Monsieur le Président, l'économie et l'environnement vont de pair. Nous l'avons dit et redit, et c'est absolument vrai.
Jusqu'à maintenant, la course à la croissance économique à l'échelle planétaire s'est trop souvent faite au détriment de l'air que nous respirons, de l'eau que nous buvons et des terres où nous cultivons les aliments. De nos jours, nous comprenons mieux que si nous voulons bâtir un monde meilleur pour nos enfants et nos petits-enfants, il ne suffit pas d'être d'excellents gestionnaires de l'économie: il faut également protéger l'environnement.
Le gouvernement s'est doté d'un plan économique à long terme. Nous empruntons la voie des pays optimistes et ambitieux. Nous investissons dans la population, les collectivités et l'économie. Le plan montre déjà des signes de progrès. Le chômage est à la baisse et la création d'emplois suit un rythme qu'on n'a pas vu depuis plus de 10 ans. Cela dit, il reste beaucoup à faire.
Nous voulons stimuler l'économie de façon durable pour de nombreuses années à venir. Ainsi, la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour en faire partie doivent profiter des débouchés et de la croissance. Tout un chacun doit payer sa juste part. Il faut veiller à ce que la croissance économique que nous créons n'empoisonne pas l'air que nous respirons, l'eau que nous buvons et les aliments que nous consommons.
Heureusement, on n'a pas à choisir entre l'économie et l'environnement. En effet, on réalise de plus en plus combien l'idée selon laquelle la durabilité environnementale peut faire avancer l'économie recèle de potentiel.
C'est pourquoi, comme ministre des Finances, je suis bien déterminé à créer les conditions nécessaires pour garantir la prospérité du Canada dans une économie à faibles émissions de carbone. Le changement climatique n'est pas seulement un défi; c'est également une occasion qui se présente à nous. Toutefois, on doit agir de façon stratégique pour la saisir. Il faut notamment collaborer avec les provinces et les territoires au titre du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques afin de prendre des mesures coordonnées pour bâtir une économie à faibles émissions de carbone au Canada.
La pollution n'est pas gratuite. Dorénavant, le monde entier, ou presque, s'accorde pour dire que le moyen le plus efficace et le plus efficient d'aborder cette question est la tarification du carbone. Celle-ci envoie un signal important au marché, et elle favorise la réduction de la consommation de l'énergie grâce aux mesures de conservation et d'efficacité énergétique, tout en permettant l'utilisation du carburant de remplacement et des avancées technologiques. C'est pourquoi l'un des piliers centraux de notre cadre pancanadien est l'adoption, dans toutes les régions du Canada, un mécanisme de tarification du carbone d'ici 2018. La conception exacte doit être déterminée par chaque province, en fonction de ce qui fonctionne le mieux pour chacune d'entre elles.
Le gouvernement propose que les provinces et les territoires qui choisissent d'imposer une taxe sur le carbone fixent le prix à 10 $ la tonne dès 2018 et l'augmentent de 10 $ par année jusqu'à atteindre 50 $ la tonne en 2022. Les provinces et les territoires qui préféreront un système de plafonnement et d'échange, comme l'Ontario et le Québec, devront établir les plafonds annuels de manière à obtenir des réductions d'émissions au moins égales à ce qu'ils obtiendraient avec un prix direct sur le carbone.
Les systèmes de plafonnement et d'échange devront en outre prévoir un objectif de réduction des émissions d'ici 2030 qui sera au moins égal à l'objectif de réduction de 30 % du Canada.
Prenons l'exemple de la Colombie-Britannique, où la taxe sur le carbone est sans incidence sur les recettes. C'était la première province à faire un tel choix. C'était il y a neuf ans. Aujourd'hui, la Colombie-Britannique possède l'une des économies provinciales les plus fortes. La Terre n'a pas pour autant arrêté de tourner. La tarification du carbone n'a pas nui à l'industrie ni supprimé la concurrence. La Colombie-Britannique a imposé une taxe sur le carbone de façon transparente et prévisible et elle redonne toutes les recettes à la population et aux entreprises de la province.
La tarification constitue un incitatif concret à la réduction des émissions dans tous les secteurs de l'économie. D'ailleurs, entre 2008 et 2015, les contribuables de la Colombie-Britannique en ont tiré un profit net de 1,6 milliard de dollars. Voilà pourquoi j'ai si peu de patience pour les critiques concernant le plan que nous avons établi pour lutter contre les changements climatiques et être un chef de file de l'économie à faibles émissions de carbone. Je sais que nous entendrons un grand nombre d'arguments de ce genre aujourd'hui. Nous devons toutefois nous rappeler que ces critiques sont fondées sur une idéologie et non sur des faits. Les faits sont clairs et appuient notre approche fondée sur des données probantes.
