Monsieur le Président, je remercie la secrétaire parlementaire du ministre des Finances de son discours. Je ne suis pas certain que les résidants de sa circonscription, Moncton—Riverview—Dieppe, sont contents du budget. En effet, ce budget, à l'opposé de ce qu'elle prétend, n'accorde pas l'attention aux Canadiens ordinaires qui font vivre ce pays et qui travaillent fort tous les jours. Ce budget aide les groupes d'intérêts qui forment la base électorale du Parti libéral du Canada.
J'ai trouvé ironique que la secrétaire parlementaire remercie le Comité sénatorial permanent des finances nationales pour son travail minutieux lors d'une analyse de la loi qui met en oeuvre le budget de 2017. Il est fort probable que l'autre Chambre demande que les dispositions relatives à la Banque de l'infrastructure soient retirées de ce projet de loi omnibus. Nous avons de nombreuses préoccupations et des questions par rapport à la Banque de l'infrastructure, questions qui restent sans réponse pendant la période des questions orales ainsi que dans les divers comités de la Chambre des communes.
La Banque de l'infrastructure est une machination pour protéger les investissements des investisseurs privés au détriment des contribuables du Canada. C'est paradoxal quand on pense que l'une des fiertés de l'entreprise privée est de prendre des risques. Ce sont les entrepreneurs qui ont les reins assez solides pour prendre des risques, ils ont l'expertise, les idées, l'esprit innovateur et le courage nécessaires pour faire les choses de cette manière. Les Canadiens paient déjà des impôts pour faire fonctionner l'État canadien, et ce n'est pas leur rôle de protéger les investissements du secteur privé. C'est l'une des questions qui nous préoccupent.
Par ailleurs, le gouvernement a retiré 15 milliards de dollars des projets d'infrastructure communautaires pour financer cette nouvelle banque, mesure que déplore mon collègue de Louis-Saint-Laurent. Il spécifie que les communautés des régions du Québec ne bénéficieront pas du soutien de la Banque de l'infrastructure, parce qu'elle ne s'occupe pas des projets de moins de 100 millions de dollars. Ce n'est pas à Rimouski ni à Baie-Comeau que l'on trouvera un aréna de 100 millions de dollars.
En réalité, cette banque ne servira que les intérêts des grandes Villes et des Villes judicieusement sélectionnées selon les votes obtenus en 2015. Voilà, c'était mon introduction.
La secrétaire parlementaire du ministre des Finances a osé dire que c'était un budget pour les gens, pour le peuple, alors que c'est tout à fait le contraire. Le projet de loi C-44, tout comme le budget de 2016, cible des groupes d'intérêts libéraux, des groupes d'intérêt « postnational » qui ont des visées concrètes et qui passent par la Cour suprême pour faire valoir leurs propositions politiques au lieu de passer par la Chambre. Cette fois-ci, ils ont certainement l'oreille et l'écoute du gouvernement, et leurs revendications politiques se font bien entendre, puisque le budget ne répond qu'à leurs besoins.
Un autre élément me met extrêmement mal à l'aise. Le titre du budget est « Bâtir une classe moyenne forte ». Or il aurait dû être « Bâtir un pays fort pour tous ».
Bien sûr, on veut une classe moyenne forte, je le comprends, mais je me mets à la place de millions de Canadiens qui vont considérer leur salaire et se demander s'ils font partie de la classe moyenne. C'est un secret de Polichinelle, en politique canadienne, que le gouvernement libéral mentionne toujours la classe moyenne parce que la plupart des gens veulent pouvoir se sentir inclus dans la classe moyenne, même s'ils n'en font pas nécessairement partie selon leur revenu. C'est une astuce, un concept fourre-tout, mais les gens entendent inconsciemment que les libéraux travaillent pour les membres d'une seule classe et pas pour tous les Canadiens.
