Monsieur le Président, nous sommes ici ce soir pour parler d'une accusation grave portée par l'ancienne procureure générale au comité hier. Elle a déclaré: « Pendant environ quatre mois, soit de septembre à décembre 2018, j’ai fait l’objet de pressions soutenues et constantes de la part de nombreuses personnes au sein du gouvernement qui, pour des considérations d’ordre politique, souhaitaient que je passe outre au pouvoir discrétionnaire des procureurs en tant que procureure générale du Canada dans le but inapproprié de conclure un accord de suspension des poursuites avec SNC-Lavalin. »
C'est une accusation assez grave. Au centre de cette accusation se trouve une entreprise qui emploie beaucoup de gens — et nous sommes reconnaissants pour les bons emplois au Canada —, mais employer beaucoup de gens ne donne pas à une entreprise le droit de faire ce qu'elle veut.
On parle d'une entreprise dont le conseil d'administration est loin d'être blanc comme neige. Par exemple, la Banque mondiale a interdit à SNC-Lavalin de soumissionner des contrats pendant 10 ans, après que des enquêtes ont révélé qu'elle s'était livrée à des activités de corruption au Bangladesh et au Cambodge. De plus, un ancien dirigeant de SNC-Lavalin a récemment plaidé coupable d'avoir enfreint les lois électorales pour verser des dizaines de milliers de dollars dans les coffres du Parti libéral et du Parti conservateur. C'est une entreprise qui, en 2011, a pu acheter les activités commerciales d'Énergie atomique du Canada limitée pour à peine 15 millions de dollars, y compris les plans du réacteur CANDU, tout en obtenant des contrats garantis d'une valeur de 75 millions de dollars pour les travaux, ce qui couvre amplement le prix payé pour un important actif canadien, les plans du réacteur CANDU.
À l'heure actuelle, SNC-Lavalin fait partie d'un consortium qui devrait bénéficier d'un projet d'immobilisations de plusieurs milliards de dollars ici même au centre-ville d'Ottawa, avec la privatisation de l'exploitation de l'usine de chauffage et de refroidissement qui dessert de nombreux immeubles du centre-ville, y compris celui où nous nous trouvons actuellement.
Nous entendons maintenant parler d'ingérence politique de la part du premier ministre au nom de cette entreprise, non pas pour les travailleurs, mais pour aider les dirigeants de SNC-Lavalin à échapper à ces accusations criminelles. J'aurai d'autres choses à dire à ce sujet plus loin dans mon allocution.
En réponse au témoignage de l'ancienne procureure générale voulant qu'il y ait eu des efforts soutenus pour faire pression sur elle afin qu'elle revienne sur sa décision, le NPD a demandé au premier ministre de renoncer au secret ministériel pour la période suivant son renvoi du poste de procureure générale, mais pendant laquelle elle était toujours au Cabinet. Il ne l'a pas fait, et elle a dit très clairement au comité qu'il y a certains facteurs qui l'ont menée à démissionner du Cabinet qu'elle ne peut révéler, puisque ces renseignements sont toujours protégés par le secret ministériel.
Nous avons également demandé que le comité de la justice entende les 11 personnes impliquées dans la campagne de pression que la députée de Vancouver Granville a nommées, dont le premier ministre. Il a certainement des détails que les Canadiens aimeraient connaître et qui sont essentiels pour comprendre ce qui s'est passé. Il devrait donc comparaître devant le comité.
Nous avons également demandé la tenue d'une enquête publique complète lorsque cette affaire a éclaté, il y a quelque temps, et nous avons réitéré notre demande parce qu'il y a beaucoup d'éléments qui ne sont pas clairs dans cette histoire. Je ne pense pas que cela surprenne qui que ce soit ici. Il semble qu'il y ait de nouvelles révélations presque tous les jours. La portée des enquêtes actuelles n'est tout simplement pas suffisante pour comprendre tout ce qui se passe. Chaque enquête peut donner des résultats importants et permettre de découvrir une pièce du casse-tête, mais aucune des enquêtes existantes ne peut révéler toute l'histoire. C'est pourquoi il est important que nous tenions une enquête publique.
