Madame la Présidente, c'est un plaisir pour moi de joindre ma voix à celle de mon collègue de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles et de participer à cet important débat sur le projet de loi C-83 et le régime canadien de détermination des peines.
Je trouve inquiétant qu'encore une fois, le gouvernement se contente de présenter un plan de communications au lieu de proposer des mesures concrètes. Pour tout dire, le rapport de la commissaire du service correctionnel dont parle le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre a été transmis au gouvernement à peine quelques minutes avant le début d'une manifestation sur la Colline du Parlement qui a été organisée par l'entourage de Tori Stafford, la jeune femme tuée par Terri-Lynne McClintic et son partenaire.
Nous avons vu comment a réagi le père de Tori, Rodney Stafford, et le tollé qu'a soulevé le transfèrement de Mme McClintic dans un pavillon de ressourcement de la Saskatchewan. Or, voilà que, quelques minutes avant le début de la manifestation, les libéraux mettent la main sur ce rapport. Les députés se rappelleront sans doute que les libéraux ont défendu cette décision et que la commissaire qu'ils viennent juste de nommer a fait de même. La commissaire était dans l'erreur, et les ministres en poste devraient l'admettre. J'espère qu'elle est à l'écoute, parce que j'ai l'intention de lui faire savoir en quoi elle était dans l'erreur.
Je n'ai pas lu son rapport aujourd'hui. Je me sers des commentaires qu'elle a formulés pour défendre sa décision d'appuyer, en quelque sorte, l'inaction du gouvernement. J'utiliserai de l'information publiée par le gouvernement lui-même pour prouver ce que j'avance.
Lorsque j'étudiais le droit à l'Université Dalhousie, j'ai beaucoup appris au sujet des principes de justice réparatrice, et j'ai découvert qu'ils peuvent être appliqués dans certaines circonstances. Le cas de Mme McClintic n'est pas de celles-là. D'ailleurs, sa propre famille a des doutes quant à ses antécédents autochtones.
Cela dit, sur le site Web du ministère de la Justice, le premier principe énoncé en matière de justice réparatrice révèle que « [l]'acte criminel est essentiellement une violation des rapports humains et interpersonnels [...] Un tort a été causé aux victimes et à la collectivité, et doit être réparé. »
On commence par penser à la victime. Dans ce cas-ci, la victime est Tori Stafford, une enfant que Mme McClintic a convaincue de la suivre et qui a ensuite été assassinée de façon horrible. Je ne veux pas entrer dans les détails; ils ont déjà été relatés de nombreuses fois. Cependant, la justice réparatrice commence par une réflexion sur la victime et sur le crime. Il s'agit ici du pire crime possible. La victime et sa famille ont subi les pires conséquences imaginables aux termes du Code criminel. Il ne s'agit pas d'un crime commis pour des motifs économiques ou en raison des circonstances. C'était un acte prémédité. La façon dont Mme McClintic a attiré la jeune Tori Stafford a été capturée par des caméras vidéo. Ces images resteront gravées dans la mémoire des gens de cette région de l'Ontario. Les ministres concernés devraient aller voir cette vidéo et relire le dossier. La commissaire du Service correctionnel du Canada devrait aussi le faire.
Pour commencer, ils pourraient aller lire la documentation du ministère de la Justice au sujet de la justice réparatrice. Ils pourraient aller lire l'article 718 du Code criminel, qui porte sur la détermination de la peine, ses principes et ses objectifs. J'invite d'ailleurs tous les Canadiens à aller le lire. Les dispositions qui y sont inscrites servent de fondements à notre système de justice, particulièrement lorsqu'un Canadien commet un crime contre un autre Canadien, et dans ce cas-ci, contre une enfant.
Les objectifs visés lors de la détermination d'une peine sont énoncés à l'article 718 du Code criminel. Certains de mes collègues libéraux sont avocats. Ils devraient passer en revue les cours de droit pénal qu'ils ont suivis lorsqu'ils étaient à la faculté de droit. Je les y renvoie. J'y renvoie aussi la commissaire.
Pourquoi une peine est-elle prononcée? On inflige tout d'abord une peine pour dénoncer un comportement, et le meurtre d'un enfant mérite d'être dénoncé le plus fortement possible. Deuxièmement, on veut dissuader les délinquants de commettre des infractions. On cherche en effet à dissuader les gens de commettre les pires des crimes ou des actes violents contre d'autres membres de la société civilisée. Troisièmement, les peines visent à isoler les délinquants afin de protéger le public, ce qui est particulièrement important lorsqu'on parle d'auteurs des pires crimes possibles. Quatrièmement, on tente de favoriser la réinsertion sociale des délinquants, car on ne veut pas abandonner qui que ce soit. Cinquièmement, une peine vise à assurer la réparation des torts, autrement dit à faire en sorte que les délinquants se rachètent auprès des victimes et des personnes touchées. Le dernier objectif d'une peine est de susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants.