Le projet de loi C-44, Loi d'exécution du budget de 2017, ne correspond vraiment pas, selon moi, aux besoins structurels du Canada, tant actuels qu'ultérieurs. C'est un projet de loi qui vise à modifier certaines mesures et à envoyer de l'argent ici et là. Il n'y a pas vraiment de vision supérieure en ce qui concerne la direction que prend le pays. C'est vraiment un plan budgétaire idéologique et électoraliste. Ce sont des déficits et des dépense qui sont vraiment ciblés pour conforter plusieurs groupes d'intérêt. Je vais en nommer quelques uns. En passant, ces groupes d'intérêt ont tous les droits au monde d'exister, mais ce ne sont pas eux qui devraient constituer la priorité d'un budget. Cela devrait être tous les Canadiens en général.
Dans ce budget, on cible donc les ONG, les groupes d'intérêt médiatiques, divers groupes de la société civile, les élites universitaires — les chaires de recherche ont augmenté. Toutes les universités reçoivent des montants incroyables. C'est bien pour la recherche, mais encore une fois, ce n'est pas cela qui aide les Canadiens moyens.
Ensuite, il y a les élites urbaines et financières, les environnementalistes, les « postnationalistes » qui font semblant qu'au Canada il n'y a pas de culture ni de fond commun, que les Canadiens français n'existent pas et qu'il s'agit d'un groupe parmi tant d'autres.
Puis, il y a les groupes de liberté civile. Les groupes de litigants, ceux qui depuis 1982 vont à la Cour suprême pour obtenir des droits préférentiels, pour contourner la Chambre, pour obtenir plus rapidement des décisions qui changent le cours de la politique canadienne en leur faveur. Il y a les altermondialistes, les ingénieurs sociaux qui pensent qu'en changeant certaines politiques sociales on va pouvoir améliorer certaines choses. Ils le font d'une manière strictement idéologique sans vraiment s'attarder aux conséquences potentielles de leurs actions qui sont basées sur une vision du monde plutôt que sur des faits rationnels et surtout sur la volonté d'aider tous les Canadiens.
L'essentiel de mon propos est que le projet de loi C-44 ne répond pas aux défis continentaux du Canada, aux défis nord-américains qui sont à la fois économiques, militaires et sociaux. Il ne répond pas non plus aux défis internationaux économiques, militaires, sociaux et même environnementaux.
Depuis la fin des années 1990, nous sommes dans un contexte mondial de forte compétitivité. Plus que jamais, l'Occident, dont le Canada, est en perte de vitesse. Nous sommes devant l'émergence de nouvelles puissances mondiales, les fameux pays BRICS — le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud. Il y a aussi le Nigeria, le pays le plus peuplé d'Afrique, dont l'économie est de plus en plus importante en Afrique et dans le monde.
Avec leur croissance économique, leur importance miliaire grandissante et leur population qui est gigantesque — les pays que j'ai nommés représentent facilement la moitié de la population mondiale —, ces pays émergents veulent des ressources énergétiques. Malgré les discours qu'ils peuvent tenir à l'ONU, ils veulent des voitures, ils veulent consommer, ils veulent du pétrole, ils veulent se mouvoir, ils veulent un style de vie occidental. Depuis les 20 dernières années, nous avons vu, et c'est certainement louable, un transfert accru de la richesse du Nord vers le Sud. C'est sans doute une conséquence de la décolonisation des années 1950 et 1960. C'est normal et c'est bien.
Toutefois, cela nous prend un gouvernement comme le gouvernement conservateur précédent qui comprend la géopolitique internationale, qui comprend les importants défis économiques qui sont devant nous. La crise économique de 2007-2008 était sans contredit terrible et était peut-être l'annonce d'autres choses à venir plus tard.
Il y a un certain appauvrissement au Canada, peut-être pas tant au sein de la population, mais sur le plan des infrastructures. Par exemple, nos brise-glaces sont complètement désuets, nos routes dans les Maritimes ont besoin de réfection, nos ports ainsi que nos aéroports devraient être mis à niveau, notamment Beauport 2020 à Québec qui a vraiment besoin d'investissements.
