propose que le projet de loi C-84, Loi modifiant le Code criminel (bestialité et combats d'animaux), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole au sujet du projet de loi C-84, Loi modifiant le Code criminel, qui concerne la bestialité et les combats d'animaux. Le projet de loi apporte d'importantes mises à jour au Code criminel. L'actuel gouvernement demeure résolu à faire en sorte que les lois protègent les plus vulnérables et reflètent nos valeurs communes. C'est précisément l'objectif du projet de loi.
Le gouvernement a apporté des modifications substantielles au Code criminel, visant entre autres à favoriser l'efficacité du système de justice pénale, à éliminer les dispositions anachroniques ou inconstitutionnelles, à préciser les dispositions législatives sur les agressions sexuelles et à renforcer le régime des dispositions concernant la conduite avec facultés affaiblies. Ces modifications, ainsi que celles proposées dans le projet de loi C-84, reflètent mon engagement indéfectible à assurer que les lois pénales demeurent claires, compréhensibles et à jour.
Je suis fière de nos efforts à cet égard. J'entends poursuivre la réforme des lois en me fondant sur les faits et en m'assurant que le système de justice pénale offre les meilleures protections possible aux Canadiens, et en particulier aux plus vulnérables d'entre eux.
Avant de commencer à parler en détail du projet de loi, je voudrais souligner le travail remarquable accompli par de nombreux députés, notamment le député de Beaches—East York, qui a fait preuve de leadership et a amorcé une importante discussion concernant cette question grâce à son projet de loi d'initiative parlementaire. Je veux également remercier les différents organismes et tous les Canadiens qui ont communiqué avec nous et qui défendent cette cause depuis de nombreuses années. Ce projet de loi est le résultat de leur travail de longue haleine.
Le projet de loi C-84 vise à combler les lacunes du Code criminel et à empêcher la violence et la cruauté envers les animaux. Il est le fruit de vastes consultations menées auprès des groupes de protection des enfants et des animaux, ainsi que d'intervenants des secteurs de l'agriculture et de l'utilisation des animaux; les changements qu'il propose pour régler ces questions importantes reflètent une approche consensuelle.
L'article 1 ajouterait une définition de la « bestialité » à l'article 160 du Code criminel, qui engloberait « tout contact, dans un but sexuel, avec un animal ». Cet ajout vise à répondre à la décision de la Cour suprême dans l'affaire R. c. D.L.W. de 2016 dans laquelle elle a affirmé que, aux termes de l'article 160 du Code criminel, les infractions en matière de bestialité se limitent aux actes sexuels où il y a pénétration. Pour en arriver à cette conclusion, la Cour s'en est remise à la définition de la bestialité donnée dans la common law, une définition héritée du droit britannique qui avait été incluse dans le Code criminel du Canada.
La définition élargie permettra de protéger davantage les enfants et les autres personnes vulnérables qui pourraient être contraints de participer à des actes de bestialité ou d'en être témoins, ainsi que de protéger les animaux, en garantissant que le droit criminel couvre tous les actes sexuels avec les animaux et non seulement ceux où il y a pénétration. Étant donné que la définition est axée sur le « but sexuel », les pratiques d'élevage et de médecine vétérinaire légitimes continueraient d'être exclues du champ d'application de l'infraction.
Dans sa décision, la Cour suprême a souligné que les tribunaux doivent interpréter la loi et non modifier les éléments constitutifs d'un crime d'une façon qui, selon eux, conviendrait mieux dans les circonstances d'une affaire. Il incombe plutôt au législateur d'élargir la portée de la responsabilité criminelle s'il le souhaite.
À la suite de cette décision, des défenseurs des droits des enfants et des groupes de protection des animaux se sont dits très préoccupés par l'effet du jugement et ont demandé une réforme du droit. Je conviens que la lacune signalée par la Cour suprême nécessite une réponse du Parlement, et c'est exactement ce que nous faisons.
