Comme je le disais, on a créé ce poste pour s'assurer de recevoir les informations. Le rôle du comité de l'éthique était de s'assurer que le commissaire à l'éthique avait tous les moyens et les outils possibles à sa disposition pour faire son travail.
Cet été, on a pris une décision à laquelle je ne suis pas très favorable. Je vous le dis bien sincèrement. Je me passionne pour la politique. J'adore la politique. À l'âge de 14 ans, je me suis abonné aux procès-verbaux de la Chambre des communes, le hansard. Qui fait cela? Je pense que ce système est important.
On a pris une décision avec laquelle je ne me sens pas à l'aise. On a dit qu'on allait recueillir des informations. Quand on a pris cette décision à l'époque, j'ai dit à mes collègues autour de cette table que s'ils tenaient à faire cela, nous pouvions le faire, mais que nous devrions prendre toutes les mesures nécessaires pour nous assurer que ces informations iraient directement au commissaire à l'éthique, par l'entremise de la greffière. Malheureusement, je n'ai pas réussi à convaincre mes collègues. J'ai insisté sur le fait que nous devrions nous-mêmes veiller à la protection de ces informations.
Des gens autour de la table ont peut-être réalisé qu'ils sont allés un peu trop loin. On a donc pris des dispositions pour que, si l'on insiste pour obtenir ces informations, seuls les députés puissent les consulter à huis clos et que leur personnel n'y ait pas accès. Juste pour ne pas ouvrir cette porte, les députés ne devront pas apporter leurs appareils électroniques quand ils devront consulter des informations, en présence de la greffière. Monsieur le président, je vous prédis que cela pourrait entraîner de graves conséquences à l'avenir, pas nécessairement pour nous, puisque nous pourrions nous retrouver un jour sur les bancs de l'opposition — ce qui serait normal, et même sain —, mais pour d'autres députés.
Lorsque vous serez au gouvernement et qu'on aura ouvert cette porte, vous verrez que cela n'a aucun sens que des députés enquêtent sur d'autres députés. Vous vous direz peut-être qu'on aurait dû mettre des freins ou établir des balises. Je fais encore un plaidoyer auprès de mes collègues pour leur demander d'arrêter cela pendant qu'il est encore temps et de laisser le commissaire à l'éthique faire son travail. Sinon, assurons-nous de mettre des balises très fortes afin de limiter la communication de ces documents. Je pense que c'est fondamental.
C'est comme la loi qui encadre le financement populaire des politiciens et des partis politiques.
C'est exactement le même raisonnement. C'est la raison pour laquelle nous avons un directeur général des élections. Il ne faut pas jouer avec le système ni faire de manigances dans ces affaires. Cela nuirait au système et ce ne serait pas dans l'intérêt collectif. Nous ne voulons pas voir ce que nous voyons chez nos voisins, où n'importe quoi est acceptable. Ils ont dépassé les bornes dans plusieurs domaines et ils sont en train de vivre les retombées de tout cela. Nous devons éviter cela.
Je pense que notre rôle est de renforcer le rôle du commissaire à l'éthique. Nous pouvons le faire de plusieurs façons, et je souhaite que nous le fassions unanimement. Je fais partie d'un autre comité, le Comité permanent des comptes publics, qui est géré par un député de l'opposition officielle. Lors de la dernière session, ce comité était présidé par un député pour lequel j'ai beaucoup d'estime, tout comme vous. Ce comité a toujours réussi à produire des rapports unanimes. Il y a une force derrière cela, d'autant plus qu'il traite des questions épineuses. J'espère que, sous votre présidence, nous allons réussir à faire la même chose ici et à toujours agir en respectant les bornes, dans un contexte souhaitable et sain. De cette façon, nous pourrons rendre un grand service à tous les Canadiens.
Comme je l'ai dit, et c’est le fil conducteur de mes commentaires, je vous invite tous à prendre un peu de recul et à voir ce que nous pouvons faire pour renforcer le rôle du commissaire à l'éthique et nous assurer qu'il a tous les outils nécessaires pour que les Canadiens aient confiance en son travail, qu'il peut tout examiner, que ses conclusions sont les siennes et que nous agissons en conséquence. Si on brouille les choses, cela va nous amener dans une direction que tout le monde va regretter, tôt ou tard.
En conclusion, je pense que nous avons démontré l'importance de laisser le commissaire faire son travail. M. Barrett, M. Angus, M. Dong, Mme Shanahan et tous ceux qui ont pris la parole avant moi ont fait valoir qu'il y avait des choses beaucoup plus importantes sur lesquelles nous devons concentrer nos efforts. Nous avons parlé de l'importance de la recherche de contacts dans le cadre de cette pandémie.
Il existe une application qu'on peut utiliser et qui est un excellent outil. C'est Alerte COVID. Nous devons toutefois nous assurer d'une chose: respecter les données personnelles des particuliers. Je pense qu'on l'a fait, mais on peut le vérifier.
Mme Gaudreau, M. Angus et moi-même avons tous parlé de l'importance de mener une étude sur l'intelligence artificielle et, surtout, sur la reconnaissance faciale. Des logiciels existent déjà, mais l'élaboration de ce type de produit a été interrompue pendant cette crise puisque tout le monde porte un masque. Cela nous donne une petite occasion de procéder à un examen de ce dossier et de consulter des experts de la protection de la vie privée.
En tant que Canadien de race noire, je peux vous dire que ce type de logiciel possède une marge d'erreur appréciable.
Il devient 10 fois plus imprécis quand on essaie d'identifier, à vrai dire, quelqu'un qui n'est pas blanc.
Le système mis au point pour la reconnaissance faciale au moyen de l'intelligence artificielle n'est pas bon. Je n'ai jamais enfreint une loi de ma vie, mais avec ce système, monsieur le président, il se peut que je prenne l'avion un jour et que mon nom déclenche une alarme à cause d'un logiciel défectueux. C'est ce qui m'attend et qui attend toute personne qui me ressemble. Ce n'est pas normal.
Nous devons établir des règles. Nous en avons parlé en février, le 19 février, si ma mémoire est bonne, et nous avons conclu que ce serait une des études prioritaires du Comité. Nous devrions y venir.
Nous devrions laisser le commissaire à l'éthique faire son travail et nous concentrer sur les domaines où nous avons un rôle vraiment approprié à jouer. C'est très important à mes yeux.
Monsieur le président, j'aimerais que nous en venions là, que nous laissions la personne chargée d'examiner les affaires des députés s'acquitter de sa tâche. Nous pourrions l'aider, faire en sorte qu'elle dispose de tous les outils et de l'accès à l'information dont elle a besoin. Si elle ne s'acquitte pas de sa tâche, nous devrions l'inviter à venir expliquer au Comité de quelle aide elle a besoin et nous pourrions la lui fournir.
Monsieur le président, si nous nous mettons à enquêter les uns sur les autres, sur nos familles, nos parents, nos voisins et nos amis, nous nous fourvoyons. Sincèrement, nous prenons un mauvais chemin.
Cela étant dit, monsieur le président, je vous cède la parole.
Je vous remercie de m'avoir accordé ce temps pour m'exprimer. Je sais que vous êtes nouveau au sein de ce comité. J'espère que vous avez trouvé mes commentaires pertinents et utiles, et qu'ils vous aideront dans la réflexion devant vous mener à une décision.
Je vous remercie beaucoup.