Madame la Présidente, c'est un honneur de prendre la parole à distance pour participer au débat de ce soir.
J'ai le privilège d'être membre du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes en compagnie de députés extraordinaires de tous les partis. Au cours des derniers mois, le comité a entendu de nombreux représentants du secteur aérien canadien. Hier, le comité a présenté à la Chambre son rapport intitulé « Sortir de la crise: Une étude de l'impact de la pandémie de COVID‑19 sur le secteur du transport aérien ». Les témoins entendus par le Comité étaient unanimes quant aux effets terribles de la pandémie sur le transport aérien.
Peu de secteurs ont été aussi durement touchés par la pandémie que le secteur aérien. Les compagnies aériennes, les aéroports, les agents de voyage indépendants, les contrôleurs aériens et les propriétaires des boutiques de souvenirs dans les aéroports ont tous vécu des pertes d'emplois, des pertes de revenus et des difficultés. Or, contrairement à de nombreux autres secteurs, relancer le secteur aérien ne se fera pas en criant ciseau. Le secteur aérien a vécu des problèmes uniques pendant la pandémie et les effets de ces derniers se feront sentir pendant des années.
Dans mon discours, je parlerai surtout de la situation difficile que vivent les aéroports canadiens.
Le secteur du transport aérien ne peut pas fonctionner sans aéroports financièrement viables. Après tout, les aéronefs ont besoin d'un endroit pour atterrir et décoller. Lorsque, dans les années 1990, la plupart des aéroports du pays ont été privatisés, une structure tarifaire a été établie avec les transporteurs aériens, en fonction des volumes de trafic. Les aéroports du pays pouvaient compter sur une source de revenus stable tant qu'il y avait une source stable de vols commerciaux. Tout cela a été interrompu au printemps 2020, au début de la pandémie.
Chez nous, à Regina, l'Aéroport international de Regina a vécu 10 jours sans un seul vol commercial de passagers, au début de la pandémie. Durant la plus grande partie de la pandémie, le trafic aérien a diminué de 90 % comparativement à l'avant-pandémie. La baisse des déplacements aériens se traduit par une baisse de revenus pour les aéroports du pays.
Résultat: les aéroports ont dû mettre à pied du personnel et puiser dans leurs réserves de liquidités. Lorsque celles-ci ont été épuisées, il leur a fallu emprunter auprès des banques. De nos jours, les aéroports connaissent un endettement sans précédent. Comment paieront-ils leurs dettes? En refilant les coûts aux consommateurs lorsque reprendront les déplacements aériens, après la pandémie.
D'aucuns pourraient hausser les épaules et dire: « Et alors? Les dettes des aéroports et les frais de service de la dette sont refilés aux voyageurs aériens; c'est la vie ». La situation ne serait peut-être pas si grave si le Canada était un pays fermé dont les habitants vivaient en vase clos, mais il ne l'est pas.
Les politiques du gouvernement américain en matière de transport aérien ne manqueront pas d'avoir des répercussions sur le Canada et le reste du monde. Il convient de noter que dans les premières semaines de la pandémie, le Congrès américain a adopté la loi CARES, qui prévoit une aide financière de 10 milliards de dollars pour les aéroports américains. Cela signifie que les aéroports américains ont bénéficié d'une sécurité financière tout au long de la pandémie et n'ont pas eu à contracter une énorme dette. Cela signifie que les aéroports américains n'auront pas à refiler à leurs clients le fardeau financier de la dette et les frais de service de la dette.
Même avant la pandémie, les vols en partance d'un aéroport canadien étaient nettement plus chers que ceux en partance d'un aéroport américain. Cette différence s'explique par le fait que, historiquement, les gouvernements américains considèrent les aéroports comme un investissement dans les infrastructures, tandis que la plupart des aéroports canadiens sont exploités sur des terres publiques et constituent une source de revenus pour le gouvernement fédéral grâce aux paiements des baux fonciers.
Vu l'endettement croissant des aéroports canadiens, qui refilent une part toujours plus grande de celui-ci et de leurs frais de service de la dette aux voyageurs, les aéroports américains deviennent comparativement plus avantageux. À long terme, cette situation s'avère un problème pour les aéroports canadiens, surtout ceux situés à une distance raisonnable en voiture de la frontière américaine. L'aéroport de Bellingham, dans l'État de Washington, n'est qu'à une courte distance en voiture de Vancouver, de l'autre côté de la frontière. L'aéroport de Niagara Falls est en territoire américain, à une courte distance en voiture de Hamilton et de St. Catharines en empruntant l'autoroute. L'aéroport de Plattsburgh, dans l'État de New York, s'affiche quant à lui comme l'aéroport américain de Montréal.