Comme je l'ai mentionné, le projet de loi fait suite à la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire D.L.W. en définissant la bestialité comme « tout contact, dans un but sexuel, avec un animal ». Cela garantirait l'interdiction de tout contact entre un être humain et un animal dans un but sexuel. Cette modification enverrait un message clair et sans équivoque aux gens souhaitant faire du mal à des animaux. Elle permettrait aussi de protéger davantage les enfants qui seraient exposés ou contraints de participer à des comportements abusifs, ainsi que d'autres personnes vulnérables qui pourraient être obligées de se livrer à de tels actes.
La définition proposée met l'accent sur la notion générale de contact dans un but sexuel. L'expression « dans un but sexuel » a un sens bien établi dans le droit criminel canadien. Elle est utilisée dans plusieurs articles distincts du Code criminel, et je suis convaincue qu'elle s'appliquera aux infractions en question.
Dans l'ensemble, la définition proposée est plus claire et reflète ce que les Canadiens comprennent de la signification de cette infraction. Elle est également conforme aux demandes de groupes de protection des animaux et d'intervenants du secteur agricole, y compris la Fédération des sociétés canadiennes d'assistance aux animaux et la Fédération canadienne de l’agriculture.
Cette définition aura aussi comme avantage d'éviter que des activités normales d'élevage des animaux, comme la reproduction du bétail et la médecine vétérinaire, ne soient pas considérées comme des infractions.
Actuellement, le Code criminel contient trois infractions liées à la bestialité. Le projet de loi C-84 ne change pas la nature des peines prévues pour ces infractions. Une personne mise en accusation est passible d'une peine maximale de 10 à 14 ans d'emprisonnement.
Je voudrais aussi souligner que les modifications proposées dans mon projet de loi de réforme de la justice pénale, le projet de loi C-75, augmenteront la peine maximale, qui sera de deux ans moins un jour, dans le cas d'une déclaration sommaire de culpabilité pour l'une ou l'autre des deux infractions concernées. Ces changements nous permettront de faire des gains d'efficacité dans le système de justice pénale en encourageant le recours aux déclarations sommaires de culpabilité dans la mesure du possible.
De solides arguments liés à la sécurité publique militent pour que le Parlement élargisse la portée des deux infractions, en particulier l'argument de la protection des enfants et des autres personnes vulnérables. Les études récentes confirment le lien déjà bien établi entre, d'une part, la bestialité et, d'autre part, les agressions sexuelles contre les enfants et d'autres formes de violence.
Je signale que la Fédération des sociétés canadiennes d'assistance aux animaux a organisé une conférence en 2017 pour examiner plus attentivement ces questions. Le rapport final présente une vue d'ensemble du dossier. Je félicite la Fédération du travail important qu'elle a réalisé afin de sensibiliser la population à la gravité de ces problèmes.
On peut aussi constater ces liens dans des affaires criminelles. Le droit pénal canadien montre que, dans les cas d'agression sexuelle d'un enfant mettant en cause un animal, ce genre de comportement est très souvent grave et comprend la perpétration répétée de sévices à l'endroit de l'enfant et de l'animal. Grâce à ce projet de loi, les responsables de l'application de la loi, y compris les procureurs, disposeront des outils dont ils ont besoin pour rendre justice aux victimes de ces actes ignobles.
J'aimerais également parler d'une deuxième série de réformes prévues dans le projet de loi C-84, qui représente une étape importante en vue d'assurer la pleine protection de tous les animaux. Ces mesures supplémentaires viendront renforcer la protection des animaux en élargissant la portée des infractions concernant les combats d'animaux prévues dans le Code criminel.
À l'heure actuelle, on y prévoit deux infractions portant expressément sur les combats d'animaux. La première est l'alinéa 445.1(1)b), selon lequel il est interdit d'encourager le combat ou le harcèlement d'animaux ou d'y aider ou assister. Il s'agit d'une infraction mixte passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans sur déclaration de culpabilité par mise en accusation ou d'un emprisonnement maximal de 18 mois et d'une amende maximale de 10 000 $. Le projet de loi C-75 portera en outre la peine maximale sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire à deux ans moins un jour.