En établissant la tarification du carbone, pour la première fois, nous obtenons les mesures incitatives fondées sur le marché et nécessaires pour encourager des activités plus écologiques et l'innovation à faible émission de carbone. Pour ceux qui souhaitent obtenir un exemple en temps réel de la vitalité du marché pour ce genre de choses, je n'ai qu'à mentionner l'émission d'une obligation verte de 500 $ américains par Exportation et développement Canada, sa troisième et sa plus importante à ce jour.
Les produits de cette obligation verte appuieront le portefeuille d'actifs verts d'Exportation et développement Canada, y compris les prêts consentis à des entreprises qui sont actives dans les domaines de la conservation, de la protection et de l'assainissement de l'air, de l'eau et du sol, de la création d'énergies renouvelables et de l'atténuation des effets des changements climatiques.
Par conséquent, la demande est claire, et nous avons très certainement une solution. Nous devons maintenant saisir cette occasion.
Nous pouvons saisir cette occasion en favorisant l'innovation. Nous devons trouver de nouvelles façons novatrices et efficaces de produire de l'énergie et de générer de l'électricité pour alimenter les entreprises, les maisons et les automobiles au Canada. Le gouvernement a un rôle fondamental à jouer à cet égard.
Partout dans le monde, les pays investissent maintenant davantage dans l'énergie propre que dans les combustibles fossiles. Les entreprises choisissent des options non polluantes pour la fabrication et la vente de leurs produits. Elles accroissent l'efficience de leurs opérations. Elles mettent en oeuvre des idées audacieuses qui créent de nouveaux emplois et offrent de nouvelles possibilités.
La demande mondiale pour ces technologies propres est en hausse. Le secteur de l'énergie propre pourrait en effet fournir de l'emploi à 76 000 personnes d'ici cinq ans. Le Canada a la possibilité de s’approprier une plus grande part du marché mondial en pleine croissance de la technologie propre et des solutions novatrices visant à réduire la pollution et de devenir un chef de file mondial de l'économie à faibles émissions de carbone.
Les progrès réalisés au cours des dernières décennies ont conduit à des innovations en matière de technologies non polluantes, notamment dans les domaines de la production d'énergie éolienne, solaire et géothermique. En 2015, plus de 300 milliards de dollars ont été investis dans l'énergie renouvelable à l'échelle internationale. Cela représente près du double du montant investi dans les sources d'énergie traditionnelles. À elle seule, la Chine prévoit de consacrer plus de 350 milliards de dollars à l'électricité non polluante d'ici 2020.
Le secteur de l'énergie propre croît plus rapidement que jamais. Depuis 2000, la quantité d’électricité produite dans le monde par l’énergie solaire a doublé sept fois. De son côté, l’énergie éolienne a doublé quatre fois.
L'an dernier, aux États-Unis, comme le rapporte le département de l'Énergie de ce pays, plus de personnes travaillaient dans le secteur de l'énergie solaire que dans tous les secteurs qui produisent de l'énergie à partir du charbon, du gaz et du pétrole mis ensemble. Au total, près de 374 000 personnes travaillaient dans le secteur de l'énergie, tandis qu'un peu plus de 187 000 personnes travaillaient dans les secteurs d'alimentation en charbon, en gaz et en pétrole. La croissance extraordinaire de la main-d'oeuvre du secteur de l'énergie solaire des États-Unis s'explique par les travaux de construction qui doivent être effectués dans le cadre de l'élargissement des capacités de production d'énergie renouvelable du pays.
Le fossé qui existe au chapitre du nombre d'emplois ne cesse de grandir, la production d'électricité à partir du charbon ayant enregistré une baisse de 53 % au cours des 10 dernières années. Durant la même période, la production d'électricité à partir du gaz naturel a grimpé de 33 %, alors que la production d'énergie solaire a connu une croissance de 5 000 %.
Certains pays, comme le Costa Rica, s'approchent rapidement d'une consommation d'énergie uniquement renouvelable. Très bientôt, des bardeaux de toiture solaires alimenteront nos maisons en énergie. De plus en plus de voitures, d'autobus et de trains fonctionneront à l'électricité. L'électricité alimente également les collectivités côtières par des turbines rotatives sous-marines qui fonctionnent à l'aide des marées montantes et descendantes, comme celles qui sont installées dans le bassin Minas et dans la baie de Fundy et qui fonctionnent actuellement.