Pourquoi est-il important d'aller au fond des choses? Quiconque a déjà subi des pressions ou de l'intimidation pour faire quelque chose contre son gré a probablement une idée de ce qui ne va pas dans cette situation, et quiconque a subi des pressions ou de l'intimidation de la part d'une personne en position d'autorité en aura une idée encore meilleure. C'est peut-être un superviseur au travail qui peut congédier une personne et la priver de son salaire, ou un propriétaire qui décide si une personne peut ou non rester dans un appartement. C'est peut-être un agent de libération conditionnelle ou l'entraîneur d'une équipe sportive. Ce sont des gens qui sont en position d'autorité. Dans l'ensemble, les personnes qui occupent ces postes font du bon travail et sont des leaders dans nos collectivités, mais lorsque des gens qui occupent ces postes décident d'abuser de leur pouvoir et de leur autorité, les gens qui en font les frais vivent quelque chose de terrible. C'est laid et c'est mal.
L'allégation est que le premier ministre, son secrétaire principal, sa chef de cabinet et le greffier du Conseil privé, qui ont tous beaucoup d'autorité et de pouvoir, ont agi ainsi. Selon l'ancienne procureure générale, comme je l'ai dit, ils ont utilisé ce pouvoir pour exercer des pressions inappropriées sur elle afin qu'elle infirme une décision de la directrice des poursuites pénales en vue de soustraire une société accusée de corruption de fonctionnaires publics à des accusations au criminel. Le premier ministre veut mettre cela sur le compte d'une différence de points de vue et il veut mettre sa parole en jeu contre la sienne.
Cependant, je pense que quiconque a regardé le témoignage d'hier aurait vu que la députée de Vancouver Granville a présenté un témoignage calme, cohérent et bien documenté et qu'elle était l'incarnation même d'un témoin crédible. Je crois son témoignage et j'encourage tous les Canadiens qui nous écoutent chez eux à le regarder par eux-mêmes s'ils ont le moindre doute. Bien qu'elle et moi ne soyons pas d'accord sur un certain nombre de questions de politique, et nous avons eu des désaccords à la Chambre, je respecte son intégrité. Elle a été un exemple pour nous tous, quelle que soit notre affiliation politique, de par la façon dont elle s'est conduite dans une situation très difficile.
L'ancienne procureure générale prenait des décisions qui lui revenaient. Ce n'était pas au premier ministre, mais à l'ancienne procureure générale de décider s'il fallait négocier un accord de suspension des poursuites. Une fois qu'elle a pris sa décision, c'était réglé.
Il n'était pas inapproprié au départ que le premier ministre discute avec elle de l'incidence économique de cette décision. Franchement, c'est ainsi que l'on élabore de bonnes politiques et que l'on prend de bonnes décisions. Toutefois, lorsqu'elle a dit qu'elle avait bien réfléchi et qu'elle avait pris sa décision, cela aurait dû être la fin de l'histoire.
Toutefois, nous n'avons pas entendu dans son témoignage que le premier ministre et divers intervenants haut placés ont présenté de nouveaux renseignements lorsqu'ils se sont tournés vers elle et son personnel pour essayer de les convaincre de revenir sur cette décision. Peut-être que le premier ministre, s'il souhaitait venir témoigner devant le comité, pourrait nous dire quels nouveaux renseignements il a présentés, mais ce n'est pas ce que nous avons entendu. Nous avons entendu qu'ils revenaient toujours avec des arguments semblables et des menaces voilées pour l'amener à changer d'idée.
Elle a tenu tête au premier ministre et à son équipe au nom d'un principe important, celui de la primauté du droit. Pourquoi est-ce important? Ce principe nous donne des droits. C'est ce qui nous protège des mégalomanes et des tyrans qui parviennent parfois à accéder au pouvoir.
En tant que Canadiens, nous avons droit à un procès équitable et à un traitement égal devant la loi. Nous pouvons comparer notre situation avec celle d'autres endroits dans le monde d'aujourd'hui ou d'autrefois, où les gens vivent ou vivaient dans la peur des coups de tête des puissants. Nous nous sommes dotés de lois au fil du temps pour bâtir un système qui protège les Canadiens contre ce genre de traitement arbitraire, mais aucune loi ne peut garantir cela pour toujours. Protéger nos droits, tout comme protéger notre démocratie, est un travail qui n'est jamais terminé, et c'est pourquoi des moments comme celui-ci sont si importants.
