Madame la Présidente, j'aimerais commencer cette allocution en rendant hommage à un ancien maire de Rouyn-Noranda, M. Pierre Grandmaître. Il est décédé au cours des derniers jours et ses funérailles auront lieu le 20 juin prochain. Même s'il a été maire il y a presque 25 ans, nous devons à M. Grandmaître possiblement les plus grands éléments qui font encore aujourd'hui la fierté et la qualité de vie de Rouyn-Noranda. On peut penser notamment à l'arrivée des Huskies de Rouyn-Noranda, qui sont encore les champions en titre de la Coupe Memorial pour une troisième année consécutive, COVID oblige. On peut aussi penser à la fameuse piste cyclable que nous avons autour du lac Osisko, à Rouyn-Noranda.
J'ai une petite anecdote au sujet de M. Grandmaître. À 18 ans, j'avais le rêve de me présenter comme candidat aux élections municipales et mon père m'avait proposé d'aller voir son ami Pierre Grandmaître afin qu'il me jase un peu de son expérience et qu'il me conseille. M. Grandmaître m'a écouté et m'a aussi demandé de faire partie de l'équipe de Jean-Claude Beauchemin et de participer à tous les comités stratégiques d'une élection. Il a vraiment été une immense influence pour moi et c'est grâce à lui que je suis aujourd'hui à la Chambre. L'accompagnement et le mentorat que M. Grandmaître m'a offerts à cette époque ont été importants. La dernière fois que je l'ai vu, c'était en marge de l'élection de 2019. Pierre Grandmaître était aussi un ancien candidat conservateur, mais il m'avait donné son appui à la sortie du bureau de vote. Ce moment m'avait touché et je le chérirai longtemps, tout comme son sourire également.
Passons maintenant à la motion dont nous débattons.
Encore une fois, le Québec doit se défendre et, encore une fois, le Bloc québécois doit défendre le Québec. Tout récemment, le dernier budget du gouvernement libéral nous a démontré un autre exemple d'ingérence du fédéral dans les compétences du Québec, particulièrement dans le domaine de la santé, qui est pourtant un pouvoir exclusif du Québec.
Aujourd'hui, on voit la motion M‑62 qui s'ajoute à la Chambre pour l'établissement d'un régime fédéral de soins dentaires. Qu'on comprenne bien que le Bloc québécois ne s'oppose pas à l'idée d'un régime de soins dentaires qui permettrait d'augmenter la qualité de vie de plusieurs personnes, notamment les plus vulnérables. Nous nous opposons à toute forme d'ingérence sous-entendue par cette motion.
La Chambre des communes devrait prendre acte en ce qui concerne le respect de la volonté démocratique du Québec de refuser cette fâcheuse tendance du gouvernement fédéral de s'ingérer dans les champs de compétence du gouvernement du Québec.
Aujourd'hui, nous célébrons le 30e anniversaire du Bloc québécois et c'est une journée particulièrement intéressante pour présenter cette motion, surtout avec le débat que nous avons eu plus tôt.
Combien de fois faudra-t-il rappeler que les soins de santé sont de compétence provinciale? Les articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 déterminent très clairement le partage des compétences gouvernementales entre le fédéral et les provinces. La santé est un pouvoir exclusif du Québec, à l'exception de la santé des Autochtones, des hôpitaux militaires, de l'approbation des médicaments, qui relève de Santé Canada, et de la gestion des quarantaines.
Si le gouvernement du Québec et l'Assemblée nationale venaient à décréter qu'un tel régime de soins dentaires était prioritaire et qu'ils demandaient au fédéral du financement sans condition pour une telle mesure, le Bloc québécois appuierait le Québec dans ces démarches.
Il y aurait alors un régime dentaire au Québec et un autre pour le reste du Canada. Pourquoi? C'est tout simplement parce que le Québec sait ce qui est bon pour le Québec et notre expérience nous démontre que les programmes universels ne fonctionnent pas. C'est comme pour les garderies où le gouvernement fédéral nous a pris fièrement en exemple, tout comme pour l'assurance-médicaments.