J'ai parfois l'impression que le Canada ne comprend pas qu'il perd de la vitesse en ce qui a trait à son rôle international de force motrice économique et diplomatique.
Il y a également le contexte nord-américain. Les États-Unis sont aussi victimes de l'émergence des pays du BRICS. C'est notamment pourquoi le président actuel a été élu. Les Américains sont extrêmement préoccupés, car 20 millions de personnes sont sans emploi aux États-Unis. Ils tombent donc à nouveau dans un contexte isolationniste. Les médias en parlent comme si c'était un nouveau phénomène, alors qu'au contraire, aux États-Unis, l'isolationnisme revient environ tous les 50 ans.
Dans ce contexte isolationniste, il y aura des baisses de taxes importantes aux États-Unis pour les entreprises et les Américains. C'est un contexte politique réactionnaire, que ce soit sur le plan économique, social, militaire ou diplomatique. Ce n'est pas à nous de juger si c'est bon ou pas. Les Américains vont développer leur isolationnisme économique.
Je constate que le gouvernement libéral, dans son projet de loi C-44 de mise en oeuvre du budget de 2017, ne semble pas expliquer comment nous allons composer avec cette nouvelle réalité nord-américaine ni comment nous allons nous assurer que les entreprises canadiennes seront compétitives devant un isolationnisme américain et une frontière moins poreuse qui permet moins d'échanges. Les échanges entre le Canada et les États-Unis sont d'une valeur de 2 milliards de dollars par jour, alors elles sont tout de même importantes. Ces réactions isolationnistes américaines, qui dureront au moins trois ans et quelques mois, auront des effets très importants sur le Canada, mais on n'entend jamais les libéraux nous en parler.
Nous voyons également un contexte canadien se façonner devant nous. L'état économique de la fédération se détériore depuis deux ans. Par exemple, on constate avec stupéfaction que les libéraux ne parlent jamais de la perte de croissance économique importante en Alberta et des pertes d'emplois importantes pour les Albertains. Ils ne parlent pas non plus des problèmes d'emploi dans les provinces de l'Atlantique. Ils ne parlent pas de l'importance de Montréal et de Québec. Bref, on ne les entend pas vraiment parler du rôle de chaque province dans l'unité économique de notre pays.
Par exemple, nous leur disons depuis plusieurs mois qu'il est incompréhensible qu'au Canada, on ne puisse pas faire de libre-échange entre les provinces, alors que c'est bel et bien inscrit dans la Constitution. Pour cette raison, nous leur avons demandé de faire un renvoi à la Cour suprême afin que ses juges interprètent la Constitution telle qu'elle est écrite, et ce, de façon définitive, et nous renvoient un jugement qui stipule noir sur blanc que le libre-échange entre les provinces devrait avoir cours. Cela aiderait certainement nos entreprises partout au pays.
Il y a vraiment une nécessité de compléter des projets d'envergure pour les 100 prochaines années. Encore une fois, ce budget nous parle de bâtir une classe moyenne forte, mais il ne prévoit aucun projet d'envergure pour s'assurer que, dans 50 ans, il y aura une création de richesse encore plus grande. Tous les groupes d'intérêt que les libéraux favorisent dans leur plateforme et dans leur budget s'opposent systématiquement à tout projet d'envergure à long terme.
J'aime toujours prendre l'exemple du premier ministre du Québec M. Bourassa, qui, dans les années 1970, a mis en place des projets hydroélectriques gigantesques, des barrages comme on n'en avait jamais vus dans l'histoire de l'humanité. Récemment, un barrage en Chine a battu le record, mais jusqu'à tout récemment, nous avions les plus grands barrages au monde au Québec. Ainsi, aujourd'hui, au Canada et au Québec, nous sommes ceux qui payons le moins cher pour l'électricité. C'est bien l'une des seules choses pour lesquelles nous payons le moins cher, mais grâce à cela, nous avons au Québec un État-providence en santé et des services somme toute adéquats.