La primauté du droit et la démocratie ont également une composante culturelle importante. Si nous voulons sauvegarder la démocratie et la primauté du droit, nous devons instaurer dans nos institutions une culture du respect des règles et de l'application régulière de la loi. Plus on monte dans la chaîne alimentaire, plus on a de pouvoir, plus il est important pour la démocratie et la primauté du droit que l'on se conduise selon les normes éthiques les plus élevées et dans le respect de ces règles. La députée de Vancouver Granville s'est montrée à la hauteur de son devoir à cet égard, mais, d'après son témoignage d'hier, le premier ministre et son équipe sont loin d'avoir fait de même.
L'ancienne procureure générale a affirmé que, le 5 décembre, lors d'une rencontre avec l'ancien secrétaire principal du Cabinet du premier ministre, Gerry Butts, celui-ci a dit à sa chef de cabinet que la loi était l'oeuvre de Stephen Harper et qu'il n'aimait pas la loi, comme si c'était pertinent. Lors d'une réunion tenue le 18 décembre dans le bureau de l'ancienne procureure générale, Gerry Butts et la chef de cabinet du premier ministre, Katie Telford, ont dit à Jessica Prince qu'il fallait trouver une solution à cette histoire d'accord de suspension des poursuites. Il a dit: « Jess, toute solution dans cette affaire suppose une certaine forme d'ingérence. » Mme Telford a dit: « Nous ne voulons plus discuter des détails juridiques. » C'est ce qu'a rapporté hier la députée de Vancouver Granville dans son témoignage.
Lors d'un appel téléphonique du 19 décembre entre l'ancienne procureure générale et le greffier du Conseil privé, ce dernier a déclaré: « Je pense qu'il [le premier ministre] va trouver un moyen de le faire, d'une façon ou d'une autre. Il est déterminé, et je voulais que vous le sachiez. » Il a également dit à l'ancienne procureure générale qu'elle ne souhaitait probablement pas un affrontement avec le premier ministre.
Pour une raison ou une autre, le premier ministre a estimé qu'il pouvait passer outre à l'indépendance de la procureure générale. Nous ne devrions peut-être pas nous en étonner. Après tout, il a été le premier premier ministre canadien à être reconnu coupable de manquements à l'éthique par le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique.
Et qu'est-il arrivé lorsque KPMG s'est retrouvée dans l'embarras? Les libéraux se sont montrés disposés à conclure une entente secrète lorsqu'on a découvert que KPMG avait conçu un stratagème d'évitement fiscal. Elle n'a eu qu'à payer les impôts qu'elle devait, sans pénalité. Elle a été amnistiée, et la plupart des conditions de l'entente sont demeurées secrètes.
Le gouvernement a érigé au rang de science l'organisation de collectes de fonds où les donateurs achètent un accès privilégié, ce qui, en soi, a posé toute une série de problèmes d'éthique. Nous devons garder l'oeil ouvert parce que, dans la culture du tout m'est dû qui engendre ce comportement, on peut facilement prendre l'habitude de la corruption.
Voilà pourquoi il est important de rester vigilant. Voilà aussi pourquoi il est important de savoir exactement ce qui s'est passé. Voilà pourquoi il est essentiel que l'ancienne procureure générale puisse donner sa pleine version de l'affaire. Voilà pourquoi il est important que le premier ministre accorde une dérogation aux règles du secret du Cabinet non seulement pour la période où elle était procureure générale, ce qui a déjà été fait, mais aussi pour la période où elle était ministre des Anciens Combattants.
Elle a dit clairement, dans son témoignage, qu'il y avait des choses qu'elle ne pouvait pas dire concernant sa décision de démissionner du Cabinet, en fin de compte, pour une raison que nous ignorons et qui est vraisemblablement liée à quelque chose comme une conversation qu'elle aurait eue entre le moment où elle est entrée en fonction comme ministre des Anciens Combattants et le moment où elle a démissionné du Cabinet.
Voilà aussi pourquoi il est important qu'une enquête publique complète ait lieu, de manière à ce que l'on puisse aller au fond des choses.
Maintenant que j'ai bien démontré l'importance de la question, je voudrais prendre quelques minutes pour répondre aux arguments invoqués par les députés libéraux dans cette enceinte aujourd'hui.
Ils disent que l'opposition ne devrait pas s'inquiéter parce que le comité de la justice fait enquête. Je respecte l'idée que le comité de la justice a un travail à faire. Cependant, je crois qu'il s'est enfermé dans des balises trop étroites pour que son étude puisse lui permettre de découvrir tout ce qui se passe. C'est une étude dont la portée n'est pas suffisante pour que nous puissions avoir l'heure juste sur toutes les allégations contenues dans le témoignage.