Le Canada possède le talent et l'ingéniosité nécessaires pour être un chef de file mondial, pour s'attaquer aux problèmes du monde et les transformer en emplois pour la classe moyenne et en croissance économique durable. Le Canada compte déjà plus de 800 sociétés canadiennes du secteur des technologies propres, qui sont dirigées par des entrepreneurs innovateurs qui mettent au point diverses technologies, comme des batteries perfectionnées pour véhicules électriques, et qui emploient plus de Canadiens que tout autre grand secteur connu, comme l'industrie forestière et l'industrie pharmaceutique.
Le secteur des technologies propres du Canada emploie environ 55 000 personnes, y compris de plus en plus de jeunes Canadiens. Par exemple, CRB Innovations, située à Sherbrooke, au Québec, transforme des plantes en carburéacteur moins polluant. Un autre exemple, c'est l'entreprise Siemens, qui a mis sur pied la toute première usine d'éoliennes du Canada à Tillsonburg, en Ontario. Cette usine emploie maintenant environ 300 personnes. Voilà ce que nous entendons par « emplois de l'avenir ».
Ce n'est que le début. La création de solutions qui réduisent la pollution, allant des batteries pour les voitures électriques au captage de la pollution par le carbone des usines, pourrait créer des milliers d'emplois d'ici quelques années. Nous avons besoin des meilleurs scientifiques, de travailleurs qualifiés et d'entrepreneurs innovateurs qui sauront transformer leurs nouvelles idées en produits qui seront acheminés vers les marchés. De nouveaux emplois en construction et dans le secteur manufacturier seront créés à mesure que nous améliorons l'efficacité énergétique de nos édifices et que nous modernisons notre réseau de production d'électricité.
Les industries du Canada connaîtront la prospérité en trouvant des modes de fonctionnement meilleurs et plus propres. Des millions de Canadiens en tireront des avantages. Non seulement ils profiteront de perspectives d'emplois et d'occasions d’innovation, mais ils évolueront dans un environnement plus propre et plus résistant.
En ma qualité de ministre des Finances, je suis fermement résolu à placer le Canada dans la meilleure position possible pour tirer profit d’un environnement plus propre. Voilà pourquoi le budget de 2017 place les gens compétents, talentueux et créatifs au coeur de la nouvelle économie de l’innovation, qui créera les emplois de la classe moyenne d’aujourd’hui et de demain. Nous avons essentiellement misé sur les secteurs clés de l’économie dans lesquels nous avons réussi par le passé et dans lesquels nous pouvons être à l’avant-garde à l’avenir. Les technologies et ressources propres sont en tête de liste, en même temps que l’agroalimentaire, les industries numériques, les biosciences liées à la santé et la fabrication de pointe.
Grâce au budget de 2017, nous continuerons d’investir dans la recherche-développement ainsi que dans les entreprises soucieuses d’appliquer les nouveaux concepts sur le marché. Nous collaborons avec les intervenants et les partenaires concernés pour élaborer une stratégie globale en ce qui a trait aux technologies propres. Cette stratégie nous permettra de recenser les possibilités d’innovation, de fixer des objectifs de croissance ambitieux, de faire ressortir les défis et les goulots d’étranglement propres à certains secteurs, et d’aider les innovateurs à atteindre leurs objectifs.
Notre plan comprendra une stratégie de développement des affaires internationales afin d'aider les entreprises canadiennes à énergie propre à devenir des chefs de file mondiaux et à tirer parti des possibilités du marché mondial en expansion.
Nous élaborons également une stratégie relative aux données sur les technologies propres en vue de favoriser l'innovation, d'enrichir les connaissances au sein du secteur privé et des milieux des intervenants et d'aider le gouvernement à prendre des décisions éclairées à l'avenir.
Finalement, nous établirons un carrefour de la croissance propre, qui fera partie du service à guichet unique d'Innovation Canada, dans le but d'améliorer la coordination du programme fédéral, de permettre le suivi des résultats relatifs aux technologies propres dans l'ensemble du gouvernement et d'établir des rapports connexes, et de permettre aux intervenants d'avoir accès aux marchés internationaux.
Le soutien apporté aux technologies propres permettra au Canada de saisir les occasions qu’offre la nouvelle économie mondiale en diversifiant son économie et en élargissant l’accès aux marchés.
Pour pouvoir prendre leur essor, les entreprises technologiques ont besoin de capitaux et de financement. C’est la raison pour laquelle le budget de 2017 met près de 1,4 milliard de dollars à la disposition de la Banque de développement du Canada et d’Exportation et développement Canada. Cette somme comprend 380 millions de dollars sous forme de financement en capitaux propres en faveur des entreprises de technologies propres, 570 millions de dollars sous forme de fonds de roulement et environ 450 millions de dollars en fonds supplémentaires destinés aux projets à forte intensité de capital.