Tout le long de la frontière canado-américaine, l'histoire se répète. Les aéroports américains deviennent une option de plus en plus intéressante tandis que les aéroports canadiens ont du mal à trouver des façons de refiler leur écrasante dette aux voyageurs canadiens. Cet endettement se fera sentir dans tout le secteur du voyage aérien puisque les compagnies aériennes, les agents de voyage indépendants et les hôtels canadiens vont tous perdre des occasions d'affaires.
Que pourrait faire le gouvernement pour aider nos aéroports en détresse? Selon moi, le secteur du voyage aérien a vraiment besoin d'un plan de réouverture sécuritaire. Plus vite les Canadiens pourront recommencer à prendre l'avion, plus vite les compagnies aériennes et les aéroports vont se remplumer, et plus vite on amoindrira les effets néfastes de la pandémie que j'ai abordés.
L'absence de clientèle en raison de l'incertitude du marché est toutefois la plus grande difficulté que le secteur du voyage aérien doit surmonter. La pandémie a provoqué le chaos dans bien des segments de l'économie, y compris les restaurants, les cinémas et les boutiques de vêtements. La majorité des entreprises relèvent avant tout du gouvernement provincial, qui, dans presque tous les cas, dispose déjà d'un plan détaillé de réouverture sécuritaire en fonction du taux de vaccination.
Par exemple, dans ma province, la Saskatchewan, dans trois jours à peine, les restaurants n'auront plus à limiter le nombre de clients assis à une même table, mais on ne pourra commander qu'à la carte, les buffets étant encore interdits. Imaginez à quel point il sera plus facile pour les restaurateurs, leurs employés et leurs clients d'organiser un grand dîner lorsqu'il y aura un plan de réouverture clairement défini pour les restaurants.
Maintenant, imaginez si le gouvernement fédéral faisait la même chose pour le transport aérien. Je suis sûr qu'après plus d'un an de cette pandémie, de nombreux Canadiens aimeraient vraiment commencer à planifier leurs voyages d'été. Les compagnies aériennes, les agents de voyages, les organisateurs de voyages et les hôtels aimeraient tous commencer à accepter des réservations.
Quelles sont les règles? Plus important encore, quelles seront les règles la semaine prochaine, le mois prochain et dans les mois à venir, à mesure que les taux de vaccination continueront à augmenter?
Si une personne entièrement vaccinée prend l'avion pour les États-Unis et revient ensuite, pendant combien de temps encore devra‑t‑elle se soumettre à la quarantaine obligatoire de 14 jours? Pendant combien de temps encore cette personne devra‑t‑elle se rendre dans les hôtels de quarantaine? Qu'en est‑il de la personne qui n'a obtenu que la première dose de vaccin? Qu'en est‑il du mari et de la femme qui sont entièrement vaccinés, mais dont les enfants sont trop jeunes pour recevoir le vaccin?
Et on ne parle ici que des voyages internationaux. Que se passera-t-il si nous voyageons au Canada? Y aura-t-il un ensemble de mesures disparates à l'échelle du pays, certaines provinces exigeant une quarantaine, par exemple? Sera-t-il plus facile pour les voyageurs canadiens de passer leurs vacances estivales aux États-Unis plutôt qu'ailleurs au pays?
Voilà autant de questions pratiques et bien raisonnables que les Canadiens commencent à se poser. Mais puisque le gouvernement fédéral n'a pas de réponse ni de plan de réouverture sécuritaire à offrir, une nouvelle saison touristique est menacée. La perte d'une autre saison entraînerait des torts indus tant aux aéroports de ce pays qu'à nos compagnies aériennes, agents de voyage indépendants, contrôleurs aériens, organisateurs de voyages et beaucoup d'autres Canadiens qui dépendent d'un secteur du transport aérien pleinement fonctionnel.
J'exhorte le gouvernement à soumettre dès que possible un plan de réouverture sécuritaire pour les voyages aériens.