Dans sa forme actuelle, cette infraction n'englobe pas tous les éléments de la participation aux combats d'animaux, une activité déplorable. Par conséquent, le projet de loi C-84 élargirait la portée de cette infraction consistant à encourager le combat ou le harcèlement d'animaux ou à y prêter son concours afin d'inclure aussi la promotion, l'organisation, la réception d'argent ou la participation liées au combat ou au harcèlement d'animaux. L'infraction viserait aussi le dressage, le transport ou l'élevage d'animaux à des fins de combat ou de harcèlement.
Ce sont là d'importantes modifications qui feront que tous les aspects des combats d'animaux seront interdits et que tout individu qui prend part à l'un des éléments de ce comportement criminel sera tenu responsable de ses actes. J'aimerais souligner, tout particulièrement, que les modifications proposées visent également les incitatifs financiers liés à ce crime, ce qui constituera un élément dissuasif pour les individus impliqués dans cette activité inacceptable.
La seconde infraction, prévue à l'article 447 du Code criminel, concerne la possession d'une arène pour les combats de coqs et prévoit les mêmes sanctions que pour les combats d'animaux. La peine maximale pour cette infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité sera augmentée aux termes du projet de loi C-75. Cette infraction prévue par le Code criminel est d'une portée extrêmement étroite et témoigne de ses origines historiques, à une époque où les combats de coqs étaient la principale forme de combats d'animaux.
Nous savons que, malheureusement, les combats de chiens se multiplient, de nos jours. Le projet de loi C-84 modifie donc cette infraction consistant à construire, à fabriquer, à entretenir ou à garder une arène pour les combats de coqs pour viser toute arène pour les combats d’animaux. Toute forme de combat animal étant cruelle et odieuse, il faut que nos lois s'appliquent à tous les animaux. En termes simples, il n'y a aucune raison légitime ou raisonnable d'organiser des combats d'animaux. Ce comportement est cruel et doit être arrêté.
C'est une autre mesure importante que le gouvernement prend pour garantir que le droit criminel est à jour et sanctionne les comportements criminels. Il importe de noter que les combats d'animaux ont souvent été associés au crime organisé, notamment aux jeux illégaux et au trafic illicite de drogues et d'armes à feu. Les changements que nous apportons au projet de loi C-84 permettront aux organismes d'application de la loi de poursuivre plus facilement les criminels, de retracer les cas de combats d'animaux et de protéger la sécurité publique. En élargissant la portée de l'infraction afin qu'elle couvre d'autres activités, nous veillons à ce que les organismes d'application de la loi soient correctement outillés pour détecter et intercepter le crime, quelle que soit l'étape à laquelle il est découvert.
J'aimerais prendre quelques minutes pour parler plus précisément du cas des combats de chiens. Il est difficile de recueillir des données sur la prévalence de ce problème en raison de son caractère clandestin. En fait, l'organisation de combats de chiens passe souvent inaperçue jusqu'au moment où des policiers tombent dessus par hasard en enquêtant sur d'autres types de crimes. Cela dit, nous savons qu'en mai et en octobre 2015, de même qu'en mars 2016, l'équipe de gestion des cas graves de la SPCA de l'Ontario, la Police provinciale de l'Ontario et le service de police de Chatham-Kent ont travaillé en partenariat pour mettre fin à l'organisation présumée de combats de chiens. Ces trois enquêtes conjointes ont conduit à l'exécution de 11 mandats de perquisition sur trois propriétés situées dans le compté de Lanark, à Tilbury et à Kent Bridge, en Ontario. Les fouilles ont permis de sauver 64 pitbulls et de saisir des documents, des photos, du matériel vétérinaire, de l'équipement électronique et des centaines d'objets utilisés dans l'entraînement des chiens ou dans les combats comme tels.
La SPCA de l'Ontario indique que l'organisation de combats de chiens est une réalité dans cette province. Ces combats peuvent durer d’une à deux heures et prennent fin lorsqu'un chien meurt, ou qu'il a subi des blessures trop graves pour continuer à se battre. Il n'est pas rare que ces chiens souffrent de profondes blessures par perforation et de fractures. Dans bien des cas, ils meurent en se vidant de leur sang ou succombent à une infection.
