de sauver six vies. Par la suite, une augmentation soudaine et très importante de presque 100 000 consentements de dons a été enregistrée au Canada.
La motion M-189 réclame des campagnes d'information pour favoriser les conversations publiques, des échanges qui déboucheront sur des discussions avec nos proches, en famille et entre amis. C'est un enjeu de société qui nous concerne toutes et tous. Un réel effort doit être fait pour maintenir une sensibilisation au don d'organes pour que celui-ci devienne un réflexe naturel, y compris lorsqu'il s'agit de notre propre mort.
Malgré les efforts déployés actuellement, ce sont environ 250 personnes qui meurent chaque année au Canada parmi les 4 500 personnes qui souffrent et qui attendent une greffe. Je crois sincèrement que nous devons faire mieux pour la vie de ceux et celles dont le seul espoir est un don d'organes.
Je tiens à remercier toutes les personnes, les organismes et les intervenants avec lesquels j'ai discuté concernant le don d'organes et cette motion. Je tiens particulièrement à mentionner que la motion M-189 transcende toute partisanerie politique. D'ailleurs, des appuis de tous les coins de la Chambre m'ont été confirmés, et je désire remercier d'avance ces honorables députés.
Maintenant, la dernière chose que je demande à mes collègues, mis à part leur appui à la motion M-189, est d'aller s'inscrire comme donneur, si ce n'est déjà fait, et d'en parler avec les membres de leur famille pour qu'ils connaissent leur intention. Si par bonheur une autre personne de leur entourage voulait s'inscrire, nous porterions encore davantage notre message aux quatre coins de notre pays.
Je remercie à l'avance mes collègues de leur intérêt et de la qualité des échanges que nous aurons.