Toutefois, qu'est-ce qu'il y a au Canada, en ce moment, qui garantit que, dans 50 ans — j'y serai encore si j'ai de la chance —, nos enfants et nos petits-enfants profiteront d'une richesse grandissante? Il n'y a rien dans ce projet de loi qui nous le garantisse, car il ne s'attarde qu'à l'instant présent et ne vise qu'à conforter des groupes électoralistes qui forment la base du vote libéral, qui s'effrite lentement, mais sûrement.
Selon mon analyse et celle de mes collègues conservateurs, le projet de loi C-44 démontre que les libéraux travaillent pour l'élite financière de la Banque de l'infrastructure du Canada et les élites sociales qui veulent apporter des changements politiques d'envergure, et ce, pas pour créer des emplois, mais pour qu'ils siéent à leur vision du monde. Toutefois, il n'y a rien pour les travailleurs. C'est la raison pour laquelle l'opposition conservatrice a l'obligation morale et politique d'être la voix des contribuables à la Chambre.
Comme je l'ai dit à la Chambre hier, il serait peut-être plus intéressant de parler des devoirs des citoyens, des Forces armées canadiennes et des façons dont on peut servir notre patrie. Toutefois, au contraire, nous sommes obligés de parler de l'importance de diminuer les taxes et de créer des emplois, car sous ce gouvernement, ces deux choses sont en danger.
Les taxes ne cessent d'augmenter. Cette année seulement, le fardeau fiscal des Canadiens augmente de près de 5 milliards de dollars, que ce soit pour le transport en commun, pour le covoiturage, pour la bière et le vin, soit la taxe du vendredi et du samedi soir, pour la taxe sur les médicaments, pour la garde d'enfants, pour les propriétaires de petites entreprises, pour les entreprises pétrolières et gazières, qui représentent des millions d'emplois au Canada, ou pour la taxe sur le tourisme. Bref, il y a une panoplie de taxes et le gouvernement rompt ses promesses les unes après les autres.
Pire encore, le déficit est de 29 milliards de dollars, et ce n'est pas un déficit conjoncturel. Il n'est pas dû à la nécessité de relancer l'économie et de créer des emplois, comme c'était le cas lors de la crise économique de 2007-2008. Ces déficits sont engendrés dans le but d'avoir un budget qui répond aux besoins des divers groupes d'intérêt dont j'ai parlé au début de mon discours. De plus, ces déficits n'ont aucune date butoir.
C'est la première fois que le ministre des Finances du Canada est incapable de répondre à la simple question qu'on lui pose: quand prévoit-il mettre fin au déficit financier canadien? Est-ce en 2017, en 2018, en 2020, en 2030 ou en 2040? Il ne peut pas répondre. Il ne prend pas au sérieux l'économie plus qu'il ne le faut.
Bref, il est important de rappeler aux Canadiens qu'on assiste depuis deux ans à une explosion du déficit. Par ses paroles et ses actions, le gouvernement libéral crée des budgets afin de s'approprier l'argent des contribuables et de le redistribuer de façon à favoriser les intérêts de groupes particuliers et non ceux de tous les Canadiens. Le gouvernement veut diviser les Canadiens en disant qu'il travaille pour la classe moyenne et non pour les autres. Il n'a pas de vision globale pour le Canada, notamment en ce qui concerne les défis continentaux et internationaux. Par ailleurs, il ne cesse de présenter à la Chambre des projets de loi moribonds, comme celui qui vise à augmenter le salaire des ministres d'État.
On devrait s'attarder à des choses beaucoup plus importantes. Je suis certain que cela vous préoccupe également, monsieur le Président, mais soyez rassuré: jusqu'en 2019, nous allons défendre les contribuables canadiens tous les jours, jusqu'à minuit s'il le faut, et nous allons nous assurer que ce gouvernement n'aura pas plus qu'un mandat, afin que, dans 60 ans, ce pays ne soit pas le reflet de cette gestion terrible.