Par ailleurs, il faut souligner l'existence d'un conflit d'intérêts politiques fondamental dans l'idée de confier une enquête à un comité qui est dominé par les libéraux. Ils ont nettement intérêt à s'assurer que le problème disparaisse pour ne pas faire de tort au premier ministre en fin de compte. Il est très révélateur de voir que beaucoup de libéraux ne semblent pas admettre ce conflit d'intérêts ou ne semblent pas comprendre que les gens puissent avoir des objections légitimes quand ils constatent que le comité de la justice est le principal forum employé pour tâcher de savoir comment le gouvernement a pu se mettre dans une telle situation, au départ. Les libéraux ne semblent pas capables de comprendre qu'il y a bel et bien un conflit d'intérêts ou à tout le moins une apparence de conflit d'intérêts.
Lorsqu'on se fixe comme objectif de respecter les plus hautes normes éthiques, comme le premier ministre l'a indiqué à ses ministres dans les lettres de mandat qu'il leur a adressées et comme il l'a annoncé aux Canadiens lors de la campagne électorale de 2015, les apparences de conflit d'intérêts sont tout aussi importantes que les conflits d'intérêts réels. Il y a certainement apparence de conflit d'intérêts lorsque six députés libéraux forment à toutes fins utiles le tribunal qui aura le dernier mot concernant ce qui s'est passé dans ce dossier.
Les libéraux ont aussi dit que, étant donné que le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique mène une enquête, nous ne devrions pas nous inquiéter. Ils affirment que nous ne devrions plus poser de questions, puisque le commissaire va tout régler dans une décision. Nous le savons bien. C'est même le NPD qui a réclamé cette enquête.
Ce n’est pas parce que nous n’avons pas confiance dans le commissaire que nous réclamons une enquête publique. Nous savons que l’enquête en cours est très valable. Cependant, l’enquête du commissaire est aussi de portée limitée. Les règles qui régissent le bureau du commissaire et qui définissent ses pouvoirs et responsabilités ne lui permettent pas de pousser l’enquête aussi loin qu’il le faudrait.
Il est donc impossible que le rapport du commissaire aille vraiment au fond des choses, compte tenu de tout ce que nous avons entendu. Ces allégations d’ingérence politique dépassent la portée des pouvoirs du commissaire aux conflits d’intérêts. Ses pouvoirs sont limités aux conflits ayant trait aux intérêts financiers des députés. Ses conclusions nous intéressent vivement, mais ce qui s’est passé dans cette affaire dépasse largement son mandat.
Les libéraux nous donnent aussi une autre raison de cesser de nous inquiéter: c'est que la directrice des poursuites pénales a dit avoir pris cette décision de façon indépendante. Toutefois, le problème n’est pas de savoir si cette décision était bien indépendante. Le problème, c'est que, une fois la décision prise, des politiciens, notamment le premier ministre, et du personnel de son cabinet ont tenté de faire annuler cette décision — et ils ne se sont pas contentés d’une seule intervention en ce sens auprès de l’ancienne procureure générale. Ils ont orchestré une véritable croisade pour obtenir que cette décision soit révisée.
Voilà le problème. Bien sûr, la directrice des poursuites pénales a pris sa décision de façon indépendante, mais la question est de savoir si d’autres intervenants ont cherché à faire annuler cette décision pour des raisons politiques.
J’ai entendu, aujourd'hui, les libéraux affirmer à la Chambre que le premier ministre avait dit à l’ancienne procureure générale que c’était à elle de prendre la décision finale. Selon eux, cela montre qu’il n’y a rien d’irrégulier dans cette affaire, aucune raison de s’inquiéter. Je suis convaincu qu’il lui a vraiment dit cela. C'est une très bonne manière de se protéger. J’imagine qu’elle l’a même cru sincère au début. C'est ce qu’elle a dit dans son témoignage. Quand elle a perdu son poste, elle a probablement commencé à voir d’un autre œil la discussion au cours de laquelle il lui avait dit que la décision lui revenait à elle, et à elle seule. Quand elle a pris la décision que le premier ministre ne souhaitait pas voir prendre, elle a perdu son emploi. Cela jetait une tout autre lumière sur les conversations qu’ils avaient eues jusque-là et qu’elle avait raisonnablement pu juger légitimes.