Or, actuellement, ce que souhaite le Québec n'est pas un régime fédéral de soins dentaires ou toute autre ingérence. Il souhaite une hausse des transferts en santé du fédéral, et ce, sans condition. Voilà ce que souhaitent les Québécoises et les Québécois. Depuis 30 ans déjà, le Bloc québécois respecte la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois et invite le NPD et l'ensemble de la Chambre à faire de même.
Revenons au dernier budget du gouvernement fédéral. C'est le budget de toutes les ingérences. Ce budget nous propose, selon un stratagème des plus douteux et sous un grand théâtre de bonne conscience, l'élaboration par le gouvernement fédéral de critères et de normes en matière de santé. Dans ce budget, le Québec prend acte que le fédéral veut établir des normes nationales pour les soins aux aînés dans les établissements de soins de santé de longue durée, établir des normes nationales pour les soins en santé mentale, établir des normes nationales pour les soins à domicile, établir des normes nationales pour les soins de santé destinés aux femmes et établir des normes nationales pour la santé reproductive.
A contrario, le Canada doit prendre acte que le Québec n'en veut pas de ces critères et de ces normes. Il veut servir sa population avec des moyens adéquats pour le faire. Le fédéral n'a pas à dire aux Québécoises et aux Québécois comment normaliser les soins de santé. Laissons le ministère de la Santé du Québec et les experts québécois en santé normaliser les soins de santé du Québec.
De plus, le gouvernement fédéral se permet d'être arrogant envers le Québec, et cela n'est pas nouveau. Le fédéral s'est permis des critiques sévères envers le Québec, particulièrement au sujet de la situation dans les CHSLD en mars et en avril 2020. Ce sont des critiques déplacées et, surtout, très représentatives des intentions du premier ministre de centraliser au fédéral les pouvoirs en matière de santé.
Si le gouvernement libéral souhaite aider le Québec à améliorer la malheureuse situation dans les CHSLD, qu'il assume ses responsabilités envers les Québécoises et les Québécois en rétablissant les transferts fédéraux à 50 % des dépenses en santé, comme prévu dans les ententes initiales conclues il y a plus de 50 ans. Du moins, que le fédéral rétablisse à 35 % les transferts en santé, comme le demande le Bloc québécois, l'Assemblée nationale du Québec et l'ensemble des provinces.
Je rappelle que la dernière fois qu'Ottawa a assumé ses responsabilités en matière de santé, qu'il a respecté l'entente convenue entre le fédéral et les provinces et qu'il a assumé la moitié de ces dépenses, c'était il y a plus de 30 ans. Maintenant, il utilise une situation critique et malheureuse, soit la pandémie de la COVID‑19, comme une occasion inouïe de faire de la politique centralisatrice.
À l'heure actuelle, Ottawa n'assume pas plus de 20 % des dépenses en santé, alors qu'il doit en assumer 50 %, comme le prévoient les ententes initiales. Cela va plus ou moins bien dans les hôpitaux du Québec, et c'est aussi le cas dans le reste du Canada. C'est en très grande partie la faute du gouvernement fédéral, qui fait de la politique sur le dos de la santé physique et mentale des Québécois et des Canadiens.
Par surcroît, comment fermer les yeux devant l'une des volontés de centralisation du gouvernement fédéral les plus grossières des dernières années, celle de fédéraliser le secteur financier en encadrant les domaines de l'assurance, des valeurs mobilières et de la distribution des produits et services financiers, entre autres?
Depuis plusieurs années déjà, l'objectif du fédéral est de faire glisser les activités de réglementation du Québec vers l'Ontario. Une éventuelle autorité unique pancanadienne en matière de valeurs mobilières est néfaste et ne doit pas voir le jour. Ce n'est pas qu'une querelle de compétences ou une chicane entre le fédéral et les provinces, c'est un combat entre Bay Street et le Québec. L'objectif de ce régime canadien de réglementation des valeurs mobilières est un autre exemple de la centralisation des marchés financiers effectuée par le fédéral, qui veut faire de Toronto une autorité unique pancanadienne qui irait à l'encontre du développement économique autonome de toutes les provinces. Je rappelle que le Bloc québécois et le Québec s'y opposent fermement.