Comme je l'ai mentionné, les combats de chiens, qui sont une forme terrible de cruauté animale, sont aussi liés à toutes sortes de crimes, notamment le jeu clandestin et des délits relatifs à la drogue ou aux armes. C'est principalement dans le but de faire des paris que l'on organise des combats de chiens, et, souvent, les participants misent des milliers de dollars, ce qui montre à quel point cette activité est lucrative pour les personnes qui y prennent part.
Je signale également que, selon la Société de protection des animaux de l'Ontario, lorsque la police effectue une descente dans un endroit où ont lieu des combats de chiens, elle trouve souvent des enfants. Exposer un enfant à ce genre de cruauté le désensibilise à la violence, ce qui peut être en soi une forme de maltraitance. Je suis fière que nous prenions des mesures importantes en vue de limiter et d'empêcher cette forme horrible de cruauté envers les animaux et les enfants. Les modifications proposées à l'infraction — le fait de cibler les arènes conjugué aux modifications apportées à l'infraction relative aux combats d'animaux — cibleront ceux qui dressent des chiens à se battre ou qui reçoivent de l'argent pour le faire et qui ont recours à des méthodes barbares pour rendre ces animaux plus agressifs et féroces. Ce prétendu dressage peut comprendre le fait de suspendre cruellement un chien à un arbre ou à un poteau par la mâchoire et de l'inciter à mordre un appât le plus longtemps possible sans le relâcher dans le but d'accroître la létalité de sa morsure.
Aucun animal ne devrait être mis à mort simplement pour divertir des gens. C'est d'une cruauté effroyable et c'est tout à fait contraire aux valeurs des Canadiens.
Je suis fière des changements nécessaires que nous proposons pour protéger les animaux contre les horribles mauvais traitements qui ont pu se produire dans certaines situations. Je tiens à le répéter: ce projet de loi ne change strictement rien aux usages légitimes des animaux. Il vise à protéger la sécurité publique et à resserrer davantage la loi pour prévenir la violence et la cruauté contre les animaux.
Nous mettons l'accent sur des mesures de protection qui font consensus et qui sont le reflet des valeurs que nous avons en partage. En élargissant la portée des deux infractions concernées, nous ne nuisons aucunement aux usages légitimes des animaux, comme le dressage et l'usage des chiens d'assistance, la recherche médicale, la chasse, la pêche ou les droits de chasse et de pêche qu'ont les Autochtones.
Avant de terminer, je tiens à répéter que ce projet de loi est le résultat de beaucoup de consultations, au cours desquelles nous avons pu observer que les changements proposés recueillent de larges appuis. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, ce sont des changements que réclament la Fédération des sociétés canadiennes d'assistance aux animaux et la Fédération canadienne de l'agriculture, de même que l'Association canadienne des médecins vétérinaires et beaucoup d'autres groupes du monde agricole, qui demandent des mesures contre les combats d'animaux et la bestialité.
En tant que parlementaires, nous sommes nombreux à entendre le point de vue de citoyens inquiets qui nous exhortent à moderniser les dispositions juridiques interdisant la cruauté contre les animaux. De plus, au cours des consultations effectuées par le gouvernement, un certain nombre de provinces ont demandé au Parlement de prendre des mesures pour combler les lacunes soulignées par la Cour suprême dans l'affaire D.L.W. Je suis certaine que ce projet de loi contient les correctifs nécessaires.
Je reconnais que certains voudraient que la loi aille encore plus loin en proposant des réformes supplémentaires aux lois sur la cruauté envers les animaux. Je pense qu'il est essentiel de prendre des mesures maintenant pour s'attaquer à ces questions particulières, qui font, je crois, l'objet d'un vaste appui. Le gouvernement est déterminé à fournir toutes les mesures de protection appropriées dont jouissent les plus vulnérables et il continuera d'examiner le dossier dans le cadre de son vaste examen du système de justice pénale.
Quelques suggestions ont déjà été faites, y compris par des organisations de défense des droits des animaux, sur les façons dont nous pouvons renforcer le projet de loi. Comme je l'ai déjà dit au sujet d'autres projets de loi, je suis heureuse d'entendre des propositions constructives qui reflètent les objectifs des réformes proposées et j'ai hâte de participer à un débat approfondi et productif. J'exhorte donc tous les députés à appuyer le projet de loi et à favoriser son adoption rapide.