On nous a aussi dit de nous tenir tranquilles, car le premier ministre a levé le secret professionnel et le secret du Cabinet. Toutefois, il n'a pas levé le secret du Cabinet pour la période où la députée a siégé au Cabinet entre le moment de son congédiement de son poste de procureure générale et de sa nomination comme ministre des Anciens Combattants et celui de sa démission. Elle a dit très clairement au comité qu'elle n'était pas en mesure de raconter tous les pans de l'histoire. Selon toute vraisemblance, il s'est passé quelque chose durant cette période qui l'a amenée à changer d'idée. Si nous voulons faire toute la lumière sur cette affaire, nous devons savoir exactement ce qu'il en est.
Hier, au comité de la justice, mon collègue de Victoria a présenté une motion visant tout simplement à demander au comité d'exhorter le premier ministre à lever le secret du Cabinet. Le comité n'a pas le pouvoir d'obliger le premier ministre à le faire. Tous les membres libéraux du comité ont voté contre la motion et refusé d'au moins demander au premier ministre de prendre l'initiative de laisser l'ancienne procureure générale raconter toute l'histoire.
Je sais qu'il ne me reste que quelques minutes. Je veux revenir sur le principal argument que nous servent les libéraux à la Chambre pour se défendre, et c'est celui des emplois et de leur volonté de les protéger. Nous désirons tous que les Canadiens puissent travailler, mais cela ne veut pas dire que tout est permis. On ne peut pas donner un passe-droit pour éviter la prison. Ce n'est pas parce qu'une entreprise est grande et qu'elle emploie un grand nombre de personnes qu'elle peut se permettre de soudoyer des fonctionnaires et espérer s'en tirer. C'est totalement inadmissible.
Dans l'affaire qui nous occupe, est-ce vraiment des travailleurs et des emplois qu'on se souciait? Au dire de l'ancienne procureure générale, le premier ministre a exprimé des préoccupations d'ordre politique: il a mentionné qu'il était député de Papineau, que des élections allaient avoir lieu au Québec et qu'il fallait faire quelque chose. Rien à voir avec les travailleurs ou leurs emplois. L'enjeu, c'étaient les intérêts politiques du premier ministre et du Parti libéral. Voilà de quoi il retournait. Tout cela avait très peu à voir avec les travailleurs.
Ce qui aurait pu être fait, c'est réformer le régime d'intégrité et l'interdiction de participer à des marchés publics pendant 10 ans. C'est d'ailleurs une solution qu'envisagent les libéraux. Je dois dire que c'est la solution appropriée. Il faut se pencher sur le régime de sanctions et envisager de le modifier, et non appliquer des pressions indues dans le but de faire tomber des accusations criminelles. Voilà la voie à suivre. Or, les libéraux ont nui à toute démarche dans ce dossier. Quoi qu'ils fassent désormais, ils auront l'air de faire des pieds et des mains pour aider SNC-Lavalin à s'en tirer à bon compte.
La ministre des Services publics et de l’Approvisionnement a témoigné au comité hier. Je lui ai posé une simple question à plusieurs reprises. Je lui ai demandé si, selon elle, la corruption de fonctionnaires constitue une infraction grave, et si la corruption serait traitée comme telle dans la nouvelle politique en matière d'intégrité. Elle m'a répondu que le gouvernement n'a pas d'opinion au sujet de la hiérarchie des infractions. C'est ce qu'elle a dit. Cette ministre, qui supervise le plus important budget d'immobilisations du gouvernement, a refusé de dire si elle considère que la corruption de fonctionnaires est une infraction grave. Je n'en croyais pas mes oreilles. C'est dire à quel point le gouvernement actuel cherche à aider cette entreprise et à quel point ceux d'en face craignent de faire quoi que ce soit qui pourrait nuire aux intérêts de cette entreprise.
J'espère avoir l'occasion, pendant la période des questions et observations, d'en dire un peu plus sur les travailleurs et le bilan du gouvernement à leur égard. Un des premiers projets de loi que j'ai vu adopter à la Chambre a été le projet de loi C-10, qui a fait l'objet d'une attribution de temps et de tout ce qui vient avec. C'était un projet de loi qui visait à modifier la loi afin de permettre à Air Canada de sous-traiter ses travaux de maintenance dans le secteur de l'aéronautique à l'extérieur du pays. J'ai d'autres exemples, que j'espère pouvoir présenter pendant les questions et observations.