Je vous remercie, monsieur le président.
Bonjour, chers collègues.
Je voudrais spécifier d'emblée que mon intervention contiendra une question s'adressant aux fonctionnaires. Une autre question était destinée à la représentante du gouvernement, mais je crois qu'elle va partir. S'il n'y a pas de secrétaire parlementaire, un élu libéral pourra peut-être y répondre.
D'abord, je vais donner un peu de contexte aux députés de l'extérieur du Québec. Grâce à des visionnaires comme la regrettée Lise Payette, qui avait été ministre lorsque René Lévesque était premier ministre, le Québec a le meilleur régime de protection des consommateurs en Amérique du Nord. La loi y est plus précise qu'ailleurs. En raison de notre tradition civiliste, nous avons l'habitude de tout prescrire et de tout codifier. Surtout, les recours sont simples et gratuits pour les consommateurs. Lorsque des causes importantes doivent être traitées par les tribunaux, l'Office de la protection du consommateur les prend à sa charge au nom des consommateurs lésés.
Les banques n'ont jamais aimé cette différence québécoise. Elle ont plaidé l'exclusivité fédérale pour faire valoir qu'elles étaient au-dessus de nos lois. Elles ont plaidé la prépondérance fédérale afin de balayer la loi québécoise. Or, après avoir perdu leur cause devant la Cour suprême, en 2014, elles sont venues se plaindre ici. Cela a eu pour résultat le projet de loi C-29, il y a deux ans. Le gouvernement y affirmait la prépondérance fédérale en matière de protection des consommateurs pour les banques, mais n'imposait pas à ces dernières de vraies obligations. Le tollé a été énorme au Québec. Le gouvernement a reculé, ce qui nous amène aujourd'hui au projet de loi C-86, qui est beaucoup plus complet que celui qui a été présenté il y a deux ans.
Contrairement au projet de loi C-29 d'il y a deux ans, le projet de loi C-86 n'affirme pas la prépondérance fédérale. L'intention du gouvernement n'est visiblement pas d'ignorer le Code civil du Québec. Plus tard, j'aimerais poser une question, tant aux fonctionnaires qu'à la secrétaire parlementaire, sur l'intention de la loi et sur ce qui y est écrit. L'intention n'est donc pas de faire fi du Code civil du Québec, de la Loi sur la protection du consommateur, qui en découle, ou de l'Office de la protection du consommateur, qui applique la loi et défend les gens ordinaires.
Le projet de loi C-86 est en effet mieux conçu que le projet de loi C-29. S'il impose des obligations réelles aux banques, il comporte toutefois une grande lacune pour ce qui est des recours. Le seul recours gratuit, l'ombudsman des banques, n'est ni vraiment neutre ni décisionnel. Si la banque ne suit pas les recommandations de son ombudsman, de quel autre recours le client dispose-t-il? Il peut s'adresser à la Cour fédérale, seul et à ses frais. Si la cause se rend jusqu'à la Cour suprême, il peut en coûter jusqu'à 1 million de dollars. Personne ne se rendra jusque là, seul face à l'armée d'avocats de la banque, pour contester 50 $ de frais cachés. Des recours coûteux comme ceux-là sont très mal adaptés à un domaine comme la protection du consommateur, où il s'agit souvent de petites sommes.
Si la loi précise que la loi québécoise continue de s'appliquer, comme le suggère l'amendement, le consommateur ne perdra rien. Il pourra, au besoin, continuer de porter plainte à l'Office si la banque ne respecte pas nos lois. L'Office pourra prendre la cause à sa charge s'il faut la porter devant les tribunaux.
À cet égard, le projet de loi C-86 crée une incertitude. Comme on le sait, les banques vont continuer à faire valoir qu'elles sont au-dessus des lois québécoises. C'est ce qu'elles ont toujours fait. Comme la nouvelle Loi sur les banques contiendra dorénavant toute une section sur la protection des consommateurs, la Cour suprême pourrait bien leur donner raison. Les Québécois perdraient alors le recours gratuit dont ils bénéficient aujourd'hui et devraient se rabattre sur le recours très coûteux que leur offre le projet de loi C-86. C'est un recul. Je suis certain que ce n'est pas l'intention du gouvernement. J'aimerais donc demander à sa représentante quelle est l'intention du gouvernement dans ce projet de loi.
L'effet probable du projet de loi C-86 tel qu'il est rédigé est problématique. Les fonctionnaires nous avaient timidement confirmé un point lors de la séance d'information technique il y a trois semaines. J'aimerais leur demander si le projet de loi C-86 va mettre de côté la Loi sur la protection du consommateur, en ce qui concerne les banques, ou s'il va créer un flou qui va entraîner une poursuite dont l'objet serait réglé devant la Cour suprême?
C'est pourquoi nous soumettons notre amendement. Celui-ci précise que la création de ces nouvelles obligations fédérales n'a pas comme effet de mettre de côté les lois des provinces ou n'interdit pas les recours visant à les faire respecter, mais nous assure plutôt que les Québécois ne perdront pas au change. Je voudrais vraiment qu'on précise si, dans le cas des banques fédérales, le projet de loi C-86 met de côté la Loi sur la protection du consommateur.
Je vous remercie, monsieur le président.