Mme McClintic est responsable du rôle qu'elle a joué dans la mort de Tori Stafford. Elle devrait réparer ce crime, tant en fonction de la justice réparatrice que du Code criminel. Elle doit être isolée de la population pour son implication dans le pire des crimes.
Il faut dissuader et il faut dénoncer. En présence du pire des crimes, ces considérations doivent primer sur la réinsertion. Elles doivent passer avant le transfèrement d'une personne vers un pavillon de ressourcement. Un pavillon de ressourcement est en réalité conçu pour répondre à des principes de justice réparatrice, pour des gens qui ont été amenés à commettre un crime en raison de ce qu'ils vivaient, comme la pauvreté, ou parce qu'il y a plus de cas d'incarcération d'Autochtones. Je suis en faveur des pavillons de ressourcement, mais pas pour les tueurs d'enfants.
Passons maintenant de l'article 718 aux articles 718.1 et 718.2 du Code criminel. On y énonce d'abord le principe selon lequel la peine doit être proportionnelle à la nature de l'infraction. Je rappelle à tous — et à la commissaire du service correctionnel — que c'est le pire crime qui puisse être commis dans notre société. Aucune comparaison n'est nécessaire.
Je suis d'avis que le caractère proportionnel de l'infraction signifie que Mme McClintic doit purger la totalité de sa peine dans une prison à sécurité maximale. Il est certain que l'approche réparatrice des pavillons de ressourcement, généralement réservée aux délinquants autochtones, ne devrait pas être offerte dans les cas de meurtres au premier ou au second degré. C'est une politique qui devrait être immédiatement soumise à la Chambre. C'est ce à quoi les Canadiens s'attendent.
Selon le Code criminel, selon les principes de la justice réparatrice de Justice Canada, le transfèrement de Mme McClintic dans un pavillon de ressourcement ne se justifie en aucune façon. Il n'y a aucune façon de le justifier. Nous avons là un autre exemple de l'impuissance du gouvernement actuel à agir, ce qui, à mes yeux, est plus inquiétant que la décision en elle-même et les manigances des libéraux qui, comme par hasard, ont réussi à faire apparaître un rapport de la commissaire le jour même d'une manifestation sur la Colline du Parlement. Il y a une hiérarchie. Le ministre se trouve à la tête du ministère. Le premier ministre est responsable des ministres. Nombre de fois, nous avons vu une incapacité d'agir et de reconnaître les erreurs des ministères.
On le voit à l'heure actuelle avec Statistique Canada et sa collecte de renseignements — que les Canadiens trouvent scandaleuse. Le ministre responsable devrait dire à Statistique Canada de ne pas toucher à ces renseignements. Un individu reconnu coupable de meurtre qui a développé un trouble de stress post-traumatique parce qu'il avait tué une policière en Nouvelle-Écosse, un meurtrier qui n'a jamais servi dans l'armée, touche des fonds réservés à nos vétérans, c'est une erreur qu'Anciens Combattants Canada devrait reconnaître et corriger. L'affaire de Mme McClintic offre probablement le meilleur exemple d'une erreur qui devrait être corrigée. La situation est inexcusable.
J'aimerais que la commissaire du service correctionnel analyse, comme je l'ai fait, l'article 718 du Code criminel ainsi que les principes de la justice réparatrice, et qu'elle me donne une seule raison pour justifier le transfèrement de Mme McClintic dans un pavillon de ressourcement. Il est temps pour les libéraux d'intervenir et de faire preuve de leadership. En tant que loyale opposition, nous avons la responsabilité de faire part des préoccupations des Canadiens au Parlement. D'ailleurs, je félicite les Canadiens qui ont bravé le froid et la pluie aujourd'hui en venant sur la Colline du Parlement pour exprimer leur indignation à l'égard du transfèrement de Mme McClintic.
Le problème, c'est que nous sommes en présence de ministres libéraux qui sont incapables d'agir. Ils font comme s'il leur était impossible d'agir. C'est parce que, pour eux, le poste, l'image et la voiture de fonction sont plus importants que leurs responsabilités. Dans le cas qui nous occupe, ils minent la confiance à l'égard de notre système judiciaire et de notre système correctionnel. Je n'ai toujours pas entendu l'ombre d'une justification à ce sujet. Les libéraux devraient assumer leurs responsabilités, annuler le transfèrement de Mme McClintic et interdire tout autre transfèrement dans un pavillon de ressourcement pour ceux qui ont enlevé la vie d'une personne.