À quatre reprises, l'Assemblée nationale du Québec a unanimement demandé au fédéral d'y renoncer. Au Québec, tout le monde est contre au Québec. Tous les partis politiques, les milieux d'affaires, le secteur financier et les fonds de travailleurs s'y opposent. Bref, le fédéral veut créer une autorité des marchés financiers comme celle qui existe et qui a déjà de bons résultats au Québec. Rarement a‑t‑on vu des milieux d'affaires du Québec se mobiliser d'une seule voix pour s'opposer à cette très mauvaise idée du gouvernement fédéral, qui veut faire plaisir à Bay Street.
Que le gouvernement fédéral et Bay Street en prennent bonne note: la création de cette autorité unique pancanadienne en matière de valeurs mobilières retrouvera toujours le Bloc québécois sur son chemin. Ce sera toujours non, car une autorité des marchés financiers québécoise forte et déjà reconnue représente un bassin de compétences dans l'encadrement juridique de la finance, une condition essentielle au développement du secteur.
Montréal est la 13e place financière sur la planète. Elle représente 150 000 emplois au Québec et une contribution de 20 milliards de dollars au PIB, soit 6,3 %. Le Bloc québécois sera toujours de ce combat pour conserver l'encadrement juridique de la finance dans le giron du Québec. Une place financière forte est indispensable au fonctionnement de nos sièges sociaux et à la préservation de nos entreprises. La préservation du Québec de la réglementation du secteur assure une proximité des décideurs qui permet l'accès au marché des capitaux pour les entreprises, condition essentielle pour soutenir l'investissement et la croissance des entreprises partout au Québec.
La création de cette autorité unique pancanadienne en matière de valeurs mobilières n'est rien de moins qu'une attaque contre le maintien de nos sièges sociaux et la préservation de piliers économiques distincts. Les 578 sièges sociaux qui se trouvent au Québec représentent 50 000 emplois avec un salaire deux fois plus élevé que la moyenne québécoise, en plus de 20 000 autres emplois chez des fournisseurs de services spécialisés, comme les services comptables, juridiques, financiers et informatiques.
Il y a tant d'exemples qui démontrent que le fédéral outrepasse ses champs de compétence que le Québec peut prétendre que son plus grand ennemi politique et économique est à l'intérieur de ses propres terres. Je parle d'exemples comme mettre en place un régime d'assurance‑médicaments universel comme celui qui existe au Québec et créer un réseau de garderies comme celui qui existe au Québec. Aussi, le monde de l'éducation québécois n'est pas épargné par les ingérences du fédéral, avec les bourses du millénaire octroyées par le gouvernement libéral de Jean Chrétien, comme les bourses qui existaient déjà au Québec; avec une stratégie en matière d'éducation internationale du gouvernement fédéral pour recruter des étudiants étrangers dans les universités canadiennes qui fait concurrence à la stratégie qui existe déjà au Québec.
Pourquoi doubler les structures et les efforts? Pourquoi ne pas simplement encourager les efforts déjà consentis en les finançant directement? Pourquoi dédoubler la charge et la lourdeur administrative au détriment des Québécoises et des Québécois? C'est également le cas en recherche, et c'est plus subtil et insidieux, puisque la recherche représente l'innovation et le développement de nos sociétés du point de vue des pratiques.
La recherche fondamentale est mise de côté et est peu valorisée; on l'oublie. Dorévanant, il faut qu'elle soit orientée vers la société et non pas vers l'intérêt privé des entreprises.
En terminant [difficultés techniques] la motion M‑62, car les soins de santé sont une compétence des provinces et du Québec. Le fédéral n'a pas à dicter ce que doivent faire ces derniers et imposer un fardeau fiscal...